Marie Siby Faye, chargée des organisations syndicales au MEN : « Aucun salaire n’a été ponctionné »

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En plus d’avoir envoyé des réquisitions aux enseignants, le gouvernement a procédé à des prélèvements sur les salaires des enseignants. Dans cet entretien, la Chargée des organisations syndicales du ministère de l’Education nationale, Marie Siby Faye, précise qu’il ne s’agit pas de ponctions. Que le gouvernement a décidé de ne payer aux enseignants que les jours travaillés. Elle apporte des précisions sur les réquisitions, sur les négociations en cours.

Des syndicats d’enseignants continuent la grève. Comment envisagez-vous le reste de l’année ?

Monsieur le président de la République, en recevant le rapport annuel du Haut Conseil du dialogue social, a donné des instructions claires, pour que l’année scolaire se poursuive normalement. Que les compositions se tiennent et que les dispositions soient prises afin que les examens se tiennent à date échue. Donc, le gouvernement est dans cette dynamique et est en train de s’organiser pour cela.

On parle de réquisitions et de ponctions de salaires. Est-ce que ces mesures sont effectives ?

Je dois d’abord préciser qu’il n’y a nullement pas eu de ponction de salaires. Aucun salaire n’a été ponctionné. Ce qui s’est passé, c’est qu’il y a des jours qui n’ont pas été travaillés pour faits de grève et que ces jours ne peuvent pas être payés. Ça, c’est autant valable pour le gouvernement que l’Administration et le privé. Les jours non travaillés ne sont pas rémunérés. C’est sur cette base que des sommes ont été prélevées pour faits de grèves. Il n’y a pas eu de ponctions du tout. C’est une précision. Les réquisitions, c’est normal. La réglementation le prévoit. Je pense que nous sommes régis, soit par la loi 61-33 pour les fonctionnaires, soit par la loi 97-17 du 1er octobre 1997 portant code du travail. Par rapport à cela, nous sommes tenus de nous conformer à la réglementation dans nos rapports et dans nos démarches au quotidien.

Les mesures sont-elles effectives ?

Les mesures sont effectives : les jours non travaillés n’ont pas été payés.

Est-ce qu’elles ont eu un effet sur les enseignants ?

Absolument ! De toute façon, ceux qui sont républicains se conforment à la loi et ont rendu les notes. Les notes, on a commencé à les rendre. Dans certaines localités, pratiquement dans toutes les académies, des enseignants sont en train de rendre les notes et des conseils de classe se tiennent. Même dans certaines académies, on a vu des établissements où les conseils se sont tenus. Il n’y a  pas eu de rétention des notes.

Quelles sont ces localités où les enseignants ont rendu les notes?

Je peux donner l’exemple de l’Inspection de l’éducation et de la formation  (IEF) de Mbirkilane. Dans les collèges, sur un ensemble de 60 professeurs, il n’y a plus aucune rétention des notes. Dans certains établissements, les enseignants travaillent. Vous savez qu’il y a une partie des responsables d’organisations syndicales qui ont levé le mot d’ordre de grève, en toute responsabilité.

N’empêche que d’autres syndicats d’enseignants se radicalisent. Qu’en pensez-vous ?

Vous savez, chacun a ses préoccupations, son agenda, est conscient des actes qu’ils posent. Maintenant, que chacun prenne ses responsabilités.

Vous dites qu’il n’y a pas eu de ponctions, mais certains enseignants disent que leurs salaires du mois de mai ont été coupés. Est-ce le cas ?

Les salaires n’ont pas été coupés, pour ceux qui sont allés en grève, aucun salaire n’a été coupé. Ils ont eu justement ce qu’ils devaient percevoir. Maintenant, avec surtout le prélèvement des jours non travaillés, c’est normal. C’est la réglementation. Je pense qu’à ce niveau-là, il n’y a aucun problème. Il ne faut pas que l’on parle de salaires ponctionnés. Il ne faut pas que l’on dise que les salaires ont été coupés. Ce sont des jours non travaillés qui n’ont pas été payés. L’autre élément, c’est que justement par rapport à cette question-là, comme toute œuvre humaine, elle est à parfaire. S’il y a des enseignants qui ont vu leurs salaires diminuer ou qui pensent que des jours de grève ont été prélevés par erreur, ils peuvent se signaler, en prenant le soin d’aller vers leur école ou établissement. Qu’on leur fasse une attestation prouvant qu’ils ont effectivement travaillé ces jours-là, et ils seront remis dans leurs droits.

Peut-on allier réquisitions et ponctions ?

Il ne faut pas allier réquisitions et ponctions. Les réquisitions ne servent pas à les faire retourner en classe, mais plutôt à ce qu’ils remettent les notes aux enfants. Les notes sont la propriété privée des enfants. Les réquisitions, c’est pour leur demander de rendre les notes et de tenir les conseils de classe pour que les enfants puissent connaître leur situation. Parce qu’on est très avancé dans l’année scolaire. Ça n’a rien à voir avec le fait d’aller en grève. C’est un droit et je ne pense pas qu’on leur ôte ce droit d’aller en grève. Ils sont libres de le faire. Mais le gouvernement est aussi libre de prendre des mesures qui s’imposent. Donc, il ne faut pas faire de lien entre la réquisition et les sommes prélevées pour faits de grèves.

Est-ce qu’il est prévu des sanctions contre les enseignants qui refusent de prendre les réquisitions ?

Il y a un cadre réglementaire qui est là, qui régit les agents de l’Etat, fonctionnaires comme non fonctionnaires. Par rapport à cela, il y a le décret 72-017 du 11 janvier 1972 modifié qui établit que les personnes relevant de l’Education et de la Formation peuvent être réquisitionnées. C’est pour dire donc que le gouvernement est dans le cadre réglementaire. Raison pour laquelle il a pris cette décision. Toujours dans le cadrage réglementaire, il est aussi dit que pour ceux qui ne se conforment pas à la loi, le gouvernement prendra les dispositions qui s’imposent ; et cela n’a rien à voir avec des sanctions. C’est tout simplement l’application de la loi.

Donc, il ne faut pas que l’on pense que ce sont des menaces ou autres. Nous sommes dans un Etat de droit. Et à un moment donné, il faut aussi que la loi s’applique. Je pense que personne, aujourd’hui, ne peut dire que l’Etat est en train de faire un coup de force. Le gouvernement a le plein droit d’user des mesures possibles et imaginables pour que les enseignements se tiennent. Les dispositions réglementaires, on les connaît. Maintenant, celui qui refuse de se conformer à la loi, il s’expose à des sanctions.

Quelles sont les sanctions prévues par la loi ?

Je dis et je le répète, ce que la loi prévoit, c’est soit une amende ou une peine d’emprisonnement. Mais, je ne dis pas que le gouvernement va aller jusque-là. On est dans la première étape. Les réquisitions ont été données. Le gouvernement va évaluer et après évaluation, prendra les mesures qui s’imposent. Donc, c’est juste un pas que nous avons franchi, en donnant les réquisitions.

Quel est le montant de l’amende ? Quelles sont les peines prévues ?

Si je ne m’abuse, c’est entre 20 000 FCFA et 100 000 FCFA. La peine d’emprisonnement est de 6 jours. Mais, on n’en est pas encore là. Ce qu’il faut retenir, c’est que tout simplement le gouvernement va évaluer la situation et voir quelle va être l’étape suivante. On n’est pas dans une dynamique de menaces, ni guerrière. Le Président l’a dit, le gouvernement est ouvert au dialogue, tenu d’écouter les uns et les autres. Mais aussi de faire respecter la loi et surtout de permettre aux enfants de jouir de leurs droits à l’Education qui est un droit consacré.

On a l’impression que le gouvernement se radicalise. Ne craignez-vous pas d’en arriver à une impasse ?

Tout ce que je peux dire, c’est qu’on ne peut reprocher à un gouvernement d’appliquer la loi. Le gouvernement ne peut pas se radicaliser. S’il y a radicalisation, c’est peut-être d’un autre côté. Jusqu’à présent, ce sont des mesures normales, correctes, qui se prennent partout dans le monde. Dans aucun pays du monde, on n’a jamais vu un travailleur aller en grève et réclamer un salaire. Ce n’est pas possible. Pour preuve, si on permet aujourd’hui aux organisations syndicales d’avoir ce qu’on appelle les check-off, en principe ça doit servir à ça : les jours non payés prélevés sur les salaires doivent être remboursés par l’organisation syndicale.

Est-ce qu’il ne fallait pas commencer par les médiations avant de faire recours aux réquisitions ?

Vous savez qu’il y a eu beaucoup de rencontres, depuis le 08 octobre 2015. Le gouvernement est passé de 14 à 24 milliards F CFA, en 2016, pour la prise en charge des préoccupations des enseignants. Concernant les mises en solde, le président de la République a donné des instructions pour que l’on passe de 5 000 à 10 000 mises en solde. Des efforts sont faits par le gouvernement. Maintenant qu’on s’accroche pour demander des choses qui n’étaient pas dans le protocole de 2014, c’est préoccupant.

A propos de l’augmentation de l’indemnité de logement, ce qui était dit : c’est que l’étude sur le système de rémunération des agents de l’Etat serait faite ; que cette étude serait partagée avant validation avec les acteurs. Leurs préoccupations ont été intégrées, en principe. Et maintenant, les résultats de cette étude sont remis à monsieur le président de la République. C’est à lui de prendre la décision. Par rapport à cela, on ne peut pas dire au gouvernement qu’il faut augmenter l’indemnité de logement. Au-delà, il y a des parcelles qui sont mises à la disposition des enseignants. Je pense qu’il ne sert à rien de vouloir trop tirer sur la corde, même s’il y a des négociations. Il faut que nous comprenions que nous n’avons pas  le droit de compromettre l’avenir des enfants sénégalais.

A quelques mois des examens, est-ce qu’il n’est pas temps de trouver une solution à la crise scolaire ? D’autant plus que les enseignants disent que l’Etat n’a pas respecté ses engagements.

Ceux qui le disent, en fait, j’ai l’impression qu’ils ne maîtrisent pas le contenu du protocole d’accords de 2015. Ils s’agrippent à la question des lenteurs, tout en sachant que cette question ne peut être réglée en un tour de main. Ils connaissent les difficultés. Ils savent que ce sont des dossiers qui ont été accumulés depuis longtemps. Si des efforts sont faits aujourd’hui par le gouvernement pour accélérer le processus, ils devaient au moins reconnaître cela. L’autre élément, c’est que le coût financier du protocole est exorbitant. Et malgré cela, le gouvernement s’est engagé à mettre énormément d’argent. 24 milliards en 2016, sans compter les reclassés de 2006 qui ont été pris en charge pour un montant de plus de 986 millions FCFA.

Des efforts sont faits, ils savent que la prise en charge de ce protocole ne peut se faire en deux ou trois jours. C’est un processus long. Le gouvernement s’y est attelé. Donc, il faudrait qu’eux aussi lâchent du lest. Si nous devons faire le tour des questions contenues dans le protocole, au-delà des lenteurs administratives, il n’y a pas de point qui vaille la grève. Et le dernier élément, c’est que les salaires sont perçus à date. Aucun enseignant ne dira : je n’ai pas perçu mon salaire, en ce qui concerne le ministère de l’Education nationale. Je pense que les syndicats ne gagneraient justement pas à aller dans le sens de la destruction de l’école sénégalaise. Je lance un appel pour qu’ils rejoignent les classes. Que les cours reprennent et qu’ils comprennent que ce n’est pas en créant cette situation de terreur pour les parents, les élèves, qu’ils vont sortir grandis de la situation.

EnQuête

1 COMMENTAIRE

  1. N’importe quoi ! Ceux qui travaillent même sont victimes de cette ponction. Le même discours chaque année. Sur quels critères vous vous êtes basé pour ponctionner ? C’est du banditisme… Vos menaces déguisées seront vaines.

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