Non ! L’Afrique ne vendra pas ses terres Par Famara Diédhiou

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Avec la Nouvelle alliance pour la sécurité alimentaire et la nutrition en Afrique initiée par Barak Obama, lors du Sommet du G8 en mai 2012, l’industrie agricole et alimentaire internationale est de plus en plus impliquée dans l’élaboration des politiques du G8. À la suite de cette nouvelle alliance, il y a un risque que les stratégies de lutte contre la pauvreté et la faim soient orientées vers les intérêts politiques et économiques des multinationales. Elle implique déjà six pays africains.
Les petits agriculteurs et les méthodes agro écologiques sont respectivement les acteurs clés pour l’éradication de la faim dans le monde et les meilleures pratiques pour conserver la biodiversité, diversifier et enrichir l’alimentation et, enfin, adapter l’agriculture aux effets des changements climatiques. Les expériences de terrain l’ont prouvé. Aussi, le rapporteur spécial des Nations Unies pour le droit à l’alimentation et la Fao l’ont-ils reconnu et déclaré.

Malheureusement, des politiques à objectifs purement financiers ne cessent d’être imposées à l’Afrique au profit de multinationales semencières et autres firmes étrangères au continent : Alliance for a Green Revolution in Africa (Agra), Nouvelle alliance G8, etc. Si depuis 2010 Agra est combattue et dénoncée à la base par les plates-formes paysannes africaines et d’ailleurs, la Nouvelle alliance G8, quant à elle, essaie de s’infiltrer subtilement à travers les gouvernements africains. Heureusement, les organisations de la société civile (OSC) sont restées éveillées et alertent les citoyens.

L’Initiative G8, Nouvelle alliance pour la sécurité alimentaire et la nutrition en Afrique, n’est qu’une autoroute qui trace la voie à l’ouverture radicale des marchés pour les semences internationales et les sociétés agraires multinationales dans les pays africains. Tout comme les Accords de partenariat économique (Ape) furent une menace aux entreprises et aux marchés africains, elle constitue une menace aussi grave pour l’agriculture Africaine.

Enseignements du forum sur l’environnement et le développement

La Nouvelle alliance G8 a été initiée par Barak Obama, lors du Sommet du G8 en mai 2012. Dans cette initiative, les pays du G8 sont en coopération avec six pays africains (Ethiopie, Burkina Faso, Côte d’Ivoire, Ghana, Mozambique, et Tanzanie), des organisations multilatérales (Banque mondiale, Programme alimentaire mondiale, etc.) et quelques unes des plus grandes firmes du secteur de l’agriculture et de l’alimentation (Cargill, Syngenta, Monsanto, Yara, etc.). Leur but est de créer des conditions sûres pour les investissements privés dans le secteur agricole. Ainsi, ils espèrent sortir 50 millions de personnes de la pauvreté au cours des dix prochaines années. Les OSCs préviennent que les petits agriculteurs pourraient être lésés au profit de l’industrie agricole et alimentaire qui serait la grande bénéficiaire de cette initiative.

Avec la nouvelle Alliance, l’industrie agricole et alimentaire internationale est de plus en plus impliquée dans l’élaboration des politiques du G8. Ainsi, il y a un risque que les stratégies de lutte contre la pauvreté et la faim soient orientées vers les intérêts politiques des multinationales. En effet, l’Alliance vise à exploiter de façon intense les ressources agricoles de l’Afrique et à intégrer la production agricole locale dans les chaînes de valeur mondiales. Il est nécessaire de se demander si cette intégration dans les chaînes de valeur mondiales profitera vraiment aux petites exploitations agricoles africaines. La réponse est évidente. Une telle politique agricole se fera au détriment de ces dernières et par ricochet l’Afrique aura confié son alimentation à des entreprises privées qui ne sont mues que par leurs intérêts financiers.

Il y a de quoi s’alarmer quand on sait que les gouvernements africains aident à atténuer les risques d’investissement, en fournissant des informations liées à l’investissement et un climat d’investissement favorable dans les marchés d’intrants agricoles (semences, engrais, pesticides) et le secteur foncier. Nombreux sont les problèmes qui en résultent et qui sont systématiquement ignorés par la Nouvelle Alliance G8. Citons par exemple la concentration du pouvoir dans le marché des semences, la perte de la biodiversité agro-alimentaire, la marginalisation des communautés rurales, la concentration des terres, l’accaparement des terres et le conflit substantielle des objectifs entre la demande de la lutte contre la faim et les intérêts commerciaux originaux des multinationales.

Le Sénégal est l’une des nouvelles cibles de ce partenariat suicidaire pour les agriculteurs et l’agriculture familiale. Outre les démarches officielles, trois faits majeurs confirment cette menace :
– A son retour du sommet du G8 en juin 2013, le président Macky Sall a déclaré que l’Afrique risque de vendre ses terres ;
– l’acte 3 de la décentralisation qui, derrière certains de ses objectifs nobles, viserait l’accès plus facile aux terres des communautés rurales ;
– l’atelier d’information et de sensibilisation sur la biosécurité et la biotechnologie de septembre 2013 à Dakar, où ont été chantés les avantages des OGM pour préparer les Sénégalais à les accepter.
Par conséquent, il est urgent que la société civile sénégalaise veille, comme elle a toujours su le faire, à ce que les décisions finales soient à l’avantage de la majorité : les populations rurales, les jeunes, les agriculteurs et agricultrices.

Les principes de base des droits humains sont violés

Par ailleurs, les approches de la Nouvelle Alliance G8 portent profondément atteinte aux droits humains, surtout à travers la législation semencière et les politiques foncières. Une évaluation des risques quant au respect des droits humains aurait due être effectuée en tant qu’exigence minimale avant une telle initiative. La tenue d’un large débat public pour savoir si une telle participation étroite du secteur privé a un sens et est socialement souhaitable aurait été encore plus pertinente. A ce jour aucune initiative de la sorte n’est réalisée ou prévue.

L’initiative a été développée plus ou moins sans la participation de la majorité des groupes concernés. Une fois de plus, ces groupes ne sont pas reconnus comme des porteurs de droit et donc ont fait l’objet de discrimination et ségrégation actives. Pire, les approches développées par les petits exploitants agricoles telles que les stratégies agro-écologiques ne sont pas mentionnées dans la nouvelle alliance. C’est pourquoi les petits agriculteurs, groupe supposé cible de la Nouvelle Alliance, ont à plusieurs reprises milité contre les stratégies de la Nouvelle Alliance.

Promotion de l’Agriculture industrielle et de la « révolution verte ”

Les politiques de la Nouvelle Alliance travaillent en faveur de l’industrialisation de l’agriculture car elles s’appuient sur les semences hybrides, les OGM, sur l’utilisation tragique et accrue d’engrais et de pesticides et aussi sur l’agriculture mécanisée à grande échelle. Cette politique s’appuie donc sur des éléments qui ont gravement porté atteinte, dans le passé, à la biodiversité, à l’environnement et qui ont participé à l’appauvrissement des petits agriculteurs. Exemple, en Inde, Monsanto a vanté ses produits, obligeant le gouvernement a accepté l’introduction du coton OGM en 2001. Une étude menée de 2001 à 2006 par deux agronomes locaux a révélé ce qui suit : a) une maladie qui n’était apparue que sur le coton Bt (OGM) s’est répandue dans tous les champs, même ceux du coton traditionnel : à l’unanimité tous les paysans déclarent n’avoir jamais vu cette maladie; b) la pulvérisation de pesticides a doublé chez presque tous les producteurs ; c) les semences traditionnelles sont devenues très rares sur le marché, obligeant ainsi les producteurs à aller se les procurer chez les semenciers privés, notamment Monsanto, à un prix quatre fois plus cher (endettement usurier) ; c) si les récoltes sont mauvaises c’est la faillite, qui, a causé un nombre incalculable de suicides.

L’approche Nouvelle Alliance G8 n’a pas pris en compte les connaissances et expériences existantes de l’agriculture locale. Basé sur les enseignements du Rapport sur ??l’agriculture mondiale, on aurait pu s’attendre à une plus forte orientation vers les connaissances traditionnelles et les besoins des petits agriculteurs. Certaines phrases de la Nouvelle Alliance donnent même l’impression que la majorité des agriculteurs n’est plus nécessaire dans la conséquence finale. En effet, selon l’Institut International pour l’Environnement et le Développement (IIED), moins de 5% des agriculteurs africains ont potentiellement les ressources et le capital nécessaire pour être intégrés dans la chaine de valeur mondiale. Avec l’appui des pays du G8 et sans aucune opposition conséquente des pays africains, l’industrie pousse à la restructuration des zones rurales sans la population rurale.

Une autre crainte concerne la réduction dans la variété/diversité de la culture des produits alimentaires. Car les stratégies de culture de l’industrie agricole se concentrent souvent sur quelques cultures et variétés, laissant beaucoup d’autres en marge. Ainsi, le système alimentaire des populations des pays en développement connaitra un déséquilibre. A cet égard, il faut s’attendre a ce que l’industrie alimentaire et l’agro-industrie offrent leurs solutions qui consisteront très probablement à proposer des aliments transformés très chers et nutritionnellement enrichies et des OGM comme le riz doré.
En effet, dans plusieurs régions foisonnent des lois et des règlements unilatéraux, validées ou en train de l’être, qui visent à privatiser les semences et à rendre leur usage très contraignant pour les agriculteurs, en particulier « les petits agriculteurs ». Pourtant, tout récemment, ce 4 octobre, au cours d’une rencontre entre La Via Campesina et le Directeur général de la Fao, M. J da Silva, il a été formalisé un accord de coopération reconnaissant le rôle essentiel que jouent les petits producteurs en tant qu’acteurs de premier plan dans l’éradication de la faim dans le monde. Cette coopération vise également à élargir les droits des agriculteurs sur les semences en conformité avec les lois nationales et internationales.

Exigence
Le Forum sur l’environnement et le développement et les organisations signataires considèrent que la Nouvelle Alliance G8 est une adoption sans précédent de lutte contre la faim par un groupe d’intérêt, petit mais puissant. Cela se manifeste de façon saisissante dans le fait que l’indicateur de «succès» de la Nouvelle Alliance est mesuré par rapport au « Doing Business » de la Banque mondiale, qui ne mesure que le climat d’investissement pour les investisseurs (étrangers). Dans le même temps, les menaces substantielles au droit à l’alimentation et à d’autres droits humains ne sont pas prises en compte. Encore une fois, la société civile sénégalaise, les Osc africaines et les organisations paysannes doivent se lever et exiger de la transparence, de la participation et de la redevabilité à défaut d’arrêter la Nouvelle Alliance G8 et Agra. C’est possible, parce que dans les années 2006- 2007 nos gouvernements ont fait respecter leur décision de ne pas signer les APE grâce à leur collaboration avec les OSCs. Au niveau national, le Forum social Sénégalais, Enda Pronat et bien d’autres organisations ont donné le ton : soutenons-les. Au niveau régional « Nous Sommes la Solution » (www.fahamu.org/was), une initiative de femmes rurales, est en train d’abattre un grand travail de sensibilisation et de plaidoyer au Burkina Faso, au Ghana, en Guinée, au Mali et au Sénégal. Sur le continent, l’Alliance pour la souveraineté alimentaire en Afrique (Afsa) agit, réagit et plaide au niveau des institutions régionales pour une meilleure gouvernance agricole et environnementale. Nous sommes tous concernés et nous devons léguer de la pureté aux générations futures.

Par Famara Diédhiou
([email protected]),
coordinateur de la campagne Nous sommes la solution – Célébrons l’agriculture familiale !, qui mobilise des associations de femmes rurales au Mali, en Guinée, au Ghana, au Burkina Faso et au Sénégal

3 Commentaires

  1. Non espèce d’idiot; il ne s’agit pas de vendre nos terres comme ça! mais de les faire exploiter par ceux qui ont des moyens au lieu de les laisser en friche et contempler nos paysans mourir dans la pauvreté, la faim et la misère complète( évidement nous pénards, on gueule pour se faire un nom et parfois de l’argent à travers des ONG voraces et sans pitié)

  2. On peut constater que ce papier est un ramasis d’ idees saugrenues et nesfastes de certaines  » ONG » qui n’ont rien a proposer aux populations assaillies , de plus en plus, par la mal -nutrition en afrique. Au contraire elles ne font que du bruit pour continuer a recevioir leurs « perdiems » , en tant que caisses de resonnances de lobbies qui n’ ont pas interet a ce que les paysans Africans ne deviennent des agriculteurs modernes prouvant ameliorer leurs conditions de vies avec des revenus substantiels que peut offrir l’agro-business. C’est a la limite du sabotage qui prend forme, dans ces officines pour être in fine un motus operndi. Mais qu’a cela ne tienne, les paysans savent ou se trouve leur interet.

  3. L’article peut être critiqué pour son manque de clarté et sa présentation, mais on ne peut lui refuser cette vérité: La nouvelle politique agricole des G8 n’a pas été conçue pour les beaux yeux des paysans Africains ni pour éradiquer la faim et la malnutrition en Afrique. Ici aux USA, et même là-bas en Europe et Asie, les effets dévastateurs et irréparables de l’introduction de produits, plantes, semences et autres produits Génétiquement modifies par des organisations comme MONSANTO, ne sont plus à démontrer.
    L’article a soulevé beaucoup de questions pertinentes que les populations Africaines ne maitrisent pas ou ne suivent pas, mais c’est un secret de Polichinelle que d’affirmer comme l’article le souligne, que certaines graines, certaines semences et certaines plantes qui sont entrain d’être commercialisées du fait de leur productivité, ou rendement “High yield” ou de leur résistance ou cout, ont aussi des revers et des conséquences incalculables et démesurées sur nos économies et sur notre sante. Pour prendre l’exemple le plus patent et le plus connu de tous que même les européens (notre propre France en tète) ne veulent pas et ne souhaitent pas sur leur sol, est le Mais génétiquement modifie (corn) américain que ces gros producteurs essaient d’imposer au reste du monde.
    Y’a aussi une bataille très âpre que les Populations Natives ou indigènes des USA (que l’on appelle erronément des Indiens), mènent contre certaines variétés de riz que l’on veuille introduire dans leur habitats et qui risquent d’éliminer le riz naturel (Wild Rice) de leurs terres et de leur chaine alimentaire et donc les rendre dépendants de ces gros producteurs.
    Pour vous dire que cet article peut paraitre mal rédigé, long ou rabâché, il a néanmoins le mérite de soulever beaucoup de questions et de présenter d’utiles infirmations que les populations gagneraient a maitriser.
    Une autre idée que l’article ne souligne pas, mais qui va venir s’ajouter a un débat déjà « HOT est le problème de décentralisation, et donc l’Acte III sur la décentralisation tant décriée. Disons seulement que si la répartition, la division, la dotation, la distribution, et la cession ou la vente des terres deviennent politisées a cause de cette décentralisation, nous pouvons nous attendre a la mainmise de grands producteurs sur nos terres, car la cession se fera au ‘Meilleur Offrant’ et ces messieurs (Monsanto, Cargill ou ADM) viennent avec de gros moyens contrairement au petit cultivateur de la vallée du fleuve. La chine par exemple ne se limite pas a pratiquer ou introduire la Nano technologie dans ses produits, elle a décidé d’être propriétaire foncière « de terres cultivables » dans des pays comme l’Ukraine avec le seul but de pouvoir cultiver ces terres comme elle le souhaite. L’Afrique risque d’être la grande perdante si nos autorités ne préparent pas les populations et les agriculteurs et surtout si nos experts nos départements et nos agences s’occupant des questions agricoles ne sont pas au diapason (Up to-date-) des dernières technologies, introductions et tendances dans la chaine alimentaire mondiale. Ne soyez pas surpris de savoir que notre voisin le Burkina Faso est cité mais aussi est classé parmi les plus grands producteurs de ce type de mais que la plupart des pays ne souhaite pas voir sur leur territoire. Dites-vous bien que ce mais du Burkina est bien vendu et très consommé sur toute la zone Ouest Africaine sans bruit ni tambour. Nous devons nous atteler au travail, les défis sont énormes et l’heure est grave. Voilà un extrait du rapport d’un Expert français sur ces types de mais :

    Why GM Corn is Dangerous
    French Professor Gilles-Eric Seralini, molecular endocrinologist at the University of Caen and a member of two French government commissions evaluating GM food, found that MON 810, along with several other varieties of GM crops, showed statistically significant problems in animal studies that regulators have not pursued with follow-up research.
    Seralini said the effects of the GM crops were similar to that of pesticides, including inflammation disorders, and problems with livers and kidneys, two major organs involved with detoxification
    – See more at: http://www.darkgovernment.com/news/monsanto-dangers-of-genetically-modified-corn/#sthash.RxKYlhku.dpuf.

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