D’abord, il faut tout de suite le reconnaître, Pape Samba est une espèce, rare, disons même, en voie de disparition dans cette jungle que l’on appelle dans les démocraties : la presse. L’homme est resté journaliste, d’un genre particulier certes, même s’il est vrai – aussi – qu’il a été un mauvais directeur de publication.
Il ne fait pas partie de ces journalistes qui ont trop bien compris leurs missions au point de ne point avoir besoin d’une lettre de mission.
Pape Samba n’a pas – donc – voulu comprendre que la ligne du journal l’Obs devait changer pour servir –exclusivement – les intérêts du patron.
D’un journal qui interpelle, dénonce et fait condamner (par des experts en tout) quotidiennement le gouvernement, l’Obs devait changer de couleur et devenir un journal qui explique, justifie et fait comprendre les décisions du gouvernement.
Ainsi, au groupe futures médias (GFM) on ne voit plus le gouvernement comme on le voyait il y a de cela 10 mois. Les temps ont changé.
Oumar Faye, Léral Askane Wi, vous le connaissez ? Grâce au groupe futures médias. Certainement !
Mais apparemment, pour certaines têtes, bien pensantes, de GFM, M. Faye est devenu très bavard et ne mérite plus qu’on lui donne la parole, depuis un certain 25 mars 2012. Pour parler simple, disons qu’il n’est plus un bon client.
Cependant, Pape Samba a mis du temps, beaucoup de temps même, pour comprendre qu’il ne s’agit pas seulement de priver la parole à Oumar Faye, mais à tous ceux qui pensent comme ce Monsieur. Disons, Pape Samba n’a pas compris qu’il lui fallait trouver d’autres « distributeurs automatiques » de « bonnes paroles ». Je ne vous demande – surtout – pas de suivre mon regard – et pas du tout alors – du coté des invités, très spéciaux des émissions politiques de RFM et de TFM.
Récemment, un ami me disait qu’il ne comprenait pas l’Obs qui était selon lui, entre : « soumission » et « audace ». Froidement, je lui avais répondu : le directeur de publication est un traître. Traître, entendu ici au sens bourdieusien du terme.
En effet, au moment où, par exemple, pour montrer qu’on est branché, le code secret est devenu très simple, il faut juste encourager le gouvernement sur la traque des biens dits mal acquis, Pape Samba, lui, avait trahi son monde en allant chercher trop loin, jusqu’à même convoquer quelqu’un qui était hors de cause, en mettant à la Une de l’OBS, ses revenus légaux et son patrimoine déclaré. Il s’agissait là, manifestement, de la « mauvaise parole ». La « bonne parole » étant : le Président est de toute façon hors de cause.
Seulement, ceux qui disent cela oublient, certainement, que Nixon a été poussé à la démission et que Clinton a failli être destitué pour une affaire de mœurs.
Que dis-je ? Dire que le Sénégal doit se mesurer aux bonnes pratiques des démocraties avancées n’est plus de la « bonne parole ». Le Président en exercice est intouchable. Répétez SVP ! Pour qu’on ne l’oublie plus.
Toutefois, s’il est vrai que Pape Samba a d’énormes qualités professionnelles, il n’en demeure moins, aussi, que l’homme a de très nombreux défauts. Il écrit bien, même s’il ne signe presque jamais. Il est peut être le seul directeur de publication qui (re)lie tous les articles et les faits réécrire par leurs auteurs, mot à mot, phrase par phrase.
Seulement, dans sa rédaction, il a ses Hommes. En effet, en parcourant l’Obs, il était trop facile de reconnaître ceux qui travaillaient réellement sous les ordres de Pape Samba et ceux qu’il ne contrôlait pas.
Parmi les défauts de l’homme, il y a aussi sa tendance à privilégier le coté « obscur » de ses compatriotes. Les « dessous » des bonnes dames, il les aime bien. De même que les petites culottes des grands messieurs.
Il aime les faits divers. Trop même ! C’est peut être ce qui faisait la réussite, commerciale, de « Week end magazine », dont il a été le directeur de publication.
Enfin, nous sommes trop naïf pour croire que Youssou Ndour soit si intelligent pour mettre entre les mains de Pape Samba un journal d’enquête. Il faut le dire, Pape Samba est aujourd’hui le plus grand journaliste d’investigation de ce pays. Mais peut être aussi, le plus indépendant. Il s’agit là d’un jugement sur pièce et non d’un blanc-seing. .
Lui confier, donc, un « magazine d’enquête » est vraiment un pari risqué.
Juste pour dire que le groupe futures médias n’a pas en vérité l’ambition de sortir des placards son fameux projet de « magazine », mais il a voulu tout simplement y mettre Pape Samba.
Très bon séjour monsieur le journaliste !
Sadikh DIOP
Administrateur de l’Observatoire de l’information et des médias