Le 18 juillet, le premier président de l’Afrique du Sud démocratique (1994-1999) doit souffler sa quatre-vingt-quinzième bougie. Mais cet anniversaire semblait encore loin, samedi 30 mars, au moment où Nelson Mandela entamait sa troisième journée d’hospitalisation pour le traitement d’une infection pulmonaire récurrente.
La veille, la présidence sud-africaine avait assuré dans un nouveau communiqué qu’il faisait des « progrès constants », avait « bon moral » et avait pris « un petit déjeuner complet ». L’inquiétude autour de l’état de santé de « Madiba », du nom de son clan, est montée d’un cran en Afrique du Sud car c’est sa troisième hospitalisation en trois mois. En décembre 2012, il avait passé dix jours à l’hôpital pour traiter une infection pulmonaire. Début mars, il y avait été admis pour subir des examens de routine avant de ressortir le lendemain.
Ses problèmes respiratoires remontent à son incarcération sur l’île de Robben Island, au large du Cap. Il avait contracté la tuberculose au cours des vingt-sept années passées derrière les barreaux pour s’être opposé au régime de l’apartheid, oppresseur de la majorité noire du pays.
« Je ne pense pas que les gens doivent paniquer et j’ajoute même, calmons notre anxiété, il réagit très bien et il est entre de bonnes mains, avec de très bons médecins », avait insisté, jeudi soir, l’actuel président, Jacob Zuma.
Il est toutefois très difficile d’évaluer la gravité de l’état de santé de Nelson Mandela. L’accès aux informations est verrouillé, limité à un communiqué quotidien sommaire. En décembre 2012, son opération pour retirer des calculs biliaires avait été annoncée après coup.
Les autorités justifient ce contrôle strict par la nécessité de respecter la vie privée de l’ex-chef d’Etat. Le lieu de son hospitalisation – Johannesburg ? Pretoria ? – n’a pas été révélé. Cette stratégie favorise les spéculations, mais la présidence sud-africaine tente aussi de faire face à la frénésie qui s’empare des médias à chaque alerte de santé de l’une des dernières icônes du XXe siècle.
DÉCLIN
Cette attitude contraste avec celle des Sud-Africains qui, progressivement, se sont habitués à l’idée que leur héros, retiré de la vie publique depuis plusieurs années, n’est pas éternel. « En zoulou, quand quelqu’un de très âgé décède, les gens disent qu’il ou elle est rentré à la maison », avait ajouté, jeudi, Jacob Zuma.
Au pouvoir sans discontinuer depuis 1994, mais de plus en plus critiqué pour son inefficacité, le Congrès national africain (ANC) tient aussi à ne pas briser le tabou de la santé de son dirigeant historique pour éviter d’abîmer l’image d’un homme qu’il a contribué à mythifier avant sa disparition.
Des proches de Nelson Mandela confiaient récemment au Monde que, effectivement, son état de santé déclinait. Il marche de moins en moins, et quand il se déplace, c’est avec l’aide d’un déambulateur.
En février, son ancien avocat et vieil ami, George Bizos, faisait même ce constat en public : « Malheureusement, il oublie parfois que l’un ou l’autre est décédé, ou son visage exprime l’incompréhension quand on lui dit que Walter Sisulu ou d’autres ne sont plus de ce monde ».