Pêche – Utilisation des filets mono-Filaments au Sénégal: Quand le ministère du Commerce encourage l’incivisme

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Les nombreuses campagnes de sensibilisation et des opérations de saisie, qui parfois se déroulent dans la violence, n’y feront rien. Des pêcheurs artisanaux continuent de recourir à des filets mono-filaments aux conséquences néfastes pour la ressource halieutique, aidés en cela par l’incohérence du gouvernement. Alors que l’utilisation du filet à mono-filament est interdite au Sénégal depuis 1998, dans le secteur de la pêche, le ministère du Commerce autorise son importation et sa commercialisation au niveau national. Ce qui encourage l’incivisme de pêcheurs artisanaux qui s’obstinent à braver cette interdiction, en s’en procurant, quitte à en découdre avec les garde-côtes.

L’utilisation de filets en mono-filament ou en multi-mono-filament est interdite par l’article 30 du Décret N° 98-498 du 10 juin 1998. Le texte dit: «Il est interdit d’utiliser ou de détenir à bord des embarcations de pêche des filets maillants fabriqués à partir d’éléments mono-filaments ou multi-mono-filaments en nylon.» Il s’agit de ces filets composés de plusieurs fils monofils torsadés, ce qui a pour but d’augmenter la solidité et surtout la souplesse de la nappe de filet et la capacité de pêche. En général, la couleur des nappes est bleue, mais selon les arrivages elles peuvent êtres vertes, ce qui ne change rien en la qualité de pêche.

Selon le capitaine de vaisseau, Cheikh Sarr, Directeur de la protection et de la surveillance des pêches, ces filets à base de fils de nylon sont prohibés pour des raisons écologiques et de préservation de l’écosystème et des ressources du fait de leurs conséquences néfastes, surtout en cas de perte dans les eaux. En effet, il peut arriver que ce type de filets, que certains pêcheurs généralement mouillent, se perdent. Et, comme il ne se détériore pas facilement (il peut faire près de 500 ans pour se dégrader), «il continue à attraper des poissons, à tuer la ressource en s’accrochant à des rochers ou des habitats des poissons, entraînant une perte de ressources du fait de la colonisation des habitats. C’est pourquoi il a été interdit, mais des pêcheurs sénégalais continuent à l’utiliser», déplore-t-il.

Un Code pour interdire l’importation et la commercialisation

Seulement, il y a un couac au sein de l’administration qui semble encourager «l’incivisme» de certains pêcheurs artisanaux qui s’entêtent à utiliser ce matériel banni. Alors que le ministère de l’Economie maritime en interdit l’utilisation, le ministère du Commerce en autorise la commercialisation. «Malheureusement, la commercialisation n’est pas interdite au Sénégal. L’importation et la commercialisation n’étant pas interdites, les gens le trouvent facilement. Ce qui complique le combat de la Direction de la protection et de la surveillance des pêches (DPSP)». «Mais l’utilisation comme filet de pêche est prohibée, la détention à bord d’une embarcation de pêche, d’un navire est interdite. Chaque fois qu’on trouve ce type de matériel de pêche sur une embarcation ou sur un bateau ou bien mouillé dans la mer, en fonction de l’utilisation, il est saisi et détruit systématiquement, avec bien sûr, en cas de préjudice, une amende modique pour la pêche artisanale allant de 15.000 à 50.000 F Cfa. Ce qui fait que ce n’est pas suffisamment dissuasif pour qu’ils arrêtent de l’utiliser», relève Cheikh Sarr. C’est pour corriger ce dysfonctionnement que le prochain nouveau Code de la pêche (actuellement en révision) prévoit, d’en interdire complètement l’importation. Ce qui fait que la douane pourra saisir ce type de filet et sévir contre son importation. «Actuellement, la douane ne peut pas saisir ces filets qui entrent dans le territoire parce que l’importation n’est pas interdite», explique le directeur de la DPSP.

La DPSP ne reculera pas face à la défiance

Par rapport aux affrontements de ces derniers jours entre les pêcheurs de Thiaroye sur Mer et les garde-côtes et éléments de la marine, le capitaine de vaisseau trouve que «c’est dangereux que des pêcheurs s’en prennent à des agents de la DPSP, de la marine nationale et des gardes-côtes, mais nous avons la loi avec nous. Pour éviter leur utilisation, nous allons continuer la sensibilisation, à contrôler et à retirer les filets».

En en réponse à la demande de certains de proposer une alternative de rechange aux filets retirés, le directeur de la DPSP coupe court. «C’est interdit, pourquoi l’acheter d’une manière frauduleuse et attendre qu’on vous propose quelque chose à la place. Ce n’est pas cohérent». Et de rappeler qu’il y a eu des expériences pour promouvoir, vulgariser d’autres types de filets au moment où l’interdiction a commencé. A l’en croire, il s’agit de filets de type biodégradable au bout de quelques années et certains en ont fait l’expérience pendant une période de transition. Car, «l’Etat ne peut pas acheter des filets à chacun. Les filets proposés peuvent durer suffisamment longtemps pour une entreprise artisanale et ils ne feraient pas de dégâts une fois perdus en mer parce que pouvant se dégrader au bout de quelques années», souligne-t-il.

D’ailleurs, souligne Cheikh Sarr, il y a des localités qui n’utilisent plus le filet mono-filament, notamment Kayar et Yoff. «Donc cela veut dire qu’on peut bien s’en passer. Il suffit d’un peu de volonté et de vouloir changer de méthodes petit à petit ils y arriveraient». Toutefois, prévient-il, les bagarres et autres formes de résistances violentes de pêcheurs ne les feront par reculer. «Les pêcheurs n’ont pas hésité à attaquer même la marine. Cela ressemble à de la défiance. Dans un Etat de droit, des citoyens qui doivent compter en cas de besoin sur leurs forces de l’ordre devraient quand-même les ménager, leur accorder un minimum de respect (…) Quant à se bagarrer contre l’administration, cela peut produire son effet pour un jour, mais cela ne nous arrêtera pas. Puis que c’est interdit, nous maintenons le combat. (…)».

Par Sudonline.sn

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