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PORTRAIT : Pr Mame Thierno Dieng, Médecin général : Leçons d’humanisme et d’humilité.

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De la station passagère «Monsieur le ministre», Mame Thierno Dieng a repris son titre de «Professeur» de médecine. Le fait peu ordinaire a marqué les esprits de ses compatriotes : l’ancien ministre de l’Environnement et du Développement durable a repris ses consultations de médecin militaire, sitôt le témoin passé à son successeur. Pourtant, le concerné range le fait dans le registre ordinaire. Comme le Général de Brigade qu’il est, Pr Mame Thierno Dieng, Directeur général de l’Hôpital d’instruction militaire Principal, veut rester droit dans les principes de simplicité, de modestie et de sobriété.

Comme un coursier à la force puisée de l’élégance et de la constance, un homme peut bien voyager sur la monture de ses principes propres et de ses vertus républicaines celle-ci constituant son viatique irrévocable. Surtout un militaire au garde-à-vous face au devoir de servir sa Nation ! Dans un palais abritant la réunion du Conseil des ministres comme dans la salle de consultation de l’Hôpital d’instruction militaire Principal, un citoyen peut rendre de précieux services à sa communauté dans des domaines placés au cœur de la gouvernance politique, économique et sociale du Président de la République. Un chef d’Etat distribue les rôles selon une feuille de route calquée sur les aspirations de ses compatriotes, pierres angulaires de son action à la tête du pays.
Professeur Mame Thierno Dieng, par ailleurs Général de brigade, trouve son « Sénégal émergent » dans un bureau de ministre comme dans une salle de consultation, en tant que praticien de la médecine. Dans les deux espaces de décision, il veut contribuer à la qualité du capital humain de son pays. De l’environnement à la santé, c’est comme un mur mitoyen qui sépare les deux thématiques au regard de leur impact conjugué sur la qualité de vie. Et Mame Thierno Dieng a une approche de qualité : servir, peu importe la station où l’on se trouve par la volonté du Président de la République.
Cette obstination dans sa conception de la République en cache une autre relative à un trait de caractère : son urbanité dans la sobriété. Il est très détendu dans son vaste bureau, presque sans ornement, de directeur de l’Hôpital principal de Dakar. La décoration des lieux n’a certainement aucune signification pour lui. L’homme n’est pas fan du clinquant. Il s’est découvert une charge quasi-sacerdotale dans la responsabilité de raviver le flambeau de la prise en charge médicale au Sénégal. C’est le cheval de bataille du Pr. Mame Thierno Dieng, vêtu en tenue de médecin militaire. D’être en pointe dans la lutte pour la qualité des soins est un privilège dont il s’honore et qu’il entend honorer. Il a pris conscience que ce poste n’est pas accessible à tout le monde. Il est le quatrième directeur sénégalais de l’Hôpital d’instruction des Armées du Sénégal. Une confiance de la République qu’il entend mériter. « Je dispose de la légalité conférée par le décret présidentiel et d’une légitimité basée sur les états de services hospitalo-universitaires », commente le médecin-chef directeur, l’appellation consacrée pour celui qui dirige l’Hôpital principal. Il félicite le Président de la République, Macky Sall, qui a, une nouvelle fois, porté son choix sur lui.

Une dette à l’école sénégalaise
Ce fils de paysans refuse de se faire une fixation sur un poste. Il a une dette morale : celle de servir la République à toutes les stations. Il n’a cessé de répéter, comme le refrain d’une chanson, « je suis un produit ad integrum de l’école sénégalaise. Le Sénégal m’a tout donné. Le Sénégal ne me doit plus rien. C’est moi qui dois tout au Sénégal », reconnaît celui qui a vu le jour le 21 mai 1962, à Niakhène, dans la région de Thiès. Ces convictions fortes expliquent en grande partie l’acte qu’il a posé juste après sa sortie du gouvernement et qui est salué par des Sénégalais dont de nombreux internautes. C’est très rare au Sénégal, qu’un ministre démis de ses fonctions retourne à son poste de travail le lendemain de la passation de services. Pourtant, ce médecin militaire n’a jamais voulu considérer cet acte comme un fait d’arme. Notre rencontre a ceci de particulier : c’est la première fois qu’il parle de façon officielle après son départ du gouvernement. Il a jusqu’ici refusé de donner suite aux pressantes demandes d’interviews des médias.
« Les gens pensent que j’ai posé un acte extraordinaire. Or, pour moi, c’est dans l’ordre normal des choses. Mon père n’a jamais payé un rond pour mes études, du primaire jusqu’à l’agrégation. C’est le contribuable sénégalais qui a payé mes études qui m’ont donné l’expertise et la place que j’occupe », justifie ce médecin militaire spécialisé en dermato-vénéréologie. Il ne cherche pas à s’ériger en moralisateur. La reprise de ses consultations est analysée comme une redevabilité. Le médecin a agi en militaire. « On est allé me chercher à l’Hôpital Le Dantec pour répondre à un besoin précis de la République. J’ai répondu à ce besoin, et lorsque la mission est terminée à cette station, je suis retourné à l’Hôpital où j’ai soigné des malades et formé des médecins », déclare l’universitaire qui a fait ses études primaires à l’école publique de Niakhène (1969-1975), les études secondaires au Lycée Malick Sy de Thiès (1975-1982) avant d’intégrer la Faculté de Médecine de l’Université Cheikh Anta Diop (1982-1989) comme élève-officier médecin de l’Ecole militaire de Santé.

Une passion immodérée pour le service
Que de chemin parcouru à la recherche d’un savoir bénéfique à la communauté nationale ! Il s’épanouit, Monsieur le ministre. L’enseignement et l’exercice de la médecine sont au-dessus de tous les autres métiers pour le Pr. Mame Thierno Dieng. S’il ne tenait qu’à lui, il n’aurait jamais quitté ses premières fonctions. Il n’avait pas d’autre choix que de répondre à l’appel de la République. « Je ne pouvais pas mieux servir la République qu’en soignant les malades et en formant des médecins. C’est pour cette raison que, lorsque j’ai fait la passation de services le mardi, le mercredi, j’ai repris mes consultations à Le Dantec », s’exprime le natif de Niakhène, dans le département de Tivaouane.
Juste après sa sortie du gouvernement, Pr Mame Thierno Dieng a été élevé au grade de Général de brigade, moins d’un mois plus tard, le chef de l’Etat lui a confié la direction du prestigieux et historique Hôpital d’instruction des Armées. L’enseignant-chercheur n’entend pas faire moins que ses trois prédécesseurs sénégalais qui ont su préserver la réputation de l’établissement après le départ des Français. Son ambition est claire : maintenir le flambeau hérité des mains des généraux de brigade Boubacar Wade, Momar Sène et Bakary Diatta. « Je suis prêt à être le modeste continuateur de leur mission. Aujourd’hui, lorsque nous voyons l’hôpital principal, nous pensons que nous pouvons relever le défi ou tout au moins maintenir son niveau », croit le dermatologue.

Servir du terroir à la nation…
L’homme affectionne les citations pour étayer son argumentaire. Il aime donner des références en partageant le fil de ses idées. Son discours est entrecoupé d’anecdotes. En plus des citations et des adages, il a recours à des anecdotes. La conversation avec ce médecin n’est point ennuyeux. L’homme n’est jamais dans la démesure, même lorsqu’il se projette dans l’avenir. Ses ambitions sont réalistes pour l’établissement sanitaire. L’Hôpital principal doit se positionner comme une référence sur le traitement de nouvelles maladies à haute prévalence telles que les cancers, les pathologies rénales et cardiovasculaires. Son discours tranche parfois avec le langage protocolaire lorsqu’il est porteur de l’intérêt général. « Je n’ai pas peur de dire qu’il n’y a aucun hôpital qui soit en mesure de répondre, pour le moment, à la prise en charge de ces trois maladies », défend l’universitaire.
Sa trajectoire lui a appris le don de soi et l’humilité. Jusqu’à l’intégration de l’Ecole militaire de santé, Mame Thierno Dieng aidait ses parents dans les champs à Niakhène. Il reste attaché à son terroir et aussi à des valeurs de solidarité. Même en dehors de ses jours de travail, il y retourne de temps en temps pour leur apporter assistance médicale. « J’ai des engagements et des obligations vis-à-vis de mes proches parents et des Sénégalais. J’organise des consultations gratuites au profit des personnes éloignées des structures hospitalières », renseigne l’universitaire qui milite pour une rupture dans l’offre de soins. Pour lui, le médecin a le devoir d’aller à la rencontre des malades si son calendrier le permet. Il ne se contente pas d’énoncer. « S’il faut toujours attendre les malades dans un hôpital, ils ont tout le temps de mourir », prévient le dermatologue.
Au-delà de la compétence, un médecin, ou de manière plus large un agent de santé, doit rester un humaniste. C’est une valeur à incarner en tout lieu et à tout moment. Cet humaniste a le devoir de sacrifier à l’acquisition continue des connaissances. D’ailleurs, ce principe revient dans le discours de notre interlocuteur. De cette manière, le médecin ou l’agent de santé se met dans une posture de remise en cause continue.
« L’une des valeurs d’un médecin, c’est l’humilité qui consiste à reconnaître ses limites humaines. Si on n’accepte pas ses insuffisances, on ne se mettra pas dans une perspective d’amélioration. Il faudra également être disponible vis-à-vis des personnes qui viennent vous voir parce qu’elles souffrent », conseille le professeur des universités qui continue à assurer ses consultations médicales une fois par semaine. Il pouvait se contenter d’assumer ses charges administratives. Cependant, l’enseignant préfère prêcher par l’exemple. « Je ne peux pas exiger aux autres de travailler alors que je ne le fais pas », justifie le médecin militaire.
L’enseignant dénonce cette tendance de la quête de connaissances à des fins personnelles. Il regrette de plus en plus que l’échelonnement soit mis en avant au détriment de la résolution des problèmes qui interpellent nos sociétés. « La bonne recherche, ce n’est pas celle destinée à satisfaire la curiosité intellectuelle du chercheur. Ce n’est pas, non plus, celle qui favorise leur avancement. La bonne recherche consiste à prendre à bras-le-corps les questions vitales qui nous interpellent », défend l’universitaire. Pour lui, aucun argument ne peut légitimer une recherche qui vise la satisfaction individuelle. Il a investi un vaste champ en dermatologie. Les résultats de ses travaux ont contribué à l’élaboration des réponses aux problèmes de santé.
Sans protocole et sans accent jubilatoire, le Général de brigade, médecin militaire, a délivré une ordonnance comportementale de serviteur de la République.

• Par Idrissa SANE

Avec lesoleil.sn

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