Au cœur d’un rapport de la Cellule nationale de traitement des informations financières (Centif), le directeur général des élections a été confronté lundi dernier au représentant de la société Nikel Print. Une confrontation qui intervient après leurs auditions séparées par la Section Recherches, révélées par L’As. La Centif soupçonne un « trou » d’un demi-milliard dans son rapport, en s’interrogeant sur un écart de commandes, mais aussi sur des mouvements financiers dans des comptes. Cheikh Guèye, qui dit être blanc comme neige, convoque la modification de l’article L64 du Code électoral, à 70 jours des élections. Aux enquêteurs, instruits par le parquet, qui a été saisi par le Garde des Sceaux, de trancher.
À la suite de son audition à la Section Recherches de la gendarmerie nationale, Cheikh Guèye, Directeur général des élections (Dge), a été confronté lundi dernier au représentant de la société Nikel Print au cœur d’un rapport de la Cellule nationale de traitement des informations financières (Centif). Un dossier que le Procureur de la République a imputé aux hommes du lieutenant-colonel Moussa Fall pour « enquête exhaustive ». Dans son rapport, la Centif s’interroge sur la nébuleuse dans la commande d’urnes passée en 2007 pour les élections locales et sénatoriales. En effet, indique-t-on, sur 23.000 urnes commandées, seules 18.250 ont été livrées. La Centif soupçonne un trou de près de 500 millions de Fcfa, non sans jeter le trouble sur des mouvements financiers entre administrateurs, notamment des retraits de 70 et 100 millions de Fcfa dans les comptes de la société mise en cause. Une source proche de la Dge, interpellée hier, confirme cette confrontation.
Devant les enquêteurs, Cheikh Guèye a justifié cette « modification de la commande initiale », à l’origine des suspicions de la Centif, par la retouche, à 70 jours des élections, de l’article L64 du Code électoral. Selon lui, il fallait 9000 urnes pour s’adapter à cette situation alors qu’il ne pouvait pas passer d’avenant car il fallait des urnes plus grandes pour les législatives. Avec leur « marge de sécurité » de 4000 urnes, il fallait, toujours selon lui, acquérir 5000 urnes supplémentaires, plus grandes que la commande initiale. Ainsi, explique-t-il, au lieu de livrer 23.000 urnes, 18.250 ont été livrées dont 9000 en format rallongé de 10 tiers. Le représentant de Print a d’ailleurs mis sur la table des enquêteurs un bordereau de la Douane pour… se dédouaner. Ont-ils convaincu les gendarmes ? Difficile de présager les conclusions qu’ils adresseront au ministère public.
Pour autant, il semble que les enquêteurs sont plus intrigués par les mouvements financiers dans les comptes de la société, vers d’autres destinations. Un proche de Print jure que « ces mouvements étaient destinés à un administrateur ayant participé au marché et qui a, par la suite, quitté la boîte ». Des sources proches de l’enquête réfutent formellement cette thèse. Il faut dire que les proches de Guèye jurent sur tous les saints que ce dernier est « nikel » et qu’il serait victime de manœuvres pour le liquider. « Quoi ? Ceux qui disent ça ne sont pas sérieux. Ce n’est qu’un dossier parmi d’autres et parler de règlements de comptes est impropre dans cette affaire », tempête une source judiciaire.
Pas de règlement de comptes
La même source ajoute : « Personne n’a de comptes à régler avec personne. Et ceux qui convoquent la soi-disant détérioration des rapports entre Ousmane Ngom et Cheikh Tidiane Sy n’ont rien compris. Le Garde des Sceaux fait son travail, comme le ministre de l’Intérieur fait le sien. Ils ont de très bons rapports. Avec ces dossiers d’audits, le ministre de la Justice fonctionne sans état d’âme. Il ne protège personne, il ne charge personne. Il transmet au Parquet qui se charge de piloter une enquête qui déterminera ou non les faits », explique cette source.
Faut-il encore préciser que sur 67 rapports transmis par la Cellule nationale de traitement des informations financières (Centif) au Procureur, 60 ont fait l’objet d’une information judiciaire, ouverte au niveau des cabinets d’instruction du tribunal régional hors classe de Dakar. Ce, au moment où un comité mis en place par le Garde des Sceaux met la dernière touche sur un projet de création d’un tribunal financier. Ces rapports financiers tous azimuts ont fini d’ailleurs par placer le ministre d’Etat, ministre de la Justice dans le collimateur de certains cercles. « Ceux qui manœuvrent contre lui perdent leur temps. Comme il l’avait dit dans vos colonnes, entre lui et le Président c’est des relations de confiance et d’amitié. Le chef de l’Etat lui a confié une mission, il la remplit sans état d’âme », martèle cette source judiciaire.
Cheikh Mbacké GUISSE
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