Après l’annonce de la disparition de leader congolais Etienne Tshisekedi, quel est l’avenir pour l’UDPS et plus largement pour le rassemblement de l’opposition alors que l’accord de la Saint-Sylvestre n’est toujours pas mis en application et que l’arrangement particulier qui doit concrétiser le partage du pouvoir est loin d’être signé. Eléments de réponse.
C’est d’abord un coup dur pour l’UDPS qui malgré les absences répétées ces dernières années d’Etienne Tshisekedi, les remises en cause, continuait de se fondre avec la personnalité de son président. Pas de congrès du parti malgré des demandes répétées vu l’âge avancé de son leader, des négociations avec le camp présidentiel longtemps tenues secrètes, le refus in extremis de participer au premier dialogue sous l’égide de l’Union africaine.
Mais le poids politique d’Etienne Tshisekedi s’est mesuré d’abord à Genval, en Belgique, alors qu’il était encore en convalescence. Plusieurs partis et plateformes de l’opposition avaient fini par s’allier sous son impulsion, mais surtout en raison de sa stature d’opposant historique, que le rassemblement de l’opposition est né.
Stature confirmée par le dialogue qui s’est ouvert sous l’égide de l’Eglise catholique, avec un poste taillé sur mesure, celui de président du Conseil national de suivi de l’accord. Poste attribué à lui, le président du Conseil des sages du rassemblement, alors que la primature était attribuée au rassemblement lui-même, mais c’était encore à lui qu’en interne, on demandait de choisir le nom du Premier ministre.
Testament politique
L’abbé Donatien Nshole, secrétaire général adjoint de la Cenco, déplore le vide laissé par le départ du « sphinx de Limete » et appelle à considérer l’engagement d’Etienne Tshisekedi dans le dialogue en cours comme son testament politique : « C’est vraiment avec consternation que nous avons appris cette nouvelle. C’est arrivé à un très mauvais moment et on ne s’y attendait pas. La veille de son voyage, monseigneur Ambongo et moi-même sommes allés lui souhaiter bon voyage. Et on pensait que ce serait pour quelque temps. »
« Nous ne pouvons que prier pour le repos de son âme avec un grand désir de voir le combat qu’il a mené toute sa vie pour la démocratie reconnu par la suite, poursuit Donation Nshole. On peut considérer sa dernière volonté politique qui était son agrément à l’accord qui a été signé le 31 comme son testament politique. Je conseillerai tant sur l’opposition, sa famille politique que la majorité, à tous les Congolais d’ailleurs, par respect pour lui, qu’on prenne quand même au sérieux ce compromis politique pour lequel il a donné son quitus. »
Provoquer un sursaut
Une omniprésence de la figure d’Etienne Tshisekedi face à celle de Joseph Kabila, au point de faire grincer les dents des autres délégations. Ces dernières semaines, au fil des négociations, quand des divergences d’opinions, de stratégies, émergeaient au sein du rassemblement, c’était encore le nom d’Etienne Tshisekedi qui était brandi pour mettre tout le monde d’accord.
De son côté, l’historien congolais Isidore Ndaywel, auteur de l’ouvrage Histoire générale du Congo, veut croire que ce décès, loin de tout remettre en cause, va provoquer un sursaut au sein de la classe politique : « Ça, c’est le souhait. Je pense que c’est un sursaut qui peut être possible. Nous avons vu dans notre histoire que la disparition, de ce que nous considérons comme nos héros nationaux, a toujours abouti à une situation plus intéressante. La mort de Patrice Lumumba [assassiné en 1961] a permis la fin de la sécession katangaise ; la mort de Laurent Désiré Kabila [assassiné en 2001] a permis qu’il y ait finalement enfin la fin de la guerre et l’accord inter-congolais exclusif en Afrique du Sud. Souhaitons également que cette disparition soit une occasion pour qu’il y ait un sursaut tant au niveau des pouvoirs publics, que du président de la République et de l’opposition, pour que finalement cette accord soit mis en place. »
Rfi.fr