« Les tyrans ont une grande connaissance des hommes. Ce ne sont pas des idiots. Ils savent exactement comment on manipule les peuples. Ils avancent jusqu’au bout…. jusqu’au moment où la situation leur échappe » Emil CIORAN, écrivain roumain
Dans un ouvrage célèbre, intitulé « IN SICKNESS AND IN POWER » paru en 2008, David Owen, neuropsychiatre et ex-secrétaire au Foreign Office révélait l’existence d’une pathologie liée à l’exercice du pouvoir. Le syndrome « d’HUBRIS », défini comme « la maladie du pouvoir » crée chez le sujet, une forme d’ivresse du pouvoir qui le conduit à tous les excès. Les symptômes marquants de cette pathologie se manifestent par l’intolérance à la contradiction, le déni de réalité, la prise de décisions à l’emporte-pièce, et la forte propension à l’abus de pouvoir.
Si le Sénégal conserve tous les attributs formels d’un Etat démocratique en 2016, les actes posés par Macky Sall depuis son avènement au pouvoir en 2012 sonnent le retour de vieux démons et rappellent étrangement une époque que l’on croyait définitivement révolue.
Dans la forme, le Sénégal n’a rien à envier aux plus grandes démocraties du monde : le pays est doté d’une Constitution moderne et progressiste qui consacre le pluralisme, les libertés et les principes d’égalité entre tous les citoyens. Au sein de l’ONU, le Sénégal est signataire de tous les traités internationaux, Conventions, et protocoles additionnels. Le pays est membre des instances continentales (Union africaine) et régionales (CEDEAO) et est signataire de la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples. Avec à son actif, 2 alternances réalisées de manière tranquille pour ne pas dire banale, le Sénégal pouvait légitimement prétendre bénéficier du statut de modèle démocratique en Afrique.
En vérité, l’exercice du pouvoir par Macky Sall a considérablement amenuisé le capital « démocratique » sénégalais, désormais réduit à sa plus simple expression.
En effet, depuis 2012, nous assistons à un phénomène inédit, marqué par un rétrécissement sans précèdent de l’espace démocratique. De nombreux éléments permettent de mesurer ce recul démocratique, pour le moins historique :
- La multiplication, sans motif valable, des interdictions de manifester par les Préfets, en violation totale de la Constitution (la liberté de manifester étant un droit fondamental ; toute interdiction doit être justifiée par une menace à l’ordre public exceptionnellement grave aucun dispositif policier ne peut répondre),
- L’instrumentalisation de la justice et la saisine systématique ou l’autosaisine « fortement suggéré » du Procureur pour déclencher des procédures judiciaires à l’encontre d’opposants politiques : par exemple la volonté suspecte de réouverture du dossier des chantiers de Thiès, sans qu’aucun fait nouveau tangible ne vienne justifier le bien-fondé d’une telle démarche,
- L’immixtion récurrente et illégale de la Division des Investigations Criminelles dans le jeu politique ; cette dernière étant déviée de sa mission originelle au point de devenir une police politique, aux ordres du pouvoir exécutif (convocation de membres du parti socialiste dans une affaire qui relève normalement du fonctionnement interne d’un parti),
- La mainmise opérée sur une bonne partie des médias pour formater les esprits et le retour de la censure pour camoufler des faits de mal gouvernance à l’opinion publique, par un usage subtil de l’aide à la presse visant à amadouer voire récompenser les médias qui manifestent une volonté de « coopérer »,
- Le recours disproportionné à la réquisition d’enseignants (laquelle réquisition revêt un caractère illégal, le recours à cette disposition étant très encadré par la loi), dans l’unique but d’étouffer des revendications sociales légitimes, traduisant l’incapacité du régime de nouer un dialogue social fécond avec le monde éducatif,
- La fragilisation volontaire de certains corps de contrôle (réduction des pouvoirs dévolus à la Direction Centrale des marchés publics), laissant le champ libre à l’explosion exponentielle des marchés de gré à gré et balisant le terrain aux prédateurs de deniers publics pour un enrichissement illicite,
- La volonté de neutraliser les corps intermédiaires (intimidation d’une frange de la société civile, tentative de jeter le discrédit sur certains membres d’organisations des droits de l’homme ou de lutte contre la corruption et la concussion, violences policières, détentions arbitraires, etc…) par des actions déstabilisatrices,
- Enfin, les nombreux dysfonctionnements qui ont entaché la sincérité et la régularité du scrutin référendaire du 20 mars 2016 (propagande de la RTS, violation des règles de neutralité prescrites par la CNRA, achat massif de conscience, suppression de centaines de bureaux de vote, privant des milliers de sénégalais de leur droit de vote, rétention de dizaines de milliers de cartes d’électeurs, etc…), ont fini de semer le doute sur la capacité du régime actuel à organiser une consultation électorale de manière transparente et non faussée.
De fait, le jeu démocratique sénégalais sous Macky Sall se caractérise par la prédominance de 2 institutions : la justice et la police. Dans le fonctionnement normal d’un état démocratique, ces 2 piliers interviennent pour exercer un pouvoir régalien conféré par la Constitution, mais n’interfèrent jamais dans le jeu démocratique, qui est du ressort exclusif des acteurs politiques. L’une des difficultés auxquelles est confrontée la démocratie sénégalaise actuelle est liée avant tout à la faiblesse du régime, qui ne semble pas disposer des moyens politiques adéquats pour gouverner le Sénégal, dans le cadre d’un fonctionnement démocratique classique: un pouvoir qui gouverne, une opposition qui assume sa mission de reconquête du pouvoir, et une presse qui exerce pleinement son rôle de contrepouvoir.
L’incapacité à satisfaire la demande sociale, l’absence de résultats sur le front de l’emploi, et l’incapacité à convaincre une majorité de sénégalais expliquent sans doute, l’usage par le régime actuel de moyens non conventionnels, voire anti-démocratiques (la neutralisation d’adversaires politiques étant sous-traitée à une justice instrumentalisée). Le recours systématique à la machine judiciaire et à son pendant (la DIC) est moins le signe d’une force que la marque d’un terrible échec politique.
Si le projet de Macky Sall de conserver le pouvoir est parfaitement compréhensible, son ambition doit s’inscrire dans un cadre démocratique non faussé, dont les règles sont tracées par la Constitution (un cadre qui lui a permis d’accéder démocratiquement au pouvoir). Car, l’histoire démontre que le recours excessif à la force s’avère insuffisant, voire contreproductif dans un pays comme le Sénégal, dont les valeurs démocratiques soient solidement ancrées.
Seybani SOUGOU – E-mail : [email protected]
Merci cher SOUGOU! Votre diagnostic est sans appel et reflète parfaitement la réalité de la courbe triphasique d’évolution de notre démocratie. La Phase 1 de cette courbe correspond aux pratiques que vous avez décrit dans votre texte et qu’on peut renvoyer au temps du Parti Unique de Senghor qui fût marqué par d’âpres combats de nos vaillants et courageux compatriotes du temps pour forcer le pouvoir au changement. La Phase 2 de cette courbe correspond à la croissance exponentielle de cette courbe qui a consacré le multipartisme, plusieurs acquis démocratiques, la réalité de la liberté des citoyens, de la presse et des manifestation, la séparation réelle des pouvoirs dans une certaine mesure, la quasi extinction de l’article 80 concernant le délit d’offense au chef de l’état, la liberté des artistes et opposants qui critiquaient très durement Diouf sans être poursuivis et finalement l’acquisition de nos 1ere et 2e alternances démocratiques conquises au terme d’âpres luttes de nos vaillants et courageux compatriotes du temps. La Phase 3 enfin dont les acteurs aux pouvoir actuel se battent de toutes leurs forces pour nous retourner aux années 60 de la dictature par les méthodes et moyens que vous avez exposées dans votre texte. La jouissance du pouvoir rend fou et l’histoire a montré que la dictature a été l’apanage des faibles qui ne peuvent se maintenir au pouvoir en dehors de la dictature et donc des fraudes. Nous devons refuser que le fruit des sacrifices et efforts de tous nos vaillants et courageux compatriotes passés soient enterrés aussi banalement et facilement en opposant une résistance à la hauteur de la tentative.
Certes les dictateurs connaissent les hommes, mais Macky lui n’en sait rien. On lui a juste fourni une recette à appliquer. Et cette recette il l’a reçue bien avant d’arriver au pouvoir des pourvoyeurs de légions.
En réalité Macky Sall lui même n’est qu’un chaînon d’un système. Il est là juste parce qu’il a accepté ce que des millions de sénégalais auraient refusé.
Sougou Paris et tu veux nous faire croire a un recul de Demokratie au Senegal! Complexe de ….va vivre en Gambia
Où se trouve le complexe?
Ns avons là 1 bel article avec 1 argumentation soutenue,des analyses pointues et 1 décryptage rigoureux de la situation.
Faut opposer des arguments en lieu et place des invectives et diatribes.
Ce Sénégalais est 1 fierté et honore la République.
Un negre a Paris qui jette le diskredit sur son bled comme dirait l autre: Negre de Salon
Toi tu es un bel idiot
Belle analyse.
Analyse très bien écrite et qui résume parfaitement la situation du Sénégal.
Le Président Macky SALL, une fois élu, a piétiné toutes les belles promesses qu’il nous avait fait.
La Honte absolue !!!Mais une fois cet amère constat fait, la balle est dans le camp du Peuple sénégalais qui se doit de se mobiliser et lutter pour abattre le traître.
Il est heureux qu’un Patriote de la trempe de Ousmane SONKO avec son Parti PASTEF sont là pour mener le combat de restauration de la Démocratie piètinée au Sénégal !!!
Alors mobilisons nous tous derrière le Camarade Ousmane SONKO pour stopper ces Politiciens alimentaires qui ont fini de mettre le Sénégal à genoux pour donner la majorité absolue à PASTEF en Juin 2017 aux élections législatives. Pour se faire il faudra, pour la Direction de PASTEF, travailler d’arrache-pied pour asseoir le Parti partout au Sénégal et à l’extérieur.
Na Thi Nieupp Diapp car c’est le travail de toutes et de tous !!! Pour sauver le Sénégal en péril grave !!!
Que la Jeunesse se passe le mot et que les Jeunes travaillent dès à présent pour massifier le parti PASTEF
pour contrer ce Pouvoir moribond qui ne compte que sur la répression, la manipulation et la tricherie et le vol pour se maintenir !!!
Face à un Peuple debout, uni et déterminé le Renégat Macky SALL mordra la poussière avec son Régime rétrograde, corrompu, incapable et moribond.
Vive le Peuple sénégalais !!!!
Vive le Sénégal !!!
Mr Diallo merci seybany les sénégalais devaient être fier des compatriotes comme toi
Bravo très belle analyse. J’avais placé un peu d’espoir en Macky Sall en 2012 mais il est gagné par l’ivresse du pouvoir. Ce Président et son gouvernement ne savent faire que du saupoudrage. J’espère que beaucoup de Sénégalais vont se réveiller en 2019 pour ne pas réélire une personne aussi incompétente. D’ailleurs il faut que ca soit la règle au Senegal: un président incompétent ne mérite pas un second mandat il faut essayer avec quelque d’autre. A défaut on les installe sur le long terme et ils ne feront qu’accentuer leur régime autoritaire, leur dérive, leur corruption… Nous en avons marre de cet état de pauvreté généralisé en Afrique. Nous voulons des leaders qui aiment leur pays et vont proposer un nouvel contrat social et économique au peuple. Marre de ces dirigeants qui ne travaillent que pour eux.