On l’appelle maintenant et abusivement un faiseur de roi. Mais, quand on connaît la grande humilité qui caractérise l’homme, c’est un surnom qui ne lui sied. Humble comme peu d’anciens ministres peuvent l’être, Moustapha Niasse, est loin du faiseur de roi qu’on veut lui coller. Il aurait sans doute préféré le patronyme d’homme de synthèse, de dialogue et de paix.
Nul doute que si l’Afrique du Sud a eu son héros en Nelson Mandela, le Sénégal a trouvé en lui, un homme sur la personnalité de qui, la démocratie pourrait asseoir désormais, ses bases. Médiateur et arbitre, Moustapha Niasse parle à tous les groupes, toutes les générations, toutes les religions. Fort des conclusions des Assises nationales, il a eu tout au long de la campagne présidentielle, un discours et des prises de paroles remarquablement pondérés. Même au cœur de la tourmente. Jamais dans l’excès, il a même exhorté forces de l’ordre comme les gens du pouvoir à la retenue.
Homme d’Etat. Parce qu’homme de l’ordre, Moustapha Niasse est un homme un peu à part dans la classe politique. Une personnalité qu’il est facile de raconter aux enfants. Formé à l’école de l’Union Progressiste Sénégalaise et de Léopold Sédar Senghor, l’enfant de terroir issu de la région historique du Saloum, est un homme de synthèse. Son histoire politique racontée pour notre génération à son arrivée dans le gouvernement d’Abdou Diouf en 1978, pourrait paraître plus contrastée pour les jeunes élèves sortant justes du primaire que nous étions au milieu des années 1970. Le film nous met face à un homme utilisé par Senghor dans les débats à polémique autour du parti.
Contre Majmouth Diop, Secrétaire Général du Parti Africain de l’indépendance (Pai), lors d’un débat sur l’Orts, à la veille de la présidentielle et des législatives de 1978, le Sénégal découvre un jeune plein d’ambition et à la limite de l’arrogance qui cherchait à donner au « vieux » combattant, des leçons sur le marxisme et le livre de Karl Marx « Capital ». Il fallait l’oser.
En plein dans l’apprentissage politique, Moustapha Niasse a forgé sa personne dans cet environnement de la contestation (mai 1968) ; mais aussi de la polémique empreinte d’une certaine démagogie que lui reprochaient les adversaires de Senghor : Abdoulaye Wade, Cheikh Anta Diop, Majmouth etc. Les jeunes collégiens qu’on était à Mbour, l’écoutions souvent, sachant qu’il était un poulain du président Senghor dont nous remettions en questions certaines orientations politiques à l’époque. Au fil des ans, l’ancien ministre d’Etat, devenu par la suite Premier ministre de Diouf, a muri pour devenir l’un de ses démocrates qu’on cherche pour le devenir de l’Afrique. Et, jusqu’à sa sortie du gouvernement de Diouf en 1998, quand celui nomme Mamadou Lamine Loum, Premier ministre, Moustapha Niasse avait fini par nous faire comprendre qu’il avait changé.
Les années 1990 marquent aussi la rupture de l’homme avec une certaine manière de voir la politique dans un continent pris dans la tourmente des partis uniques. De passage à l’Assemblée Nationale devant les députés, l’on se souviendra de la réponse qu’il sert au député indépendant, Mamadou Puritain Fall qui se plaignait du rôle « néfaste » des journaux indépendants, il a répondra qu’ils sont ses éléments d’inspiration…Et qu’il ne se passait pas un jour sans qu’il les parcourt. A l’époque, sans radios privées, on ne pouvait lire que le Cafard Libéré, Walf Fadjr, Sud Hebdo.
Passons sur 2000 et 2007. Période où l’homme entre en scène pour le poste de président. Et depuis lors, les Sénégalais ont découvert un homme pondéré, plus posé dont la seule et unique obsession reste le développement du Sénégal et la paix. Un homme de cœur. Un homme de Dieu tout court qui ne regrette plus le fait de ne pas pouvoir dire un jour qu’il a été président de la République. La seule consolation, pour lui, ne serait-il pas d’ailleurs la fierté de voir les Sénégalais le citer en exemple dans le monde. Un homme qui n’oublie pas d’où il vient et qui a mis ses intérêts entre parenthèse pour celui de la nation. Faiseur de roi ? Que non ! Mais, un mythe est né et il faudra compter avec lui pour quelque temps encore…
je vous envoie ci-dessus les résultats de l’élection presidentielle du 26 Fevrier 2012