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Sexgate : DSK avait-il prévu un préservatif ?

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Le défunt dictateur Guinée, Sékou Touré, depuis sa tombe, crie victoire contre « les suppôts » de l’impérialisme ! Toute une génération d’intellectuels africains peut, enfin (étant entendu que personne ne souhaite qu’ils soient expédiés ad patres), mourir tranquille, elle qui, entre le milieu des années 70 et le début des années 2000 pour un pays comme le Sénégal, a expliqué toutes nos souffrances par ces trois lettres qui ont traumatisé des millions d’africains : FMI. Fonds monétaire international. Pour faire simple, l’institution qui régule et contrôle l’argent des Etats.

 

Dans « Hyènes », Djbril Diop Mambéty avait fait de son personnage, Linguère Ramatou, « une femme aussi riche que la Banque mondiale » et revenue laver un affront ; Nafissatou Diallo, émigrée Guinéenne aux Usa, hors fiction et dans ce qu’il y a de plus réel, par son refus de servir de « coup de passage », selon ses accusations, au Dg du Fmi, a, elle aussi, lavé pire qu’un affront sans le savoir.

Laissons ces considérations aux intellectuels sérieux pour revenir à la crudité du rattrapage par l’histoire. Ajustement structurel, dette, plans de rigueur budgétaire, austérité, compression des dépenses pour assurer la viabilité du cadre macro-économique des Etats : tout un laïus pour accroître l’ouverture des marchés du continent au commerce mondial. Vengeance est un mot trop puéril pour décrire la situation : l’histoire heurte encore une fois les symboles pour ramener les choses à hauteur d’homme.

FMI. Son ex-patron est tombé, tombé bien bas, suite à une tentative présumée de viol sur une Guinéenne, femme de chambre dans un hôtel new-yorkais. Depuis, quatre ingrédients aliment la chronique médiatique : sexe, argent, justice et politique. Dominique Strauss-Kahn était annoncé présent au second tour de la présidentielle en France l’année prochaine ; il a déjà eu deux jours de cachot ; il vit reclus dans un luxueux appartement, entouré de gardes, un bracelet électronique pour contrôler ses déplacements. Sa semi-liberté n’a été acquise que grâce au patrimoine de son…épouse.

Depuis trois mois maintenant, on voit des « grands » chuter ou voir leur image passer des écrins de joyaux aux bas-fonds de la décadence : Raïs ramenés sur terre en Tunisie et en Egypte, assassinat du fondateur d’Al-Qaïda, désacralisation du Fmi à cause des turpitudes sexuelles de son patron. Les médias ne s’intéressent plus tellement à ce qui sort de l’ordinaire. Ils s’intéressent désormais au non-ordinaire dans ce que font les gens célèbres, avec une exposition médiatique jamais égalée.

Nos oncles français (« cousins » est encore trop éloigné de la réalité pour décrire les rapports que l’on entretient avec l’ancienne puissance coloniale) ont constaté avec effroi pour les uns, délectation pour les autres, ce qu’est l’égalité des citoyens devant la loi aux Usa. Mal rasé, menottes aux poignets, encadré par des malabars de la police, Strauss-Kahn n’en menait pas large devant les caméras du monde entier, avec la même contrition que les ministres africains des Finances qui passent leur grand oral chaque année devant les fonctionnaires du Fmi et de la Banque mondiale.

La loi française protège l’image des justiciables tous présumés innocents. En Amérique, les procès sont filmés et les détails les plus salaces de l’affaire sont étalés sur la place publique. Dernière nouvelle : de l’Adn de DSK aurait été retrouvé sur les habits de la présumée victime. N’allons pas vite en besogne : les empreintes génétiques ne sont pas seulement relevées grâce au sperme ! Il est possible de la faire avec de la salive, du sang, de minuscules morceaux de peau. Mais, non, ici, l’Adn ne pouvait provenir que de la semence prostatique du présumé violeur. Ça fait plus hot, plus sale, plus cochon quoi !

L’autre jour, une mauvaise langue a expliqué que les Africains se battent pour que les pays nantis et des organisations similaires au Fmi subventionnent leurs semences agricoles ; ayant mal compris le topo, DSK voulait essayer d’offrir sa propre…semence. Mais dans la frénésie médiatique, on a que trop oublié le drame vécu par Nafissatou Diallo. En tout cas, les français ont mal vécu les dégradantes images de la descente d’un homme aux enfers. Tiens, tiens…

Suivez les télévisions françaises et certaines de leurs émissions d’évasion sur l’Afrique : grosso modo, on est descendu de l’arbre il n y a pas longtemps. Combien de temps a-t-il fallu se battre pour réhabiliter la Vénus Hottentote, présentée il y a un peu plus d’un siècle comme une bête de foire à travers l’Europe, poussée à se prostituer, avant de finir empaillée dans un musée espagnol ? Combien d’images de cadavres et de terribles maladies pour « labéliser » le contient noir ? Combien de clichés et de préjugés entretenus à force d’images dégradantes. Ils découvrent l’humiliation.

Un débat d’école s’est toutefois posé. Deux conceptions du journalisme s’affrontent. Avec « le sexgate » DSK, les journalistes anglo-saxons accusent le mutisme des journalistes français face aux précédents dossiers DSK car sa réputation de chaud lapin était un secret de polichinelle. Aux Etats-Unis, le journaliste met en avant son rôle social : « Le Congrès ne fera aucune loi […] qui restreigne la liberté de la parole ou de la presse. »

Au pays de Barack Obama, tout peut être montré, dit et un média même se faire partisan d’une cause Egalement, la frontière entre l’activité publique et la sphère privée, d’un homme politique par exemple, est même totalement effacée. « Une vision qui fait l’apologie du sensationnalisme », explique un bloggeur de kazeo.com. N’ont-ils pas failli occire politiquement le président Clinton, accusé à l’époque d’avoir fricoté avec une stagiaire de la Maison-Blanche ?

Par contre, en France, la liberté de la presse a toujours connu des limites que les anglo-saxons, aujourd’hui, sont en train de critiquer. En effet, des limites sont imposées aux médias avec entre autres, la protection de la vie privée. La loi sur la liberté de la presse du 29 juillet 1881 est l’un des textes fondateurs pour la France. Des délits de presse sont instaurés. Ainsi, on ne peut pas tout dire, ni tout montrer. Mais de plus en plus, le sensationnel l’emporte sur la dignité de l’information. « C’est l’inquisition pour la transparence ! », selon la belle formule d’un journaliste. La presse française préfère en tout cas considérer cela comme du voyeurisme et une atteinte à la vie privée : Chacun ayant droit dans sa vie privée d’avoir la vie sexuelle qu’il souhaite, dans les limites de la loi.

Ici, sous nos cieux, cette situation abracadabrantesque aurait été impossible. Héritage de la loi française avant toute autre considération. On aurait d’abord cherché à l’étouffer l’affaire ; à discréditer la victime ; à faire pression sur sa famille ; à soudoyer plusieurs médias pour envelopper de poussière les éléments de l’accusation afin que personne ne s’y retrouve. Les plus cupides lui auraient jeté à la figure qu’elle a raté l’occasion de sa vie (mais si, mais si…)

Le sexe est encore tabou sous nos cieux. Ici, l’allusion est toujours limite en ce qui concerne les turpitudes des puissants. Et Dieu sait que des casseroles comme celles-là, il y a en a gogo ; beaucoup comme quand les Américains –encore eux !- distribuaient gratuitement des préservatifs dans les centres de santé du pays au tout début de la pandémie du sida. Au fait, DSK avait-il un préservatif à portée de main au cas où ? Trêve de supputations ! Nafissatou Diallo a dit non ! Non à toutes les formes d’impérialisme ! Non au diktat du Fmi ! Dommage que l’affaire ait eu lieu après la tenue du Forum social mondial à Dakar ! Le refus de la dame est un condensé d’altermondialisme et de dignité. Dignité. Yes, we can !

nettali.net

 

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