Thiémé Ngouye Ndiaye, agent à la Direction nationale du patrimoine bâti de l’Etat: « J’ai été battu et torturé par des éléments de la garde rapprochée de Mme Wade »

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Le 21 juin 2008 au stade Léopold Sédar Senghor, les journalistes Kara Thioune et Boubacar Kambel Dieng ont été sauvagement battus par des éléments de la Police. Il y a quelques semaines, le verdict est tombé et les matons s’en sont sortis avec des peines d’un mois de sursis et de 750 mille Francs Cfa d’amende. Cette « injustice » tant décriée encourage-t-elle les hommes en tenue à violenter les citoyens sans conséquence ? En tout cas, les cas de violences policières sont inquiétants dans ce pays. La plupart des victimes ne peut pas ou ne sait pas à qui s’adresser. Thiemé Ngouye Ndiaye est une de ces victimes qui a pu parler.

« Je m’appelle Thiémé Ngouye Ndiaye, je travaille à la Direction nationale du patrimoine bâti de l’Etat. J’ai été battu et torturé par des éléments de la garde rapprochée de Mme Wade. Le jeudi 25 novembre dernier, j’avais été envoyé par mon patron à la banque. Je devais faire des courses pour lui.

J’ai quitté mon lieu de travail vers 13 heures, quand je suis arrivé à hauteur de la cathédrale de Dakar sur l’avenue de la République, j’ai remarqué qu’il y avait des laveurs de voitures sur la route. En même temps, j’ai aperçu un monsieur à côté de la route. Il était habillé d’un tailleur courte manche. Je suis venu stationner juste à côté de lui, car il empêchait les véhicules de passer. Je lui ai dit : « Les gars, faites vite car je suis pressé ». En fait, je devais aussi aller à la station d’essence acheter du carburant pour le groupe électrogène du bureau. Il y avait une coupure d’électricité et on me demandait de faire vite, car il y avait des papiers à imprimer concernant des affectations de logement et que cela ne pouvait pas attendre davantage. Quand j’ai parlé à ce monsieur, il n’a pas daigné me répondre. Un autre monsieur s’est approché de moi et j’ai baissé la vitre. Sans me dire quoi que ce soit, il m’a donné un coup sur la tête et mes lunettes sont tombées. Je n’avais rien compris ! Je suis descendu du véhicule et j’ai remarqué que le gars qui m’avait frappé s’est un peu éloigné. Je suis venu vers lui pour comprendre pourquoi, il m’avait tapé. Je lui ai dit : « De quel droit tu te permets de me frapper et pourquoi tu m’as frappé ? » Sa seule réaction a été de me charger encore. Je ne pouvais le laisser me battre. J’ai réagi et il y a eu des échanges de coups. Mon collègue qui était resté dans le véhicule est venu pour nous séparer. Mais, quatre autres messieurs, habillés à peu près de la même manière sont venus se ruer sur nous. Ils ont maîtrisé mon collègue et se sont mis à me battre. Un gars qui était en tenue militaire, qui a certainement reconnu notre véhicule de fonction criait : « Arrêtez les gars, c’est la famille ! » Mais, ils ne l’ont pas écouté. C’est peut-être pour cela que les gens ont raconté dans la presse que j’étais un gendarme qui refusait de se mettre au garde-à-vous devant son supérieur et c’est pour ces raisons qu’ils m’ont battu. Ce n’est pas vrai ! Je ne suis ni un gendarme ni un policier. Je suis un simple citoyen, pressé de faire convenablement son travail.

Ils ont continué à me battre et j’ai réussi à m’accrocher sur l’un d’eux que j’ai empoigné de toutes mes forces. Ils me demandaient de le lâcher, mais je m’accrochais solidement. Je ne comprenais plus rien et je ne savais pas que j’avais affaire avec des éléments de la Police en civil. En aucun moment, ils ne m’ont dit qu’ils étaient des policiers, des membres de la garde rapprochée de la Première dame, Viviane Wade. C’est après que j’ai appris que Mme Wade était dans les parages et que ces hommes en costume était des membres de sa sécurité. Je ne pouvais pas le deviner. Je croyais que ce sont les laveurs de véhicule qui bloquent la circulation comme à leur habitude sur cette avenue. De toute façon, je ne pouvais pas imaginer que la voiture de la Première dame pouvait créer tout ce bouchon. S’ils s’étaient présentés à moi comme des policiers ou des gendarmes, j’aurais obéi sans rechigner. Comment, moi, qui me rends très souvent au Palais pour des besoins de mon boulot pouvais avoir des altercations avec des hommes de tenue ? Je ne leur ai pas manqué de respect en aucun moment. Je me suis garé à côté d’eux juste pour comprendre ce qui se passait. Mais, c’est comme s’ils n’étaient pas lucides.

En tout cas, ils ont continué à me battre. L’un d’eux a tordu ma main jusqu’à ce qu’elle se fracture. Mon collègue qui était avec moi les suppliait de me laisser. Il lui criait à tue-tête : « Laisse-le, son bras est cassé ! » Mais, ils ne voulaient pas l’entendre. L’un d’eux disait : « On s’en fout s’il a une fracture. » Ils ont continué… Pourtant, la fracture était ouverte… Sur le coup, je ne pouvais pas sentir que mon bras était cassé. Ils m’ont amené par la suite à la maison militaire, ensuite au commissariat du Plateau. Heureusement, au commissariat un policier m’a reconnu et a demandé à ce qu’on m’envoie à l’hôpital Principal. C’est comme cela que je me suis retrouvé ici (Ndlr : Nous l’avons trouvé dans son lit d’hôpital à Principal). J’ai été opéré du bras et retenu à l’hôpital… »

Cheikh Fadel BARRO

lagazette.sn

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