Ma récente sortie sur 2STV expliquant « la vocation première d’un Etat n’est pas de créer des emplois, mais de créer les conditions favorables à la création d’emploi » a sans doute heurté la sensibilité des ignorants et de ceux qui attendent tout de l’Etat. Pourtant, aucun économiste au monde ne pourra soutenir une thèse contraire. Un gouvernement n’est pas là pour créer des emplois, mais pour «favoriser la création d’emplois», je signe et persiste.
En Afrique en général et au Sénégal en particulier, on parle beaucoup de la nouvelle structuration démographique avec une émergence d’une population très juvénile, sans prendre en considération le processus d’évolution même de nos sociétés. Dans nos pays en proie à plusieurs difficultés avec des défis multiples, l’arbitrage politique a sans doute fait perdre de vue certaines urgences ou occasionné des choix de politiques stratégiques pas forcément appropriées sur le temps. Tout cela pour dire que la seule chose qu’on peut reprocher à un Etat (parlant d’emploi) c’est de ne pas avoir créé suffisamment de conditions pour favoriser leur création. En somme, ne pas s’être suffisamment préparé pour accueillir convenablement le flux de jeunes en recherche d’emplois que les perspectives annonçaient déjà par les calculs de probabilités et par l’historique des évolutions démographiques.
Un gouvernement n’est pas là pour créer des emplois, mais il en crée quand-même pour s’auto-gérer, faire fonctionner ses institutions. Un gouvernement n’est pas là pour créer des emplois, mais ne se refuse pas à en créer si l’opportunité se présente. Un gouvernement n’est pas là pour créer des emplois, mais a le devoir d’inscrire toutes ses politiques aux réalités socio-économiques, géostratégiques et politiques de sa sphère, toujours dans la logique de création de valeurs et d’emplois.
Dans l’histoire et par expérience dans tous les pays du monde, à chaque fois qu’un Etat est parvenu à faire reculer sensiblement le taux de chômage, c’est quand il parvient à un développement industriel sur fond de croissance de la production et de la productivité et un développement de la culture entrepreneurial sur fond d’une amélioration du climat des affaires. Cela suppose pour notre cas, une politique industrielle axée « positionnement stratégique sur des secteurs clés et propices à la croissance rapide durable et au potentiel de recrutement massif. Cela suppose également une révolution plus qu’un assainissement du cadre des affaires et une jeunesse dont la formation est adaptée aux demandes présentes et futures du marché. La vraie gestion du flux exponentiel des demandeurs d’emploi est dans l’anticipation et la projection. L’absorption du chômage ne se décrète pas, elle s’anticipe. Ce qui veut dire que le flottement socio-économique dans la gestion du chômage perdurera avant que la tendance ne baisse. Et là encore, à condition que les initiatives en cours soient soutenues, mais surtout s’adaptent et se façonnent au rythme des évolutions multidimensionnelles, à côté de cette structuration évolutive susmentionnée.
Cheikh Mbacké SENEConsultant en intelligence économique, veille et CommunicationDoctorant au School of Business and EconomicsAtlantic International University (USA)