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Un pays en urgences (Par Mamadou Ibra Kane)

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D’urgences en urgences, le Sénégal est comme plongé dans un état d’urgence permanent. La troisième vague de la pandémie à Covid-19, avec ses explosions de cas, ne nous laisse pas trop le choix. Elle nous admet, en effet, aux urgences.
Mais, « quand il est urgent, c’est déjà trop tard ». Il y a une part de vérité dans ce coup de gueule du député de l’opposition Mamadou Lamine Diallo. Il dénonçait le 25 juin dernier, la précipitation à modifier le code pénal et le code de procédure pénale concernant la lutte contre le terrorisme. En la circonstance, le parlementaire Diallo a été bien inspiré de ressusciter Talleyrand. La suite lui donne davantage raison. Conséquence : coups de poing et volée de bois vert en dehors et au sein de l’hémicycle.
On n’avait pas fini de constater les dégâts collatéraux de la procédure d’urgence choisie par le pouvoir, voilà qu’une autre procédure d’urgence est empruntée pour réviser, cette fois-ci, le code électoral. Il y avait urgence, dit-on. Il fallait insérer dans le code toute une batterie d’accords entre les acteurs pour se conformer au délai de six mois fixé par la CEDEAO. Faute de respect de ce délai, la démocratie sénégalaise courrait le risque de se faire taper sur les doigts par l’organisation communautaire. Après moult reports, les élections territoriales pourront finalement se tenir le 23 janvier 2022. Ouf ! Enfin, on y arrive. Pas si vite !
On découvre encore que le consensus obtenu sur les Locales n’est pas sans conséquence sur une autre élection. Une élection certes de moindre envergure, mais une élection tout de même. Le renouvellement du mandat des hauts conseillers est donc renvoyé aux calendes… sénégalaises ! Leur mandat se terminent en novembre 2021. Majorité et opposition se sont encore entendues pour que l’élection des hauts conseillers se tienne après les Territoriales. Mais quand ? Pour rappel, 80 des 150 membres du Haut Conseil des Collectivités territoriales sont élus au suffrage indirect pour un mandat de 5 ans. Il se pose au pays un réel problème de maîtrise du calendrier électoral.
Il faut le dire, un pays qui est tout le temps dans l’urgence réfléchit peu. Sinon, pas du tout. Eh bien, la raison est simple. Parce qu’il a tout le temps le nez dans le guidon ou la tête sous l’eau. En mauvaise situation donc. Et puis, urgence pour urgence, y a-t-il plus urgent que la nouvelle vague de coronavirus qui s’abat sur le Sénégal ? Sûrement il n’y en a pas. Facteur aggravant, le vaccin est en rupture alors que l’écrasante majorité réclame sa dose. Très bizarre de constater que même ceux qui avaient déjà pris la première dose se voient privés de la seconde qui était pourtant prévue à une date très précise. Le fait de ne pas fabriquer de vaccins ne saurait être une excuse. Les gouvernants semblent avoir oublié que l’avenir ne se prévoit pas. Il se prépare.
Les codes électoral, pénal et de procédure pénale ne manquent pas d’importance. Rangeons-les quand même un moment. L’urgence est ailleurs : faire face au nouvel ennemi qu’est le variant Delta. Avec les mêmes armes ? À virus variant et variable, il faut changer son fusil d’épaule et de stratégie. Non seulement on ne sait plus à quel vaccin ou saint se vouer, plus inquiétant encore, on n’est même plus sûr qu’il n’y aura pas un autre variant qui s’appellerait Omega. Pourquoi pas ? Assurément, notre monde vit un vrai psychodrame !

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