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Wade – Henri Grégoire Diop : Un si vieux contentieux

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Abdoulaye Wade récuse le président de la Crei qui juge son fils, Karim. Mais ce serait plus profond que cela comme motif. C’est Henri Grégoire Diop, lui-même, qui l’avait inculpé avant de le laisser libre dans le dossier de l’assassinat de Me Babacar Sèye. C’est l’un des contentieux que Wade a souvent eus avec les magistrats.

Abdoulaye Wade a dressé un sévère réquisitoire contre le président de la Cour de répression de l’enrichissement illicite (Crei), lors de la manifestation du Front patriotique pour la défense de la République (Fpdr), mercredi. Il dit : «Henri Grégoire Diop a commis des actes inacceptables qu’on a jamais vus dans la justice. Même dans les pays de l’Est, on n’a jamais vu un magistrat faire sortir un avocat de la salle. Si l’avocat a commis une faute, on fait appel au bâtonnier pour régler le problème. C’est le Conseil de l’ordre qui le juge et le procureur peut faire appel de la décision. C’est un magistrat injuste. Voilà un président qui empêche un avocat de poser des questions. Un président qui empêche son assesseur de poser des questions et qui fait menotter un prisonnier dans la salle. On n’a jamais vu ça. Henri Diop a montré qu’il a déjà son jugement en poche. C’est pourquoi les avocats l’ont récusé. Et nous aussi, nous le récusons.»

Mais tout indique qu’au-delà de l’avenir de Karim Wade qui est entre les mains de la Crei, présidée par Henri Grégoire Diop, il y a une longue histoire entre l’ancien président de la République et le magistrat. Certains parlent de «contentieux», d’autres d’«animosité» que Me Wade nourrirait contre le magistrat en charge du dossier de son fils poursuivi pour enrichissement illicite présumé. C’est que, rapporte-t-on, Henri Grégoire avait inculpé le père, lui-même, dans l’affaire Me Babacar Sèye en 1993. Une audience, soulignent des sources judiciaires, «très mal passée» entre l’opposant d’alors et le juge du deuxième cabinet du Tribunal régional de Dakar qu’était l’actuel président de la Crei. En fait, le doyen des juges de l’époque, le défunt Cheikh Tidiane Diakhaté, souligne-t-on, était en vacances judiciaires et il revenait à Henri Grégoire Diop de «s’occuper» de Wade et Cie, présumés complices dans l’assassinat du juge constitutionnel, après les arrestations de Clédor Sène, Pape Ibra­hima Diakhaté et Assane Diop.

Wade et les «magistrats couchés»
Wade n’a pas de contentieux seulement avec Henri Grégoire Diop. Ses relations avec les magistrats ont souvent été heurtées. Mardi, lors de la réunion du Comité directeurs du Pds, il avait déclaré qu’il y a «des magistrats honnêtes, des magistrats corrompus et des magistrats couchés». Dans sa veste d’opposant, cette faute peut lui être pardonnée.

Wade contre Youssou Ndiaye en 2001
Déjà, dès les premiers mois de son mandat de président de la République, il avait entrepris un bras de fer juridique avec le Conseil constitutionnel. Alors que sa coalition avait utilisé son acronyme et son effigie comme symboles pour la campagne des Légis­latives de 2001, les «cinq sages» avaient statué sur la requête du Ps, de l’Urd et de l’Afp sur l’investiture de Alé Lô à la fois sur la liste du Ps et celle de la mouvance présidentielle. Et Wade, en sa «qualité de gardien de la Cons­titution», comme il le précise, avait saisi Youssou Ndiaye d’une lettre pour n’avoir pas informé la coalition présidentielle de cette saisine. «Je constate une double violation : celle de la Constitution et celle de la loi», avait fait remarquer Wade au Conseil constitutionnel qui, selon lui, est «tenu lui-même au respect de la Consti­tution et de la loi», comme l’Exé­cutif et le Législatif. Et cette correspondance avait le ton d’une demande d’explications. «Je souhaite avoir vos explications et vos commentaires», a-t-il dit au président du Conseil constitutionnel.
La juridiction s’expliquera et argumentera avec des articles à l’appui, concluant que «telle est la pratique qui s’est instaurée depuis la Cour suprême et qui s’est poursuivie au Conseil constitutionnel depuis sa création». Cela n’a pas eu l’air de plaire et de convaincre le successeur de Abdou Diouf qui, dans une autre lettre, revient à la charge. «Je n’ai pas la même interprétation que vous du contentieux soulevé», leur a-t-il signifié, relevant un texte des magistrats cité «de façon erroné».

Wade et les «magistrats esclaves»
La gifle de trop a été l’assimilation choquante du magistrat à un esclave. Présidant la cérémonie d’ouverture de la 53ème réunion annuelle de l’Union internationale des magistrats (Uim) à Dakar, Abdoulaye Wade dit : «On pense généralement l’indépendance de la justice par rapport à l’Exécutif, alors qu’il y a beaucoup d’autres contraintes. La question de l’indépendance des magistrats ne se pose pas, car psychologiquement le magistrat ne veut pas être indépendant. C’est comme des esclaves. On les libère, ils font 200 mètres et reviennent pour dire : ‘’Je ne sais pas où aller’’. Qu’est-ce que vous voulez ? Si les magistrats ne veulent pas se libérer, qu’est-ce j’y peux ?»

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