Avant de partir en exil samedi, l’ancien président gambien Yahya Jammeh a volé des millions de dollars dans les caisses de l’Etat, a accusé dimanche un conseiller de son successeur Adama Barrow, le jour même où une mission militaire ouest-africaine se déployait pour « sécuriser » le territoire.
« Au moment où nous prenons en main le gouvernement, la Gambie est en détresse financière », a ainsi affirmé Mai Fatty, un proche conseiller du nouveau chef de l’Etat gambien, toujours réfugié à Dakar où il a prêté serment jeudi: et « les caisses sont pratiquement vides ».
Selon lui, « en l’espace de deux semaines, 500 millions de dalasi ont été retirés » par Yahya Jammeh, soit près de 11 millions de dollars. Hébergé par le Sénégal, à Dakar, depuis la mi-janvier, Adama Barrow souhaite rentrer « dès que possible », a encore confirmé dimanche M. Fatty, son conseiller, lors d’une conférence de presse à Dakar. Mais « la sécurité en Gambie est encore fragile », a souligné celui-ci.
Dans une déclaration lue en son nom par M. Fatty, Adama Barrow a souhaité « que les forces de la Micega (la Mission de la Cedeao en Gambie) restent en Gambie jusqu’à ce que la situation générale sur le plan de la sécurité y ait été globalement rétablie ». Selon un haut responsable sénégalais de la Micega, le chef de l’armée gambienne, Ousman Badjie, aurait déjà annoncé son ralliement au nouveau président.
‘Ex-dictateur de Gambie’
Une certitude: l’opération de la Micega durera jusqu’à ce « que les conditions de l’exercice effectif » du pouvoir de M. Barrow « soient réunies », a assuré son commandant, le général François Ndiaye. Marcel Alain de Souza, haut responsable de la Cedeao, a cependant affirmé que le pouvoir « ne pourra pas rester ainsi vacant » trop longtemps: M. Barrow devra prendre ses fonctions « le plus rapidement possible ».
Après six semaines de crise politique grave née du refus de M. Jammeh, battu à l’élection présidentielle du 1er décembre, de céder la place à M. Barrow, les choses commencent cependant à se décanter. Sous d’intenses pressions diplomatiques, notamment de la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (Cédéao, 15 pays), l’ex-président gambien a finalement accepté de se retirer, après 22 ans de pouvoir, et s’est envolé de Banjul pour Conakry samedi soir. Selon des sources officielles guinéennes et la Cédéao, il a ensuite pris un autre avion pour la Guinée équatoriale. Mais les autorités de ce pays restaient silencieuses dimanche soir sur sa présence sur leur sol, alors que le principal parti de l’opposition, la CPDS, a dénoncé la décision d’accueillir « l’ex-dictateur de Gambie ».
Depuis l’éclatement, le 9 décembre, de la crise politique gambienne, de multiples initiatives avaient été prises pour que Jammeh cède la place. Des troupes de la Micega avaient ainsi pénétré en territoire gambien dès jeudi après-midi, après la prestation de serment de M. Barrow à Dakar, mais elles avaient rapidement suspendu leur progression pour laisser agir la diplomatie, selon la Cédéao, qui comptait alors mobiliser jusqu’à 7.000 hommes de cinq pays. Et les derniers efforts menés vendredi par la Guinée (membre de la Cédéao) et la Mauritanie (non membre de la Cédéao), ont donc finalement abouti. Dans une déclaration commune, la Cédéao, l’Union africaine (UA) et l’ONU ont même annoncé garantir les droits de M. Jammeh, y compris à revenir dans son pays, saluant sa « bonne volonté » pour parvenir à un dénouement pacifique de la crise.
‘Jammexit’
Selon certains experts auprès de l’AFP, ces garanties ne seraient cependant pas légales. Dimanche, un haut responsable mauritanien a de même indiqué que Nouakchott avait dénoncé auprès de la Cédéao, de l’UA et de l’ONU l’entrée de « forces étrangères » en territoire gambien. Selon lui, il s’agirait d’une « violation des termes de l’accord » ayant permis le départ en exil de M. Jammeh. Le déploiement des troupes de la Micega semblait en tout cas bien accueilli dimanche par les soldats gambiens et la population, ont constaté des journalistes.
Dimanche soir, les blindés de contingents sénégalais circulaient dans la capitale sous des acclamations, et ce jusqu’aux abords du palais présidentiel où s’aventurent habituellement peu de résidents civils. Samedi, les rues de Banjul avaient déjà connu des scènes de liesse après le départ de Yahya Jammeh, qui a dirigé d’une main de fer cette ex-colonie britannique de moins de deux millions d’habitants. Sur sa page Facebook, le conseiller d’Adama Barrow, Mai Fatty, avait parlé de « Jammexit ». « Bon débarras! », s’est exclamé Mohammed Jallow, 54 ans, tandis que Omar Mbenga a estimé que la Gambie a eu son « indépendance d’un dictateur terrible ».
Une nouvelle Gambie qui s’essaie à la diabolisation style Macky Sall. Si la Gambie plonge dans cette méthode infâme, s’en sera fini pour elle.
En effet. Là contagion est rapide et très dangereuse. Barrow, le nouveau Président de son peuple, doit rester le même homme authentique que les gambiens ont connu et élu. Il n’est redevable à aucun Président ou aucune force étrangère. Il est redevable uniquement au peuple gambien. Il doit donc garder son indépendance, sa souveraineté et son authenticité afin d’agir librement en toute conscience sans l’influence de personne. Il doit s’éloigner des manipulations et des mensonges qui sont l’apanage des faibles et mauvais.