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Cheikh Béthio et son empire : Des pires moments au renouveau ! Destin d’un Cheikh pas comme les autres…

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Depuis la défaite de Wade lors de la dernière présidentielle à son combat avec la mort en France en passant par les événements de Médinatoul Salam, Cheikh Béthio a vécu, certainement, les pires moments de son existence. Parfois assimilé au diable et par d’autres au messie, le guide spirituel des Thiantacônes a su bénéficier, pendant qu’on s’y attendait le moins, de soutiens de taille. Avec le meurtre de deux de ses talibés à Mbour, beaucoup ont pensé que c’était le début du déclin pour celui qui estime le nombre de ses disciples à plusieurs millions d’âmes. Aujourd’hui, c’est le renouveau. Privé de parole car sous liberté provisoire au magal 2013, il a parlé cette année, envoyé des bœufs à ses plus grands détracteurs Mbacké-Mbacké, reçu une délégation du Président Macky Sall et rappelé sa mission de guide spirituel. Enquête au cœur du « Kurel » pour connaître l’empire de Cheikh Béthio.

Cheikh Béthio, qu’on l’aime ou qu’on ne l’aime pas, a réussi à pénétrer presque toutes les familles Sénégalaises. Comptés par millions ou par milliers, ses disciples sont dans les tous les coins et recoins de ce pays. Ils sont facilement reconnaissables par le collier autour du cou avec une photo du Cheikh, par leur manière de s’habiller et de parler. Oui, le Cheikh et ses talibés ont un vocabulaire spécial, spécialement conçu pour eux, codé parfois. Entrons dans l’univers d’une organisation pas comme les autres…

Le « kurel » : la macrostructure

Le « Kurel » désigne de manière on ne peut plus simpliste l’ensemble des thiantacônes . Ils sont jeunes, hommes comme femmes pour la plupart, même si, sur le bout des doigts, il peut être compté quelques personnes du troisième âge.

Le « kurel » a pris ses élans à Guédiawaye et Pikine pour se répandre dans toutes les régions du Sénégal. Cheikh Béthio l’appelle ainsi pour éviter qu’il soit confondu aux dahiras où peuvent se mouvoir des talibés mourides ayant fait leur acte d’allégeance auprès de chefs religieux différents. Ici, il s’agit d’un pouvoir centralisé au niveau du Cheikh qui émet les ndigels exécutables uniformément par tous les disciples. Les règles sont claires mêmes si elles sont diffuses. Tout se conçoit au sein de la structure : les mariages et autres cérémonies familiales répondent à certaines exigences répertoriées dont celle d’informer le guide spirituel qui se charge, personnellement ou par délégation de pouvoirs, des précautions à prendre. C’est ainsi que c’est lui qui désigne scelle les unions, qui baptise (ou qui fait baptiser) les enfants. Les garçons sont appelés Serigne Saliou et les filles Mame Bousso. Les autres noms qui peuvent, suivant d’autres conditions, être choisis sont Serigne ceux des fils de Serigne Touba et, tout dernièrement, celui de Serigne Bass Abdou Khadre. La suite édifiera sur le choix du nom de ce dernier.

Les daaras, démembrements du « kurel »

Sont ainsi appelées les structures plus ou moins grandes installées dans les régions, départements, quartiers ou établissements scolaires. Le nombre de participants dépend de la taille de la localité ou de l’établissement concernés et de l’importance du nombre de disciples qui y habitent ou qui le fréquentent. Par exemple, le daara Touba-Hlm est forcément plus « consistant » que celui de Touba-Bambey. Il en est de même pour Touba-Université Cheikh Ana Diop qui n’a rien à voir avec Touba- Lycée de Mbacké.

Les daaras sont dirigés sur « ndiguel » du Cheikh par des « diawrignes » que lui-même a désignés. Ces « diawrignes » sont chargés de relayer la parole du Cheikh généralement qui les regroupe périodiquement, dans une réunion appelée « réunion des diaxrignes ». Ils ne sont cependant pas investis d’un pouvoir qui leur donne le droit de tout faire. En effet, ils peuvent parfois souffrir la contradiction apportée sur certaines questions par des condisciples, confie notre source. Quand une femme et un homme finissent d’afficher leur attachement jusqu’à se confirmer pour un mariage, c’est lui qui se charge d’en informer le Cheikh qui pilote les démarches nécessaires auprès des parents des concernés. Notre interlocuteur de marteler que c’est à tort que les gens pensent que les mariages sont scellés au mépris de l’accord parental. Les daaras servent aussi de cadre d’échanges et de collecte des « taabis » ou « participations financières » en cas d’événements comme le Magal ou le Gamou.

Le vocabulaire… ce qu’il faut dire

« Ku baax, Gnou gi siaar » suffit pour saluer. Cela signifie « monsieur au grand cœur, je vous salue ». Dire bonjour autrement peut aider à attester de son non-appartenance au « kurel ». Pour dire merci au Cheikh, il faut articuler « dieuredieuf Thioune ». Les mots dahiras, « diangu » pour désigner les manifestations religieuses sont interdits. Il faut dire à la place « daaras « et « thiant ». Quand on danse au rythme des chants, on ne parle pas de « fecc » mais plutôt de « dukatt ». Les participations financières sont dénommées « taabi » et non « cotisations ». Pour parler du Cheikh, on ne dit jamais Béthio mais Cheikh Béthio ou Cheikhbi. Cette appellation émanerait de consignes données à plusieurs reprises par Serigne Saliou Mbacké. Pour désigner son épouse, il est préférable de dire « sokhna si » et non « sama diabar ». Les époux sont appelés « borom keur » et non « djekeur ». Les enfants sont des « tout tank » et non des « khalé ». Le vocabulaire est loin d’être exhaustif, mais revêt un caractère essentiel pour les thiantacônes.

Cheikh Béthio du déclin au renouveau !

Suite au meurtre de deux de ses talibés à Médinatoul Salam, Cheikh Béthio a été arrêté. Il séjournera à la maison d’arrêt et de correction de Thiès avant d’être transféré à Rebeuss. L’occasion sera saisie par ses détracteurs dont des Mbacké-Mbacké pour demander son emprisonnement à perpétuité pour complicité de meurtre et autres chefs d’accusation les uns plus graves que les autres. Ses disciples devenaient la risée publique. Seuls les plus courageux continuaient à afficher leur « identité » de thiantacône. Le nom de leur guide spirituel devait résonner à travers les médias comme une symphonie obligatoire au quotidien. Pour certains, c’est Serigne Touba, lui-même, qui lui réglait ses comptes. Notre source de nous apprendre que certains de ses talibés ont vu le feu d’amour pour leur guide spirituel s’éteindre. « Il y en a qui ont quitté le Cheikh depuis. Cela a commencé avec la défaite de Wade lors de la dernière présidentielle d’ailleurs. D’autres comme moi sont restés inamovibles, car j’ai compris… » Il ne dira jamais ce qu’il a compris. En prison, Cheikh Béthio ne recevra aucune visite véritablement spéciale. Il a fallu que Cheikh Bass Abdou Khadre brise le tabou pour que certaines personnalités religieuses de Touba s’avisent à le faire. Viendront par la suite d’autres. Terriblement malade, Cheikh Béthio bénéficiera d’une liberté provisoire non sans difficultés, et ira se faire soigner en France. Il subira deux opérations du cœur en moins d’un mois et c’est miraculeusement qu’il recevra la plénitude de ses aptitudes cardiaques, ont confié ses chirurgiens français. De retour de l’hexagone, il ira rendre visite à plusieurs dignitaires de la confrérie mouride dont naturellement, le Khalife Général des Mourides et celui des Baay-Fall. Et Cheikh Béthio devait ainsi renaître de ses cendres.

Le renouveau !

Privé de parole en public par décision de justice, car bénéficiant juste d’une liberté provisoire, Cheikh Béthio devait passer son premier « magal après séjour carcéral » dans le silence. En 2013, ses talibés ont été, en effet, sevrés de son discours si attendu. Hélas, c’était le début de la fin de la traversée du désert. Ses entretiens avec Serigne Cheikh Bass Abdou Khadre se multipliant, le réhabiliteront de son rôle de guide spirituel accepté par le monde mouride. Un rôle qu’il n’a jamais perdu, tonne notre second interlocuteur, par ailleurs son jardinier. Le porte-parole du Khalife Général des Mourides ira, par la suite, lui présenter ses condoléances à Thiès à la suite du rappel à Dieu de son frère Serigne Guilé Thioune ; C’est d(ailleurs lui qui avait dirigé la prière mortuaire à Touba. Il recevra, quelques mois plus tard, le Cheikh chez lui pendant de longues heures à Guédé lors de la journée de prières organisée par le Mbacké-Mbacké en mémoire à sa mère disparue la veille. Cheikh Béthio devient, subitement, de plus en plus fréquentable. Le défilé de ses 2000 bœufs sera légitimé, indirectement, par la cellule communication du grand magal qui acceptera que soient montrées les images prises par ses services la veille du 18 Safar dernier. Le Président Macky Sall , considéré par un bon nombre de thiantacônes comme la source des « malheurs » de leur guide spirituel, enverra une délégation conduite par le ministre-délégué Moustapha Diop. C’est la paix partout ou presque ! En effet, Cheikh bi fera savoir à qui veut que Macky Sall n’a rien à voir avec ce qu’il a récemment enduré et que tout relevait de la volonté divine. Pour cette fois, évidemment, le Cheikh a parlé même si par ailleurs, il est toujours sous liberté provisoire.

Les à-côtés du dernier magal

L’affaire Maimouna Sao, du nom de son ex-épouse épinglée récemment par la dahira Safinatoul Amann pour détention et consommation, dans la cité religieuse et en période de magal, de boisson alcoolisée est certainement l’événement qui peut, le plus attirer les attentions. Pourtant la dame, pour s’approprier la maison où elle a été surprise par les hommes de Serigne Modou Lô Ngabou, a déposé une plainte contre Cheikh Béthio. L’affaire est encore pendante devant la justice. Autre chose : l’histoire Amy Collé Dieng. La Mbalax-girl s’est vue rabrouée, le jour du magal, par un Cheikh Béthio qui refusait de laisser chanter une personne inconnue. « Je ne te connais pas » lui dit-il, avant de rappeler que ces « thiants » n’ont rien à voir avec ce qui se passe dans la rue. « Nous ne jouons pas ! » La Thiessoise chantera tout de même.

Dakaractu-Touba

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