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De quoi les industries chimiques du Sénégal (ICS) sont-elles le nom ?

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Jadis fleuron de l’économie sénégalaise, les Industries Chimiques du Sénégal (ICS) se sont muées aujourd’hui en malédiction pour les populations riveraines. Dans cette boulimie insatiable des exploitants des phosphates et des acides de notre pays, rien ne semble plus arrêter les ambitions démesurées d’expansion des ICS. Animées par une cupidité purement économique et capitaliste, ces industries se sont engagées dans un processus destructeur, de pollution, d’expropriation et d’appauvrissement des riverains. Les intérêts financiers priment sur la santé et le bien-être des communautés, laissant derrière elles un paysage de désolation et de détresse.

Les ICS exploitent aujourd’hui 1 800 000 à 2 000 000 tonnes de phosphates par an, ont fait 566 423 853 591 FCFA de Chiffres d’affaires en 2022, dont 15% appartenant à l’Etat du Sénégal, 78%, INDORAMA, 6,78 IFFCO et 0,22% pour le Gouvernement Inde. Et la valeur commercialisée au titre de l’année 2022 était de 56 392 615 820.

Malgré cette situation qui vient d’être décrite, il est regrettable de constater que depuis leur implantation dans la zone en 1957, l’entreprise fait preuve d’un mépris total de ses obligations environnementales et sociales vis-à-vis de l’Etat et des populations locales. Une situation inédite relayée par Confidentiel Afrique vient s’ajouter à ce constat. Il est en effet question du placement des fonds des ICS dans des comptes off shore, notamment à la Exim Bank India, alors que jusqu’à un passé récent, ces fonds étaient placés dans des banques commerciales locales,[1] d’une redevance minière impayée de 200 milliards de FCFA et une taxe superficiaire d’un montant de 305 millions que la société doit verser à l’Etat du Sénégal

Sur le plan environnemental, l’exploitation et la transformation du phosphate par les ICS ne s’effectuent pas sans incidences majeures sur l’écosystème, la nappe phréatique et l’atmosphère, car impliquant l’utilisation des terres cultivables, le rejet de gaz toxiques, la délocalisation des riverains et l’assèchement de la nappe phréatique. C’est la raison pour laquelle, dans la convention minière de 1999 signée avec l’Etat du Sénégal, la Société avait pris des engagements pour le respect et la protection de l’environnement. Mais, le non-respect de ces engagements est aujourd’hui un secret de polichinelle. Les déversements permanents dans l’Océan Atlantique de déchets et résidus chimiques, notamment d’acides sulfuriques, le rejet de gaz et autres produits hautement toxiques par les ICS, entraînent incontestablement une pollution de l’océan, de l’atmosphère et des sols ainsi que de graves risques d’assèchement et d’intoxication de la nappe phréatique de toute cette zone, tuant ainsi les populations riveraines à petit feu.[3] La catastrophe écologique et environnementale que constituent les ICS, dans le silence total et absolu des autorités étatiques, démontre à suffisance que cette société échappe au contrôle de la puissance publique. Aucune politique de réhabilitation et de réaménagement des terres après exploitation, n’est menée pour permettre aux agriculteurs de poursuivre leurs activités agricoles. Les récoltes dans la zone connaissent ainsi une baisse significative entraînant une diminution drastique des revenus des paysans, obligés d’abandonner leurs cultures de rente.

Dès lors, ce phénomène accentue la pauvreté des populations riveraines et engendre la raréfaction des produits maraichers dans le marché et par conséquent la hausse des prix des légumes telles que l’oignon, pommes de terre, etc. En dépit de tous leurs engagements et de tous les rappels à l’ordre, les ICS restent indifférentes aux fuites de gaz et de produits toxiques qui affectent la santé de la population et empoisonnent l’environnement. Face à ce qui peut être qualifié de désastre écologique et social, aucune campagne de reboisement n’est initiée par les ICS pour atténuer ou corriger les dégâts environnementaux, reconstituer les sols et rétablir l’écosystème gravement endommagé, notamment par l’avancée constante de la montagne de phosphogypse vers les terres d’habitat et de culture. La politique environnementale promise par les ICS est inexistante et inefficace parce que les « investisseurs » indiens rechignent à y injecter les moyens financiers nécessaires. Dans la convention les liant à l’Etat du Sénégal, les ICS avaient, à l’origine, une concession de 17 ha pour l’installation de l’usine. Aujourd’hui, leur exploitation s’est étendue jusqu’aux abords des villages jadis très éloignés de l’usine.

Sur le plan sanitaire, les rejets toxiques de gaz, de CO2 et de poussières qui s’échappent de l’usine, en plus des conséquences sur l’environnement et l’écosystème, exposent les populations à des risques sanitaires considérables, car pouvant causer des infections pulmonaires, gastriques ou oculaires. Or, aucune infrastructure sanitaire digne de ce nom et capable d’accueillir les malades de la zone et de leur apporter des soins sanitaires correspondant à ces pathologies, n’est construite par les ICS au profil des populations

Sur le plan social, les ouvriers et journaliers sont payés 3.500CFA/j et même bien en deçà par des prestataires et sociétés d’intérim véreux qui, épargnés de tout contrôle étatique, violent allègrement et impunément les conventions collectives et le code du travail. Quant aux travailleurs (permanents, temporaires), ils sont confrontés à des conditions de travail précaires et insécures, au grand mépris des lois sénégalaises en matière de travail et de protection sociale.

En matière de politique et de responsabilité sociale (RSE), les actions et réalisations des ICS ne dépassent guère la construction de quelques salles de classe, la clôture des écoles, l’octroi d’aides pour le pèlerinage aux lieux saints de l’Islam et du Christianisme, le soutien pendant les fêtes, des dons aux associations sportives, toute chose qui confine les bénéficiaires dans la posture de la dépendance et de la main-tendue, étouffant ainsi les revendications légitimes des travailleurs et des populations.

Quant à la politique de recrutement en vigueur aux ICS, il est regrettable de noter le faible quota réservé aux jeunes et cadres des localités environnantes. Cette situation engendre périodiquement des révoltes pour dénoncer des méthodes de recrutement discriminatoires et opaques, alimentant ainsi les tensions avec les populations locales. De plus, l’entreprise favorise l’importation massive d’ouvriers et de cadres en provenance de l’Inde et d’autres régions, au détriment des jeunes diplômés, des travailleurs qualifiés, des chauffeurs et des ouvriers du département de Tivaouane. Et le nombre de plus en plus croissant de ces travailleurs expatriés fait qu’on parle même de l’existence d’un « village indien » qui serait établi aux abords de l’usine, exclusivement peuplé d’ouvriers indiens.

De la responsabilité de l’Etat du Sénégal

Sous ce rapport et compte tenu de tout ce qui précède, nous, signataires de la présente tribune, engageons l’Etat du Sénégal à se lancer, sans tarder, dans la confection d’un nouveau cahier des charges en vue d’un nouvel appel d’offres international afin de se donner la latitude et le temps d’étudier les meilleures conditions d’attribution, contraintes et engagements tenant compte, de façon stricte, des intérêts du Sénégal et des populations environnantes.

La fin du contrat des Industries Chimiques du Sénégal devant parvenir en septembre 1999, nous estimons qu’elle offre une opportunité unique pour repenser la gestion de cette société, dans le but de promouvoir un développement économique et social plus inclusif et durable dans notre zone

Ce nouveau cahier de charge devra intégrer les dispositions pertinentes de la loi 2022-17 du 23 mai 2022 relatives au contenu local, qui disposent en ses articles 3 et 4 que les industries minières doivent contribuer au développement du tissu industriel et commercial local. Elles doivent également mettre en place des mécanismes visant à accroitre les emplois locaux dans la chaine de valeur des industries minières et à promouvoir la disponibilité d’une main d’œuvre locale qualifiée (entre autres)

Et compte tenu des manquements graves et répétés constatés dans la mise en œuvre de la précédente convention signée avec les ICS, nous invitons l’Etat du Sénégal à inclure dans le nouveau cahier des charges, la mise en place d’une commission chargée du suivi-évaluation de la future convention d’exploitation qui sera signée.

En nous érigeant en sentinelles de ces nouvelles règles à instaurer avec les éventuels futurs partenaires, nous profitons de cette tribune pour engager l’État du Sénégal à prendre toutes les mesures nécessaires pour garantir que les ICS et tout futur partenaire respectent leurs engagements envers les populations riveraines et l’État lui-même.

Nous invitons aussi l’Etat du Sénégal à un strict contrôle aussi bien des qualités que des quantités de produits extraits et exportés, et exigeons la protection des droits des communautés locales et de l’environnement, ainsi que la restauration et la revalorisation des terres déjà exploitées.

Nous invitons également l’Etat du Sénégal à introduire, dans le nouveau cahier des charges, des clauses de résiliation et/ou de suspension des conventions minières en cas de non-respect des engagements souscrits ou en raison d’une utilité publique motivée par la nécessité de sauvegarder des vies humaines menacées par les exploitations.

De même, les ressources naturelles appartenant au peuple selon l’article 25-1 de la charte fondamentale du pays, nous encourageons l’Etat du Sénégal à mettre en avant la préférence nationale. Le Sénégal dispose d’une expertise avérée qui, par le passé, a fait ses preuves dans sa capacité à gérer des entreprises de cette envergure sans recourir à des partenaires étrangers.

En ce qui concerne les droits des populations spoliées et déguerpies, nous exigeons des ICS le dédommagement les populations victimes d’expropriation ou de saccage de leurs terres de culture, et le respect, dans la transparence, des règles, directives et engagements sur la Responsabilité sociétale d’entreprise (R.S.E) auxquels elles sont astreintes.

Nous demeurons persuadés que l’Etat du Sénégal tiendra compte de ces remarques et propositions pour être et rester dans la logique des promesses de ruptures systémiques. Ces promesses suscitent, partout, de grands espoirs pour une émergence réelle et un développement bénéfique pour les populations sénégalaises. Tout ceci s’inscrit dans le cadre et l’esprit du PROJET de rupture et d’inspiration souverainiste conduit par le président Bassirou Diomaye Faye et le Premier ministre Ousmane Sonko, à travers le JUB-JUBAL-JUBANTI.

Fait à Tivaouane, le 09 juin 2024

Ont signé :

Arame Kébé, Juriste, Chargée de projets
Dr Ibrahima Seydi Ba, Professeur de Lettres Modernes au Lycée de Mboro
Dr Mohamed Lat Diop, Enseignant chercheur en SIC à l’EBAD-UCAD
Ngagne Thiam, Ingénieur de conception en Informatique
Massamba Sall Seck, Manager Qualité et Performance des organisations
Ousmane Ciss, Professeur de Philosophie, Socio-anthropologue
Khalifa Ababacar Sarr, Ingénieur en Géomatique et Spécialiste en Gestion des déchets solides et assimilés, Directeur Général de la SONAGED
Association pour la défense des intérêts de l’arrondissement de Méouane (ADIAM)

Dr Mouhamadou Moustapha Sarr, Enseignant chercheur en Génie mécanique et productique à l’ENSEPT-UCAD
Guilaye Guèye, Ingénieur en Mécanique et Matériaux, expert en transformation numérique
Dr Moustapha Diop, Enseignant chercheur à l’UCAD
Dr Sidy Dièye, Directeur Associé et Consultant international AXLEY Bankers Sénégal
Ngouda Seck, Ingénieur en Génie Civil
Dr Mamadou Bamba Seye, Pharmacien
Dr Mamour Ndao, Médecin urgentiste
Aliou Dia, Comptable à Orange et Chef d’entreprise
Babacar Diop, Professeur au Lycée Technique de Thiès
Lamine Niang, Enseignant
Ousmane Faye, Professeur de Philosophie
Momar Dieng, Professeur de Philosophie
Babacar Sarr, Ingénieur agronome
Alé Ndiaye, Juriste
Aminata Sow, Professeure de Mathématiques au Lycée de Mboro
Youssou Kébé, Professeur de Français au CEM de Mboro
Malick Ousmane Diop, Professeur de Lettres au Lycée de Darou Khoudoss
Babacar Diedhiou, Professeur de Philosophie, conseiller à la Marie de Mboro
Cherif Assane Ndiaye, Professeur d’économie
Ousmane Thiam Ndiaye, Professeur en Techniques Industrielles,
Mouhamadou Hady Dieng, Consultant en santé, Chargé de programme Communication et Partenariat
Mamadou Lamine Sow, Logisticien – déclarant Douane
Mbaye Samb, Professeur environnementaliste et Doctorant
Khadim Mbacké Diop, Professeur de Mathématiques au Lycée de Mboro
Cheikh Ndoye, Directeur de l’Institut Hibroul Oumma pour l’éducation et l’enseignement Franco-Arabe de Ndiop Sao, conseiller à la mairie de Darou Khoudoss,
Cheikh Atab Goudiaby, Professeur de Mathématiques
Cheikh Mbaye Ndiaye, Informaticien/Echantillonneur Mine et Conseiller Municipal
Dame Djité, Professeur de SVT au BST de Tivaouane,
Gortil Mar, Enseignant en langue Arabe à l’IEF de Thiès
Moussa Diakhaté, Ingénieur en informatique
Mme Aîchétou Ser, Assistante au Bureau national CEDEAO,
Mbaye Diongue, Enseignant
Djiby Khoulé, Ecologiste, professeur de SVT
Djibril Sadio, Professeur de Lettres au Lycée de Mboro
Amadou M. Seck, Professeur de Mathématiques au Lycée Ababacar Sy de Tivaouane
Thierno Baldé, Professeur,
Amadou Moustapha Seck, Professeur de Mathématiques au Lycée Ababacar Sy de Tivaouane
Cheikh Tidiane Gaye, Entrepreneur
Papa Malick Ndiaye, Technicien supérieur en Géomatique
Papa Gaye Sarr, Professeur de Philosophie au Lycée de Darou Khoudoss
Abdoulaye Diomaye Diouf, Professeur Titulaire de Sciences Physiques, Chef de bureau au MEN

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