Mactar Sylla, ancien DG de la RTS et conseiller spécial de Ali Bongo: «Transparence des règles et rationalisation de l’audiovisuel»

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Ancien Directeur général de la RTS, Mactar Sylla a roulé sa bosse un peu partout sur le continent. Conseiller spécial du président gabonais Ali Bongo, il nous parle dans cet entretien de sa mission au Gabon et des enjeux de la télécommunication en Afrique et de bien d’autres sujets. Entretien !

 

Icône : Vous êtes aujourd’hui Conseiller Spécial du président Ali Bongo Ondimba, comment vous êtes-vous connus ?

 

Mactar Sylla : J’ai eu l’honneur d’avoir été approché par des personnalités dont je tairais les noms, alors que je dirigeais le Groupe Spectrum Télévision au Cameroun, pour faire partie de l’équipe de campagne d’un des candidats d’alors aujourd’hui président de la République gabonaise. J’ai accédé à l’offre, fort de l’accompagnement d’un leader, stratège et manager Sénégalais de classe internationale, Victor Ndiaye, PDG de Performances Management Consulting, un autre de ces nombreux compatriotes «prophète hors chez soi» qui personnellement me comblent de fierté. Avec nos amis et collègues Gabonais nous avons travaillé sur le projet de société du candidat et la conduite de sa campagne avec les résultats que le monde entier sait. Au niveau symbolique, une telle sollicitation marque une rupture avec le fétichisme pour ne pas dire le complexe des communicants et stratèges européens. Notre première rencontre a duré environ 3 heures aux termes desquelles un déclic s’est produit en termes de partage de sa vision, de principes, d’ambitions et de valeurs et nous avons convenu de relever le défi de la victoire ensemble autour du projet du Gabon Emergent bâti sur 9 axes stratégiques, dans un pays à 9 provinces avec un homme de la nouvelle génération sous le label «Ali 9». Le Président élu a souhaité que cet engagement à ses côtés se poursuive durant son mandat. Nous (Victor et moi) avons alors décidé d’investir et de créer deux sociétés que je dirige : Performances Management Consulting Gabon et Africa Communication & Conseil pour concrétiser notre engagement à accompagner le Président. Au-delà du titre à porter avec humilité, c’est une marque de confiance et un encouragement à la persévérance.

 

En quoi consiste exactement votre travail à ses côtés ?

Nous avons devant nous un chantier colossal mais exaltant auprès d’un homme d’Etat d’une qualité rare, d’une finesse et d’une intelligence remarquables, humble, attentif, capable d’écoute et d’ouverture d’esprit et profondément humain. C’est un nouveau type de leadership tout simplement. Plutôt que de faire de la littérature, je vous demande d’observer le Gabon des 20 derniers mois localement et sur la scène internationale, de continuer à observer ce qui se fait et se fera dans les prochaines années en termes de gouvernance, de diversification économique, d’industrialisation, de prise en compte des enjeux écologiques, de la biodiversité, du développement de services à valeur ajoutée, de renforcement de l’Etat de droit et de la démocratie. Le Président Ali Bongo Ondimba a souhaité que la vision du Gabon émergent ne soit pas un rêve, mais une ambition partagée, servant d’aiguillon au peuple gabonais dans son action au quotidien. Pour cela, il lui semblait nécessaire, au démarrage de son mandat, de dessiner de façon précise la destination future (le Gabon émergent), d’indiquer les grands axes qui y mèneront (les orientations stratégiques) et de présenter de façon concrète les actions et projets qui seront menés durant la première étape de la compétitivité de façon à impulser de manière irréversible la croissance et la marche vers l’émergence. L’objectif ultime est de faire en sorte que l’économie gabonaise ne repose plus sur un seul pied, le pétrole, mais sur trois piliers solides, le Gabon industriel, le Gabon vert et le Gabon des services.  Nous aidons avec d’autres collaborateurs, à tous les niveaux, à affiner cette vision du Président Ali Bongo Ondimba, à la traduire en actions et réalisations par les diverses parties prenantes, à la partager, à faire adhérer. Concrètement nous avons assisté le Secrétariat Général du Gouvernement à organiser et animer le premier séminaire gouvernemental de trois jours sur l’émergence, en novembre 2009, à La Lopé (500 kms de Libreville). Il m’arrive aussi de répondre à des sollicitations particulières de certains ministres pour expliquer et relayer la vision du chef de l’Etat par exemple le ministre de l’Education, de l’Innovation et de la Culture m’a fait l’honneur de délivrer l’adresse inaugurale des états généraux de l’Education et de la Recherche. Celui du Pétrole, des Mines et Hydrocarbures m’a confié la restitution du premier Séminaire gouvernemental aux 150 principaux directeurs généraux, membres de son cabinet et cadres du ministère et leur rôle spécifique de «carburant de l’émergence». Je peux multiplier les exemples.

 

On dit que vous préparez une chaîne continentale avec le président gabonais ?

Beaucoup de choses se disent et se supputent et c’est normal concernant un homme public.  L’une de mes toutes premières missions a consisté avec l’appui de mon équipe à procéder à l’audit et à l’accompagnement de structures existantes dans une logique d’identification du potentiel et de renforcement des capacités. Le président Ali Bongo Ondimba a une vision très claire des enjeux de communication. A l’heure de la mondialisation, à l’heure où la Communication devient un secteur essentiel par son impact dans la vie quotidienne, à l’époque des profondes mutations technologiques et de la convergence, l’Afrique, malgré les récents développements, l’entrée en scène de nouveaux acteurs, reste marginale dans l’industrie des contenus, de la production , de l’édition et de la distribution des programmes et services de presse, radio, télévision, nouveaux services à valeur ajoutée. Le continent malgré l’émergence de nouvelles entités et offres médiatiques, à côté des acteurs publics historiques et traditionnels, malgré une présence satellitaire accrue de chaînes africaines, n’a pas encore atteint la vitesse de croisière nécessaire et exploité toutes les potentialités et opportunités qu’offre l’économie médiatique. Il ne faut également pas oublier que la première chaîne de TV privée francophone est née au Gabon avec Télé Africa. La première radio panafricaine Africa n° 1 est née au Gabon qui est également le pays de l’ex CENACI (Centre National de la Cinématographie) devenu Institut Gabonais de l’Image et du Son. C’est dire que le Gabon, y compris par vocation prouvée et par sa position géographique a de nombreux atouts objectifs pour être un pôle médiatique d’excellence en Afrique. On verra ce qui se fera dans une perspective structurante, strictement professionnelle notamment dans l’édification du pilier du Gabon des Services mais bien au-delà dans l’affirmation d’un acteur médiatique panafricain de référence dans ses talents, ses contenus, sa couverture, ses supports et son rayonnement. Chaque chose en son temps mais il est normal que le pilier du Gabon des services se construise aussi par et avec le développement des médias.

 

On a l’impression que vous n’en avez jamais assez en matière audiovisuelle. Qu’est-ce qui vous fait courir ?

(Rires….) C’est le développement et l’émergence qui me font courir. L’audiovisuel entre dans ce cadre plus global mais demeure restrictif, livré à lui seul. Je revendique mes diverses casquettes de juriste, de planificateur et de gestionnaire de projets, d’universitaire, d’accroc des nouvelles technologies, d’amoureux des arts et de la culture. Il se trouve que l’audiovisuel est un domaine visible donc qui focalise plus facilement l’attention. C’est servir et être utile qui me font courir….

 

Vous êtes très présent dans la création de chaînes de télévision en Afrique. Le Sénégal ne vous attire-t-il pas ?

C’est vrai mais comment dire que son propre pays ne vous attire pas ? Pour l’histoire, j’ai envoyé un courrier au chef de l’Etat en octobre 2006 exprimant mon souhait de création d’une chaîne de télévision au Sénégal et demandant les conditions légales et réglementaires à remplir. A ce jour, ce courrier est resté sans réponse. A cette époque, le Sénégal audiovisuel aurait pu être attrayant mais le fonctionnement actuel, les règles du jeu d’attribution des licences posent problème car à mon avis elles dérogent des règles du droit audiovisuel, de la jurisprudence éprouvée dans les pays qui ont une expérience plus solide. Dans la logique privée, à moins d’avoir un autre agenda, l’analyse du marché est déterminante en matière d’investissements. La situation actuelle avec autant d’acteurs et le méli-mélo en termes de règles d’anti-concentration, de concurrence n’incite pas un investisseur ou un professionnel du secteur à entrer dans la danse à moins de faire une OPA sur l’une des structures existantes après «due diligence». Le marché publicitaire est trop étroit d’une part avec une portion exorbitante pour le secteur public qui n’a pas d’autre choix que de survivre en se battant pour le même gâteau que les opérateurs privés. De ce fait, si la vision est celle d’une chaîne de qualité, il sera difficile d’atteindre le seuil de rentabilité. Aucune banque consciente de la situation actuelle du marché ne suivra un nouvel opérateur car tout business plan démontrera la non viabilité d’un projet dans le contexte actuel à moins que des réformes fortes et profondes ne soient prises pour mieux organiser et réguler le secteur. Je milite pour la transparence des règles et pour une rationalisation de l’audiovisuel. Le principe directeur ne peut pas être celui de la tête du client ou du visiteur. C’est dire que l’initiative du groupe de réflexion sur l’audiovisuel au début de l’alternance et la procédure mise en œuvre par le ministre Mamadou Diop Decroix n’auraient jamais dû être interrompues. C’était la bonne méthode. Tout pouvoir public soucieux de veiller aux multiples enjeux, au dynamisme et aux effets structurants de la communication doit marquer sa volonté de créer un cadre nouveau en réaménageant le monopole traditionnel de l’État d’une manière qui soit propice à la coexistence et au développement harmonieux du secteur public et du secteur privé, avec des règles claires et applicables à tous les opérateurs. Ces règles, qui marquent le souci d’une rationalisation de chaque paysage audiovisuel national, se fondent sur un certain nombre de principes fondamentaux :

la liberté comme principe directeur, avec l’extension de la libéralisation et la fin du monopole d’État à la télévision. Ce qui signifie la mise en place d’un cadre juridique efficace, transparent, garantissant la liberté de communication et favorisant une concurrence loyale entre les divers opérateurs audiovisuels, pour le plus grand bénéfice du public ;

l’accomplissement de formalités d’autorisation ou de déclaration des activités visées par la loi au vu et au su de tout citoyen avec publication et information publique ;

l’institution d’une autorité indépendante de régulation à compétences réelles et élargies ;

le principe de concurrence saine et loyale, afin de prévenir la concentration et les abus de position dominante ;

l’égalité de traitement des opérateurs et des usagers et la non-discrimination

la transparence ;

l’application de sanctions réprimant tout manquement aux dispositions légales et réglementaires ;

la nécessité d’une prise en compte accrue de la diversité des cibles et des publics dans les politiques de communication ;

la volonté de stimuler l’émergence d’une production audiovisuelle nationale et panafricaine suffisante et de qualité pouvant contribuer à l’essor des industries culturelles ; la fourniture d’un service et d’une offre audiovisuels de qualité à tout le public, sur l’ensemble du territoire national, dans les langues principales.

 

Qu’est-ce qu’il faut faire pour remédier à ces couacs ?

La régulation ! Elle seule permet de protéger aussi bien l’Etat que l’investisseur. Tout nouveau régime peut à défaut de régulation et d’institutions fiables à compétences établies, remettre en cause toutes licences ou autorisations délivrées, surtout qu’elles le sont ou sont supposées l’être pour des durées déterminées et non ad vitam aeternam et renouvelables sur la base de règles et principes. Je ne me contente pas de critiquer, je formule des pistes de solutions. Dans le souci de limiter la concentration des pouvoirs économiques autour d’une même catégorie de services ou sur l’ensemble du système audiovisuel, les règles suivantes pourraient être appliquées :

– aucun opérateur, personne physique ou morale, ne peut détenir plus d’une autorisation/licence par type d’exploitation. Il ne peut, par conséquent, exploiter cumulativement plus d’une chaîne de radio ou de télévision à couverture nationale ;

– une même personne physique ou morale ne pourra prendre des participations financières supérieures à 50 % dans plus de deux sociétés ou entreprises titulaires d’autorisations différentes.

Les fréquences audiovisuelles sont des ressources nationales, au même titre que toute autre ressource comme les fréquences téléphoniques ou les licences de pêche. Aussi leur concession doit-elle répondre à un certain nombre de principes et de règles qui fondent les caractéristiques de l’État de droit : égal accès aux services, respect de la liberté d’entreprendre, principes de neutralité et de non-discrimination. Ces principes doivent être expressément reconnus dans les attributions et missions de l’autorité indépendante de régulation des médias à compétences réelles et élargies, qui se déclinent ainsi :

– veiller à l’exercice des droits et devoirs liés à la liberté de la communication audiovisuelle dans les conditions définies par la Constitution et les dispositions législatives ;

– garantir, dans le respect de la loi, l’indépendance et la liberté de l’information et de la communication des médias et opérateurs audiovisuels ;

– veiller, dans le respect de la loi et de la préservation des identités culturelles, à l’objectivité et au respect de l’équilibre dans le traitement de l’information véhiculée par les médias et les opérateurs audiovisuels ;

– veiller à l’accès équitable des partis politiques, des syndicats et des organisations reconnues de la société civile aux médias du service public, dans les conditions fixées par les lois et règlements en vigueur ;

– procéder à des appels à candidature publics pour l’exploitation des services de télévision et de redistribution de signaux télévisés ;

– examiner les demandes d’exploitation des opérateurs audiovisuels privés et délivrer les autorisations et licences nécessaires, après avis technique de l’Agence de Régulation des Télécommunications et de la Poste ;

– autoriser, sur la base de la transparence et de l’égalité des chances, les services de radio et de télévision ; publier les autorisations au Journal officiel ; motiver les refus d’autorisation ;

– appliquer les sanctions relatives aux divers manquements des opérateurs audiovisuels publics et privés ;

– fixer les règles concernant les conditions de production, de programmation et de diffusion des émissions réglementées lors des campagnes électorales ;

– favoriser et promouvoir la libre et saine concurrence entre les médias et opérateurs audiovisuels.

S’agissant plus particulièrement des conditions et critères d’attribution des autorisations, la délivrance des autorisations d’exploitation de services de radiodiffusion sonore ou de télévision diffusée par voie hertzienne terrestre, par câble, par MMDS, par satellite ou par tout autre procédé de télécommunication autres que ceux exploités par la société nationale de service public devrait, à notre avis, être subordonnée à la conclusion d’une convention passée entre l’autorité de régulation, au nom de l’État, après avis technique de l’autorité chargée de la régulation des télécommunications, et la personne physique ou morale demanderesse de l’autorisation. Les conditions à remplir pour l’obtention d’une autorisation pourraient porter sur :

– le dépôt des statuts de l’entité requérante ;

– un formulaire spécial disponible auprès de l’autorité de régulation ;

– une copie certifiée conforme de la carte d’identité nationale du requérant ou de son représentant légal lorsqu’il s’agit d’une personne morale de droit privé ;

– des extraits de casier judiciaire des promoteurs, requérants ou représentants lorsqu’il s’agit d’une personne morale ;

– le certificat de domicile du représentant légal ;

– la description du projet et des sites ;

– les sources de financement ;

– la durée et les caractéristiques générales du programme propre ;

– le temps consacré à la diffusion de la production propre et locale, y compris les œuvres africaines, notamment de programmes quotidiens d’information, éducatifs, culturels et de défense des consommateurs ;

– la présence d’émissions au moins dans une langue nationale et, dans le cas de projets régionaux, dans la langue prédominante de la zone de diffusion ;

– la description des équipements techniques conformes aux normes et standards de diffusion définis et arrêtés par l’agence chargée de la régulation des télécommunications ;

– la description des procédés techniques de diffusion ;

– le versement d’une caution non remboursable, en fonction de la nature, de la vocation et de la dimension des projets (vocation locale ou nationale, de radio ou de télévision, communautaire ou commerciale…) ;

– le versement d’une redevance annuelle correspondant au type de service exploité ;

– un engagement écrit à se conformer aux obligations légales régissant l’activité audiovisuelle ;

– un engagement d’incessibilité de l’autorisation à tout tiers, que ce soit sous forme de vente, de prêt, de location, de gage ou de tout autre procédé ;

– l’emploi d’un nombre minimum de professionnels nationaux, en fonction du format et du service envisagés, avec l’indication des qualités et qualifications des personnels et dans le respect des dispositions du code du travail et des textes en vigueur.

La durée de l’autorisation est également un sujet de réflexion. Je milite personnellement pour les hypothèses suivantes les plus communes :

– dix (10) ans pour les services de télévision ;

– cinq (5) ans pour les services de radiodiffusion.

 

On a plusieurs télés au Sénégal mais on a la désagréable impression que toutes font la même chose. Partagez-vous cette impression ?

C’est vrai que les chaînes se ressemblent comme des siamoises hormis l’habillage et l’identité d’antenne. En termes de concept et de programmation c’est le mimétisme et le choc frontal, la différence se jouant et se faisant au niveau du talent des animateurs et journalistes d’une part, de la qualité du signal et de la couverture d’autre part. Cette question aurait pu être réglée dans les cahiers de charges des différentes chaînes au moment de leur autorisation. Toutes deviennent généralistes. Beaucoup d’amis patrons de chaînes qui me voyaient développer des concepts au Cameroun où a démarré la TV du matin en Afrique francophone avec GOOD MORNING CAMEROON en 2003 et divers programmes sur le rire (le journal du Bien, repris dans plusieurs pays ou émissions interactives et émissions décentralisées de proximité me disaient» puisque tu as choisi Spectrum, et que tu es notre ami à tous, chaque fois que tu initieras quelque chose qui nous intéresse, nous ne nous gênerons pas pour reprendre et installer le concept. C’est cela aussi la réalité de la télévision. En définitive, le seul verdict qui vaille est celui du public, d’où l’importance des mesures d’audiences qui déterminent les positions et les revenus publicitaires.

 

La production semble être le talon d’Achille de nos chaînes de télé. Quel est le bon schéma pour gagner la bataille des contenus ?

Diffuser est une chose, être regardé en est une autre. De manière globale il faut quatre ingrédients :

La formation et le renforcement permanent des capacités des personnels.

L’appui sur un réseau de producteurs nationaux et ou africains ayant des mandats de production et permettant l’externalisation de la production autre que l’information

Des études d’auditoires fiables, indépendantes et crédibles.

Des mécanismes de financement publics et privés

Les émissions d’information, sous toutes leurs formes (journaux, reportages, magazines, talk-shows…), doivent respecter les principes d’expression pluraliste et d’équilibre entre les divers courants d’opinion et les diverses familles de croyance et de pensée. De même, le respect des cibles sensibles doit être de mise. Les opérateurs audiovisuels publics et privés assurant une diffusion publique et non cryptée de leurs programmes doivent s’abstenir de diffuser des émissions dont le contenu et la nature pourraient porter atteinte aux us, coutumes, traditions et bonnes mœurs, notamment à la pudeur des enfants, adolescents et personnes âgées. Les émissions incitant à la violence ou à la discrimination sexuelle, ethnique ou raciale devront être strictement interdites. Tout titulaire d’une licence/autorisation d’exploitation de services de communication audiovisuelle autre que les distributeurs de signaux non produits localement sur réseaux câblés serait tenu d’insérer un programme d’information qui lui soit propre, d’au moins une demi-heure par jour, pour permettre au public de s’informer. Il serait également tenu de contribuer à l’animation économique et culturelle des zones de diffusion. Les opérateurs audiovisuels publics et privés doivent satisfaire les obligations prévues dans leur cahier des charges en matière d’information générale, avec au moins un journal d’information nationale et un journal d’information régionale dans chaque zone de diffusion, notamment dans la langue nationale principale. La notion d’informations spécialisées devrait être introduite.

Les services de communication audiovisuelle devraient avoir un droit d’accès égal à l’information, indépendamment de leur support et de leur nature juridique, au nom de la liberté d’information. Ils devraient également pouvoir rendre compte des manifestations publiques autres que sportives ou nécessitant l’acquisition de droits. L’obligation d’informer le public s’exercera dans le respect des droits des personnes privées, notamment le respect de la vie privée et du droit à l’image.

En matière de publicité, l’exigence de vérité et de décence sera la pierre angulaire. Le contenu des messages publicitaires doit être conforme aux exigences de vérité, de décence et de respect de la personne humaine telles que définies dans les lois respectives de chaque État. Ces messages ne pourront porter atteinte au crédit de l’État, ils ne devront contenir aucun élément de nature à choquer les convictions religieuses, philosophiques ou politiques, ils doivent être conçus dans le respect des intérêts des consommateurs qu’ils ne devront en aucun cas, directement ou indirectement, par omission ou en raison de leur caractère ambigu, induire en erreur.

Les messages publicitaires ne peuvent contenir aucun élément ou signe de discrimination raciale, ethnique ou de sexe, des scènes de violence ou toute incitation à des comportements préjudiciables à la santé, à la sécurité des personnes et des biens ou à la protection de l’environnement. Doivent également être interdits les messages publicitaires concernant les produits faisant l’objet d’une interdiction légale ou réglementaire.

La publicité ne doit en aucun cas exploiter l’inexpérience ou la crédulité des enfants et des mineurs. Ces derniers ne pourront être les prescripteurs du produit ou du service faisant l’objet de la publicité et ne pourront en être les acteurs principaux que s’il existe un rapport direct entre eux et le produit ou le service concerné. Les messages publicitaires doivent être clairement annoncés comme tels, même dans le cas d’émissions interrompues par des messages. Les écrans devront être identifiables avant et après leur diffusion.

Le militant de la coexistence d’un secteur privé dynamique et prospère avec un service public fort et irremplaçable dans ses missions intrinsèques ne peut conclure en occultant l’indispensable préparation du service public à la concurrence. Et cela passera nécessairement par l’instauration de mécanismes de financement public conséquents et à la hauteur des ambitions et missions assignées. Ainsi le service public ne puiserait-il pas plus de 70 à 80 % de son financement dans des sources privées. Cette inversion de flux et de tendance, avec un plafonnement publicitaire, assurerait, par là même, la viabilité des structures privées de production et de diffusion, maillons essentiels de la chaîne audiovisuelle publique et privée de qualité que nous rêvons tous de construire, jour après jour.

 

L’Afrique peine à se doter d’une chaîne de télévision grand public à l’image de CNN ou France 24. Que faire pour y parvenir ?

On ne le dira jamais assez, la télévision absorbe beaucoup d’argent. Quand j’entends les annonces de certains projets légitimes et ambitieux du reste et le budget supposé les mettre en œuvre, je me fais une idée très précise de leur réalisme, de leur probabilité, de leur durée de vie et de leur succès. Pour les exemples que vous citez l’ordre de grandeur des budgets est le suivant : CNN a un budget de 650 millions d’Euros par an soit 426 milliards de francs CFA ;

France 24 le petit poucet du groupe a un effectif d’environ et un budget annuel gravitant entre 87 et 90 millions d’Euros (environ 60 milliards francs CFA) dont une dotation annuelle de l’Etat de 80 millions d’Euros,  soit un peu plus de 52 milliards CFA ;

Si l’on considère le budget de la société holding «Audiovisuel Extérieur de la France» d’où émane ce montant, la dotation publique totale allouée en prévision de la loi de finances 2011, s’élève à 330,3 millions d’euros TTC (soit plus de 216 milliards de francs CFA) en augmentation de 5,3 % par rapport à la Loi de Finances 2010. Le reste du financement va essentiellement à TV5 et à RFI. Dans un souci de pragmatisme, on peut citer Al Jazeera : à ses débuts en 2001 avec 30 millions USD l’équivalent à l’époque de 30 millions d’Euros (environ 20 milliards de francs CFA) que je considère comme le minimum critique et crédible pour un projet continental. Souvent quand les chiffres valsent, on perçoit de suite la faisabilité et la viabilité des multiples projets de conquête de la planète. Et là il ne s’agit que de chaînes d’information. Si on veut des chaînes généralistes ou thématiques comme celles axées sur le sport, il faut avoir les reins solides car c’est un autre niveau de coûts. La télévision est dévoreuse de contenus qui ne peuvent être des plats réchauffés mais frais et cela a un prix. Elle demande aussi des compétences de plus en plus fines et la polyvalence, donc des ressources humaines créatives, à former et à parfaire. Mais comme on le dit chez nous : «Diaka ban gui ku moune rek na nodd» (La mosquée est là que tout muezzin fasse son appel). Je crois en l’écologie médiatique.

Propos recueillis par Seydou Diop, Icône magazine/xalimasn.com

 

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