Cuisine dans les cérémonies familiales : Les hommes prennent le pouvoir

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Il n’y a pas de sot métier. Nourris à cette vérité multiséculaire, beaucoup d’hommes ont investi les cérémonies familiales où ils ont pris la place des femmes dans la préparation des mets. Wal Fadjri est allé à la découverte de cette nouvelle race de cordons bleus qui, à la faveur de la crise économique née des années d’ajustement, ont bousculé les habitudes pour prendre cette place d’habitude réservée au sexe dit faible. Signe d’une mutation sociologique dictée par la mondialisation, le métier, même s’il nourrit son homme, n’est pas une assurance-vie. Exigeant en termes de force physique, il n’est exercé que le temps de la jeunesse. D’où la nécessaire reconversion.

EXPLICATION – LES HOMMES AUX FOURNEAUX : Quand la crise suscite des vocations

Ce n’est pas par passion qu’ils ont choisi d’exercer ce métier jusque-là chasse gardée des femmes. Si les hommes ont investi le milieu, c’est pour fuir les affres du chômage, au grand bonheur de leurs clientes qui en redemandent.

Des jeunes hommes qui cuisinent durant les cérémonies familiales ou religieuses. L’image est devenue banale même s’il est difficile de dater l’apparition du phénomène. Certains le font remonter aux années d’ajustement structurel (1985-1990). Voulant se libérer des griffes du chômage, les hommes cuisiniers de cérémonie se sont imposés dans ce monde où ils ont chassé les femmes des cuisines pour s’y installer durablement. Depuis, ils ont connu succès et estime. Leur cote de popularité a fini de monter auprès de la gent féminine qui ne peut plus se passer de leurs services. C’est au marché de Castors que nous avons rencontré ces hommes cuisiniers.

Bien habillés, ils préparaient tranquillement leur thé en attendant l’arrivée d’un potentiel client. En tout, ils étaient une dizaine dont la moyenne d’âge varie entre 25 et 30 ans. Selon l’un d’eux, Abdou Fall, c’est à cet endroit que ceux qui ont besoin de leurs services viennent les chercher. C’est leur «bureau de main-d’œuvre», en quelque sorte. «Nous n’avons pas besoin de faire le tour des quartiers à la recherche du travail. Nos clientes savent où nous trouver en cas de besoin», informe-t-il.

Pourtant, la plupart d’entre eux ont appris le métier de cuisinier ou de plongeur auprès des femmes cuisinières. Au fil du temps, ils ont acquis un savoir-faire précieux avec lequel ils ont fini par détrôner ces dernières. Leur force physique, leur courage et leur désintéressement par rapport aux aliments destinés à la préparation des repas ont suffi à faire leur publicité. «Ils sont honnêtes et propres. On n’a pas besoin de les surveiller, car ils font leur travail avec beaucoup de sérieux, contrairement aux femmes qui, en plus d’être sales dans leurs façons de travailler, sont cupides. Elles demandent toujours plus d’argent pour se payer des condiments, alors que ce sont elles-mêmes qui se chargent des achats pour le repas», tranche, visiblement en connaisseuse, la dame Mariétou Fall.

Cette commerçante qui a fini par prendre goût aux services de ces «cuisiniers» ne voit pas d’un mauvais œil leur incursion dans le milieu. «L’arrivée des hommes dans le milieu de l’art culinaire est une bonne chose. Ils nous permettent d’accueillir nos hôtes dans de bonnes conditions, car ils sont de fins cordons-bleus».Un point de vue qu’elle partage avec la sage-femme Fatou Niang. Pour cette derrière, afin de réussir sa cérémonie familiale, il est plus que recommandé de louer les services de bons cuisiniers, et de préférence des hommes. «Il est désagréable de convier ses hôtes à une cérémonie et de les entendre se plaindre de la restauration. D’où l’importance de s’attacher les services de personnes capables de satisfaire leurs moindres caprices.

C’est pour cela que j’ai choisi de ne traiter qu’avec les hommes pour la prise en charge alimentaire de mes invités lors de mes cérémonies familiales», révèle-t-elle. Toutefois, contrairement à ce qu’on pourrait penser, la prestation de service des hommes coûte plus cher que celle de leurs «consœurs». Pour une grande marmite de riz, «mbana» dans le jargon, les hommes ne demandent pas moins de vingt-cinq mille francs Cfa. Si c’est le méchoui, c’est trente mille francs. Tandis que, pour les mêmes services, les femmes ne demandent pas plus de quinze mille francs.

Jeune cuisinier de son état, Mamadou Samb explique la différence de prix par le fait que leur service ne se limite pas seulement à la cuisson des repas. Puisque, en plus de la cuisson, ce sont eux qui nettoient la vaisselle avant et après. En plus, les hommes n’ont besoin de l’aide de personne lorsqu’ils cuisinent. C’est pourquoi, ils ne sont pas prêts à faire des concessions sur les prix. Le métier étant exigeant en termes d’efforts physiques, beaucoup envisagent de l’abandonner avant de faire de vieux os. Ils craignent de ne plus être à la hauteur.

Dossier réalisé par Paule Kadja TRAORE

walf.sn

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