Macron-Le Pen: sur la Défense, des programmes dictés par deux visions du monde inconciliables

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La guerre en Ukraine pousse les pays occidentaux à se pencher sur l’état de leurs forces armées et replace au cœur de la présidentielle française l’importance que doit occuper la Défense. Voici ce que proposent les deux candidats qualifiés pour le second tour en la matière.

En février dernier, le rapport de la commission défense de l’Assemblée nationale avait marqué les esprits, indiquant que si la France, septième puissance militaire mondiale, entrait en guerre, elle manquerait de moyens et de munitions au bout de quinze jours.
Des moyens, les deux candidats qualifiés pour le second tour de la présidentielle veulent justement en donner aux forces armées, mais les priorités, elles, diffèrent totalement.

Emmanuel Macron : modernisation et relance européenne

Candidat à sa réélection, Emmanuel Macron entend tenir sa promesse de maintenir le budget de la Défense à 2% du PIB d’ici à 2025. Ce seuil, dépassé en 2020, est un engagement pris par les membres de l’Otan. Il a longtemps fait défaut à la France, et plus largement aux Européens.
Ainsi, en 2022, le budget des armées a été porté à 41 milliards d’euros, en hausse de 1,7 milliard par rapport à 2020. Des augmentations plus importantes encore, de l’ordre de 3 milliards d’euros, sont prévues dès l’an prochain. Objectif : atteindre les 50 milliards dans trois ans.

Dans le prolongement de la Loi de programmation militaire (LPM) 2019-2025 – dite « de réparation et de préparation de l’avenir » –, cette augmentation du budget ira massivement à la modernisation des forces françaises. Une modernisation qui passera par un renouvellement du matériel – 60 chasseurs Rafale supplémentaires, cinq nouveaux sous-marins nucléaires – et un effort porté sur l’innovation, avec le développement de nouvelles armes : « armes électromagnétiques, camouflage optique pour les véhicules de combat, drones sous-marins, missiles hypersoniques, nano-satellites de surveillance spatiale », est-il énuméré dans son programme.

Pour le président sortant, cet accent mis sur la Défense ne se conçoit que dans un cadre européen. La construction d’une Europe de la Défense reste au cœur de son programme. Il l’a encore rappelé le 2 mars dernier, au début de l’invasion russe en Ukraine. Pour la bâtir, l’Union européenne doit « investir davantage pour moins dépendre des autres continents et pouvoir décider pour elle-même ». L’Europe « doit désormais accepter de payer le prix de la paix ». Le sommet européen, convoqué quelques jours plus tard à Versailles, n’a pas accouché d’une véritable révolution : si pour la première fois, des livraisons d’armes – en l’occurrence à Kiev – ont été décidées au niveau européen, la gestion s’est faite au niveau des États.

Mais l’effort sur le long terme, que souhaite appuyer Emmanuel Macron dans un second quinquennat, porte essentiellement sur l’orientation des investissements des Vingt-Sept vers l’industrie européenne de défense. Il y est partiellement parvenu à Versailles : Bruxelles doit présenter, avant l’été, un état de lieux des lacunes et opportunités dans ce domaine. Pour le chef de l’État, le développement de programmes d’armements conjoints comme l’avion et le char du futur (le Scaf et le MGCS) avec l’Allemagne reste la colonne vertébrale de cette stratégie.

Marine Le Pen : conditions des militaires et sortie du commandement intégré de l’Otan

Prenant le contre-pied de son adversaire, Marine Le Pen entend fermer la porte à ces deux projets industriels structurants et milite en faveur d’une « réindustrialisation » militaire en France seulement. « Il faut arrêter la coopération en matière d’industrie de l’armement, parce que ça ne fonctionne pas, déclarait-elle encore la semaine dernière sur BFMTV. La philosophie de l’Allemagne est trop différente de celle de la France pour réussir quelque chose qui soit performant et cohérent. »

Elle souhaite ainsi « le retour à une grande politique nationale de l’armement », passant par des investissements dans le renforcement des compétences au sein de la filière française, et la valorisation des exportations, en dépit « des tentatives des ONG de [les] empêcher ».
Valorisation, aussi, des métiers, et plus largement de l’image des armées : soldes et primes réévaluées, renforcement de l’accompagnement des familles, « amélioration de l’habillement et de l’alimentation », retour aux grandes célébrations militaires… Marine Le Pen choie ici un électorat qui lui est acquis. Avec elle, la « Grande Muette » le sera moins : « Le respect débute par la reconnaissance de l’apport intellectuel des militaires aux débats de la Cité.Les armées françaises doivent pouvoir s’exprimer non seulement sur leur métier, mais aussi sur des domaines plus larges », peut-on lire dans son programme.

De manière générale, à l’instar de son rival, la candidate soutenue par le Rassemblement national souhaite une hausse significative du budget des armées, pour atteindre les 55 milliards d’euros d’ici à 2027. Mais ici, point de nécessité de se conformer aux engagements pris au sein de l’Otan, dont elle souhaite justement quitter le commandement intégré, et ce, dès cette année. Cette proposition phare de son programme figurait déjà dans celui de 2017.

Par ce geste, Marine Le Pen entend mettre la France sur un point d’équilibre entre les États-Unis et la Russie, et au centre dans un monde redevenu « multipolaire ». Et ce, même si la sortie du commandement intégré n’enlève rien aux engagements pris par la France au sein de l’organisation. Elle prône d’ailleurs, une fois « le conflit russo-ukrainien achevé », un rapprochement entre l’Alliance atlantique et Moscou. Une position assumée à la veille du second de tour, mais délicate à tenir dans le contexte actuel, alors que la candidate d’extrême droite fait toujours l’objet de critiques sur ces accointances passées avec le régime de Vladimir Poutine.

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