1.200.000 F CFA pour un P4 à Thiès, 130.000 Fcfa pour de l’encre, 400.000 Fcfa pour une tonne de riz…
Le contrôle de l’échantillon de transactions sélectionnées à partir de la balance auxiliaire des comptes fournisseurs a permis de constater que ces achats estimés à 219.304.741 F Cfa ont été effectués par l’hôpital régional de Thiès sur des bases non concurrentielles et constituent de ce fait des ententes directes non autorisées. « Le fractionnement des achats est quasiment la règle dans la politique d’approvisionnement du Centre hospitalier régional de Thiès. Qui invoque, pour se justifier, les tensions de trésorerie qui empêcheraient toute contractualisation. Alors que cet argument ne saurait prospérer, dès lors que les marchés à commandes ou de clientèle auraient pu être passés », assène l’audit.
Pire, des paiements de prestations non justifiées ont été effectués ou sur la base d’une facture pro forma sans autre support de commande et de livraison. Détournement ? En tout cas, l’audit révèle que les précomptes de Tva sont opérés, mais ne donnent pas lieu à un reversement à l’Administration fiscale.
Comme pour enfoncer le clou, les auditeurs révèlent que des surfacturations ont été notées, lors de l’acquisition de matériel informatique : « cinq ordinateurs P4 ont été acquis à 1.200.000 F Cfa l’unité, soit près de trois fois le prix du marché ; l’encre pour imprimante laser est acheté à 130.000 F Cfa l’unité, soit le double du prix du marché). S’y ajoute que nous n’avons pas pu contrôler l’existence dudit matériel informatique, le chef du Service administratif et financier arguant la multiplicité des machines qui les rendait difficilement identifiables ; ce qui est une illustration des déficiences de la comptabilité matières ». S’ensuit une incertitude sur la réalité de cette acquisition, d’autant plus que la liasse comptable ne comprenait pas de bordereau de livraison. L’achat de riz également a fait l’objet d’une surfacturation, car l’hôpital de Thiès a acheté la tonne de riz à 400.000 F Cfa, alors que le riz parfumé simple est vendu 270.000 F Cfa la tonne, tandis que le riz parfumé de luxe est facturé 330.000 F Cfa la tonne.
A Fann, les auditeurs notent que plusieurs marchés ont été conclus pour des montants plus élevés que ceux auxquels ils ont été attribués au terme de la procédure d’évaluation des offres. Alors qu’aucune disposition du Dossier d’appel d’offres ne prévoit de variation des quantités. Ainsi, sur l’appel d’offres N°1, le lot relatif au gaz médical a fait l’objet d’un contrat de 60.000.000 F Cfa avec Sahel Gaz, alors qu’il a été attribué pour 34.000.000 F Cfa ; un autre contrat a été passé avec Delta Médical pour les 4 lots, dont il est attributaire pour un montant de 31.000.000 F Cfa, là où le cumul des lots qu’il a gagnés se chiffre à 26.008.825 F Cfa etc. Ce constat a été fait sur la quasi-totalité des lots attribués sur l’appel d’offres N°1 et sur les deux lots de l’appel d’offres n°2.
De nombreux produits ayant donné lieu à la conclusion de marchés avec des fournisseurs sélectionnés au terme de procédures concurrentielles sont commandés directement à d’autres fournisseurs, sur la base d’ententes directes non autorisées. C’est le cas pour les produits de biochimie achetés hors procédure concurrentielle auprès de Technologie Services pour un montant de 8.764.500 F Cfa, alors que ces produits ont fait l’objet d’un marché avec la Société diffusion représentation promotion », attributaire du lot N° 4 relatif aux consommables et réactifs de labo-biochimie.
C’est également le cas pour Delta Médical auprès de qui l’hôpital a effectué des achats estimés dans notre échantillon à 5.319.900 F Cfa hors procédure concurrentielle (produits non compris dans les lots 1, 8, 9 et 11 dont il est attributaire). Une exécution anticipée du marché conclu avec la Société Drp et relatif aux lots 4 Réactifs de labo-biochimie et 5 Réactifs de labo-bactériologie de l’Appel d’offres N° 1 a été notée, des livraisons ayant été effectuées avant l’approbation du contrat en violation des dispositions de l’article 44 du Code des obligations de l’Administration. L’examen des offres des soumissionnaires pour le marché relatif aux travaux d’aménagement des Espaces verts et jardins, attribué à Afrique Entreprise et Jardin pour 24.958.504 F Cfa, a permis de constater de nombreuses similitudes laissant entrevoir des manœuvres collusives. D’autant plus que tous les autres soumissionnaires se sont auto éliminés, en cotant au-delà du seuil de passation des marchés par Drp.
Le même constat relatif à la cotation des offres a été fait sur le marché portant travaux d’étanchéité, attribué à Top Negoce pour 24.962.310 F Cfa et pour lequel « nous avons noté, lors du contrôle de l’exécution physique, une surfacturation estimée à 11.801.334 F Cfa (47,28 % du montant du marché), car les surfaces facturées sont quasiment le double des surfaces effectivement couvertes par les travaux », selon les auditeurs. L’examen des offres des soumissionnaires de la Drp portant fourniture de matériel informatique attribué à Assaicha pour 9.921.440 F Cfa a permis de constater que les factures pro-forma présentées par les soumissionnaires sont similaires, laissant entrevoir une collusion. Le même constat de manœuvres collusives a également été fait sur le marché portant mise en place d’un système d’information pour la gestion du Cdim attribué à Info consul pour 11.800.000 F Cfa et pour la fourniture de blouses attribuée aux Etablissements Talla Seck pour 14 868.000 F Cfa.
A Thiaroye, comme dans une comédie
Les marchés portant respectivement sur l’acquisition de matériel informatique et sur l’achat de mobilier hospitalier semblent avoir fait l’objet d’un simulacre de consultation, selon l’audit. Pour le marché relatif à l’acquisition de matériel informatique, les offres techniques de cinq soumissionnaires (Mora Multi Services, Office informatique, Sen Services informatique, Papeterie Sop Nabi, Setrane Sarl) sont quasiment identiques. Leurs factures pro-forma sont, au regard d’un faisceau d’indices concordants, préparées par la même source ou des sources liées, sur plusieurs papiers à en-têtes différents.
Pour le marché portant acquisition de matériel hôtelier, deux soumissionnaires (Gie Lafa, Etablissement Khady Ndiaye) ont la même adresse et la même boîte postale ; deux autres candidats (Immo Medic et Office médical) présentent les mêmes offres techniques. De plus, Immo Medic et Sopasec Sarl ont des factures pro forma similaires. « Ce cumul d’anomalies est une illustration du caractère factice des deux procédures de demandes de renseignement et de prix qui ne sont organisées que pour donner les atours de la régularité », tranche l’audit.
Des achats divers estimés à 4.222.126 francs ont été effectués sur des bases non concurrentielles par l’hôpital (produits de quincaillerie, gaz, câbles, travaux de la réhabilitation du service Eeg, de la Pharmacie et du Hall de Direction). Ces achats ont été tous effectués auprès des Ets Elimane Fall, sans preuve d’une consultation préalable d’autres fournisseurs. Plusieurs paiements estimés à 6.246.920 F Cfa ont été effectués au profit de Mora Multi Services pour la réparation et la maintenance du parc informatique (aucun contrat de maintenance n’a été signé) et l’extension du Réseau informatique. Ce fractionnement des commandes est effectué en violation des dispositions du Code des marchés.
L’audit a aussi constaté que les travaux d’entretien et de réhabilitation de la Division 1, confiés à Atex au terme d’un contrat approuvé le 16 Octobre 2007 pour une durée de 180 jours, n’ont pas été entrepris. Cette situation résulterait d’une décision de la Direction de l’hôpital, qui n’aurait pas souhaité fermer cette Division 1, afin de disposer de capacités d’accueil pour faire face à la forte demande de soins. Un ordre de service prescrivant l’ajournement des travaux n’a pas été servi à l’entreprise pour ordonner leur suspension, en violation de l’article 128 du Code.
Par ailleurs, un avenant (global et forfaitaire) à ce contrat a été signé le 22 Avril 2009, pour des travaux dont la consistance n’est pas étayée par un devis descriptif estimatif en bonne et due forme. S’y greffe qu’aucun ordre de service ordonnant les travaux supplémentaires n’a été pris par la Direction de l’hôpital pour l’exécution desdits travaux. Enfin, un paiement estimé à 12.116.240 F Cfa a été effectué au profit de Cogetra pour l’achat de matériels et mobiliers de bureau sur des bases non concurrentielles, en violation de l’article 75 du Code des marchés sur les ententes directes. Autant dire qu’ils sont vraiment malades, ces hôpitaux !
A Kaolack, on tripatouille tout…
Les auditeurs ont relevé sur plusieurs acquisitions que les montants des offres financières des candidats ont fait l’objet de modifications au moment de la contractualisation, pour les fixer à des niveaux différents de ceux retenus au moment de l’attribution. Dans le cas particulier du lot N° 5 de l’appel d’offres portant acquisition de produits médicaux et relatif aux fils de suture, le soumissionnaire Diahanor a été retenu, alors qu’il n’était pas moins disant. Puisque son offre, non exhaustive par ailleurs, se chiffrait à 92.302.000 F Cfa pendant que celle d’un autre soumissionnaire moins disant se chiffrait à 66.765.600 F Cfa.
L’offre de Diahanor a été modifiée pour passer à 14.800.000 F Cfa. Le même constat a été fait sur le lot N° 7, pour lequel le montant du marché arrêté à 34.500.000 F Cfa est différent du montant de l’offre retenue au terme de la procédure d’attribution, qui se chiffre à 52.955.354 F Cfa, en violation des dispositions des articles 59 alinéa 1 et 9 du Code des marchés relatifs respectivement aux critères d’évaluation des offres et à l’existence de crédits préalables.
Les ambassades de Paris, New-York, Madrid, Genève et la « valise diplomatique » dans le gré à gré
Aux Affaires étrangères, le fractionnement concerne 69% du montant total des Drp (530.949.485 FCFA sur 766.474.868 FCFA). En nombre, cela correspond à 63% des Drp (78 sur 124). Les fractionnements sont effectués non seulement pour plusieurs fournisseurs mais aussi au profit d’un même fournisseur, pour une même nature de dépenses. Mieux ou pire, les services des missions diplomatiques et consulaires n’ont pas requis l’avis préalable de la Dcmp pour les marchés passés à l’étranger, contrevenant ainsi aux dispositions de l’article 148 du Code des marchés publics. Il en est ainsi des travaux de réfection et des acquisitions d’immeubles pour les postes diplomatiques de Paris, New York, Bruxelles, Tunis, Kuala Lumpur, Madrid, Genève.
Mais aussi, l’expédition de la « Valise diplomatique » par la société de messagerie expresse, Dhl ainsi que des prestations d’hébergement et de restauration (conférences, séminaires et congrès internationaux) par le réceptif hôtelier le Méridien Président.
Avenants en série à Saint-Louis
Plusieurs marchés conclus par l’hôpital de Saint-Louis, au terme des procédures d’appel d’offres, sont exécutés dans les mêmes conditions que les marchés à commandes, alors que cette particularité n’est expressément spécifiée ni dans les documents d’appel à la concurrence, ni dans les contrats. Aussi, des marchés ont été conclus pour régulariser des prestations déjà effectuées ou en cours d’exécution, en violation de l’article 44 du Code des obligations de l’Administration. Cette anomalie a été identifiée sur le marché portant acquisition de matériel informatique, pour lequel des indices concordants laissent présager une communication de noms de marque contraire à l’article 7 du Code des marchés ou une collusion, puisque trois candidats offrent exactement le même matériel pour quatre des cinq articles demandés. Cette même collusion a également été notée sur le lot Imprimés de l’appel d’offres portant acquisition de fournitures de bureau consommables informatiques et imprimés…
Des marchés sont conclus pour des montants dépassant les enveloppes budgétaires, en violation de l’article 9 du Code des marchés relatifs à l’existence de crédits préalables. Le contrat relatif à l’installation d’une Centrale téléphonique, conclu le 28 Mai 2009 pour un montant de 6.869.618 F Cfa TTC a, par la suite, donné lieu à la signature d’un avenant le 18 septembre 2009 pour les travaux de câblage d’un bâtiment, non prévus dans le contrat de base (câblage téléphonique du nouveau bâtiment pour 914.205 F Cfa TTC), en violation de l’article 23 du Code des marchés qui interdit la signature d’un avenant, après la réception des travaux ou fournitures. Des marchés sont aussi passés pour des montants différents de ceux auxquels ils ont été attribués au terme de la procédure de sélection l’hôpital, engageant des négociations avec les attributaires pour ajuster les montants des marchés aux crédits disponibles, en violation des dispositions de l’article 69 du Code des marchés qui interdit toute négociation pour les marchés de travaux, fournitures et services autres que les prestations intellectuelles, et de l’article 2 de la directive n°4 / Uemoa sur le respect des principes d’équité et d’égalité des candidats.
Principal « joue » au théâtre
A l’hôpital Principal aussi, c’est la bamboula. Sen Distribution s’est vu octroyer un marché de 24.957.553 F CFA à la suite « d’une procédure de concurrence simulée », selon l’audit. L’examen des offres relatives au marché sur la réhabilitation du nouveau Mess des Officiers, attribué à Sbcs pour 23.660.162 F CFA a permis d’identifier de nombreuses similitudes entre les offres des différentes entreprises ayant participé à la consultation (Sen distribution, Sbcs, Esbtp, Georges Soumah, Senegal negoce international) qui laissent présager, soit une simulation de la part de l’autorité contractante, soit une collusion entre fournisseurs. Les mêmes entreprises qui ont participé à cette opération se retrouvent encore pour les marchés portant réhabilitation de la Clinique Brévié, les travaux de peinture de la Pharmacie, toujours pour la plupart attribués à Sen Distribution pour des montants respectifs de 9.907.550 F CFA et 3.886.920 F CFA. Une autre caractéristique commune à tous ces marchés est que le délai de dépôt des offres est toujours anormalement court (4 à 5 jours), délai ne permettant pas une sérieuse préparation des offres. Les tests et sondages effectués sur un échantillon sélectionné à partir de la balance auxiliaire des comptes fournisseurs ont permis, selon l’audit, de noter que des marchés de gré à gré ont été effectués pour un montant estimé à 82.559.171 F CFA.
Collusion frauduleuse à Dantec
A l’hôpital le Dantec aussi, ça sent mauvais. Des entreprises en collusion avérée sont consultées par l’Hôpital et les factures pro – forma produites en réponse aux dites consultations sont, au regard d’un faisceau d’indices concordants, préparées par la même source ou des sources liées sur plusieurs papiers à en-têtes différentes. Elles sont présentées de la même façon, les mêmes caractères sont parfois utilisés, les mêmes fautes commises, le même numéro de Ninea utilisé par des entreprises aux dénominations sociales différentes (Afrobiz International et O’rizon, Mondial Contact Services et Sctdf Sarl , Queen Sénégal et Papa Arfang Sarr). Les anomalies notées laissent présager des procédures de Demandes de Renseignement et de Prix qui semblent avoir été organisées dans le but d’octroyer les marchés à des fournisseurs préalablement désignés, donc en l’absence de toute concurrence réelle.
Hoggy bat au rythme du gré à gré
A l’hôpital général de Grand Yoff, l’audit signale que le contrôle de l’échantillon de transactions sélectionnées à partir de la balance auxiliaire des comptes fournisseurs a permis de constater que des achats estimés à 71.729.148 F CFA ont été effectués sur des bases non concurrentielles, et constituent de ce fait des ententes directes non autorisées. Sous ce rapport, il faut également souligner que les mêmes natures d’opérations font l’objet de multiples achats fractionnés, dont les montants cumulés dépassent largement les seuils de passation des marchés par appel d’offres.
Un avenant de 62 millions F CFA au marché portant sur la fourniture de poisson a été conclu sans autorisation préalable de la Dcmp en violation des dispositions de l’article 138 du Code des marchés. Le même constat a été observé pour le marché portant sur les denrées alimentaires, reconduit par avenant sans autorisation préalable pour un montant de 145 millions F CFA. Le marché portant sur les travaux de réhabilitation de la salle d’angiographie a fait l’objet d’une relance. La Commission ayant à tort décidé de ne pas procéder à l’ouverture des plis, arguant qu’un seul pli a été reçu à la date limite des offres. La Drp portant fourniture de matériels d’endoscopie a été attribuée pour 14 980.200 F CFA à Ste, sur la base d’un critère dit du « mieux disant » au détriment du candidat Sdm qui a présenté l’offre conforme évaluée la moins disante, en violation de l’article 77 du Code des marchés.
CMG
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