Contrôle technique des véhicules automobiles : De l’opacité dans la mécanique

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Un des mécanismes de lutte mis en place par les autorités publiques pour lutter contre les accidents de la route et améliorer la qualité de l’air à Dakar est le Centre de contrôle technique des véhicules automobiles (CCTVA). Ce dernier fait même la fierté des usagers. Mais, face à la recrudescence des accidents au Sénégal – plus de 50 morts à l’espace de moins d’un mois – des voix s’élèvent pour s’interroger quant à l’efficacité du contrôle: «que vaut le centre de contrôle de Dakar ? Pourquoi le projet d’extension tarde toujours à se matérialiser ?»

En attendant d’obtenir quelques éléments de réponses, la liste des accidents mortels se suivent et se ressemblent chaque week-end. Pendant ce temps, une véritable chaîne de nébuleuse et d’opacité s’est installée autour du CCTVA, mettant en doute le contrôle technique. Dépassant largement sa capacité d’accueil, les machines de contrôle sont usées remettant en cause la fiabilité du résultat. Que dire du business autour du centre où plusieurs jeunes et des courtiers «aident» les automobilistes à remplir les conditions requises pour passer convenablement sa visite technique.

CAPTEUR SOUDE, CRAMPONS DES MACHINES ET ROUES DE FREINAGE  TRES USES… : La fiabilité du résultat du CCTVA en cause

Les machines du Centre de contrôle technique des véhicules automobiles (CCTVA) gérées par le Bureau Veritas, ne tiennent plus face au grand rush des voitures. De 300 à 400 véhicules par jour, le centre accueille, depuis décembre 2013, environ 1200 automobiles par jour. Il dépasse largement sa capacité d’accueil, mettant en doute la qualité de la visite technique des véhicules. Par conséquent, le constat tiré par les agents du bureau est amer: le capteur est soudé, les crampons des machines très usés, tout comme les roues de freinage.

Alors que la presse n’a pas encore fini d’épiloguer sur le récent rapport de la Direction de la Protection civile qui fait état de 651 individus emportés par les accidents de route l’année dernière, l’année 2017 commence à compter ces morts. Le bilan est lourd: plus de 50 morts. En atteste, il y a quelques semaines, 17 personnes avaient péri dans un accident entre un minibus et un camion-citerne dans la localité de Malem Hodar, le 26 janvier. Sur le chemin du retour du magal de Porokhane, 14 morts ont été enregistré à la suite d’une collision entre un bus et un car «ndiaga-ndiaye». Moins de 48 heures après, Saint-Louis enregistre 18 morts dans une collision entre un car de passagers et un camion-citerne. Quid du week-end dernier qui a vu une dizaine de personnes périr dans des accidents à Bignona, Thiès et Sédhiou ? (Voir par ailleurs)

Bref, l’année 2017 est déjà macabre. Suffisant pour faire sortir le président de la République de ses gonds. Macky Sall dit avoir dépassé les limites en matière de tolérance et le moment est venu de prendre toutes les mesures que requiert la situation. Poursuivant son argumentaire, Macky Sall met les pieds dans le plat. «La saignée sur les routes doit s’arrêter. Nous avons dépassé les limites en matière de tolérance». Macky Sall qui a présidé la traditionnelle cérémonie de levée des couleurs, le lundi 6 mars dernier à la Place Faidherbe de Saint-Louis, a annoncé des mesures hardies contre cette «saignée» sur les routes du Sénégal.

MACKY MET LES PIEDS DANS LE PLAT

Pour le président de la République en tournée économique dans la région nord, il est temps également de, «le moment est venu de prendre toutes les mesures que requiert la situation, d’une part vis-à-vis du parc automobile sur la nécessité de veiller momentanément à l’arrêt de ces véhicules qui, présentement, ne devraient jamais disposer de visites techniques leur permettant de circuler et de transporter des personnes». Selon lui, il est temps également de «revoir les visites techniques avec une rigueur extrême, de voir également avec les professionnels, les transporteurs eux-mêmes, les chauffeurs à travers leurs associations et l’administration sous des modalités, des mesures seront prises puisque cela ne peut plus continuer». Donc le président demande expressément de revoir les visites techniques avec une rigueur extrême.

VERITAS ANNONCE INJECTER 84 MILLIONS F CFA DANS LA MAINTENANCE PREVENTIVE ET L’ETALONNAGE DES EQUIPEMENTS LES 6 DERNIER MOIS

Pour arrêter cette hécatombe sur les routes, le gouvernement libéral avait mis sur pied le Centre de contrôle en confiant la gestion au bureau Veritas, avec comme mission principale, renforcer la sécurité routière et la qualité de l’air à Dakar. De juin 2012 à décembre 2016, Veritas a réalisé plus d’un million de contrôles avec un taux de contre visite global moyen de 36%, indique le Bureau Veritas dans un publireportage paru dans le quotidien nationale Le Soleil. Selon l’entreprise, ce taux moyen de contre-visite a baissé en 2016 à 32%. Et, dans le souci d’assurer le fonctionnement régulier des installations techniques mises à sa disposition, Veritas a injecté, de juin 2012 au 31 décembre 2016, 84 millions F Cfa dans la maintenance préventive et l’étalonnage des équipements.

LES OBJECTIONS DES AGENTS: LES MACHINES DE CONTROLE DES 8 LIGNES NE TIENNENT PLUS

Des informations qui sont loin d’être partagées par les agents du bureau Veritas. Ils font un constat amer sur les installations techniques du centre qu’ils jugent défectueuses. Selon des agents du bureau Veritas, les machines de contrôle des 8 lignes ne tiennent plus du fait de la grande affluence des véhicules. Selon eux, les capteurs de machines de contrôle sont soudés, les crampons très usés, tout comme les roues de freinage. Par conséquent, la fiabilité du contrôle est sujette à équivoque. «Le matériel de contrôle est usé. Beaucoup de voitures en règles, sans problème, risquent de revenir. Les machines de contrôle ne sont plus fiables», nous informe-t-on.

LA CONTRE-VISITE, UNE ASTUCE POUR SE FAIRE DE L’ARGENT

Poursuivant leur argumentaire, les agents, débités par le volume horaire de travail que leur impose l’entreprise – du lundi au vendredi de 7h à 20h et le samedi de 7h à 17h – signalent que les «responsables du bureau Veritas nous obligent à renvoyer plusieurs véhicules pour se faire de l’argent. La contre-visite oblige le propriétaire d’un véhicule à payer encore. Donc, ils se font de l’argent sur le dos des sénégalais». Et de poursuivre: «on est fatigué de charges horaires du bureau Veritas. Nous bossons même les samedis pour permettre aux véhicules de passer leur visite technique. Le débordement des véhicules jusqu’au pont de Hann s’explique par notre manque de motivation».

CENTRE DE CONTROLE TECHNIQUE CCTVA DE HANN : Dans l’enfer du quotidien des visiteurs

Au moment où les accidents de la circulation se multiplient, coûtant la vie à des centaines de personnes chaque année, la problématique de la visite technique revient et se pose avec acuité. La responsabilité humaine et les défaillances techniques étant les principales causes de ces accidents. Un tour au Centre de contrôle technique des véhicules automobiles (CCTVA) permet de constater le quotidien difficile des automobilistes qui viennent chaque jour passer des visites techniques. Au CCTVA, les propriétaires des véhicules sont obligés de s’armer de patience pendant que des jeunes leur proposent leur aide pour les formalités et conditions à remplir pour passer convenablement sa visite technique.  Reportage.

A hauteur du pont de Han, un long fil de véhicules automobiles attire l’attention des usagers de l’autoroute et de l’axe Capa Front de Terre. Il s’agit de voiture dont les visites techniques sont arrivées à termes ou qui en sont à leur première visite. Ce long fil s’écrase devant le portail du Centre de contrôle technique des véhicules et automobiles (CCTVA). Des jeunes, quelques accessoires de véhicules en main, se faufilent entre ces automobiles pour proposer leur service à ces candidats à la visite technique. Un vacarme total au long de la route des Maristes. Il est 15heures passées. Les chauffeurs de camions, de taxis et des véhicules particuliers doivent garder leur mal en patience pour espérer obtenir le fameux quitus communément appelés macarons.

Bref au CCTVA de Hann, le décor est campé. Devant le grand portail du centre, c’est un tohu-bohu total. Il faut d’abord passer au guichet pour payer 7000 F Cfa, en plus d’un timbre à 2200 F Cfa pour entrer dans le centre. Une fois dans l’enceinte du CCTAV aussi, c’est un vrai parcours de combattants. Les visiteurs doivent encore garder leur mal en patience. Car, ici également, c’est le long fil indien qui tape à l’œil. Trois rangées sont constituées pour les différentes catégories de véhicules.

Après une petite visite du centre, nous constatons un lot de machines parquées juste à côté. C’est pour un entretien, nous dit-on.  Une des causes certainement des lenteurs notées dans le travail de contrôle. «Il faut plus de 30 minutes pour diagnostiquer une voiture», nous signale notre interlocuteur. Avant d’ajouter: construit pour accueillir «400 véhicules par jour, le centre dépasse les 1000 par jour, actuellement. Ce qui fait que le personnel et les machines n’en peuvent plus».

Suffisant pour soulever l’ire des visiteurs qui perdent trop de temps. «Tu vois, parfois un véhicule qui n’a pas fait la queue, se retrouve devant nous autres, pour la visite technique. Tu comprendras que l’agent du centre a reçu de l’argent pour le faire faire entrer. C’est frustrant pour nous qui sommes venus depuis 5 heures du matin pour la visite technique», dénonce un chauffeur.

LE BUSINESS DES COURTIERS

Le malheur des uns fait le bonheur des autres. Cet adage pourrait bien s’appliquer au CCTVA. Des jeunes qui travaillent aux alentours du centre trouvent leur compte dans cette longue attente. En effet, c’est un véritable commerce qui s’est installé au tour du long fil de voitures en attente. Tour ceux qui ont des problèmes techniques peuvent se rapprocher de ces jeunes qui peuvent leur vendre des accessoires et parfois même les louer. Le temps d’un passage pour obtenir une vignette. Bref, ils sont nombreux à aider les véhicules à réussir cet examen, moyennant une somme bien sûr, en leur permettant de compléter les éléments indispensables pour obtenir son «macarons».

Alioune Lèye et Mamadou Ba, deux jeunes mécaniciens, louent des accessoires aux visiteurs, le temps du contrôle technique. Il s’agit, par exemple, de triangles ou d’extincteurs… «Nous aidons les gens qui ont des problèmes de frein ou de parallélisme avant la visite», nous précise l’un deux. Comme tout travail non réglementé, les deux jeunes sont souvent contraints de déjouer la vigilance des gendarmes. «Les gendarmes nous interdisent de vendre ces triangles et extincteurs aux visiteurs qui n’en ont pas», disent-ils.

Quid des courtiers qui peuvent faire du porte-à-porte, entrer de bureaux en bureaux pour obtenir tous les pièces nécessaires sans que l’intéressé n’ait à se déplacer ? Moyennant motivation, bien sûr.

Sud Quotidien

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