Les ex-rebelles ivoiriens des Forces nouvelles (FN), qui tiennent le nord du pays, ont pris vendredi la localité de Zouan-Hounien, dans l’ouest, dans une zone sous contrôle du gouvernement du président sortant Laurent Gbagbo, a-t-on appris de sources concordantes. Dans cette localité proche de la frontière libérienne, des combats avaient opposé jeudi éléments de l’ex-rébellion, alliée à Alassane Ouattara, reconnu chef d’Etat par la communauté internationale, et Forces de défense et de sécurité (FDS) fidèles à M. Gbagbo. Vendredi, les éléments FN occupaient « toute la ville », a témoigné un habitant, interrogé par téléphone depuis Abidjan.
Un responsable des FDS dans la zone a confirmé la prise de la ville par le camp adverse, assurant qu’il s’agissait d’un « repli tactique » des forces pro-Gbagbo. Toutes les unités FDS prépositionnées sur l’ancienne ligne de front coupant d’ouest en est le pays depuis les affrontements de 2002-2003 sont « en état d’alerte », a-t-il ajouté.
L’ONU DANS LE VISEUR
Plus tôt dans la journée, Charles Blé Goudé, ministre et chef des « patriotes » partisans de Laurent Gbagbo, avait appelé les jeunes à « s’organiser en comités pour empêcher par tous les moyens », la force de l’ONU dans le pays de circuler, s’adressant à quelque 3 000 personnes dans le quartier pro-Gbagbo de Yopougon. « Aujourd’hui ce ne sont pas les rebelles qui nous font la guerre, c’est l’Onuci qui nous la fait », a-t-il affirmé, appelant à créer des « comités d’autodéfense dans les quartiers ». « Il faut éviter de tomber dans le piège de la guerre civile », a-t-il toutefois déclaré. « C’est le piège que nous tend l’ennemi. Je ne veux pas qu’à leur casse vous répondiez par la casse », a dit le ministre de la Jeunesse de Laurent Gbagbo.
La réunion publique s’est terminée dans une ambiance houleuse, et Charles Blé Goudé a été chahuté à sa sortie. Des militants ont manifesté leur colère, réclamant un mot d’ordre d’aller combattre le camp Ouattara. « On veut libérer, on veut libérer, on veut se battre ! », criaient certains. « Nous sommes dans nos quartiers en train de souffrir et lui nous parle d’être calmes, c’est de la foutaise ! On veut aller assiéger l’Onuci. On va mourir, c’est vrai, mais on va libérer notre pays! », a expliqué à l’AFP un groupe de jeunes militants.
Dans un communiqué publié à l’issue du conseil des ministres de jeudi, le gouvernement Gbagbo a dénoncé « l’attitude complice des forces onusiennes » dans « l’infiltration » de « rebelles » dans plusieurs quartiers d’Abidjan. Le camp Gbagbo réclame depuis décembre le départ de l’Onuci, qu’il accuse d’avoir pris parti pour son adversaire. Le secrétaire général des Nations unies Ban Ki-moon a « fermement déploré » ces menaces. « Le secrétaire général déplore fermement les menaces proférées par le camp de Monsieur Gbagbo à l’encontre des Nations unies, y compris l’appel récent d’entraver à partir d’aujourd’hui (vendredi) les mouvements des casques bleus à Abidjan », a-t-il dit, cité par son porte-parole Martin Nesirky. « Il exige la cessation immédiate de ces menaces et des obstructions aux activités des casques bleus, notamment leurs efforts visant à protéger la population civile », a-t-il ajouté.
LEMONDE.FR avec AF