Après l’exclusion de Idrissa Seck du Pds, les réactions de ses militants, ceux de l’ex-Rewmi, n’ont pas tardé. Cheikhou Cissé, membre de la première heure de la section Rewmi à Kédougou dénonce dans cet entretien le fait que le Pds n’a pas rendu à son leader la monnaie de sa pièce. Mais à quelque chose malheur est bon, il voit à travers cette exclusion un moyen pour Idrissa Seck de mieux s’affirmer face aux Sénégalais.
Comment appréciez-vous l’exclusion de votre leader des rangs du Pds ?
C’est un sentiment de mécontentement et de frustration. Nous savons tous le parcours du président Idrissa Seck dans ce parti. Lui aimait à répéter que si le Parti démocratique sénégalais (Pds) était une entreprise, il en était l’actionnaire majoritaire. Cela veut dire tout simplement qu’il a fait tout son parcours politique dans le Pds. D’ailleurs, le Président Wade aime aussi à rappeler que depuis son adolescence, il a tout donné au Pds. Cependant, ce que le Président retient, c’est seulement la partie où il a aidé Idrissa Seck à se faire du point de vue intellectuel. Mais peut-être qu’il a oublié l’autre partie, c’est-à-dire le sacrifice, le don de soi et le travail consentis par Idy dans et pour le parti, jusqu’à son élection à la Magistrature suprême en 2000. Et être exclu par des gens qui sont pour la plupart des militants de la dernière heure.
Ce sont ces derniers qui se sont réunis autour d’un Conseil national qui n’a pas une certaine légalité, une certaine base juridique pour décider de son exclusion. C’est un sentiment de peine que nous éprouvons à l’endroit du «frère» Idrissa Seck. Mais aussi un sentiment de soulagement, parce que les gens voulaient véritablement qu’il quitte le parti pour voler des ses propres ailes. Il en a les capacités et le charisme.
Après tant d’efforts consentis pour ce parti, il se voit aujourd’hui exclu. N’est-ce pas un échec de sa part ?
Heu ! C’est-à-dire, l’échec incombe à ceux qui l’ont exclu. Il dit depuis, qu’il n’a jamais trahi, qu’il n’a jamais quitté le Pds, que le Pds est son élément naturel. Si les gens l’excluent du Pds, c’est à eux de se poser des questions. Ils doivent se demander pourquoi avoir exclu un membre aussi influent que Idy. Ils se disaient certainement qu’en retournant au Pds, il allait limiter les ambitions de Karim Wade dans la course à la Présidence.
Je fais partie de ceux qui pensent que le Pds dont parle Idy est un Pds «idyllique». C’est un Pds virtuel qui n’existe que de nom, qui comprend des transhumants de la dernière heure qui véhiculent des valeurs contraires aux valeurs du Sopi.
D’ailleurs le constat est là. Les jeunes générations disent Y’en a marre. Ce Sopi n’est plus le Sopi auquel les gens s’attendaient en 2000. Je pense qu’il a eu quand même tort de s’accrocher à ce Pds. Je sais qu’il y a une part affective dans cette manière de procéder qui a été excessive. Néanmoins, nous militants de la base, nous lui réaffirmons notre soutien. Nous lui disons qu’il n’a rien à regretter de cette séparation, car séparation il y’en avait déjà. Il faut se demander d’ailleurs quand il parle du Pds, de quel Pds s’agit-il ? Un Pds qui ne vous convoque pas, vous ne participez pas à ses instances, vous ne participez pas non plus à ses activités, votre avis n’est pas sollicité dans certaines circonstances. Donc de quel Pds nous parlait-il ? C’est certainement le Pds affectif logé quelque part dans son cœur qu’il espérait revoir vivre.
Mais les gens restent toujours sceptiques. Par conséquent que devrait être la conduite de Idrissa Seck après tout ce qui vient de se passer ?
Une conduite de rupture par rapport à cette famille libérale. Nous sommes à un tournant de l’histoire politique sénégalaise. Le temps de Wade est dépassé, il faut tourner cette page.
C’est ce que Bennoo a compris d’ailleurs en initiant les Assises nationales. Pour dire qu’il était temps pour un Sénégal de rupture parce que véritablement les 11 ans de l’Alternance ont complètement altéré les pratiques, les mœurs, les pratiques politiques et de gouvernance dans ce pays. Donc, l’attitude de Idrissa Seck à mon avis doit être une attitude claire, responsable et courageuse. C’est à dire revenir au Rewmi et mobiliser autour. Fondamentalement, je suis de ceux qui militent pour cela.
On reproche à votre leader de ne pas communiquer, de se suffire à lui-même. Qu’est-ce qui peut justifier un tel comportement ?
On pourrait lui reprocher cela. Mais, à l’analyse, on pourrait comprendre son attitude. N’oubliez pas que c’est quelqu’un qui a fait l’objet de poursuite judiciaire, d’emprisonnement etc. Donc, son moindre geste est surveillé. Imaginez-vous qu’il veuille faire face à la puissance étatique. On pourrait comprendre son attitude. C’est un peu cela ma compréhension. On peut le comprendre même si nous ne pouvons pas le pardonner. Je dis qu’il est temps qu’il communique avec la base. Comme je le dis, il n’y a que peu de gens qui peuvent comprendre sa conduite mais pas la majorité.
On a comme l’impression que le problème de Idrissa Seck est la dévolution monarchique du pouvoir à Karim Wade et l’anti-constitutionnalité de la candidature de Wade…
Oui ! En fait, Abdoulaye Wade a déjà posé des jalons pour aller à la Présidentielle de 2012. Et là, il s’agit d’un rapport de forces. Je pense que Idrissa Seck est déjà dans cette dynamique. Il faut nécessairement que toutes les forces démocratiques de ce pays s’unissent pour amener le Président Wade à ne pas se présenter à ces joutes électorales. Idy a essayé dans le Pds de contrecarrer le troisième mandat que veut briguer le président de la République. Il n’a pas pu le faire. Il a été exclu. La dévolution du pouvoir est également en marche parce que Karim Wade a tous les pouvoirs dans ce pays. C’est le fils du Président. Soit on est avec lui soit on est contre lui. C’est la règle du jeu. Donc, comment combattre ce projet ? Cela ne sera pas, en tout cas à l’intérieur du Pds. On sort du Pds pour tendre la main aux autres forces vives de la Nation afin d’amener Wade à quitter le pouvoir.
Comment comptez-vous rassembler, ramener tous ces gens qui ne croient plus en votre leader ?
Idy a la chance d’être un homme charismatique. Quelqu’un me disait : «Si vous ne voulez pas être convaincu par Idy ne l’écoutez pas.» C’est dire son charisme. Nous avons besoin de ce charisme. Même l’opposition actuellement a besoin de ce charisme et est à la recherche de cet homme. Et Wade a campé sans le savoir le profil du candidat. Il a dit que, celui qui doit le succéder doit être courageux. On retrouve ce courage chez Idy. Celui qui doit le remplacer doit être populaire, on retrouve cette popularité chez Idy. Qui est plus populaire que Idy, qui a drainé tout récemment des foules à Diourbel, Kaolack ? Il doit être intelligent. Je pense véritablement qu’en parlant d’intelligence, on ne saurait vraiment faire abstraction de lui. C’est un homme qui a également la foi. C’est vrai qu’il y a eu beaucoup de militants qui étaient découragés par son attitude de vouloir coûte que coûte prospérer dans le Pds. Il y’a beaucoup de militants qui ne pouvaient pas le suivre dans cet élan-là. C’est le moment de réconcilier les cœurs et de tendre la main à l’opposition, pour lui dire que nous partageons le même combat. Qu’on ne veut plus d’un Président super puissant qui mène le pays par le bout du nez.
En parlant d’opposition, est-ce qu’on peut s’attendre à ce que Idrissa Seck rallie les rangs de Bennoo ?
C’est vrai qu’il y a des relations assez difficiles entre Idrissa Seck et l’opposition, mais cela se comprend. Il y a une sorte de jalousie, il faut le dire. Idrissa Seck, c’est quelqu’un qui a un certain charisme qui pourrait venir bouleverser tout de suite la donne politique au niveau de l’opposition. Mais, il n’est pas exclu qu’ils s’allient.
Certainement, il va aller seul à l’élection. Mais un deal peut être noué avec cette opposition pour les besoins d’un second tour. Aussi pourquoi ne pas prendre les conclusions des Assises nationales et voir s’il y a des choses intéressantes pour se les approprier. Ce sera une manière de tendre la main à l’opposition, même si cette même opposition est très méfiante vis-à-vis de Idrissa Seck. Au regard de son parcours, on sait que c’est quelqu’un qui s’est tout le temps battu pour des valeurs démocratiques.
lequotidien.sn
nous avons le meme sentiment; et nous sommes d’accord sauf sur un point, IDY a toujours ete clair sur sa position sur ses objectifs et las il faut toujours insister