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La gestion de la cité à travers les enseignements du prophète Mouhammad SAW (par Dr Assane Ndieguene )   

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Le Sénégal est doté d’atouts majeurs sur le plan humain, environnemental et spirituel. Parmi ces atouts, nous pouvons citer une population relativement jeune avec un âge médian de 19 ans [1], des côtes d’environ 531 km, le fleuve Sénégal, une importante quantité de pétrole et de gaz même si les chiffres et les probabilités avancés ne sont pas encore précis, des terres fertiles, du soleil presque toute l’année, des matières premières, un potentiel religieux important, etc.

Aujourd’hui, présent dans toutes les sphères de la société sénégalaise, la gestion de la cité est devenue un véritable casse-tête dans tous les sens du terme tant sur le plan social, économique et spirituel. Ce qui est déplorable, car elle devrait être le fondement d’une société prospère dépourvue de manipulations, de mensonges, d’inégalités, de tromperies et d’autres bassesses. Tout ceci va à l’encontre de principes religieux fondamentaux dont le Sénégal est censé être un porte-étendard en Afrique de l’Ouest avec 94% de musulmans, 5% de chrétiens et 1% de croyances traditionnelles. En plus de ces principes, notre société a hérité de génération en génération de valeurs culturelles et traditionnelles qui exercent leur influence dans les décisions politiques.

Il ne s’agit pas de poser un débat sur la laïcité ici en sachant que tout le monde est d’accord sur le fait que les pouvoirs religieux, culturels et politiques se sont toujours liés dans la gestion de la cité. Dans cette réflexion, nous souhaitons comprendre le pourquoi du délaissement systématique des bonnes valeurs que nous inculque la religion par les principaux acteurs politiques. De même, il sera question de montrer comment les enseignements de la gestion de la cité par l’islam pourraient apporter des solutions morales et éthiques à ce problème à travers des exemples concrets.Notre société est en perte de vitesse en matière de référence. Et pourtant, nous avons un modèle sur qui s’appuyer tant ses caractéristiques dans tous les sens du terme sont un exemple de réussite spirituelle ultime à travers un génie politique qui a fait ses preuves durant l’établissement de la religion musulmane au 7e siècle. Le prophète Mouhammad SAW est donné en exemple par Allah SWT en ces termes : « En effet, vous avez dans le Messager d’Allah un excellent modèle [à suivre], pour quiconque espère en Allah et au jour dernier et invoque Allah fréquemment. [S33-V21] ».  

Avant toute chose, il est important de situer le langage politique de l’islam. Les versets mecquois ont plutôt des orientations eschatologiques comparées aux versets médinois qui eux ont des orientations plutôt normatives donc plus enclins à avoir des liens avec des aspects stratégiques et politiques. Nous parlons ici de paix, de stabilité, d’harmonie, de cohésion sociale, de bons comportements et d’entraide. Il faut souligner aussi que ce sont des combinaisons d’actions successives qui pourraient laisser envisager ou non de la nature politique de telles actions. Pour faire référence à la politique, le terme siyâssa est souvent employé. Ce mot a été utilisé à l’origine dans les sociétés bédouines pour désigner l’art de dompter les chevaux ou les chameaux et s’est transformé en art de gérer les affaires ou une communauté avec le temps. Il est important de souligner qu’on ne trouve aucune trace de ce mot dans le coran.Une politique basée sur l’ouverture d’esprit et la coopération.

Le prophète Mouhammad a dû mettre en place des stratégies politiques dès les premières années de l’établissement de la religion musulmane. En effet, les débuts de l’islam furent sombres, voire chaotiques, à cause d’une persécution jalonnée de tortures infligées aux premiers musulmans et aux nouveaux convertis. Ces exactions étaient perpétrées par les puissantes familles de la Mecque dont celle du prophète Mouhammad elle-même, les Quraysh ne pouvant guère accepter cette nouvelle religion qui allait sans doute bouleverser leur mode de vie et de pensée. Les atteintes portées contre la personne du prophète Mouhammad et ses compagnons devenaient de plus en plus virulentes (insultes, moqueries, humiliations, traîtrise, persiflages, perfidies, etc.). Mouhammad, voyant sa situation et celle des premiers musulmans se dégrader sous l’emprise des menaces incessantes de ses ennemis vers 615, leur demanda d’émigrer vers la terre d’Abyssinie (Éthiopie actuelle) jusqu’à ce qu’Allah leur apporte un soulagement. À l’époque, le roi d’Abyssinie ou An-Najashi (Négus), était un homme sage, honnête et juste avec des convictions religieuses (christianisme) très profondes. Une fois sur place, les premiers immigrés musulmans et les émissaires mecquois eurent droit à un jugement devant le Négus.

Celui qui prit la parole pour les musulmans est Jafar ibn Abu Tâlib, cousin de Mouhammad, qui récita les premiers versets de la sourate 19 du coran. À travers ces versets, Jafar ibn Abu Tâlib démontra toute leur connaissance du prophète Insa ou Jésus HS devant un roi ému, les larmes aux yeux. Que dire de la honte qui s’est abattue sur les émissaires mecquois quand le Négus leur fit savoir que les paroles citées par Jafar et celles qui furent révélées à Insa provenaient de la même source? Ce fait marque le premier dialogue islamo-chrétien et la première migration des musulmans (réfugiés politiques) constituant ainsi un acte qui montre que la politique n’était pas quelque chose d’inconnu chez l’élu. Le fait de demander de l’aide est un signe d’ouverture d’esprit, de coopération et d’entraide interreligieuse mais aussi une stratégie politique qui portera ses fruits plus tard. L’islam des premières heures marcha sur un chemin de résistance où il a fallu user de différents moyens pour se défendre, résister, conquérir, annexer et s’étendre à l’aide de stratégies politiques efficaces.Une politique basée sur l’unité et la cohésion sociale pour la paixL’unité des musulmans à travers le message de Mouhammad, est d’une importance capitale, car Allah nous dit : « Ô les croyants! Craignez Allah comme il doit être craint. Et ne mourez qu’en pleine soumission. Et cramponnez-vous tous ensemble au «?abl» (câble) d’Allah et ne soyez pas divisés; et rappelez-vous le bienfait d’Allah sur vous: lorsque vous étiez ennemis, c’est Lui qui réconcilia vos cœurs. Puis, par Son bienfait, vous êtes devenus frères. Et alors que vous étiez au bord d’un abîme de feu, c’est Lui qui vous en a sauvés. Ainsi Allah vous montre Ses signes afin que vous soyez bien guidés. [S3-V102-105] ». Un ordre est donné aux croyants d’être toujours unis et de ne jamais laisser la discorde régner parmi eux en citant une référence symbolique à savoir la tribu des Aws et des Khazrajs ainsi que leurs alliés. Ces deux tribus principales de Médine qui étaient ennemis avant l’islam, se livraient continuellement bataille et gardaient perpétuellement de la rancune l’une envers l’autre depuis plus d’un siècle.

En plus de ces deux tribus yéménites, Médine était aussi habité par des tribus juives dont principalement les banus Qaynuqa alliés des Khajrajs et les banus Nadhir et les banus Qurayza qui eux étaient alliés des Aws. Nous pouvons donc supposer que ramener la cohésion sociale et la paix au sein de Médine ne devait pas être une mince affaire. À l’avènement de l’islam, ils adhérèrent à cette religion en masse et de ce fait, ils devinrent des frères, conférant par la même occasion le titre de chef de Médine à Mouhammad. En usant de stratégies politiques sous la bannière de l’islam, la meilleure des créatures a pu réunifier les deux tribus jadis ennemies. Afin de pérenniser l’entente entre les tribus, vers l’an 622, un pacte en 60 points entre les émigrés (Mouhadjir) qui ont accompagné Mouhammad à Médine, les habitants de Médine qui ont embrassé l’islam (Ansar) et les tribus d’origine juive fut mis en place. Désormais, à travers ce pacte, tous les croyants de Médine, y compris les juifs qui ont précédé les Khazrajs et les Aws à Médine, forment une seule communauté qui se doit solidarité, soutien et entraide, scellant ainsi la cohésion sociale et la paix à Médine. En bon stratège, Mouhammad avait compris que ce n’est que sur cette base qu’Il pouvait construire un état solide à Médine. Dans la continuité, Médine deviendra une base arrière dans la projection de la conquête de la Mecque. Une politique éducative pour inculquer de bons comportements à l’humainLa réussite de l’implémentation de la cohésion sociale à Médine est avant tout le fruit d’un travail titanesque qui a permis d’inculquer aux hommes une crainte révérencielle envers Allah. Cette crainte révérencielle est une soumission dictée par la crainte en elle-même.  

Le plus important pour l’homme est de craindre le Créateur et non la création qui est une partie intégrante du Créateur. L’entité qui fait partie de la création sera jugée et non le Créateur.  En même temps, nous sommes tous inclus dans l’entité du Créateur, car Il est Tout et Il ne ressemble à rien que nous ne pouvons imaginer. Ce qui veut dire que ce n’est ni ton rang social, ni ton grade, ni ton apparence, ni tes biens, ni ton pouvoir éphémère qui est plus important auprès du Seigneur, mais plutôt le degré de pureté de ton cœur et de tes actes. Malheureusement, dans notre société actuelle, la crainte révérencielle envers Allah est reléguée au second rang au détriment des plaisirs éphémères de ce bas monde. Actuellement, notre société est gangrenée par le m’as-tu-vu, le manque de modestie, la vanité, l’arrogance, l’envie, la jalousie, la haine, l’inaction, la paresse, la nescience, etc. L’équation est simple! Si vous construisez un environnement pour que l’humain puisse s’épanouir dedans, il faut inculquer à l’humain les bons comportements qui lui permettront d’exploiter cet environnement à bon escient. Ce principe est un des fondements de la vision politique du prophète Mouhammad à savoir l’enseignement de bonnes valeurs à l’humain avant de construire ce qui est autour de lui.En réponse aux problèmes que nous avons soulevés aux débuts de cet article, une première réponse serait que le prérequis des bons comportements ne dépasse pas l’antichambre de la politique.

Et ce phénomène peut être généralisé au sein de notre société actuelle dans laquelle la cohésion sociale est de plus en plus difficile. L’exemple de Médine nous montre que nous ne pouvons rien construire sans une entente et une cohésion sociale solide. La cause principale serait liée au délaissement des enseignements de la religion comme les bons comportements et les bonnes valeurs qui devraient être les bases de notre éducation. L’ordre naturel des choses voudrait que l’on se focalise d’abord sur la construction de l’humain afin de lui permettre d’évoluer sereinement dans son environnement par la suite avec une bonne cohésion sociale et un amour pour son pays. Le futur du Sénégal dépend fortement de ce qu’on fera de sa jeunesse. Cette jeunesse débordante d’énergie a besoin d’être façonnée dès maintenant pour espérer des lendemains meilleurs pour notre chère patrie. 

Dr Assane Ndieguene Ibn Aziz Ibn Wahab Ibn Tafsir Ahmadou Barro Ndieguene[1] ANSD Sénégal

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