La pertinence du débat sur le taux de croissance économique. par Ahmet Sarr

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La publication du taux de croissance économique pour l’année 2015 suscite toujours un débat passionnant dans  la classe politique sénégalaise.   Le Gouvernement du Sénégal annonce un taux de croissance économique réel, mais provisoire,  de 6.4 %  alors que le  Fonds Monétaire International (FMI) l’évalue à 5.1%. Mais enfin, cette disparité mérite-t-elle un débat politicien?  Assurément non !

L’omission, à dessein, du qualificatif « provisoire » par certains acteurs politiques,   attise le débat. Ils privilégient  la rhétorique, et cela se comprend. La solidité des  fondamentaux de l’économie montre que le taux sera confirmé ou dépassé. Cependant, le nihilisme, au sens de Gorgias,  représente  un outil de communication prisé ;  par conséquent, il faut  pérorer de tout et de rien pour exister.

Le produit intérieur brut (PIB),  par lequel on mesure le taux de croissance, représente  la valeur totale de la production de richesse effectuée par les ménages, les entreprises, et les administrations publiques à une période donnée, généralement l’année ou le trimestre. Le PIB reste un indicateur économique et une notion comparative.  Sa variation d’une période  à l’autre  permet de mesurer le taux de croissance économique et la  création de richesse dans un pays d’une part,  et d’effectuer des comparaisons entre pays,  d’autre part.

Le PIB se calcule en utilisant  trois méthodes : celle de la production,  des dépenses, ou des revenus. Le choix d’une de ces méthodes fournit la valeur du PIB.  Nous  renvoyons aux manuels d’économie pour une meilleure compréhension. Toutefois, nous notons que l’estimation du PIB en volume privilégie la méthode des dépenses au détriment des autres méthodes  et engendre, par conséquent,  des résultats différents. Ensuite, une divergence dans les périodes d’estimation du PIB conduit à des écarts. Par exemple,  un PIB calculé  à  une période (t)  ne produit pas les mêmes résultats qu’un PIB calculé à une période (t+1).  Enfin,  une variation dans le paramétrage  des  modèles d’estimation du PIB  produit un  résultat différent.  Le concept  « garbage in, garbage out », très connu des informaticiens,  s’applique bien à ce scenario. En d’autres termes, le résultat final  dépend de la qualité des variables  de l’équation.

Au total, tous ces éléments peuvent expliquer l’écart noté entre le taux du FMI et celui du Gouvernement du Sénégal.  D’ailleurs, le Directeur  de l’Agence Nationale de la Statistique et de la Démographie (ANSD), dans une émission de la Radio et Télévision Sénégalaise (RTS),  « Le Point » du Mercredi 20 Janvier 2016, confirme les différences dans les modèles de calcul du PIB entre l’ANSD et la Direction de la Prévision et des Etudes Economiques (DPEE) d’une part, et le  FMI, d’autre part. Rappelons que le FMI utilise les données fournies par le Gouvernement du Sénégal.

Par ailleurs, ces méthodes d’évaluation du PIB demeurent plus  pertinentes et significatives  pour les économies structurées et développées où le formel domine que celles sous-développées ou l’informel occupe un poids important. Pourquoi ?

Le Dictionnaire d’Economie et des Sciences Sociales, Nathan,  définit l’économie informelle  comme « l’ensemble des activités productrices de biens et services qui échappent au regard ou à la régulation de l’Etat ». L’économie du Sénégal, dont le secteur informel reste la principale composante, ne semble pas échapper à cette définition. Dès lors,  l’absence de statistiques  du secteur informel sous-évalue le  PIB et, en définitive, le taux de croissance économique.

L’économie domestique ou familiale, sous-secteur de l’économie informelle, contribue fortement à la production de richesse au Sénégal. Malheureusement, cette richesse n’est pas  estimée et   comptabilisée dans nos comptes nationaux. L’exercice est fastidieux et coûteux. Il faut le reconnaître.  Par exemple, où sont  comptabilisés les revenus de la production du maraîcher  de Sangalkam qui exploite une propriété familiale ? Ou encore, les revenus substantiels que certains opérateurs économiques circonstanciels  génèrent de leurs opérations Tabaski, Magal ou Gamou? Ou enfin,  les gains financiers d’une « Aida Niang » qui vend son fondé ou ses beignets au coin de la rue ? Combien sont-ils les Sénégalais ou Sénégalaises à gagner leurs revenus de la vente de produits finis  prêts pour la consommation et issus de ce système informel où une déclaration de revenus ne s’impose pas ? Bref ! L’évaluation de la création de richesse au Sénégal souffre de statistiques partielles.   Dans une économie développée et structurée,  comme celle des USA, la déclaration de revenus est obligatoire pour les travailleurs salariés et non-salariés. Ainsi, le gouvernement évalue adéquatement le Gross Domestic Product (GDP), l’équivalent du PIB,  et publie un taux de croissance économique reflétant la production de richesse dans le pays durant une période donnée.

Comme on le voit, les méthodes d’évaluation du PIB  présentent des limites. Le Gouvernement du Sénégal s’attèle à les corriger pour une meilleure évaluation du produit intérieur brut par un renforcement des capacités organisationnelles de l’ANSD. Une revue  des méthodes d’évaluation du PIB dans un futur proche validera un taux supérieur ou égal à 6.4%.

Cependant, la question fondamentale qui mérite un débat est celle de la pertinence de la politique économique du Président Macky SALL. Est-ce que la politique économique du Président Macky SALL peut engendrer un taux de croissance économique de 6%, 7%, ou même 8% ? Nous répondons sans ambages par l’affirmative.

Certaines contributions sur le site www.xalima.com  ont insisté sur la réalisation effective de ce taux de croissance de 6.4%. Nous ne reviendrons pas sur les arguments présentés.  Nous soulignerons juste quelques éléments importants.

L’instrument le plus médiatisé de la politique économique du Président Macky SALL demeure le  Plan Sénégal Emergent (PSE). En effet,  le PSE vise à stimuler la croissance économique par la mise en œuvre de projets phares, d’une part, et la création d’emplois, d’autre part. Ainsi, les emplois créés se traduisent par la distribution de revenus. Ces revenus distribués aux ménages et aux entreprises servent à  la consommation et à l’épargne. De plus,  la  consommation génère une demande qui, à son tour, stimule la production et augmente l’emploi. Donc, ce cycle économique élémentaire démontre  la création de richesse.

Il s’y ajoute un cadre institutionnel et juridique amélioré et  propice à toute initiative privée. Les petites et les moyennes entreprises, leviers de l’initiative privée, symbolisent le moteur de la croissance économique, et  le Président Macky SALL l’a bien compris. Il ne s’est pas trompé en invitant les Sénégalais et les Sénégalaises à épouser « l’économie des idées »  ou  « the economics of ideas ». Le Président se procurait un mouton  à la veille de la Tabaski et invitait les Sénégalais à l’entrepreneuriat.  

Le Président fait sien le concept de l’économie des idées introduit par Paul Romer, un des grands théoriciens de la croissance économique endogène.  En effet, Paul Romer affirme que la croissance économique résulte  de la mise en œuvre de recettes ou « recipes ». Il part de la notion de « physical stuff » ou  la matière physique pour démontrer que  la croissance économique découle  d’un réarrangement de la matière physique en appliquant des recettes de transformation ou  technologies.  Autrement dit,  la roue n’est plus à réinventer. Tout se transforme, et le Président Macky SALL  invite  les Sénégalais et Sénégalaises à explorer les idées de projets et à développer l’initiative privée. L’entrepreneuriat constitue l’épine dorsale de la croissance économique.

Robert Solow, le pionnier de la théorie de croissance économique, nous apprend aussi que la combinaison de deux facteurs de production et de la technologie stimule la croissance. Il  utilise la fonction COBB Douglas  Y = c. K?. L? pour argumenter sa théorie. L représente le travail ; K le capital ; et c, ? et ? des constantes de la technologie.  Au Sénégal, nous disposons  de ressources humaines. Les technologies existent dans le monde. Reste l’obstacle majeur de la  variable capital.  

C’est pourquoi, le Président Macky SALL a mis en place des structures telles que le Fonsis, le Fongip, la Bnde, et le Faise pour résoudre l’obstacle de l’acquisition du capital et pour encourager  l’initiative privée.  Autrement dit, le Président exhorte les Sénégalais et les Sénégalaises à saisir ces opportunités de financement. Il les invite aussi à  la formalisation de leurs activités. Par exemple, aux USA, il existe une race d’investisseurs qu’on appelle les « ventures capitalistes ». Leur rôle est de financer les idées ou les  projets. Au Sénégal, les structures citées plus haut se substituent aux « ventures capitalistes ».

Nous terminons notre contribution en affirmant que le Gouvernement du Sénégal s’est résolument engagé dans une politique économique structurelle.  Certes, le travail est titanesque, mais l’effort est bénéfique.  Certains projets d’infrastructure sont déjà visibles, d’autres sont en phase d’exécution avancée. Ce qui renvoie au bilan du President Macky SALL que nous, militants, communiquerons.  Patience !

Une politique  économique avec des résultats « Joni-Joni » n’existe nulle part. La politique économique du Président Obama  a mis six ans pour réduire le taux de chômage de 10% en 2009 à 5% en 2015, malgré les moyens colossaux  à leur disposition. Nous  exhortons donc les Sénégalais de tous bords à soutenir le Président Macky SALL et sa politique économique.   C’est dans notre intérêt national.  Certains Sénégalais, avertis, le comprennent et l’accompagnent dans l’édification de notre pays.  Mr.  Moubarack Lo en est une parfaite illustration.

Mon long séjour aux USA m’a conduit à une observation : les clivages politiques des Américains  disparaissent  lorsqu’il s’agit de politiques ou de programmes d’intérêt national. Pourquoi pas nous, Sénégalais ?

Ahmet F. Sarr,

APR USA- Section de Manhattan

[email protected]

 

References :

La fonction Cobb- Douglas .https://fr.wikipedia.org/wiki/Fonction_de_Cobb-Douglas.

(Consulté le 24 Janvier 2016)

 

Le Point  avec  Aboubacar Sedikh  Beye. DG, Agence Nationale  Statistique et Demographie.  2016 http://www.rts.sn/televisions/rts1/le-point/le-point-rts1-avec-aboubacar-sedikh-beye-dg-agence-nationale-statistique-et-demographie-du-mercredi-20-janvier-2016.html (Consulté le 24 Janvier 2016)

 

Romer, Paul.  Romer on Growth. Econ Talk Episode with Paul Romer, 2007 http://www.econtalk.org/archives/2007/08/romer_on_growth.html. (Consulté le 24 Janvier 2016)

 

Xalima.com . Contributions sur les taux de croissance économique. 2016.  http://xalimasn.com/?s=taux+de+croissance+economique . (Consulté le 24 janvier 2016)

 

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