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La politique au Sénégal : Anesthésier la population et euthanasier les opposants. (Par Mohamed DIA)

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Alors que l’économie sénégalaise est agonisante, le président Sall a éliminé ses adversaires politiques en utilisant tous les appareils de l’Etat. Certains adversaires furent emprisonnés, d’autres furent envoyés en exil hors de nos frontières. Des révisions constitutionnelles jugées illégales par des constitutionnalistes ont vu le jour et des programmes électoralistes ont garanti le second tour. Une fois que le président fut réélu, il a proposé un dialogue national déguisé avant que le scandale du pétrole ne surgisse. Devant l’incapacité de gouverner sans cohésion nationale, avec le plan d’ajustement structurel imposé par le FMI, il a été forcé de négocier en se réconciliant avec le président Wade, en graciant Khalifa Sall et en préparant un projet de loi pour amnistier le fils du président Wade. Cette réconciliation, déguisée pour calmer la tension sociale, sera-t-elle suffisante devant les reformes imposées par le FMI que le Sénégal devra respecter pour pouvoir bénéficier de fonds en cas d’urgence.

Jugé et condamné à cinq ans de prison ferme pour détournement de deniers publics, Khalifa Sall était accusé avec ses collaborateurs d’avoir détourné 1,83 milliards de FCFA. Il faut noter que l’ancien maire a hérité d’un ancien mécanisme en place à la mairie de Dakar. Au soir du 29 septembre 2019, le président Sall a gracié l’ancien maire de Dakar et les co-accusés dans l’effort de poursuivre le dialogue et la cohésion nationale durant ces moments de détresse. Pourquoi accepte-t-on que nos présidents nous anesthésient et jouent au demi-dieu que quand ils sont dans la tourmente. Rien ne va au Sénégal et les choses ne feront que s’empirer, que l’on gracie tous les détenus de toutes les prisons du Sénégal, cela ne changera pas grand-chose aux mauvais choix politiques. Combien de prisonniers sont toujours en en détention provisoire alors qu’ils n’ont pas commis de délit comparable au délit de détournement de deniers publics ? Qui pense aux pauvres sénégalais ?

On parle de programme d’ajustement structurel quand il y a un programme de réformes économiques que les institutions de Bretton Woods mettent en place dans des pays qui traversent de grandes difficultés pour leur aider de sortir de leur crise économique. Tout commence vers le début des années 70, la plupart des économies africaines devenaient très vulnérables avec les chocs pétroliers et les cours des matières premières. L’inflation était galopante, l’endettement était massif (endettement de la part des institutions de Bretton Woods) et un déficit commercial chronique. Ceux qui nous ont endettés sont venus nos contraindre à leurs programmes comme remède. Ces institutions ont poussé nos pays pauvres à faire des coupes budgétaires dans les secteurs de santé et d’éducation. Les gouvernants qui sont corrompus et qui ont mis leurs pays dans le gouffre ont été les bénéficiaires des fonds de l’ajustement structurel. Des gouvernants qui ont démontré leur irresponsabilité financière bénéficient de ces fonds qu’ils dépensent à leur guise, car ils savent que ces prêts ne seront pas remboursés et au pire des cas la dette sera éventuellement effacée. La manière de procéder est simple, il s’agit de réduire son déficit budgétaire en augmentant les impôts et taxes et en réduisant les dépenses sociales au lieu de s’attaquer à la corruption et aux véritables problèmes.

Quand le président Sall est venu au pouvoir, il a trouvé que l’activité économique avait bien résisté et le PIB avait accru de 1,1 % entre 2011 et 2012 et l’inflation était quand même contrôlée, s’étant établie à 1,5 % durant le premier semestre de 2012 malgré les difficultés et le déficit qui était à presque 8 % du PIB. Je ne veux pas trop me lancer dans un débat de comparaison, car des dirigeants qui sont en charge doivent juste mettre en valeur ce qu’ils ont fait sans se comparer à des régimes précédents, surtout si ces régimes ont gouverné avec la corruption et le banditisme financier. Retournons dans le début des années 2000, le Sénégal était éligible à l’initiative des pays pauvres très endettés (PPTE) et par le biais de la stratégie de réduction de la pauvreté, nous avons mis en œuvre des programmes et des politiques dans le but de réduire la pauvreté. Ce programme, qui a couvert la période de 2003 à 2005, a permis de corriger quelques lacunes et pour mobiliser les ressources pour notre politique. La période de 2006 à 2010 a été aussi celle de la seconde phase de la réduction de la pauvreté conjuguée avec la stratégie de croissance accélérée et la dernière période est la période du président Sall, qui consistait à mettre le Sénégal dans le groupe des pays à économie émergente, mais je vous laisse juger si le Sénégal est sur cette voie. Le 22 juin 2012, l’ancien ministre de l’Économie et des Finances, Amadou Kane, a écrit au FMI pour dire que le gouvernement s’engageait à reformer l’Etat pour améliorer les politiques publiques et promouvoir le développement du secteur privé. Je comprends que le Sénégal ait signé ce programme, car le précèdent régime dont le président faisait partie a trahi le Sénégal et ses générations futures à vil prix. Le gouvernement avait estimé que les mesures, qui avaient été prises, allaient leur permettre d’atteindre les objectifs du programme PSI. Le nouveau gouvernement, par la voix du président de la République, était très optimiste pour l’implantation de ces mesures. Le gouvernement a émis plusieurs eurobonds pour pouvoir boucler les fins d’années et c’est ainsi qu’en 2014, un eurobond a été émis au taux de 6,25 % remboursable dans 10 ans, puis un autre eurobond en 2017 au même taux remboursable dans 16 ans et enfin un autre eurobond en 2018 à un taux de 4,75 % remboursable dans 30 ans. Notons quand même que l’eurobond émis en 2011 est dû en 2021, avant les recettes d’hydrocarbures. Pourquoi le Sénégal a eu besoin de tant d’eurobonds ? Rappelons juste que le gouvernement s’est lancé dans des dépenses de prestige et des programmes électoralistes dans le but d’une réélection. Je suis d’accord que la politique au Sénégal a toujours marché ainsi, mais je suis contre le fait que des hommes politique veuillent défendre ce gaspillage pendant que les populations souffrent.

Après des années au pouvoir, analysons l’état du programme signé avec le FMI. L’un des programmes les moins prestigieux a été signe par le Sénégal avec le FMI, le PSI. Puis-je me permettre d’expliquer le PSI (Policy Support Instrument) ? Selon le FMI, le PSI a pour but « d’aider les pays membre à maintenir ou consolider la stabilité macroéconomique et la viabilité de la dette, tout en approfondissant les réformes structurelles dans des domaines clé où la croissance et la réduction de la pauvreté sont limitées. En général, les politiques du PSI visent à consolider la stabilité macroéconomique et à aller de l’avant avec des mesures structurelles visant à stimuler la croissance et l’emploi. Il s’agit notamment de mesures visant à améliorer la gestion du secteur public, à renforcer le secteur financier ou à mettre en place des filets de sécurité sociale ». Maintenant, dites-moi que ce programme n’est pas un ajustement structurel vu que le FMI n’utilise plus le nom d’ajustement structurel, mais plutôt de programmes en place qui ont les mêmes effets que l’ajustement structurel.

Maintenant, après la signature du PSI, le Sénégal a quand même rencontré des difficultés dans la mise en œuvre du programme. Certes, les prix du pétrole ont connu une hausse, bien que toujours abordable par rapport à l’ère libérale, mais le problème était le fait que le président ait refusé de respecter la loi de l’économie dans le seul et unique but de se faire réélire. Les prix de l’énergie n’ont pas connu de hausse quand il le fallait, car le président ne voulait pas fâcher l’électorat. Je suis tout à fait d’accord avec lui, car après tout, il fait de la politique, mais cependant, il ne devait pas approuver toutes ces exonérations fiscales pendant ce temps. Pendant que l’Etat dépensait l’argent dont il ne disposait pas, le Sénégal a accusé d’un déficit de mobilisation de recettes, qui a entrainé une baisse des dépenses publiques et une dette intérieure galopante, car l’Etat doit de l’argent à la SENELEC et à beaucoup d’entreprises dans le privé.

Pourquoi ne dit-on pas aux Sénégalais que les pressions budgétaires se sont accrues à cause des revenus inférieurs, mais surtout aussi à cause de l’augmentation de la masse salariale, qui malheureusement n’a pas changé les conditions de vie de la majorité des fonctionnaires. Et pourtant, le Sénégal avait promis d’augmenter les recettes tout en réduisant le train de vie de l’Etat. Pourquoi n’a-t-on pas encore dit aux Sénégalais que de nouvelles mesures ont été prises, car les précédentes n’ont pas été respectées et que le gouvernement s’est encore engagé à contenir les dépenses d’investissement non prioritaires qu’on finance avec de l’argent emprunté à des taux exorbitants. Pourquoi ne parle-t-on pas des dépenses courantes ?

Le Sénégal qui se veut émergent en 2035 et qui n’est pas en mesure de respecter tous les engagements du PSI qui avait été mis en place nous montre que le septennat a été un septennat électoral, ce qui est devenu normal au Sénégal, mais qu’on dise la vérité aux Sénégalais pour qu’ils puissent se préparer conséquemment. Le FMI, mise trop sur la rente des hydrocarbures et pense que nous pouvons nous permettre de gaspiller de l’argent et que cette rente attenue le déficit. Plusieurs pays africains ont commencé à produire du pétrole depuis les années 60, hélas, le Sénégal n’a rien à envier à ces pays. Nous sommes tous pauvres, pétrole ou non, le problème, ce ne sont pas les ressources, mais des institutions fortes.

A-t-on aussi dit aux Sénégalais qu’une augmentation du cours de pétrole va encore affecter nos prévisions budgétaires, et cela, malgré l’augmentation insignifiante de certains produits énergétiques, qui devait d’ailleurs se faire durant le septennat, mais encore et toujours l’électorat. Le Sénégal ne respecte pas les lois de l’économie, car tout le monde veut garder son poste et ou faire plaisir au président. Qui défend le Sénégal ? Pensez-vous que les reformes pourront être respectées et que la première phase du PSE a eu les effets escomptés pour que les bailleurs de fonds prennent le risque de venir investir au Sénégal. Regardez autour de vous et dites-moi qui oseraient mettre ses milliards dans un pays ou la corruption est présente à tous le niveaux, l’administration est lente et archaïque et une pluie forte met l’économie du pays à terre. Savez-vous qu’une seule attaque terroriste mettrait le pays dans le chaos total. Pour prévenir cela, il faut augmenter les dépenses en sécurité, et ces dépenses en sécurité non prévues, pèseront encore sur notre budget. Pourquoi a-t-on mis le Sénégal dans cette situation de détresse pour ensuite venir tromper les Sénégalais et dire que tout se passe bien alors que tout va mal.

Pourquoi le gouvernement peine-t-il à payer la SENELEC, la SAR et les investisseurs du secteur privé ? Vous avez mis le Sénégal dans cette situation, car aucune économie qui se respecte ne devait faire ce que le Sénégal a fait. Comment peut-on financer la poste en dehors du budget ? Trop de politique ! Si les Sénégalais se soignaient convenablement, mangeaient à leur faim, avaient accès aux infrastructures de base, il n’y aurait pas de problème, mais tel n’est pas le cas. À quoi sert une croissance qui ne fait rien d’autre que créer des pauvres ? Arrêtez de nous parler d’une croissance qui ne reste pas au Sénégal. C’est désolant que des technocrates deviennent de si grands politiciens sur le dos des pauvres Sénégalais et qu’ils arrivent à dormir.

Il n’y a rien que le FMI puisse apprendre aux Sénégalais que ces derniers ne connaissent pas. Nous sommes aussi bien éduqués sinon mieux éduqués que les membres du FMI, donc ne venez pas utiliser le FMI comme bouclier. Des reformes devaient être mises en œuvre durant l’accession au pouvoir du président pour sortir le Sénégal du gouffre financier, en fiscalisant le pays, et en n’exonérant que certaines entreprises au cas par cas selon la richesse créée et qui restera au Sénégal. Le Sénégal devait afficher les prix réels de l’énergie ou chercher des recettes supplémentaires dans les exonérations fiscales ou même dans le secteur informel. Cela a créé un déficit de recettes de plus de 100 milliards de FCFA, car le gouvernement a retardé la mise en œuvre des nouvelles mesures pour pouvoir se faire réélire. Une réélection qui mettra moins d’1 % de la population à l’aise pendant que plus de 99 % des Sénégalais souffrent. C’est ce que vous appelez émergence ?

Pourquoi ne dites-vous pas aux Sénégalais que le plafond de 75 milliards de FCFA des opérations de flux de trésorerie a été dépassé ? Si le Sénégal faisait toutes les autres choses de manière normale, il n’y aurait pas de problème, mais ce qui écœure les Sénégalais, c’est que pendant que l’OFNAC pointe des anomalies, des détournements et des passations de marché faites dans l’illégalité, le gouvernement est en train de jongler avec la vie de presque 16 millions de Sénégalais.

Hommes politiques, vous êtes dans votre rôle et je le comprends parfaitement, cependant, vous pouvez faire votre travail sans dire aux Sénégalais que tout va bien. Nous pouvons juger nous-mêmes si tout va bien. Vu que vous êtes dans de bonnes conditions, vous avez tendance à oublier ceux qui ne vont pas aux hôpitaux pour se soigner, car ils n’ont pas d’argent, la CMU qui a paralysé nos hôpitaux, car elle a été électoraliste ; la bourse familiale a été mise en place pour asservir 300 000 ménages, le PSE a été conçu pour une réélection. Le Sénégal s’attendait beaucoup du président Sall, car les Sénégalais ont massivement voté pour lui pensant que comme il est issu d’une famille très modeste, il aurait plus pitié de la population, mais rien de cela n’est vrai. Je prie que les quatre ans qui restent finissent en paix et que Dieu donne la force aux Sénégalais de patienter pour qu’un nouveau président qui sera bien choisi vienne mettre le Sénégal sur la voie de l’émergence.

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