La qualité, label de notre école

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Dans le Pdef, les autorités académiques du pays s’étaient souciées de la qualité de nos enseignements-apprentissages, en sus de deux autres composantes. Actuellement, dans le Paquet, il est d’abord question d’amélioration de cette qualité. La pertinence de ce glissement sémantique-amélioration de la qualité et non qualité tout court- mérite d’être bien soulignée.

Elle me donne, d’ailleurs, l’occasion de préciser à nouveau  mon point de vue sur la qualité de l’école sénégalaise.
Tout d’abord, j’affirme encore que notre système éducatif n’a jamais été sevré de qualité, même si  des personnes non averties, mais habituées à émettre des jugements à l’emporte-pièce sur n’importe quelle matière, s’obstinent à faire croire aux gens que cette sorte de lumière n’est plus facile à percevoir dans notre système éducatif ces temps qui courent. C’est sûr que déjà à l’école élémentaire et puis au lycée, durant la première décennie de notre période post-indépendance, on avait bel et bien inculqué à des promotions d’élèves le  culte de l’excellence, en plus d’un esprit d’émulation n’excluant point le respect le plus absolu de l’autre. Jusqu’à l’université, au début des années 70, il a été impossible à la première génération de bacheliers orientés que nous étions de nous départir de ces habitudes-là, au moment où nous abordions un grand virage dans un milieu marqué par de fortes sensations libertaires, et aussi par une ambiance de temps en temps festive, dans la capitale de notre pays. A cette époque,  était au moins valorisante l’image de l’étudiant dont la bourse, même  fractionnée, lui permettait de satisfaire ses besoins essentiels.
Depuis lors, des bouleversements spectaculaires au plan économique, social et culturel se sont produits dans les centres urbains du pays, sans épargner les campagnes. Rien qu’à Dakar, on remarque que beaucoup de segments de sa population, en particulier les habitants des quartiers périphériques, sont obligés d’imaginer quotidiennement des stratégies de survie,  à cause de la détérioration progressive de leurs conditions d’existence. Evidem­ment, les activités à la fois précaires et absorbantes que mènent ces braves hommes et femmes les empêchent de s’occuper dûment de leur progéniture. Et ces démissions forcées, qui contribuent à compromettre les chances de réussite d’un pourcentage très élevé d’élèves, pourraient également être brandies comme simple argument, quand il s’agit de jeter furtivement un regard  critique sur la vitalité de notre système éducatif. J’ose croire que nos collègues, habilités à faire des études approfondies en évaluation, ne me démentiront pas.
Dans les campagnes, les problèmes à recenser sont surtout les décrochages scolaires massifs, l’existence d’innombrables abris provisoires, les salles de classe à peine équipées ou fermées faute d’enseignants. D’une manière générale, les conditions d’études dans nos établissements publics deviennent de plus en plus insupportables. Une telle situation incite,  dans certains cas, ceux qui sont chargés de diriger ces écoles-là, à s’adonner à de multiples acrobaties pour rendre un peu accueillant le cadre dans lequel ils évoluent avec leurs élèves et collègues. Et ne déplorons plus ces recrutements  de volontaires ou de vacataires qui, un beau jour, se retrouvent devant un nombre souvent impressionnant d’élèves, sans savoir exactement ce qu’ils doivent leur transmettre (contenus) ni comment  le faire (méthode), encore moins pourquoi le faire (principes axiologiques et finalités). Et la plupart de nos enseignants «parachutés» continueraient malencontreusement leurs pratiques de classe hasardeuses, si la Fad de la Fastef n’existait pas.
La plateforme de cette Fad devrait être utilisée, en même temps, pour assurer la formation permanente de nos professeurs – de lycées et collèges – déjà qualifiés et la formation diplômante d’enseignants de cet ordre du privé, laïc comme catholique, non encore qualifiés. En outre, je comprends difficilement  que l’on puisse parler de baisse de niveau d’une catégorie de maîtres. A mon avis, un compatriote ayant le diplôme requis, formé dans les règles de l’art pour enseigner, à l’issue d’une sélection rigoureuse ou d’un concours avec entretien, s’exprimera correctement dans sa classe et ailleurs. Il urge maintenant de penser aux voies et moyens de réarmer moralement tous ceux qui se  chargent de forger les consciences de nos enfants, l’avenir de ce pays.
J’espère que les négociations avec nos différents syndicats, ainsi que les réformes en vue dans nos universités et les Assises de l’Education déjà programmées, engendreront  des propositions très satisfaisantes, celles qui permettront d’améliorer non seulement les conditions d’études de tous nos apprenants mais aussi la situation des serviteurs de l’école.  Personnellement, je ne commettrai jamais un crime de lèse-République en prétextant que les enseignants sénégalais doivent avoir beaucoup plus d’avantages ou qu’ils sont plus enclins à consentir des  sacrifices pour la Nation. Ils ne constituent qu’un maillon de la grande chaîne formée par la totalité des agents impliqués, à différents niveaux, dans le développement de notre cher pays. Mais ce maillon est fondamental, pour ne pas dire très précieux, puisqu’il se situe tout au début de la chaîne et sous-tend, par conséquent, la conception et l’exécution de chantiers pour l’émergence de notre cher Sénégal.
Bref, les facteurs négatifs ci-dessus énumérés, les perturbations récurrentes au sein de nos établissements secondaires et universitaires, de même que la perte des valeurs, me poussent à dire, sans ambages, qu’il est temps que l’on se penche sérieusement sur les maux et dysfonctionnements, identifiés depuis belle lurette, de notre école. Toutefois ce constat, si amer qu’il soit, n’autorise nullement à décréter que la qualité n’est pas encore un label de notre système éducatif.
Combien de fois, sous le magistère de feu le Président Senghor jusqu’à nos jours, on s’est réjoui dès qu’on fut au courant de la  réussite d’un produit de notre école au concours d’entrée à l’un des très prestigieux établissements d’enseignement supérieur de l’Hexagone ! Ces réussites honorables de la crème de nos lycées partie poursuivre ses études en Europe, comme en Amérique du Nord ou en Asie, et celles enregistrées chaque année dans le pays constituent, à juste titre, un gage de crédibilité de nos modèles éducatifs.
Un autre paramètre pour la qualité,  et même le prestige, est en rapport avec la renommée mondiale de nos professeurs et chercheurs les plus chevronnés dont, malheureusement, certains continuent de préférer les offres mirobolantes  de la plus grande puissance de ce monde ou d’autres pays nantis. Pendant ce temps, nous accueillons à bras ouverts des cohortes de jeunes, provenant de la sous-région et d’autres pays, désireux d’avoir le baccalauréat sénégalais ou de se faire former dans nos universités et instituts supérieurs, aussi bien publics que privés.
Ce déferlement incessant et les succès éclatants obtenus, ici et ailleurs, par nos élèves et étudiants sont d’abord de réels motifs de fierté pour les principaux acteurs de notre système éducatif. Ainsi, quelles que soient les difficultés du moment, ces derniers ne devraient pas se lasser de remplir avec abnégation et dignité leur mission, afin que la qualité de nos enseignements-apprentissages s’améliore toujours.

Badiallo dit Boucounta BA
Formateur à la Fastef/Ucad.

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