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L’ami dont l’aventure n’est pas ambiguë

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L’ami dont l’aventure n’est pas ambiguë ou une belle leçon d’humanisme

Dans L’ami dont l’aventure n’est pas ambiguë , récit d’humanité, d’espoir et de générosité, Amadou Elimane KANE montre que l’homme est au-dessus de tout, capable de se construire et d’évoluer pour peu qu’il ait confiance en lui-même. Comme dit Protagoras, « l’homme est la mesure de toutes choses ».

Amadou Elimane KANE dénonce les injustices, toutes les injustices et exhorte à la solidarité dont la première forme est d’aider l’autre à apprendre, acquérir la connaissance. A travers Boubacar, l’on se rend compte qu’avec le savoir et la terre, on peut repousser les limites de l’ignorance et de la misère.

Boubacar a connu toutes sortes de souffrances dès sa tendre enfance au sein d’une famille polygame, dominée par une tante sévère et autoritaire (première épouse de son père) ;le père souvent absent, il voit sa mère souffrir en silence. Dans un premier temps il décide d’arrêter les études pour voyager, car il est convaincu de ne pas trouver la réussite dans son pays mais plutôt, (barça ou barsakh) en Europe « quels que soient les dangers et les difficultés ». Le chemin a été long et difficile de Saint Louis en France en passant par Dakar, Thiès, …Kayes avant d’arriver à Bamako puis Abidjan.

Retour à Bamako où il retrouve avec émotion sa bienfaitrice et le mari de celle-ci, Alioune, avant de poursuivre sa route: Gao, Niger, Anefis, Tessalit avec d’autres compagnons de voyage qui voulaient quitter l’Afrique, car leurs « projets n’auraient de sens que sur l’autre continent ».

Le chemin vers Paris périlleux, difficile et parsemé d’embûches, de tracasseries de toutes sortes et de privations n’a pas empêché à Boubacar d' »arriver » et de  retrouver des raisons d’espérer mais c’est comme qui dirait le début des vraies souffrances. La rencontre avec son frère Alpha Ciré est un échec.

En accompagnant son ami Paul à l’Université, Boubacar rencontre Samba Diallo, son ami d’enfance. Ce dernier l’aide, le soutient, lui montre la voie sans rien attendre en retour. Cette entrevue remplit Boubacar d’une étincelle de lumière qui rend son cœur plus léger.

Plus tard, malheureusement, Samba Diallo choisit de tourner le dos à l’intérêt général pour pactiser avec le pouvoir qui « le tenait et ne desserrait pas son étreinte » jusqu’à la prison et l’humiliation. Avec Samba Diallo, les fruits n’ont pas su porter la promesse des fleurs. Boubacar n’est pas d’accord avec lui mais ne l’abandonne pas, au nom de sa « fraternité…indestructible ».

L’Europe a sa part de responsabilité dans la déchéance de l’Afrique mais celle ci est porteuse de son image, il est donc malhonnête de considérer qu’elle est la cause de tous les maux des Africains. La question qu’il faut se poser est de savoir pourquoi les Européens ne peuvent pas reconnaître le potentiel des Africains. Pourquoi ne voient-ils chez le noir que « celui qui est incapable d’exercer des responsabilités »? Pour exemple, Boubacar avec toutes ses connaissances, son savoir et sa formation ne peut débuter son enseignement sans la présence de la directrice d’école. Malgré le manque de confiance de ses chefs, la raillerie et les méchancetés de ses collègues, Boubacar est allé jusqu’au bout de son rêve. Les Européens craindraient-ils d’être dépassés? Savent-ils que l’Afrique est le continent de l’avenir? Laissant la réponse EN SUSPENS, L’ami dont l’aventure n’est pas ambiguë  nous invite à repenser nos systèmes de valeur pour nous développer c’est-à-dire à privilégier l’honnêteté, la générosité et le savoir.

Par ailleurs aider  l’autre à savoir c’est l’aider à se construire tel Abdul, le fils de Mariam Asta KANE, la femme dont l’aventure est un vrai poème. Bocar Sokhna, l’homme au regard de braise, consacre quant à lui la majeure partie de son temps au Domaine qu’il fait exister à force de courage et de détermination. Leur souhait était que, plus tard, Abdul prenne la relève mais leur fils avait en vue des horizons plus larges, aidé en cela par Boubacar.

Abdul va poursuivre ses études en France.

Il est plus chanceux que Demba Diallo et Nabou, éperdument amoureux l’un de l’autre en dépit des stupides préjugés de « classe » s’opposant à leurs sentiments. Leurs parents respectifs croient que le mélange des classes crée des problèmes et s’opposent farouchement à leur union. Mais l’amour étant une chose infinie, ils reconstruisent leur vie en suivant un principe simple: s’aimer d’un amour vrai, inaltérable, y croire et être en mouvement en acceptant le prix de leur courage. Et avancer. L’amour ne doit pas être  un obstacle à l’ordre établi, il doit « obéir à une alchimie que le cœur doit suivre ».

« Rien n’est plus dangereux que le fameuse appartenance », nous rappelle d’ailleurs à ce propos Amadou Elimane Kane.

Amadou Elimane Kane montre dans son récit que si l’homme entreprend et réussit de grandes réalisations, c’est parce qu’il bénéficie de la présence douce et aimante d’une femme-qu’elle soit mère, sœur, amie, épouse etc. Si Boubacar est resté à l’école, Amy, sa mère s’est battue avec ardeur. En suite il a eu la chance de rencontrer Collé dans le train de Dakar à Bamako, plus tard Julia qui l’accompagne jusqu’à Rome. En France Anne Marie lui offre « son amour avec force et authenticité », ce grâce à quoi « Boubacar n’était plus seul « .

Samba Diallo n’a pas écouté les sages paroles et recommandations préférant sa fuite en avant vers une extraversion qui finira par le perdre.

Grâce à Nabou, Demba Diallo a réussi à surmonter son désespoir.

En définitive, L’ami dont l’aventure n’est pas ambiguë est un récit de générosité et d’ouverture écrit dans une langue de toute beauté, avec des phrases simples et claires au travers desquelles Amadou Elimane Kane nous invite à considérer l’homme dans sa qualité fondamentale d’être humain, comme son prochain, comme une liberté et une conscience. C’est une belle et utile leçon pour les jeunes Africains, car le développement passe par l’éducation, le respect des valeurs morales et la discipline.

Amadou Elimane KANE s’inscrit dans une dynamique de rupture et continuité des actes qui ont été posés par ses aînés; d’où le titre de l’ouvrage et du nom Samba Diallo qui, dans L’aventure ambiguë de Cheikh Hamidou KANE, était confronté au choc culturel. Au XXI éme siècle, les problèmes des Africains entre autres ce sont la formation, l’emploi, l’immigration, la corruption, le népotisme, l’accaparement…

NdèyeCodou Fall

L’ami dont l’aventure n’est pas ambiguë, Amadou Elimane KANE, récit, Ed Lettres de Renaissances, Paris, 2013

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