Le président de la Cour suprême, Mamadou Badio Camara, a dénoncé, mardi à Dakar, les critiques « parfois outrageantes et le plus souvent injustes » contre la justice sénégalaise.
La justice « fait l’objet de critiques parfois outrageantes et le plus souvent injustes », a-t-il dénoncé à l’occasion de l’audience solennelle de rentrée des cours et tribunaux pour l’année judiciaire 2015-2016.
« C’est presque devenu, malheureusement, un fait de société alors qu’une justice forte est la meilleure garantie des libertés auxquelles aspirant nos citoyens », a-t-il déploré, en présence du chef d’Etat, Macky Sall.
« C’est pour nous, un grand réconfort, au moment où des forces obscures s’attaquent aux institutions, les discréditent et tentent de les déstabiliser, comme pour remettre en cause les fondements de l’Etat de droit et la paix sociale si chère à notre pays, a-t-il lancé à l’endroit de Macky Sall.
Selon le président de la Cour suprême, « c’est tout le système de protection pénale des institutions qui doit être revu pour être adapté aux nouvelles formes d’agression utilisant parfois, comme armes de destruction massive, les moyens de diffusion publique : la presse écrite, audiovisuelle et Internet. »
Les magistrats « ont conscience que les citoyens sont en droit d’attendre de leurs juges l’intégrité, l’indépendance et l’impartialité », mais « le nombre d’attaques personnelles dirigées contre des magistrats devient préoccupant, en particulier lorsqu’elles émanent d’auxiliaires de justice », a-t-il indiqué.
Après le « +porter presse +, pratique consistant à attaquer une partie adverse par voie de presse, au lieu de saisir les juridictions compétentes », la justice fait désormais face au ’’plaider presse’’, a fait valoir le président de la Cour suprême.
Si l’on en croit Mamadou Badio Camara, « certains avocats, par exemple, ne se préoccupent plus de convaincre les juges dans les salles d’audience, ils optent pour la conférence de presse pour rallier l’opinion à je-ne-sais-quelle bannière, d’une manière d’ailleurs non contradictoire. »
De l’avis du président de la Cour suprême, cette situation amène les autres parties à faire connaitre leurs positions par la même voie.
« Ces rencontres font souvent l’objet de dérapages graves au détriment des juges, pris à partie parce que leur décision ne plait pas », a souligné Mamadou Badio Camara.
‘’La justice sénégalaise a des problèmes et devrait faire l’objet d’une remise en question et d’une nouvelle prise de conscience pour améliorer son état actuel peu reluisant’’, a de son côté estimé le bâtonnier de l’Ordre des avocats du Sénégal, Me Ameth Ba.
Pour lui les maux de la justice ont comme noms : ‘’lenteurs administratives, impunité, complexité des procédures, défaillances des enquêtes de police judiciaire, instructions d’affaires laborieuses, surpeuplement carcéral, insuffisance de l’assistance judicaire, corruption …’’.
Aussi le bâtonnier de l’Ordre des avocats a-t-il interpellé le chef de l’Etat sur la nécessité de faire un ‘’diagnostic approfondi, partagé et une large concertation pour faire face aux mutations de la justice’’.
L’édition 2016 de la rentrée solennelle des cours et tribunaux portait sur le thème « Les collectivités locales et le contrôle de légalité.’’