Ousmane Diatta : un ancien cartouchard, devenu champion de l’humanitaire

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A 46 ans, Ousmane Diatta peut s’enorgueillir de sa modeste contribution au développement de son pays. Des Etats Unis où il est établi depuis une douzaine d’années, il vient au chevet des plus démunis dans le Sénégal des profondeurs. L’humanitaire est devenu la raison d’être de cet ancien cartouchard, qui a déserté les amphis pour se lancer dans la vie active, afin d’«aider sa mère». C’était en 1995.

Bachelier, Ousmane Diatta est admis à l’université Cheikh Anta Diop de Dakar. Mais il ne réussit pas de brillantes études dont peut rêver tout étudiant ambitieux. Il « cartouche » avant de faire ses adieux aux amphis. Il se lance alors dans la vie active. Le jeune étudiant d’alors va intégrer la Société des brasseries de l’Ouest africain (SOBOA) comme agent commercial. Il fallait bien travailler pour « pouvoir aider (sa) mère», explique-t-il. Auparavant, son destin croisa celui d’une star du basketball sénégalais, Astou Ndiaye, qui deviendra plus tard son épouse. Les performances de cette dernière l’avaient menée aux USA en 1992 à la faveur d’une bourse du sport. C’était juste après son Bac. Etudes terminées, stabilité professionnelle assurée, le tout devait être bouclé par un époux, un foyer et des enfants. Astou demande alors à avoir son petit cœur à ses côtés aux USA. Ousmane Diatta n’était pas particulièrement favorable à l’idée de rejoindre Astou dans son pays d’accueil. Mais l’amour est irrésistible. Il finira par obtempérer. C’est ainsi qu’il se rendit aux USA en 2000 sur la demande expresse et insistante de sa fiancée.

Cet amour qui les lie s’est matérialisé par la naissance en 2003 de triplés : deux filles et un garçon. Un événement survenu la même année où Astou gagnait le titre de champion de la Women national basket association (WNBA) avec l’équipe de Detroit Shock. «C’est la seule sénégalaise qui a joué et gagné à ce niveau. Et c’est le plus grand niveau du basket professionnel mondial », raconte avec fierté Ousmane. Mais des qualifications, Astou en avait accumulées auparavant un peu partout et même après celle de la WNBA. Elle a notamment gagné des titres au Brésil (2000), en Russie (2001) en Italie (2008) en Espagne, en France… Astou a joué différentes Coupe du monde et gagné tous les titres du Sénégal avec ASFO. Championne d’Afrique des Lionnes à plusieurs reprises, Astou est aujourd’hui titulaire d’un master en ressources humaines et management. L’ancienne capitaine des Lionnes du basket est actuellement commerciale tout comme Ousmane dans une grande boîte spécialisée dans la fabrication du matériel sportif basé à UTAH : la Icon Health and Fitness. Parallèlement, Ousmane, lui, a renoué avec les études qu’il avait arrêtées à Dakar. Il est en 3è année de Bachelor en sport management à l’Université de UTAH. Comme son épouse, il est un basketteur. Mais contrairement à elle, il n’a pas pu faire une carrière professionnelle. Toujours est-il que le couple de basketteurs utilise beaucoup la morale et les valeurs du sport pour faire du social. «Comme nous sommes des sportifs, nous utilisons les vertus du sport que sont : la solidarité, le partage, le respect de l’autre, le sens de la responsabilité et de la compétitivité, le sens du civisme et de l’amour de la patrie, pour participer, apporter notre contribution dans le développement de cette nation sénégalaise que nous tous partageons», argue Ousmane.

Tombé amoureux du basket dès l’âge de 15 ans, il a une grande taille qui se prête bien souvent à cette discipline sportive. Ousmane a notamment joué à l’US Gorée dans la petite catégorie. A Bopp, il a gagné le championnat en 1993 et la Coupe du Sénégal en 1994. L’ancien élève du lycée Maurice Delafosse a également joué à Kolda et au Casa Sport.

UNE ONG EPAULEE PAR L’EGLISE MORMONE ET DES UNIVERSITES

Après s’être bien introduits et bien intégrés dans la société américaine, Ousmane Diatta et son épouse fondent en 2006 une ONG. C’est à travers elle qu’ils donnent le sourire aux personnes désespérées. Dénommé Organisation africaine pour le développement académique et sportif (OADAS), l’ONG se fixe pour mission «de combattre l’illettrisme, l’analphabétisme, la pauvreté, les maladies et de préserver l’environnement». L’OADAS est épaulée par des partenaires comme l’église mormone, les universités américaines ainsi que des Américains de bonne volonté. «Nous apportons un tant soit peu assistance aux populations avec des dons de matériel médical, fournitures scolaires, chaises roulantes pour les handicapés et matériel sportif», souligne Ousmane. Le couple Diatta s’évertue à collecter tous les dons aux Etats-Unis et les convoie vers le Sénégal. Pour des raisons de transparence et pour assurer les donateurs du bon usage des dons, l’OADAS est accompagné par des docteurs, des sociologues, des psychosociologues lors du convoyage du matériel au Sénégal.

Le dernier matériel convoyé est composé de deux containeurs de 40 pieds d’une valeur de 350 millions de francs CFA destinés aux communes sœurs de Tamba et de Ziguinchor. Les fournitures scolaires sont distribuées dans des écoles élémentaires. Dans les hôpitaux, l’OADAS a offert du matériel chirurgical, des paquets pour nouveau-nés dans des maternités, des kits d’hygiène pour les nouvelles mamans. Des couvertures neuves ont été distribuées aux démunis et aux prisonniers de la maison d’arrêt et de correction (MAC). Quelques pouponnières du pays ne sont pas oubliées. Ainsi, la pouponnière Vivre ensemble de Mbour a bénéficié d’une ambulance médicalisée d’une valeur de 8 millions de FCFA et d’ensembles vestimentaires pour bébés. La pouponnière de la Médina, elle, a obtenu des paquets pour nouveaux- nés et de couvertures. Le dispensaire Nabil Chouchair de la Patte d’Oie a reçu des kits pour bébés. Aussi, une cinquantaine de chaises orthopédiques ont été distribuées dans le pays : 8 Tamba, 30 à Ziguinchor. Quelques-unes sont remises au Centre des handicapés de Talibou Dabo de Grand Yoff et le reste des chaises est revenu à des individus dont le jeune héros (handicapé moteur), Abdoulaye Seydi de Niarry Tally qui joue et manie l’ordinateur avec ses pieds. Ousmane précise que l’ensemble de ces œuvres de bienfaisance sont faites en partenariat avec l’Amicale des jeunes de la RTS avec l’onction de l’ancien directeur de la chaine, Babacar Diagne. L’OADAS dans ses programmes, a organisé des voyages avec des groupes sportifs des USA-notamment avec les groupes universitaires de basket de Berkeley, Californie en 2008. En 2011, ce fut avec l’université de Princeton. Tout cela vise à renforcer les relations culturelles entre les Etats-Unis et le Sénégal. C’est pourquoi Lewis Lukens, l’ambassadeur des USA à Dakar accompagne ces actions-là. On aurait pu dire que c’est de la diplomatie par le sport et la culture. D’autre part, l’ONG a aussi organisé des expéditions médicales au Sénégal avec des médecins américains associant leurs homologues sénégalais « pour aider à soigner les cas sociaux surtout dans le monde rural». Les régions de Kaolack et de Mbour ont notamment bénéficié de ce type de prestation. En outre, l’ONG organise annuellement des camps de basketball et de football pour pouvoir lancer «des messages sur l’importance de l’instruction et du bien-être social». Dès l’an prochain, Ousmane envisage d’étendre cette prestation à d’autres zones du pays. Ousmane semble avoir fait de la philanthropie un sacerdoce pour le reste de sa vie et cela demeure la source de son épanouissement. Il y travaille avec ardeur. «Je travaille toujours depuis que j’ai cessé d’aller en boite. Je passe tout le temps à travailler, à combattre l’injustice sociale, visiter les centres de santé», nous explique-t-il avec un ton modeste. «Tant que je vis et que je peux assister les femmes et les enfants, je suis épanoui. Je rends grâce à Dieu». L’OADAS est actuellement en train de construire son siège social à Mbour. Les donateurs et l’Etat américain leur facilite beaucoup de choses. Mais le gros problème réside dans le convoyage du matériel vers le Sénégal. C’est là où Ousmane attend la participation de l’Etat du Sénégal et autres personnes ressources

GRIEFS CONTRE UNE ADMINISTRATION « INFORMELLE »

Mais l’émigré a de sérieux griefs contre les vielles mauvaise habitudes des dirigeants de son pays. Ses démarches pour rencontrer ceux-ci afin de poursuivre sa mission se heurte à des murs difficilement franchissables. Trop «d’intermédiaires», trop de «personnes tampons pour accéder aux personnes qui prennent des décisions», Ousmane est tout simplement « frustré par le nouveau régime». Aprés un séjour aux Etats Unis, du retour au bercail, on perçoit très facilement les tares de sa société et on s’en étonne. C’est ce qui arrive à Diatta. Il ne comprend pas tant de barricades artificielles érigées pour que personne ne voie si facilement le chef de l’Etat. Alors que c’est pour aider l’Etat dans sa politique sociale. L’OADAS cherche notamment à nouer un partenariat avec la Fondation Servir le Sénégal de la Première dame en vain. «Il faut qu’on arrête de travailler dans l’informel, qu’il y ait un peu de professionnalisme même dans le secteur de l’humanitaire », s’offusque Ousmane Diatta. «Même l’administration est dans l’informel dans ce pays. Il y a du laxisme et un manque de professionnalisme», se lâche le champion du développement local. Ousmane loue à sa juste valeur les actions de Harouna Dia, un autre champion de l’humanitaire qui beaucoup a fait dans son village de Windou Bosséabé en faveur des populations, en particulier des femmes. Les deux hommes se sont d’ailleurs rencontrés pour échanger sur leur commune vision du développement local

FREDERIC ATAYODI

Le Pays au Quotidien

5 Commentaires

  1. C’est vrai Ami ce que tu dis. Je connais Ousmane Diatta depuis le lycee Djignabo a Zchor et la derniere fois que je l’ai vu c’etait a un camp de basketball qu’il a organise a Kolda pour les enfants.Il n y a pas plus patriote que Ousmane Diatta. Il a plein d’idees et un engagement volontaire et citoyen sans faille pour le developpement du Senegal. Il est mieux que nos dirigeants politiques casamancais. Les grandes autorites doivent ouvrir leurs yeux et appuyer ce que des Senegalais comme lui font sans bruit ni trompette. Bon courage Mr Diatta, je suis fiere de vous.
    Fadiaba depuis Ziguinchor

  2. C’est un homme de cœur, un esprit ouvert. Sa force, c’est l’amour du prochain. Cela se traduit par un engagement citoyen pour servir dans l’anonymat le maximum de personnes. Que Dieu guide ses pas. Hommage aussi à son épouse citée dans cet article. Derrière tout grand homme, il y a une grande dame. Que Dieu guide leurs actions.

  3. C’est un homme de cœur, un esprit ouvert. Cela se traduit par un engagement citoyen pour servir dans l’anonymat le maximum de personnes. Que Dieu guide ses pas. Hommage aussi à son épouse citée dans cet article. Derrière tout grand homme, il y a une grande dame. Que Dieu leur apporte plein de baraka dans toutes leurs actions.

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