Pourquoi archiver ? Par Alassane DIOUF

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LES ARCHIVES : POURQUOI ET COMMENT ?

INRODUCTION

Les premières formes d’écriture sont des tablettes de compte en argile, trouvées dans les villes de Mésopotamie vers 3 300 av. J.-C. On écrit pour conserver une trace de certains accords : certificats de mariage, contrats de sociétés, contrats de location, ventes de biens, testaments, courriers, etc. Ces actes constituent dès leur naissance des archives appelées à être conservées.

Répondre à notre question nous amène à nous entretenir d’abord autour du mot archives, ensuite pourquoi les archives et enfin comment doit – on archiver.

  1. Qu’est ce que les archives ?

Répondre à une telle question nous amène à chercher à connaitre l’origine de la discipline et sa définition.

C’est au XIVe et XVe siècles que les premiers services d’archives voient le jour en Europe mais l’absence de textes législatifs autour de cette discipline fut notée. C’est au XVIIe siècle que l’on commence à produire des réflexions sur les archives avec cette science appelée la Diplomatique.

Cette science qui étudie l’authenticité des documents avait pour but de faire la distinction entre le vrai et le faux c’est – à – dire séparer la bonne graine de l’ivraie.

Cette science qui étudie l’authenticité des documents avait pour but de faire la distinction entre le vrai et le faux c’est – à – dire séparer la bonne graine de l’ivraie. L’on a encore de mémoire, le Père PAPENBROECK et MABILLON Jean qui, publièrent respectivement en 1675 dans Acta sanctorum, un texte sur les vieux parchemins et en 1681, le De re diplomatica. Ils avaient tous un point de vue à exprimer sur les caractères intrinsèques et extrinsèques des documents.

Les documents d’archives doivent être organisés donc classés pour que l’on puisse les retrouver sans difficulté dans le contexte d’une administration « papivore » (1) pour emprunter le terme d’Henry GRANDMAISON.

L’accessibilité aux archives publiques devenant une exigence citoyenne à la suite de la révolution française, il fallait encadrer ce droit d’accès à travers des textes réglementés.

L’histoire nous renseigne qu’en 1841 le Ministre de l’Intérieur français par l’intermédiaire de Natalys de Wailly (2) qui avait conceptualisé le principe de respect des fonds, envoya aux Archives départementales une circulaire à propos de ce principe qui veut que le document soit traité en fonction de sa provenance et non de son sujet. L’archivistique commence au plan législatif à prendre forme jusqu’à ce qu’on ait dans certains pays une législation pour protéger les archives mais également les archivistes.

La première loi d’archives au Sénégal date de février 1981 mais celle – ci a été réadaptée en juin 2006 sous le vocable Loi N° 2006 -19 du 30 juin 2006 relatives aux archives et aux documents administratifs.

Comme définition, l’on retient que : « Les archives sont l’ensemble des documents quels qu’en soient la nature, la date, la forme ou le support matériel, produits ou reçus par une personne physique ou morale, un organisme public ou privée dans le cadre de ses activités ».

De cette définition, l’on perçoit le rôle éminent que ces dernières jouent dans la marche quotidienne de notre administration ou de notre vie tout court.

  1. Pourquoi les archives ?

Les archives après leur création sont collectées, traitées, classées et conservées à des fins utilitaires. Elles constituent la mémoire vivante des actes des hommes durant leurs activités. Elles retracent la vie de l’homme, des sociétés au courant de leur histoire.

  • Les archives permettent la continuité du service administratif
  • Elles sont des documents de preuve
  • Elles permettent la recherche historique
  • Elles sont un facteur de développement économique, social et culturel

Le Président François MITTERAND résume cela en ces termess : « Les archives de tous les pays, en gardant la trace des actes d’hier et leurs cheminements éclairent mais aussi commandent le présent. Ceux qui exercent une responsabilité savent bien qu’on ne définit pas des orientations dans l’ignorance du passé ».

Dans un contexte de bonne gouvernance et de transparence dans la gestion des affaires publiques, les archives constituent un levier sur lequel doit s’appuyer toute administration du fait de leur caractère indéniable d’outils de preuve et de moyens à la prise de décision.

On le dit souvent : « les paroles s’envolent, les écrits restent ».

Mais, s’agit- il uniquement de disposer de ses archives ou de bien les tenir après les avoir collectées ?

C’est là toute la problématique de notre patrimoine documentaire qui a besoin d’être sauvegardé et valorisé.

L’ancien Premier Ministre Souleymane Ndéné NDIAYE en procédant à l’ouverture officielle de la semaine internationale des archives francophones le 19 octobre 2009 à Dakar, déclarait : « Un peuple sans archives, est un peuple sans histoire » et l’autre de dire tout simplement : « la culture est l’âme d’un peuple, les archives en sont la mémoire ».

  • Comment archiver ?

Il serait bon que l’on sache qu’il y’a deux sortes d’archives : les archives publiques relevant des structures étatiques et les archives privées appartenant à un individu, une entreprise, une association, un syndicat ou un parti politique etc.

A cette question comment archiver, nous remontons à la chaine documentaire allant de la collecte à la conservation et diffusion, en passant par le traitement et le classement. Cependant, cette chaîne est  adossée à l’existence d’une production documentaire c’est – à – dire à un fonds documentaire pour rester dans le jargon archivistique. En ce sens, nos administrations n’en manquent pas et sont aujourd’hui même confrontées à une inflation documentaire, les technologies de l’information et de la communication venant avec leur lot d’archives informatiques et numériques. Les archives informatiques sont les archives créées par l’ordinateur ou arrivées au service  d’archives sous forme virtuelle et dont on ne peut situer d’original physique tandis que les archives numériques sont, l’ensemble des archives (physiques) numérisées et des archives informatiques, conservées sur un support numérique.

On les appelle aussi archives électroniques.

Face à  cette inflation documentaire, il fallait l’intervention de spécialistes formés en la matière d’où l’apparition du corps des archivistes et la création d’écoles de formation à l’instar de l’Ecole des Bibliothécaires, Archivistes et Documentalistes (EBAD) de Dakar, l’UFR CRAC de l’UGB.

A noter aussi l’existence d’autres écoles et instituts de formation en archivistique à travers le monde entier tels que l’ESI du Maroc, l’Ecole du Patrimoine Africain (EPA) au Bénin, l’Institut National du Patrimoine (INP), l’école des Chartes et l’ENSSIB en France.

C’est dire que toute politique archivistique fiable doit se reposer d’abord sur la disponibilité de ressources humaines qualifiées et viennent ensuite les moyens matériels et financiers.

Les archivistes, bibliothécaires et documentalistes communément appelés professionnels de l’information documentaire sont seuls aptes à appliquer à cette chaine documentaire les règles qui la régissent.

L’archiviste, détenteur de par sa profession, d’informations consignées sur un support papier ou électronique reste et demeure ce maillon incontournable d’une administration soucieuse de développement de l’Etat de droit.

L’archiviste travaille à garantir l’existence du document, qu’il soit accessible, traçable, authentique, fiable, intègre et exploitable.

Aujourd’hui,  des archivistes sont formés sur le tas selon l’expression et cela ne milite pas à une bonne gestion de l’information documentaire, ces derniers n’ayant aucune base archivistique pour faire le travail convenablement. Pour solutionner leur problème d’archivage, certaines entreprises s’attachent aussi les services de cabinets d’archivage ce qui n’est pas condamnable mais la question est de savoir et après ? On oublie souvent que traiter une partie ou l’ensemble d’un fonds d’archives ne peut être considéré comme une phase transitoire étant entendu que l’entreprise secrète quotidiennement des documents qui doivent être pris en compte dès que le processus de création est entamé avant leur archivage lorsque l’affaire sera close.

Le professionnel de l’information documentaire est en amont et en aval de tout système d’informations basé sur une pratique qui se veut moderne et opérationnelle.

« Qui détient l’information, détient le pouvoir » a-t- on l’habitude de dire mais faudrait que cette information soit bien traitée et conservée car « un document mal classé est un document perdu » et donc une information perdue.

Par définition, le document qui vient du latin « docere » qui veut dire « enseigner » désigne tout objet auquel on a confié de l’information (information écrite, sonore, graphique) en vue de la communiquer.

Il s’avère donc, qu’une véritable politique archivistique prenant en compte les aspects normaux en la matière soit de mise aussi bien dans le secteur public que privé pour qu’enfin on arrive à sauvegarder et valoriser notre patrimoine documentaire, mémoire de toute une nation.

CONCLUSION

« « Les archives sont l’arsenal de l’administration avant d’être le grenier de l’histoire ».» disait Charles BRAIBANT. Les archives contribuent inéluctablement à la bonne marche de nos services, de notre société, elles doivent être conservées, sauvegardées et valorisées pour la recherche scientifique mais également pour les générations à venir.

Sauvons notre patrimoine documentaire pour qu’ « au rendez vous de l’histoire qu’il n’yait pas de mensonge historique » comme disait l’autre.

Alassane DIOUF

  • Henry GRANDMAISON : le Papivore, Payot, 1976

2 – Natalis de Wailly est un historien, archiviste et bibliothécaire français né le 10 mai 1805 à Mézières, mort à Paris le 4 décembre 1886.

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