Sauver le soldat Sankharé : à propos du livre Le coran et la culture Grecque par Mor Ba

D’emblée, voici mon propos : autant je m’inscris en faut contre plusieurs des arguments du professeur Sankharé, autant je me dresse debout pour saluer son œuvre, et pour défendre sa personne contre les attaques injustifiées dont il fait l’objet depuis la publication de son ouvrage. C’est donc une réaction au débat qui a suivi la sortie du livre. Répondre aux affirmations totales de cet ouvrage avec le sérieux qui sied est une tache que je laisse aux gens de l’École de la Jonction. J’expliquerais plus tard qui sont-ils.
Sauver le soldat Sankharé
En matière de contestation soyez sur la défensive, nous a enseigné Serigne Babacar Sy, l’un des plus grands intellectuels de son temps. Ce n’est pas par l’invective. Car cette dernière nous dit Cheikh Ahmed Tidiane SY Almaktoum, est un manque criard d’argument. L’invective n’est utilisée qu’en dernier recours, lorsqu’on est à court d’argument. Et justement, d’argument, il n’en manque pas pour répondre au Professeur Sankharé. Le combat, est d’abord inllectuel renchérit Al Maktoum. Ou si vous voulez bien, la guerre des idées. Quand les ennemis de l’islam écrivent des contrevérités, prenez le temps qu’il faut pour réunir vos arguments, et par la méthode de la production intellectuelle, renvoyer leur à la face vos quatre vérités afin qu’ils se rendent compte que le terrain scientifique n’est l’apanage ni des ennemis de l’islam ni de l’occident tout simplement. (Sagesse d’Al Maktoum)
Loin de moi l’idée d’assimiler le Professeur Sankharé à un ennemi de l’islam. Mieux encore, j’affirme que dans la situation actuelle, c’est un soldat de l’islam. Pourquoi ? Parce qu’il est musulman, savant et en tant qu’intellectuel chercheur, l’un des meilleurs musulmans comme l’aurait souhaité le Prophète (PSL). (Recherchez le savoir même s’il faut aller jusqu’en Chine. Hadith). Même s’il a tord dans son livre, c’est par des arguments coraniques, scientifiques et intellectuels qu’il faut lui répondre. Notons que le coran, qui contient l’histoire de l’humanité, la charia et les recommandations divines, est de toutes les religions révélées, la seule dont les théories sont corroborées scientifiquement. (Voir La Bible, le Coran et la science de Maurice Bucaille). Lors d’un débat sur ce sujet, un ami m’a dit ceci : je comprends ton argumentaire, mais dis-toi que les sénégalais lambdas qui entendent ces affirmations ne peuvent pas tolérer qu’on s’attaque au dogme de cette manière. Je lui ai répondu que premièrement les sénégalais lambdas n’ont même pas lu le livre. Deuxièmement, je ne serai pas intervenu dans ce débat s’il s’agissait que d’eux. Mais ce sont des responsables religieux de hautes sphères qui ont attaqué (pas simplement critiqué) Sankharé dans des attitudes que je ne reprendrais pas ici. Sans avoir pris le temps de lui reconnaitre son mérite, on l’a fait passer de héros à victime en l’espace de quelques heures simplement en surfant sur des vagues d’émotions d’une opinion aussi rependue soit-elle. Ce n’est pas de cette manière qu’il faut répondre. Pas besoin de s’énerver ou de dénigrer car il n’a fait que nous inviter à un débat intellectuel, notre terrain de jeu favori normalement.
Rendre hommage au Professeur Sankharé, un héros incompris?
En plus du fait de sa contribution remarquable à la recherche du savoir et de la vérité, nous devons lui rendre hommage surtout pour sa hauteur et sa dimension morale dont il a fait preuve en présentant publiquement des excuses auprès des musulmans qu’il aurait offensés.
Dans un débat, il y a toujours des questions de fonds et des questions de forme. Sur la forme, il s’est excusé, mais doit-on se contenter de cela? Le Professeur n’a jamais remis en cause sa thèse, ce qui nous renforce dans l’idée que dans quelques jours, les paroles de ceux qui attaquaient Sankharé seront oubliées tandis que pour plusieurs décennies encore les écrits du Professeur demeureront et pourraient servir d’appui aux détracteurs de l’islam. Ce que l’on veut c’est une reprise des arguments sur le fond. Ce que l’on a pour le moment ce sont des excuses, sur la forme. Cheikh Tidiane Al Maktoum nous revient avec ce conseil : se contenter de ce que l’on a est trop ordinaire devant l’admirable principe de ce que l’on veut.
Sankharé mérite d’être saluée en tant que héros car les conclusions de son ouvrage ne font que corroborer les affirmations coraniques (Nahnou nakhoussou halayka naba ahoum bil hakhi… Nous allons te raconter leur récit en toute vérité (le coran, sourate 18:v.13). Sankharé a beau avoir tord dans le fond, son travail de recherche reste utile dans la quête de la vérité. Cela étant, le fait de relater dans un livre que des histoires dans la Grèce antique sont récitées textuellement dans le coran ne fait qu’étayer la thèse de celui-ci. Seulement, il faut arriver à se rendre compte que de toutes les traditions orales, écrites et spirituelles, c’est le texte coranique qui correspond à la vraie version des faits (naba ahoum bil hakhi- en vérité).
Du devoir de battre en brèche l’argumentaire du Professeur Sankharé
Je dois rappeler que même entre musulmans, la diversité des interprétations du coran et du sens de ses versets, non seulement elle est permise, mais c’est ce qui caractérise notre réalité. Le professeur a donc le droit d’avoir une lecture à lui, entre autres du verset suivant :
Houwal lazi bahassa fil oummiyina rassoulane. C’est Lui qui a envoyé à des gens sans Livre (les Arabes) un Messager des leurs…Sourate 62 :v.2.
Quand il dit que Oummiyina ne signifie pas toujours analphabètes, moi je lui concède cette acception. On peut le traduire comme les gens sans livre, en référence aux arabes, qui étaient dans un égarement évident. Les mots ont des sens qui varient en fonction des contextes dans lesquels ils sont utilisés. On n’a pas besoin d’être agrégé en grammaire pour le savoir.
Mais la ou le bât blesse, c’est quand il affirme que nulle part dans le coran on ne dit que le prophète était analphabète. Le fait de croire que le PSL ne savait ni lire ni écrire l’arabe ou toute autre langue, si cela était lié simplement à une question de dogme, on serait tenté de laisser le professeur croire ce qu’il veut. Mais plus qu’un dogme, l’analphabétisme de Mohammad (PSL) est une réalité historique dont il faut s’accommoder. Ce qui est plus important ici, c’est que telle était la volonté du bon dieu de laisser l’âme du Prophète (PSL) dans une virginité que rien d’autre que la science coranique ne saurait épouser. (Alam nachrah laka sadraka…N’avons nous pas ouvert pour toi ta poitrine? Sourate 94 :v.1) Nous sommes le seul peuple au monde qui sommes fiers d’affirmer que notre leader est analphabète, parce que son savoir et son œuvre sont plus vastes que toute forme d’apprentissage. Il fait partie des rares personnes citées dans le coran à qui dieu a enseigné directement le savoir.

Du premier verset révélé : (Lis, au nom de ton Seigneur… Surate 95 :v.1)
Il s’agit ici de répondre au propos selon lequel Mohammad savait lire. Le coran n’a pas dit ikhra isma rabbika. (Ce qui aurait signifié : lis le nom de ton seigneur). Mais ikhra bi…ismirabbika signifie lis au non de ton seigneur. Je vous laisse apprécier la différence entre le complément d’objet direct et le complément d’objet indirect, causée par la présence du « au » contraction de « à» et de « le ». Lis au nom d’Allah signifie lis par le biais du nom d’Allah.
Voici un autre exemple. Quand je te dis : je lis dans tes yeux ta souffrance, tu ne t’intéresse pas à savoir avec quel alphabet ou langue je fais cette lecture. Mais quand je te dis : je lis ton texte, tu comprends que je suis alphabétisé dans la langue d’écriture de ton texte. En conclusion, il faut admettre ici que «lire à » puisse avoir une autre acception que « lire », tout court.
Je pense honnêtement qu’il s’est trompé et de bonne foi, comme certains chroniqueurs l’ont déjà dit.
Attention : il est très facile de parler à Sankharé en tant que membre d’une même croyance musulmane. Le simple fait de lui citer d’autres versets qui contredisent sa théorie suffit pour clore le débat sur certaines questions. Personne n’est parfait, y compris lui, en plus de l’humilité qu’on lui connait en présentant des excuses publiques. Il ne serait pas difficile à convaincre dans un débat raisonnable.
Ce qui est primordial, c’est de savoir lui opposer des arguments que même un auteur incrédule soit obligé d’accepter sur le plan intellectuel et scientifique. Khadim Ndiaye l’a fait bien du point de vue de la culture grecque, certains ont déjà répondu du point de vue la langue arabe, tandis que d’autres ont appuyé leur argumentaire du point de vue de l’interprétation du coran. Le champ est vaste, le travail à faire considérable alors il n’y a pas de place ni à la futilité ni à la vulgarité. Par exemple, pour un musulman qui croie au coran, il est aisé de faire admettre que la transmission du savoir coranique n’a souffert d’aucune ambigüité entre le Prophète et ces scripts. Dieu dit : En vérité c’est Nous qui avons fait descendre le Coran, et c’est Nous qui en sommes gardien. (Sourate 15 :v.9).
Sankharé croit en la révélation. Mais entre celle-ci théorique et le texte écrit pas les compagnons du Prophète, il pense qu’il y a eu place à l’interprétation et à l’influence d’autres traditions en l’occurrence grecques. En définitive, le texte que nous avons aujourd’hui ne serait pas révélé, mais inspiré, selon lui! Mais Sankharé parle de ce fait avec une légèreté telle que ce ne sera pas tache facile de le raisonner sur cette question. Courage aux gens de l’École de la Jonction à qui revient cette tache.
Vous aurez déjà compris que ma contribution à ce débat n’est qu’exemplaire et je suis confiant que les scientifiques feront le reste du travail. Dans cet ordre d’idées, j’approuve la suggestion de Khadim Ndiaye qu’il faut que << des passerelles sont créées entre les daaras et l’université. >> Mais il faut faire attention là-dessus. Je rappelle que cela fait déjà plusieurs décennies que, Cheikh Tidiane Al Maktoum avait lancée cette invitation à la jeunesse musulmane de faire la jonction entre l’université du Prophète (PSL) et celle qui nous vient de l’Occident. Sans perdre de vue bien entendu, que l’université de l’Occident, dans sa forme actuelle était à l’origine une invention du monde arabo-musulman avant d’être copiée par les autres. On n’a pas besoin de regarder trop loin. Le professeur Sankharé, puisque c’est de lui qu’il s’agit, est lui-même produit de cette jonction. En plus d’être professeur renommé universitaire, deuxième agrégé en grammaire après son idole, est croyant, musulman, adepte de l’islam confrérique, ayant fait allégeance à son marabout, de surcroit arabisant. J’entends une voix me dire il ne connait que très bien le français, assez bien la culture grecque, un peu le coran et dans une moindre mesure l’arabe. Soit, mais toujours est-il que la plupart de ses détracteurs n’ont pas un profil aussi garni. Personne n’est parfait, mais surement il y a un gros travail qui a été effectué dans ce sens depuis la fin de la colonisation dans nos sociétés. J’insiste sur cette idée car il est évident que ce sont les intellectuels, produits de cette École de jonction à qui revient le travail de restituer la vérité.

Mor BA apprenti Ndongo Daara
Montréal Canada