Sénégal AN 50 – marche vers le développement : Le bel âge de la Renaissance

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C’est comme sur un long chemin parsemé d’épreuves, la marche du Sénégal vers l’indépendance. De grandes figures ont porté la grande cause de ce peuple digne dans la nuit de la dépendance comme au matin de la souveraineté internationale acquise avec les armes de la paix, de la fermeté et d’un fort ancrage dans les cultures frappées de mépris. Une autre vie a commencé. La même envie de progrès continue. En 1960 comme en 2010, le défi du développement est au cœur des préoccupations quotidiennes pour un pays qui, dès la fin de la colonisation, a entrepris de bâtir un Etat de droit et un système démocratique fiable mais aussi de jeter les bases d’un modèle économique viable. Cinquante ans après, l’affirmation des identités culturelles africaines porte les réponses à apporter aux effets néfastes de la Mondialisation. Cette Renaissance, adaptée aux urgences de l’heure, a pour socle le devoir de mémoire et se nourrit de la philosophie de l’action. C’est sans doute ce qui explique le choix porté cette année sur la thème « Renaissance et Développement ».

ACCESSION A L’INDÉPENDANCE : La longue marche vers la souveraineté internationale

Membre de la Fédération de l’Afrique-occidentale française (Aof) depuis sa création, en 1895, le Sénégal prend par référendum la décision de devenir une République au sein de la Communauté française en 1958. Il accède à l’indépendance dans le cadre de la Fédération du Mali le 20 juin 1960 avant de s’émanciper de cet Etat fédéral en août 1960. Mais que de péripéties pour en arriver-là.

ALa marche vers l’indépendance du Sénégal, comme de la plupart des autres possessions françaises d’Afrique, trouve son origine dans la Conférence de Brazzaville qui se tint en 1944. Sans les représentants africains, le Général de Gaulle, conscient de la poussée nationaliste partout dans le continent, décida d’assouplir sa position. « Il appartient à la France et n’appartient qu’à elle de procéder, le moment venu, aux réformes impériales de structure qu’elle décidera dans sa souveraineté ». Mais cette déclaration de principe pouvait difficilement résister à la poussé contestatrice qui sourdait dans les colonies africaines de la France. Le colonisateur n’envisageait pourtant nullement d’accorder l’indépendance à ses colonies. Elle savait pourtant que des réformes étaient nécessaires, urgentes même.

C’est ainsi qu’en 1956, date importante dans l’histoire de la marche du Sénégal vers l’indépendance, le vote de la Loi-cadre accorde une semi-autonomie au Sénégal et aux autres territoires de l’Aof. Cette loi dite Loi-cadre Defferre est adoptée le 23 juin 1956 sur l’initiative de Gaston Defferre, ministre français d’Outre-mer et maire de Marseille. On l’appelle « Loi-cadre » car elle habilite le gouvernement à statuer par décret dans un domaine réservé en principe à la loi. Elle crée dans les territoires d’Outre-mer des Conseils de gouvernement élus au suffrage universel, ce qui permet au pouvoir exécutif local d’être plus autonome vis-à-vis de la Métropole. Elle crée aussi le Collège unique alors que jusque-là les habitants étaient répartis en deux collèges selon leur statut civil (de droit commun ou de droit local). Pour l’essentiel, la loi consiste à élargir les compétences des Assemblées territoriales élues au suffrage universel et à créer, dans chaque territoire un conseil de gouvernement dont le vice-président qui deviendra en 1958 président est élu par l’Assemblée qui peut le renverser.

Senghor est contre la nouvelle politique coloniale de la Métropole. Dans le débat parlementaire, ses critiques portent principalement sur ce point. « Vous balkanisez l’Afrique », dit-il, « vous allez à l’encontre de son unité ». Il s’abstiendra lors du vote de la loi sous prétexte que « ces réformes ne sont que bonbons et sucettes ».

Loi-cadre Defferre

L’opposition de l’ancien président sénégalais à la nouvelle politique tenait essentiellement en deux points. D’abord, pour une raison politique : la balkanisation fera éclater la grande et forte Aof en huit petits Etats faibles aux frontières tracées par le colonisateur sans tenir compte des configurations ethniques. Ensuite, parce que la Fédération profite beaucoup au Sénégal. La politique fédéraliste de Senghor est soutenue par la majorité des dirigeants africains, politiques et syndicaux.

La Côte d’Ivoire de Houphouët Boigny, la Mauritanie et le Gabon de Léon Mba sont contre la fédération. La Côte d’Ivoire parce qu’elle ne voulait plus servir de « vache à lait » et la Mauritanie où la majorité arabo-berbère refuse d’entrer dans un Etat fédéral dominé par les Noirs.

Le retour au pouvoir du Général de Gaulle en mai 1958 met Senghor dans une posture très difficile. Son projet de Constitution coupe la poire en deux. Il tient compte des réticences de Houphouët alors ministre d’Etat, mais ne ferme pas la porte aux fédéralistes. L’article 76 prévoit que les territoires qui auront adopté la Constitution devront, s’ils décident de changer de statut, choisir de devenir départements d’Outre-mer ou Etats membres de la Communauté, groupés ou non. Les regroupements sont donc possibles, mais la France ne les imposera pas. C’est un pas décisif vers l’indépendance. Senghor est coincé. Le Parti du regroupement africain (Pra) qu’il préside tient son congrès à Cotonou du 25 au 27 juillet 1958 et réclame l’indépendance immédiate, c’est-à-dire une réponse négative au référendum constitutionnel prévu le 28 septembre de la même année. Une tournée africaine du Général est ainsi prévue dans les colonies qui se terminera par Dakar le 26 août 1958.

Acculé par son parti désireux de voter contre le projet constitutionnel, Senghor ne sera pas à l’accueil du Général. Le jour de la visite du Général, il était à Vichy en compagnie de Mamadou Dia, en cure thermale. De Gaulle s’adresse à la foule réunie en fin d’après-midi Place Protet (aujourd’hui Place de l’Indépendance). Aux porteurs de pancartes groupés au fond de la place revendiquant « Indépendance immédiate », « Nation fédérale africaine », « Unité africaine », je veux, s’écrie-t-il d’une voix sonore diffusée par une sono bien réglée, dire ceci : « S’ils veulent l’indépendance, qu’ils la prennent le 28 septembre ».

Le lendemain, c’est un de Gaulle pessimiste qui quitte Dakar. Mais le ministre de la France d’Outremer, Bernard Cornut Gentile reste encore deux jours. Il a été Gouverneur général de l’Aof, quelques années plus tôt et connaît bien le Sénégal. Il sait que Lamine Guèye et ses amis socialistes sont favorables à la Constitution. C’est ainsi qu’il s’appuiera sur les chefs religieux comme Seydou Nourou Tall, Ibrahima Niasse, Falilou Mbacké et Cheikh Tidiane Sy et, en accord avec eux, rend publique leur décision favorable qui devient ainsi irrévocable. Le projet de Constitution sera ainsi voté par une très large majorité de Sénégalais (Inscrits 1.110 823, exprimés 893.272. Le « Oui » obtient 870.362 contre 22.910 pour le « Non »).

Fédération du Mali

En application d’une ordonnance du 7 octobre 1958, les territoires ayant approuvé la Constitution, c’est-à-dire tous les territoires français d’Afrique, à la seule exception de la Guinée devenue indépendante par son vote négatif, doivent choisir dans un délai de quatre mois leur futur statut. En Aof et en Aef, tous choisissent le statut d’Etat membre de la Communauté.

Profitant alors de l’article 76 de la Constitution, Senghor et Modibo Keita décident d’unir le Sénégal et le Soudan français dans une Fédération qui prend le nom de Mali.

Le 4 avril 1959, Léopold Sédar Senghor est élu président de l’Assemblée fédérale et le Modibo Keita président du gouvernement, Mamadou Dia devenant vice-président. Dans les deux pays, les scrutins organisés en mars 1959 ont dégagé une majorité très nette en faveur de ce système fédéral. Ses défenseurs, Modibo Keita et Jean-Marie Koné, ont obtenu au Soudan 78 % des voix contre les tenants de l’indépendance soudanaise, Hammadoun Dicko et Fily Dabo Sissoko. Les deux pays peuvent apparaître complémentaires, le Sénégal fournissant un débouché maritime au Soudan, territoire enclavé mais qui abrite près de la moitié de la population de l’ancienne Aof. En août 1959, Modibo Keita critique les essais nucléaires français réalisés au Sahara après les propos tenus à Tunis par Mamadou Dia contre la poursuite de la guerre d’Algérie. Ces critiques tendent les relations avec Paris. Et, le 28 septembre 1959, Modibo Keita et Mamadou Dia sont reçus par de Gaulle et lui annoncent que la Fédération du Mali compte accéder à l’indépendance sans quitter la Communauté, ce qu’accepte le général.

Les 11 et 12 décembre 1959, lors du conseil exécutif de la Communauté réuni à Saint-Louis du Sénégal, le général de Gaulle annonce l’accès à l’indépendance du Mali, par transfert des compétences communautaires. Mais la Fédération du Mali ne deviendra complètement indépendante que le 20 juin 1960. Cette indépendance est la conséquence des transferts de pouvoirs convenus dans l’accord signé en France le 4 avril 1960. Cette date est à retenir puisque c’est elle qui sera choisie par le Sénégal pour l’anniversaire de son accession à l’indépendance.

Mais la perspective de la désignation du président de la Fédération cristallise les passions et une rivalité sourde oppose Senghor à Modibo Keïta. C’est ainsi que le 20 août 1960, l’Assemblée sénégalaise décide le retrait du Sénégal de la fédération du Mali et proclame l’indépendance, le gouvernement de Dakar récupérant la totalité des pouvoirs et proclamant l’Etat d’urgence pour une durée illimitée. Les frontières entre le Sénégal et le Soudan sont fermées.

Modibo Keita accuse les Sénégalais de sécession et reproche à la France de l’avoir encouragée.

Senghor est le premier président de la jeune République, Mamadou Dia assurant la présidence du Conseil et Lamine Guèye celle de l’Assemblée nationale.

Par Sidy DIOP
lesoleil.sn

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