Le Président écrit à Souleymane NDéné Ndiaye : «… dorénavant toutes les missions à
l’étranger devront recueillir mon autorisation»
Lorsque le Premier ministre Souleymane Ndéné Ndiaye, leur transmettra les instructions du président de la République qui se plaint de leurs nombreuses missions à l’étranger, certains membres du gouvernement, dans le tréfonds de leur conscience, étoufferont certainement de rage.
Lorsque le Premier ministre Souleymane Ndéné Ndiaye, leur transmettra les instructions du président de la République qui se plaint de leurs nombreuses missions à l’étranger, certains membres du gouvernement, dans le tréfonds de leur conscience, étoufferont certainement de rage. Le Président Wade qui a instruit le Premier ministre pour que les missions des membres du gouvernement lui soient désormais soumises pour autorisation préalable, ne prêche pas, lui-même, dans ce domaine, par l’exemple.
Par Soro DIOP
Dans une lettre n°00261 du 20 avril 2010 et portant en objet «Missions à l’étranger des membres du gouvernement», le président de la République, Abdoulaye Wade a fait remarquer au Premier ministre Souleymane Ndéné Ndiaye, qu’il lui «a été constaté au cours de ces dernières semaines le déplacement simultané, hors du Sénégal, d’un nombre relativement élevé de ministres». Au chef du gouvernement, le Président Wade fera savoir qu’«une telle situation, outre la charge qu’elle constitue pour les Finances publiques, est préjudiciable à l’exécution diligente de dossiers prioritaires». Pour mettre un terme à ces nombreuses missions hors du Sénégal de ses ministres, le Président Wade, dans sa lettre, a donné instructions au Premier ministre Souleymane Ndéné Ndiaye de bien vouloir «noter et informer les membres du gouvernement que dorénavant toutes leurs missions à l’étranger devront recueillir (son) autorisation préalable», lui, le chef de l’Etat. Par les soins du Premier ministre, Me Wade informe les ministres, entre autres membres du gouvernement, qu’en cas de déplacement, ils devront désormais l’aviser «dans des délais raisonnables, tout en précisant les motifs» de leurs missions à l’étranger. Par la même occasion, dans sa correspondance au chef de la station «primatorale», le président de la République a tenu à réitérer ses «instructions concernant la mise à contribution plus systématique de nos ambassades et consulats pour assurer la représentation du Sénégal dans les manifestations auxquelles notre pays est convié». Le Président a demandé, avant de conclure à ce que Souleymane Ndéné Ndiaye veille «personnellement à l’application stricte de ces instructions».
Les contre EXEMPLES DU MAîTRE
Seulement, on est en droit de s’interroger sur ces mesures et instructions du Président Wade concernant les membres du gouvernement. Des faits ne manquent pas pour relever que Me Wade, dans ce domaine, ne prêche pas par le bon exemple, lui, le plus grand voyageur à l’étranger devant l’Eternel. Pour preuve, le 13 mai 2009, le journal Le Populaire révélait que le Président Wade devait, à l’époque, plus de 3 milliards à la défunte compagnie Air Sénégal international. Il est vrai que le 1,1 milliard avait été (re)injecté dans les caisses du Trésor public ; ce montant correspondait à la taxe aéroportuaire que la compagnie devait au Sénégal. A la même année, sur une longue période d’ailleurs, le Président Wade n’avait plus emprunté La Pointe de Sangomar, pour voyager à l’étranger à coups de millions par des vols privés.
Dans l’une de ses parutions, l’hebdomadaire La Gazette avait révélé aussi, sans être jusque-là démentie, que les déplacements du Président Wade étaient estimés à plus de 12 milliards par an, soit près de 1,5 milliard par mois. Ces dépenses exorbitantes avaient même suscité une interpellation du Fonds monétaire international (Fmi). Cette institution avait demandé là-dessus des comptes au ministre des Finances et de l’Economie Abdoulaye Diop qui, en guise de réponse, s’était abrité derrière «des dépenses de souveraineté».
Autre fait, entre autres, du mauvais exemple du maître à ses mauvais élèves : les révélations du Quotidien du jeudi 27 août 2009 : Wade et sa cour font la noce à Biarritz, à une période où les Sénégalais étaient les otages des inondations et délestages. En repos entre la Suisse et la France, Me Wade avait déplacé une délégation qui avait occupé 10 chambres et une suite impériale au luxueux Hôtel du Palais de Biarritz, pour dépenser seulement en cinq jours la rondelette somme de 41 millions 528 mille 360 francs Cfa, uniquement pour les chambres ; donc compte non tenu du manger et autres extras. Pendant ces vacances, le Trésor s’était soulagé de 750 millions pour frais de location d’avions, notes d’hôtel, sans parler des frais de location de voitures et autres moyens de déplacement. Ce montant ne prenait pas en considération les dépenses de ministres et autres collaborateurs que le Président Wade convoquait auprès de lui.
Qui ne se souvient donc pas de la cérémonie de remise du prix Houphouët Boigny pour la paix par l’Unesco au Président Wade ? Ce 16 mai 2007, presque tous les ministres, autres membres du gouvernement, une pléthore de conseillers à la Présidence et des militants du Parti démocratique sénégalais (Pds) avaient déserté le Sénégal pour aller assiéger le siège de l’Unesco, pris en charge qu’ils étaient aux frais de la princesse qu’est la République.
Les mesures de Wade «ayant pour souci de préserver les finances publiques» interviennent dans un contexte de révélations sur la nébuleuse destination des 20 milliards de Sudatel. Une affaire révélée par nos confrères de La Gazette. Pendant qu’on est : que sont devenues les mesures du Président Wade interdisant les ministres et les Directeurs généraux de sociétés nationales de voyager en Première classe et en classe affaires ? Qui les respecte encore ? Pas certainement, Karim Wade, le fils du Président, qui se pavane lui en jet privé dans ses nombreux déplacements à l’étranger.
Ce sont là autant de faits qui prouvent à l’envi que les nouvelles mesures du Président Wade sonnent un peu dans le genre : «Faites ce que je vous dis et non ce que je fais.» Mais quels ministres et autres membres du gouvernement oseront le rappeler au Maître qui leur demande l’application stricte de ces nouvelles mesures, histoire de lui dire de balayer d’abord devant la porte du Palais ? Quelques «téméraires», seulement dans des salons feutrés de Dakar et… à portables bien éteints.