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Employée par le gouvernement, mais refusée
par l’Immigration

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Tout commence au Sénégal en 2015. Coura Felwine Sene rêve de s’établir ailleurs. Le nom « Québec » circule autour d’elle et l’attire. Pour émigrer, elle fait affaire avec une agence locale afin d’obtenir les papiers.

« J’ai payé 1200 dollars pour l’admission et le certificat d’acceptation du Québec (CAQ). L’agence s’occupait de toutes les démarches », explique-t-elle. C’est là pourtant que, sans le savoir, elle se fait flouer. L’agence et les documents délivrés s’avèrent frauduleux. Mais personne ne s’en rend compte, ni elle, ni les fonctionnaires d’ici chargés de vérifier la crédibilité des documents. Ainsi, tout se déroule comme prévu à son arrivée au Québec. Son certificat d’acceptation est échangé contre un permis d’étude. Elle s’installe à Rimouski. Après quelques années à jongler entre les études et un emploi — « j’ai passé mes nuits à l’Université », dit-elle —, elle renouvelle son CAQ sans problème. Dès sa formation terminée, elle décroche un emploi à temps plein dans un des ministères québécois. On lui offre un statut de travailleur temporaire, qui expire en janvier 2023.

Déterminée à s’installer pour de bon au Bas-Saint-Laurent, elle entreprend alors les démarches pour obtenir sa résidence permanente. Elle doit d’abord passer par Québec pour obtenir un nouveau certificat. Alors qu’elle en est à rassembler ses papiers, tout bascule. « J’ai demandé au ministère de l’Immigration un duplicata de mon premier CAQ. C’est là qu’ils se sont rendu compte du caractère frauduleux. »

« Le numéro du dossier est à mon nom, mais le numéro de référence correspond à un autre individu au Sénégal », détaille-t-elle.

Elle se dit atterrée que les fonctionnaires puissent renouveler ses papiers, pour ensuite les invalider. « Pourquoi ont-ils annulé le CAQ qui expire en août ? J’ai fini mes études depuis. Je n’en ai plus besoin. » Qui plus est, argumente-t-elle, elle aurait sans doute pu obtenir tous les papiers pour une résidence permanente sans cette copie du CAQ. « Il ne fallait pas appeler », lui aurait-on dit au ministère.

Depuis, elle multiplie les recours pour demeurer au Québec. Elle porte plainte en justice au Sénégal et obtient gain de cause. Les autorités sénégalaises font fermer l’agence frauduleuse et arrêtent les propriétaires. Son employeur, le gouvernement du Québec, lui offre un permis de travail fermé. Ce document lui permettrait de postuler sur Arrima, la nouvelle plateforme numérique de sélection des immigrants. Or, avec une mention de fraude de son dossier, Coura Felwine Sene ne croit pas en ses chances. « C’est sûr qu’ils ne vont pas me choisir. »

Prise dans un cul-de-sac administratif, elle ne peut croire qu’elle pourrait devoir quitter la province. Elle soutient avoir dépensé près de 100 000 $ pour ses études et son installation à Rimouski. « J’ai le droit d’être respecté. Ça fait cinq ans que je suis ici. Je travaille. Je ne reçois aucun chômage. »

« Je suis très découragée. J’ai pleuré toute la fin de semaine. »

Fraude

L’avocate en immigration Nadia Barrou ne s’étonne pas du refus du gouvernement. « On peut être citoyen canadien et ensuite perdre ce statut, si le point de départ était frauduleux. […] S’il y a eu une fraude, c’est normal que le gouvernement refuse. Il ne peut pas permettre cela. »

Le ministère québécois de l’Immigration ne commente pas les dossiers particuliers. Par courriel, une porte-parole confirme toutefois que « la ministre peut rejeter la demande d’une personne qui a fourni, dans les cinq ans précédant l’examen de la demande, directement ou indirectement, un renseignement ou un document faux ou trompeur ».

« Sur l’ensemble des demandes reçues pour les dossiers « étudiants » de 2016 à 2020, ce sont 0,07 % des demandes qui ont reçu une décision de refus pour ce motif, en moyenne, par année », ajoute-t-elle.

Mme Sene confirme ces statistiques. « L’agent m’a dit que c’est la première fois qu’il voit un cas comme ça. » Elle laisse cependant entendre que d’autres compatriotes pourraient se retrouver à la fois victimes de fraude et d’une erreur administrative. « Je suis la première victime, mais il y en aura d’autres. »

Jean-Louis Bordeleau

Initiative de journalisme local

ledevoir.com

1 COMMENTAIRE

  1. Faire très attention à ces agences constituées pour soit aider les sénégalais à émigrer au Canada. Il y’a bcp de faux et d’escroquerie et à la fin de la journée c’est le candidat à l’immigration qui voit son projet et ses rêves chuter comme un château de cartes à ses pires. Le Québec a fortement besoin d’immigrants et ce n’est pas pour rien qu’il a installé une délégation générale du Québec à Dakar. Alors rapprochez vous de cet organisme ne serait ce que pour avoir des conseils et les bonnes informations. Malheureusement aux Sénégal les escrocs et les fraudeurs sont à chaque coin de rue. Personnellement j’ai fait ma demande d’immigration au Canada à partir de la Belgique en 2003 et ça pris juste 6 mois sans aucun intermédiaire. Alors, je pense aussi que le gouvernement du Québec en particulier la délégation générale du Québec à Dakar doivent aider aussi les potentiels immigrants au Québec en refusant tout intermédiaire venant d’une quelconque agence et traiter directement avec les demandeurs en facilitant le contact, en organisant plus de séances d’informations. Il faut arrêter de bunkeriser les représentants du Québec et du Canada en Afrique pour être en contact direct avant les potentiels futurs québécois afin de les rassurer.

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