La Cohabitation : Ni un cauchemar ni une illusion, mais souhaitable pour équilibrer nos institutions.

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Selon notre constitution, le Président de la République détermine la politique de la Nation, préside le conseil des ministres, signe les ordonnances et les décrets. Il nomme aux emplois civils et militaires, accrédite les ambassadeurs et envoyés extraordinaires, etc…
Le même Président de la République, prérogative et privilège essentiel, nomme le Premier Ministre et met fin à ses fonctions.
En revanche ou en échange peut-on dire, la constitution prévoit expressément et ce n’est pas un exercice de style, que sur proposition du Premier Ministre, le PR nomme les Ministres, fixe leurs attributions et met fin à leurs fonctions.
Le Gouvernement, sous l’autorité du Premier Ministre, conduit et coordonne la politique de la Nation. Il est responsable devant le parlement et devant l’assemblée nationale dans les conditions prévues par la constitution. Sa déclaration de politique générale obligatoire devant l’Assemblée Nationale, peut donner lieu à sa demande, à un vote de confiance accordée à la majorité absolue des membres de celle-ci.
En sus des autres dispositions constitutionnelles, la loi suprême détermine, partage, départage et distribue les rôles et les responsabilités entre le Président et le gouvernement. Cette cohabitation entre les deux têtes de l’exécutif est plantée dans le décor constitutionnel. Notre constitution étant une sœur dérivée de la constitution française, avec ses nuances et ses dissemblances, peut donc abriter la cohabitation à l’instar de sa grande sœur française qui l’a expérimentée à trois reprises. Et la France n’avait pas sombré dans le chaos. Obama avait raison d’asséner que : « L’Afrique n’avait pas besoin d’hommes providentiels mais d’institutions fortes ». La cohabitation à la française ou à la sénégalaise est l’expérience qui contribue à rendre les institutions fortes et solides.
C’est la rencontre de deux légitimités populaires, la majorité présidentielle et la majorité parlementaire, différentes mais souveraines et contraintes de travailler ensemble à la satisfaction des aspirations du peuple seul au-dessus des institutions. Celui qui détermine la politique de la Nation et celui qui l’exécute sont obligés d’être comme des frères siamois qui marchent vers et dans la même direction. Si le Président impose le Premier Ministre de son gré ou de son camp en faisant fi de la volonté de l’opposition, celle-ci l’attend à l’Assemblée pour lui refuser la confiance ou rejeter le vote du budget. A contrario si le Premier Ministre et son camp veulent imposer leur politique sans négociation avec le président, ce dernier pourrait refuser de promulguer ses lois ou au bout du compte le démettre de ses fonctions et entrainer la chute gouvernement. Pour exemples : Le PSE du Président sera renégocié et rectifié. L’application des conclusions de la CNRI et celle des Assises nationales ou la remise en cause des contrats pétroliers et gaziers, seront autant de sujets de négociation entre les deux protagonistes de l’Exécutif. Mitterrand et Chirac ou Chirac et Jospin ont été obligés à des compromis sans compromissions pour conduire les affaires de l’Etat. Il en sera de même pour le dualisme ou le tandem sénégalais. Tout duel de chapelle sera préjudiciable à l’Etat donc à la Nation et pourrait entrainer des conséquences dramatiques pour notre démocratie. Le peuple situera les responsabilités et les sanctions positives ou négatives seront pour 2019. L’arbitre constitutionnel devra nécessairement jouer juste sa partition pour éviter le syndrome ivoirien et d’être le juge constitutionnel du vainqueur.
La cohabitation a ses vertus. Elle permet l’espoir d’un rééquilibrage des pouvoirs, par une séparation d’une impérieuse nécessité, pour un meilleur exercice du pouvoir non absolu mais juste et par la recherche constante de consensus dans la conduite des affaires. Ce que le Sénégal n’a jamais connu. L’ère d’un président hyperpuissant qui vassalise tous les pouvoirs, avec l’obsession de se maintenir le plus longtemps au pouvoir et les dérives autoritaires et frauduleuses qui en découlent, est révolu. Le peuple en est conscient, il lui faut dorénavant l’imposer aux politiciens.
Un système politique quel qu’en soient ses institutions, est incarné par des hommes et des femmes qui sont les gages de son perfectionnement ou de sa décrépitude. C’est pourquoi leur choix dans l’exercice de ce pouvoir partagé, devrait relever des critères de compétence technique et politique et non de la partisannerie encore moins du népotisme. Le souci élevé de servir l’Etat et la Nation devrait primer sur les considérations politiciennes. La cohabitation est une épreuve nécessaire à la démocratie sénégalaise pour corriger ses dérives partisanes et clientélistes, pour rectifier les mal gouvernances outrancières et impunies et enfin pour ajuster les politiques socio-économiques. La surveillance réciproque et l’émulation des énergies de part et d’autre, devrait contribuer à promouvoir la gestion saine et vertueuse tant proclamée mais toujours anéantie par l’absolutisme présidentiel et le « «pouvoirisme » boulimique perdurable.
Un gouvernement composé de membres de la mouvance présidentielle, de l’opposition et de la société civile, dans un équilibre qui reflète les forces issues des législatives, aurait une belle allure. Des premiers ministrables à la fois politiques et technocrates (Idrissa Seck, Mamadou Lamine Loum, Abdoul Mbaye, Mamadou Lamine Diallo, Aïssata tall Sall etc… -choix cornélien j’en conviens-) pour faire face à la présidence hypertrophie de Macky Sall, serait fort judicieuse pour la bonne santé de notre République. Un Gouvernement de changement et de rupture, composé avec Ousmane Sonko au Budget et les comptes publiques, M. Lamine Diallo ou Mamadou lamine Loum à l’Economie et les finances, Aïssata Tall Sall ou Adama Gueye pour la Justice, Birahim Seck du Forum civil Mohamed Sall Sao à l’Intérieur, Thierno Alassane Sall à l’Industrie et aux mines, Gadio ou Ibrahima Fall aux affaires étrangères, le Général Babacar Gaye pour gérer l’armée, Déthié Fall aux Infrastructures, Hydrauliques et assainissements etc… , serait très salutaire pour enfin asseoir les bases d’une bonne gouvernance et d’une politique résolument démocratique au bénéfice des populations. Macky se dotera bien entendu d’un certain nombre de ministres, à changer ou à reconduire. Les ministères importants (Affaires étrangères, Intérieur, Finances, Armée) devraient être nécessairement choisis en parfaite entente avec lui, tenant compte des profils et des compétences en dehors des enjeux politiques ou politiciens. Ce choix des hommes ci-dessus est personnel et uniquement illustratif, pour servir d’exemple de gouvernement idéal pour mener une politique consensuelle ou de large consensus. Si tant il est possible d’avoir un gouvernement idéal au Sénégal.
Il appartient au peuple sénégalais d’aspirer à élever le niveau de notre démocratie. On sait que les citoyens sénégalais, dans ce monde globalisé et interconnecté, ont une maturité politique au-dessus des calculs de nos politiciens. La politique est trop importante pour la laisser dans les seules mains des politiciens. Les législatives actuelles lui donnent l’occasion de tirer au forceps électoral le niveau de notre démocratie vers le haut. Et la cohabitation pour une première au Sénégal, en sera le levier déterminant. N’en déplaisent aux partisans du sur-place et du statu quo !
Chérif Ben Amar Ndiaye
Kaadoubitimrew.com

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