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L’accord entre l’Etat du Sénégal, l’ISJA et les parents d’élèves. (Par Mamadou Ciré SY)

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J’ai vraiment envie de m’épancher sur « l’accord » trouvé in extremis entre l’État du Sénégal et l’institution Sainte Jeanne d’Arc.
Aujourd’hui personne, parmi ceux qui suivaient le problème de près, ne sait en réalité où se trouve la vérité, qui a tort qui a raison.
On est tenté de donner raison à l’ISJA, ou aux filles ou à l’État.
Pourquoi on peut se laisser croire que l’ISJA a raison ?
D’abord, elle mis tout le monde, l’État, les parents d’élèves, et les populations au dilatoire. Elle a vraiment appliqué la politique de l’Autriche. En sus, elle a imposé un certain nombre de conditions. La plus bizarre, c’est celle avec laquelle elle introduit la dimension de la convenance sur le voile. Elle dit pouvoir réintégrer les filles à la condition que ces dernières puissent être enturbannées de voile d’une dimension convenable. C’est-à-dire, pour elle, un voile dont la dimension n’obstrue pas leur uniforme, un voile taillé à l’aune des oreilles. Les parents des filles qui se targuaient d’éduquer leurs enfants avec un voile convenable, c’est-à-dire comme le veut la charia musulmane, ont cédé à leurs principes de départ et semblent du coup donner raison à l’ISJA. l’État qui a laissé l’école dicter sa loi, sans se conformer à la loi, semble inopérant. Là, on pense voir que l’ISJA a raison sur eux. Si les parents acceptent de redimensionner et de réajuster la taille et la forme du voile de leur fille, ils reconnaissent implicitement qu’ils avaient tort d’affubler leur enfant de la sorte dans une institution qui est à cheval avec le port et l’allure vestimentaire. En consentant à être reçus individuellement pour recevoir des autorités de l’école un certain nombre de règles et de diktats, on imagine le sentiment intérieur de culpabilité des parents et leur vulnérabilité née de la division imposée par l’école. Autre fait non moins important amenant à croire que c’est l’ISJA qui remporte la bataille, c’est que l’intégration des filles explicitement évoquée est chronologiquement bien encadrée. Oui, il a été bien signifié aux parents et à l’État que l’inscription en question couvre l’année en cours 2019/2020. Donc retenons qu’en référence au principe du tiers exclu, si l’ISJA a raison, alors l’État et les parents ont tort.

l’État peut sembler avoir raison dans cette affaire. La décision regrettable consistant à exclure les filles avait été déjà prise. l’État, par l’entremise du ministère de l’éducation, a convoqué, dans ses locaux et tard dans la nuit, les différentes parties autour d’une table de négociations pour enfin, parvenir à les faire infléchir. L’ISJA finit par reconsidérer sa décision en reprenant les filles et les parents enjoints à revoir la façon de faire le voile à leurs filles, quitte à ne plus paraître comme une musulmane. Oui, ce n’est pas mal se disent-ils car  » l’habit ne fait pas le moine ». Donc, implicitement, l’ISJA et les parents d’élèves semblent être vaincus car se sentant fautifs d’une manière ou d’une autre. Alors l’État a finalement raison sur eux. C’est d’ailleurs ce qui est souhaitable, car l’État étant l’incarnation de tout le monde, ou comme le dit Rousseau, l’émanation de la volonté générale, lui obéir, c’est obéir à soi-même et à tout le monde. Il est le garant de la liberté de tous ses citoyens et son unique but n’est et ne serait que d’offrir un service équitable à son peuple et de veiller à l’épanouissement de ce dernier, principes sans lesquels l’État n’a pas sa raison d’être.

Les parents d’élèves semblent avoir raison dans la mesure où le combat pour lequel ils s’étaient mobilisés tous comme un seul homme, en connivence avec une bonne frange de la population, s’est terminé par, pour eux, un ouf de soulagement. Leurs filles reprendront le 19 prochain le chemin de l’ISJA avec un voile à l’allure d’un bonnet. Bon ! bonnet blanc, blanc bonnet, c’est la même chose, l’essentiel, c’est de retrouver son école pour espérer d’y recevoir les mêmes enseignements à chance égale.

Moi, en tant que psychopédagogue, mon inquiétude est que les filles, déjà stigmatisées, isolées et négativement discriminées sont immanquablement traumatisées. Dès lors, il leur sera très difficile en tout cas pour les premiers moments suivant la rentrée de suivre le rythme de leurs camarades de classe. Je conseille aux enseignants de faire preuve de patience en faveur de ces élèves. Ils doivent aussi appliquer le décrochage car ils auront au début une classe multi-grade, c’est-à-dire une classe à deux cohortes, et user d’une méthode pédagogique nouvelle qu’on appelle La pédagogie différenciée pour atteindre les résultats escomptés à travers la pédagogie de maîtrise.

Cette  » solution  » de deux poids deux mesures adoptée par l’État ne me semble pas pertinente car elle est totalement subjective en ce sens qu’elle est temporellement bornée, régaliennement lâche car basée sur la compromission et la peur. Elle n’est pas une solution apodictique, neutre et impartiale. Elle est tout bonnement relative et sentimentale : l’État n’a rien à faire avec les passions, sinon il en pâtit. Il devait tout juste s’appuyer sur les textes en vigueur pour donner raison à l’ISJA ou aux filles. Il ne l’a pas fait, attendons-nous que le problème refasse surface. La vérité est la vérité de quelque bord qu’elle se situe. En tout cas de l’avis de Platon, elle est du côté de la minorité.

Mamadou Ciré SY,

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