Le président nigérian a exprimé sa profonde inquiétude face au nombre élevé de morts inexpliquées dans l’État de Kano, dans le nord du pays, et craint qu’elles ne soient dues au Covid-19.
Le président Muhammadu Buhari a déclaré qu’une quarantaine serait imposé à Kano pour deux semaines supplémentaires, et qu’il envoyait une équipe gouvernementale pour enquêter.
Le ministre nigérian de la Santé, Dr Osagie Ehanire, a déclaré que la situation était « suivie de près ».
Mais suite aux enquêtes préliminaires, les autorités de l’Etat ont écarté tout lien avec le coronavirus.
Des centaines de personnes seraient mortes dans la communauté, mais aucun registre officiel des décès n’est tenu.
Les fossoyeurs ont d’abord fait part de leurs inquiétudes quant au fait qu’ils enterraient un nombre de corps plus élevé que d’habitude.
Ali, un fossoyeur du cimetière de l’abattoir, a déclaré à la BBC : « nous n’avons jamais vu cela, depuis la grande épidémie de choléra dont nos parents nous ont parlé. C’était il y a environ 60 ans ».
Cette semaine, le gouverneur de l’état a publié une déclaration disant que les « morts mystérieuses » n’étaient pas liées au coronavirus.
Mais après avoir ordonné une « enquête approfondie sur les causes immédiates et lointaines de ces décès », il a annoncé que leurs conclusions préliminaires « indiquaient que les décès n’étaient pas liés à la pandémie de Covid-19 ».
Le gouvernement de l’État a déclaré que « les rapports du ministère de la santé de l’État ont montré que la plupart des décès étaient causés par des complications liées à l’hypertension, au diabète, à la méningite et au paludisme aiguë ».
« Le gouverneur Abdullahi Umar Ganduje attend avec impatience le rapport final du ministère de la santé afin de prendre les mesures nécessaires ».
Ville commerciale et industrielle, Kano est devenu l’épicentre du coronavirus dans le nord du Nigeria.
Sa population très dense est toujours confinée dans un effort pour contenir la propagation du virus.
Les tests ne révèlent-ils pas la cause du décès?
Les autorités de l’État ont commencé à tester le Covid-19 il y a deux semaines et un laboratoire a dû fermer en raison de la contamination.
Des échantillons sont envoyés à la capitale, Abuja, ce qui, selon les autorités, retarde l’annonce du nombre de cas positifs détectés dans l’État.
Dr Sani Aliyu, qui est le coordinateur national du groupe de travail présidentiel sur le Covid-19, indique qu’une équipe de cinq experts médicaux a été déployée à Kano pour faciliter la réouverture du centre de test cette semaine après sa fumigation.
Les responsables prévoient également d’ouvrir un second laboratoire, à l’université de Bayero, pour tester le Covid-19 à partir de la semaine prochaine.
Combien de personnes sont mortes?
On ne sait pas exactement combien de personnes sont mortes, car les décès qui suscitent l’inquiétude se produisent dans la communauté. Dans de nombreuses régions du Nigeria, les décès ne sont pas enregistrés, et donc pour ceux qui sont morts en dehors de l’hôpital, aucun registre n’est tenu.
Il est donc difficile de comprendre combien de personnes sont mortes ces dernières semaines.
Sabitu Shaibu, le chef adjoint du groupe de travail de l’Etat sur le Covid-19, espère publier les résultats préliminaires de l’enquête d’ici la semaine prochaine, mais il estime que la plupart des 640 décès signalés sont de causes naturelles et affirme que ce chiffre est inférieur au taux de mortalité moyen pour Kano.
Les registres hospitaliers, qui constituent le seul registre de décès disponible, sont censés fournir des chiffres inférieurs à la réalité dans tout l’État.
Les membres de l’équipe d’enquête ont déclaré qu’ils mèneraient des « enquêtes de traçabilité mortuaire » avec les membres de la famille pour aider à établir pourquoi les gens meurent.
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Si ce n’est pas un coronavirus, que pourrait-il se passer d’autre?
Les hôpitaux privés qui assurent une part importante des soins de santé dans la région ont été fermés en raison des craintes liées au coronavirus.
Cela pourrait signifier un manque de soutien pour les personnes atteintes de maladies existantes qui pourraient en être mortes.
Le Dr Nagoma Sadiq, qui travaille à l’hôpital d’Aminu Kano, pense que cela pourrait être à l’origine des décès supplémentaires, mais il n’exclut pas non plus les coronavirus.
« Il est choquant pour la plupart d’entre nous que le nombre de morts soit alarmant. Mais c’est probablement dû à la réduction du nombre d’établissements de santé disponibles dans l’État ».
« Parce qu’il y a beaucoup de patients hypertendus, diabétiques, asthmatiques, cancéreux, et qu’ils n’ont pas beaucoup accès aux hôpitaux. Le confinement touche tout le monde ».
« La majorité très pauvre n’a même pas de véhicule pour les emmener à l’hôpital. »
Le fossoyeur Ali est d’accord, ajoutant que « certains disent que la situation actuelle est due à l’épidémie, d’autres disent que ce sont les difficultés de la vie. Les gens ont tellement de problèmes dans leur vie et un manque de tranquillité d’esprit ».
Cependant, le Covid-19 est connu pour être plus dangereux pour ceux qui ont des problèmes de santé sous-jacents, il se pourrait donc que les décès soient liés au coronavirus.
La seule façon d’en être sûr est de faire un test de dépistage du coronavirus.
Le Dr Sadiq a également déclaré qu’il y avait toujours une inquiétude au sujet d’une infection de fièvre de Lassa en cours dans les communautés.
L’État a eu cinq cas confirmés et un décès, selon le dernier rapport du Centre nigérian pour le contrôle des maladies.
Kano compte actuellement 77 cas positifs de coronavirus et trois décès.
Les autorités invitent le public à ne pas paniquer.
Qu’est-ce que le président a encore annoncé ?
Le président Buhari a annoncé un assouplissement progressif des restrictions de confinement à Abuja, Lagos et dans l’État voisin d’Ogun à partir de lundi prochain.
Mais il a également déclaré que le gouvernement imposerait un couvre-feu dans tout le pays entre 20h et 6h, exigerait que tout le monde porte un masque en public et mettrait fin aux « déplacements non essentiels de voyageurs entre Etats ».
L’interdiction des rassemblements sociaux et religieux restera également en vigueur.
BBC News Afrique.