L’émérgence par le numérique. Par Mme DIOP Blondin

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L’avènement du numérique offre tellement de potentialités que des pays comme les nôtres se doivent d’en faire le levier de leur politique économique. Il est clair que le numérique a modifié tous les secteurs de notre vie. Le Président Macky SALL a, dans ses ambitions, initié un programme majeur pour booster son économie et inscrire le Sénégal sur la rampe du développement. Ainsi est né le PSE avec pour ambition de hisser le Sénégal dans le peloton des pays émergents. A l’analyse de sa mise œuvre, on se pose quelques questions : le numérique y occupe t-il la place qui lui permettrait de l’impulser? Le Sénégal s’est-il donné les moyens de saisir toutes les opportunités offerts par le numérique et en faire le levier de son développement pour l’éducation, la santé, l’administratifs, le commerce, l’agriculture et d’autres services encore?
ÉTAT DES LIEUX DU SÉNÉGAL
Pour situer le Sénégal, commençons par passer en vue les différentes institutions qui sont chargées de mettre en œuvre la politique numérique du pays ainsi que l’état du secteur privé opérant dans les TIC, par la suite nous soumettrons un ensemble de propositions pratiques qui viendront enrichir la réflexion des acteurs qui mènent tous les jours le combat pour que le Sénégal conforte sa place de leader du numérique en Afrique.
L’ÉTAT
En terme d’organisation, l’état du Sénégal a créé 4 organes permanents chargés de gérer le numérique; ce sont Ministère des Poste et des Télécommunications, l’ARTP, le FDSUT et L’ADIE. A cela, il faut ajouter le CONTAN dont la mission est limitée dans le temps. On peut noter la dispersion des responsabilités sans supra leadership pour articuler la stratégie nationale. Se pose alors la question de la coordination condition d’efficacité.
Etat des lieux :
– le Ministère a subi depuis une dizaine d’années de nombreuses modifications de ses prérogatives et de sa composition ; les deux directions (Télécommunications et des TIC) sont particulièrement sous-dotés en moyens humains mais surtout en ressources d’investissement. Les appuis institutionnels reçus du régulateur présentent l’inconvénient majeur de sa dépendance financière pour l’exécution de bon nombre de ses projets. En outre, il devrait articuler toute la mise en œuvre pratique de la modernisation de l’état à l’instar du ministère du plan. Ce rôle est dévolu à l’ADIE qui dépend de la Présidence. On déplorera aussi la que les TIC, si porteurs d’emplois et si générateurs de revenus soient mentionnés le pavé des projets annexes du PSE.
Tous ces facteurs font que le Ministère n’est pas outillé pour porter la difficile tâche de fer de lance du développement par l’économie numérique au Sénégal.
– l’ARTP, autorité indépendante, a besoin d’être revue tant dans son mode fonctionnement (choix du directeur, stabilité, organigramme, recrutements en décalage avec ses besoins etc…) que dans sa gestion. Cela passe l’adoption par l’adoption d’un nouveau code des télécom.
– le FDSUT devrait être le bras armé de la lutte pour un taux de couverture réseau maximal. Ce palier sera difficile à atteindre car une grande partie des montants collectés pour cet objectif est affectée à d’autres fins. Ceci est en porte-à-faux avec les textes de l’IUT qui régissent le service universel. Il serait possible de confier la mission aux opérateurs tout allégeant de leur contribution à ce fonds.
– L’ADIE dispose d’un réseau de fibre optique conséquent destiné à accompagner l’e-gouvernement. Ses infrastructures sont surdimensionnées pour les seuls besoins initiaux, de plus elle ne dispose pas de ressources suffisantes pour la maintenance de ses équipements. Elle pourrait louer des capacités à d’autres opérateurs.
LE PRIVÉ
Les PME sont victimes de ce manque de choix résolu traduit par un plan exécutif déterminé à mettre les TIC au cœur du développement du pays. On trouve surtout des petites sociétés confrontées à de multiples tels qu’accès aux marchés en particulier ceux publics, aux financements, accompagnement dans l’organisation et la formation… Résultats les sociétés unipersonnelles et l’informel dessinent le paysage de ces entreprises. Les sociétés qui présentent un chiffre d’affaire conséquent y arrivent grâce à une présence à l’international. La croissance est portée quelques grandes sociétés, opérateurs de téléphonie pour l’essentiel. Ce contraste rend relatif le niveau développement très souvent vanté de l’économie numérique au Sénégal.
POUR UN SÉNÉGAL NUMÉRIQUE ÉMERGENT
LE NUMÉRIQUE DOIT PORTER LE PSE
Le numérique a engendré un « nouveau monde » de par son impact dans tous les secteurs de l’économie et de la vie en général. Le Sénégal n’est pas en reste. Il est facile de constater la place qu’occupe la technologie en format mobile au quotidien. Cette technologie est partout pour travailler, communiquer, jouer, socialiser, se divertir, exister… Cette mutation de la société doit aller de pair des décideurs qui comprennent et prennent en compte leurs enjeux dans les modèles de sociétés qu’ils proposent. Cela suppose un travail de prise de conscience des enjeux à mener auprès des élus.
La structure démographique du Sénégal, à savoir une population rurale très élevée, un niveau d’instruction relativement bas, un déficit d’infrastructure et d’autres facteurs sociaux, orientent les l’état à porter la priorité sur l’agriculture comme porte d’entrée de l’émergence. Pourtant, une étude de l’IUT démontre que la diffusion du haut débit sur le PIB est de 0,25% à 1,38% sur toute la population pour 10% de pénétration ; cela se traduit par la création d’emplois directs et indirects, un gain de productivité et une émulation des activités.
Le numérique devrait être la constante de développement de chaque domaine, et donc fil conducteur de cette politique. C’est l’occasion idéale pour le Sénégal d’imposer une nouvelle méthode de travailler à travers le PSE l’exécution du PSE. Cela mettrait en lumière l’engagement résolu du Sénégal, à l’instar des pays d’Afrique de l’Est tels que le Kenya ou le Rwanda, à se moderniser et faire partie des nations en pointe dans le numérique dans le but de redéfinir son modèle économique.
Cette volonté de changement de paradigme doit se traduire par la création d’un pôle numérique rattaché au PSE porteur et garant de l’exécution de la stratégie numérique nationale définie avec les institutions existantes mais aussi le secteur privé.
Les grandes lignes de la politique numérique peuvent être ainsi déclinées:
– Définir le modèle de société que nous souhaitons dans un horizon défini.
– La décentralisation qui donnerait la possibilité aux communes de mettre les collectivités au centre du développement en particulier celui de l’usage du numérique ;
– Etablir un plan national haut débit ;
– Créer des espaces dédiés, disposant de connexion à internet et de l’énergie, aux petites entreprises ;
– Créer une dynamique de développement d’activités suscitées par la transition de l’analogique vers le numérique;
– Créer des filières dans les lycées régionaux;
– Accélérer et élargir les usages du numériques pour chaque administration et institutions
– La création d’une cité numérique dans le pôle de Diamniadio; les centres de recherche, l’industrie et le gouvernement se côtoieront sur le site. Il faut attirer les investissements des grandes entreprises technologiques et motiver le privé national ;
– Faire évoluer code pénal en tenant compte des nouveaux délits liés à ces technologies

Le fil conducteur est: le gouvernement, doté d’une autorité centralisant la politique numérique, a pour rôle de définir un agenda numérique national ambitieux avec des instruments du suivi d’exécution, de faciliter le développement de l’activité et enfin de laisser jouer le marché.
REVOIR L’ARTICULATION DES INSTITUTIONS
Pour atteindre ces objectifs, il est primordial de définir une articulation entre les différentes institutions (Ministère, ARTP, ADIE, CNRA, CONTAN, FDSUT) à la lumière des arguments présentés plus haut afin que l’action de l’état soit plus cohérente et efficace.
En particulier, il me paraît nécessaire de réfléchir à la régulation de manière globale : est-il nécessaire d’avoir quatre institutions (CNRA, ARTP, FDSUT et CONTAN) ?
SYNERGIE ENTRE LES PAYS DE LA ZONE CDEAO
Les pays de la zone doivent avoir l’ambition de tracer la voie d’une politique numérique intégrée et complémentaire. Au delà des textes d’évolution et d’harmonisation des réglementations cette action permettrait de pas laisser les opérateurs le visage numérique par de la sous-région par des offres répondant à leurs seuls objectifs commerciaux.
CONCLUSION
Le Sénégal dispose des ressources humaines capables de porter ce projet, l’innovation en terme de méthodologie de suivi des projets d’état initiée par le PSE est une formidable opportunité pour réussir cette révolution numérique. Le Sénégal se doit de saisir la balle au rebond car mieux vaut tard que jamais.
Mme DIOP Blondin – Ndeye Fatou NDIAYE

2 Commentaires

  1. Bravo madame Diop pour votre profonde étude et vos suggestions pertinentes pour mieux cerner les contours et lancer les bases de l’incontournable « Route du futur » au niveau tant national que sous-régional.Une étude concrète, urgente et d’actualité

  2. Très bel article avec un état des lieux du potentiel sénégalais juste et fiable. Seulement là ou ça cloche c’est la suggestion d’une cité numérique à diamniajo. Les spécificités économiques du Sénégal ne cadrent pas avec ce projet.Le numérique peut effectivement porter la croissance économique de ce pays mais en partant des urgences et priorités de développement économiques que nous avons. La cité numérique doit être la troisième étape de notre stratégie de développement numérique et non la première. L’utilisation des TIC et leur insertion dans les activités économiques majeures est la première étape avec les mêmes pas pour les services sociaux de bases.Pour le tertiaire, faire des plate-formes de développement des teleservices à proximité des universités est la marche sur qui créera de nouvelles activités dans ce domaine mais permettra aux entreprises une main d’oeuvre fraîche et au universités de nouvelles formations innovantes etc… Bien sur ce qui permettra la création de plus valu mais surtout le rehaussement du capital technologique du Sénégal. Ce qui drainera naturellement investissement et investisseurs vers non pas uniquement Dakar mais vers toutes ces pépinières technologiques. À partir de là une cité numérique viendra naturellement et à son heure. L’économie numérique c’est l’insertion des TIC dans les activités et donc c’est d’une incohérence que d’aller investir des milliards dans une cité numérique quand il faut moins pour sursoir au réel développement numérique territorial en cumulant top down et bottom up. Le Sénégal a reculer dans ce domaine à cause de copier/coller et de tâtonnements.le leap frog est possible mais pas quand on adapte des solutions d’ailleurs. Les effets des TIC ne sont pas génériques mais dépendent des spécificités organisationelles, économiques etc

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