Objet : Dix interpellations légitimes
Monsieur le Président de la République,
En vertu de l’article 8 de la constitution du Sénégal, je me permets de vous écrire et de porter devant vous ces interpellations légitimes suite au scandale sur le pétrole et le gaz, dans lequel votre frère est impliqué qui a été révélé par des citoyens sénégalais et réactualisé par la BBC.
Loin de moi l’idée de développer un quelconque fantasme comme au cinéma, tel que vous l’avez décrit lors de votre discours du 02 juillet 2019 au CICAD. Vos différentes sorties, celles de votre frère, ses soutiens apéristes et autres alliés, n’ont pas balayé les tonnes d’interrogations qui taraudent l’esprit du Sénégalais lambda.
Dans ce qu’il convient d’appeler le Pétrogazgate, vous et votre gouvernement n’avez pas encore apporté les réponses aux questions des citoyens sénégalais qui aimeraient savoir, à juste titre, votre degré d’implication dans ce scandale où un homme d’affaires, antérieurement condamné pour trafic de cocaïne dans son propre pays, a pu bénéficier de deux (02) décrets d’approbation de votre part. Les décrets n° 2012-596 du 19 juin 2012 et n° 2012-597 du 19 juin 2012, tous les deux portant approbation des Contrats de recherche et de partage de production d’Hydrocarbure (CRPP) conclu entre l’Etat du Sénégal d’une part, et PETRO-TIM Ltd – PETROSEN d’autre part, pour respectivement, les permis de Cayar Offshore Profond et Saint-Louis Offshore Profond.
Monsieur le Président de la République,
Vos arguments sont de moins en moins rassurants dans votre volonté de tranquilliser les sénégalais, si on se réfère à votre déclaration lors de la concertation sur la mise en œuvre de la loi sur le contenu local : « […] tous les droits des investisseurs seront respectés ».
Quid de nos droits, nous Sénégalais, à qui appartiennent ces ressources ?
Vous avez aussi déclaré que vous ne laisserez personne porter atteinte à l’intérêt des ressources naturelles et vitales du pays. Je suis tenté de vous croire mais votre posture et vos actes vont plutôt dans le sens de couvrir votre frère, son ex-employeur et ses complices. La justice dont vous êtes le garant ne s’appliquera jamais si elle doit se contenter d’une démission et d’un serment, la main sur le coran. Souvenez-vous du sens de votre serment devant Dieu et les hommes.
Monsieur le Président de la République,
Dans votre volonté de protéger les intérêts de la Nation, je vous invite, vous géologue de formation et ancien Directeur Général de la PETROSEN de décembre 2000 à juillet 2001, à répondre à ces dix interpellations pour édifier les Sénégalais. Vos réponses marqueront le début d’une intention ferme de faire la lumière sur l’affaire PETRO-TIM. Je vous prie, pour cette fois, de ne pas me citer les actes que vous avez posés et qui sont postérieurs à la signature des CRPP et des décrets d’approbation en faveur de Timis. L’adhésion à l’ITIE, la création du Cos-Pétrogaz, la révision du code pétrolier, la concertation sur la gestion des ressources futures, et bien d’autres initiatives, sont pertinentes par essence mais elles viennent après que Frank Timis et ses complices ont fini de nous spolier.
Mes interpellations sont les suivantes :
1- Connaissiez-vous Frank Timis avant que vous ne signiez les décrets d’approbation en faveur de ses sociétés ?
2- L’Inspection Générale d’Etat (IGE) a-t-elle reçu un ordre de mission pour mener une enquête sur l’affaire PETRO-TIM ? Si oui, pourquoi n’avez-vous pas attendu ses conclusions avant de signer les décrets d’approbation ?
3- Frank Timis a-t-il investi dans la phase d’exploration ? Si oui, quand ?, Combien ? Sur la base de quelle étude technique ?
4- Est-ce que la procédure d’attribution des deux (02) blocs à Frank Timis a été faite dans le strict respect de la loi et de la réglementation sénégalaise ?
5- Le rapport de présentation pour la signature des deux (02) décrets est-il faux ?
6- Frank Timis a-t-il reçu 250 millions de dollars de BP ?
7- Pourquoi l’administration fiscale, sous votre autorité, n’a pas perçu la taxe de plus-value sur la cession des permis de Timis à BP et à KOSMOS ?
8- Votre frère a-t-il déclaré ses revenus (25 000 dollars US par mois pendant cinq (5) ans) auprès de l’administration fiscale sénégalaise ?
9- Êtes-vous prêt, Monsieur le Président de la République, à renégocier les contrats déjà signés tel que promis pendant votre campagne électorale ?
10- Êtes-vous prêt enfin à débattre avec le Président Ousmane Sonko sur ces questions pour éclairer la lanterne des Sénégalais ?
Monsieur le Président de la République, l’instinct de famille ne saurait, en aucun cas, prendre le dessus sur votre devoir de gardien de la constitution, laquelle confère à chaque citoyen le droit de prendre pleine possession des ressources naturelles pour améliorer ses conditions de vie (Article 25 (1) de la Constitution de la République du Sénégal).
Votre silence sur ces interpellations serait suspect et vous ne pourrez échapper indéfiniment au tribunal du peuple qui, tôt ou tard, vous jugera.
Essayez pour une fois de rester à la hauteur de vos fonctions et de rester dans la bonne postérité pour l’amour de votre pays.
Veuillez recevoir, Monsieur le Président de la République, mes salutations patriotiques.
PID