L’obsession du deuxième mandat Par Vieux Savané

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Au moment où des voix s’élèvent pour reprocher au pouvoir en place ses difficultés à fixer un cap, voilà que des ténors de la majorité veulent installer le Sénégal dans des débats sans queue ni tête. C’est ainsi que certains pontes de l’Alliance pour la République (Apr) donnent l’impression d’être déconnectés des attentes de la majorité des Sénégalais, obnubilés qu’ils sont par l’idée de s’installer durablement dans le fauteuil de leurs nouveaux privilèges. Pressés par leurs intérêts particuliers, ils en arrivent à oublier leurs missions au regard de certains actes plus que saugrenus dont ils gratifient leurs compatriotes.

A l’image de l’ancien ministre de l’Intérieur, Mbaye Ndiaye, qui revient sur le devant de la scène. Après l’épisode du talibé et son maître, il revêt maintenant l’uniforme d’un recruteur en chef, pour le compte de son parti. Aussi, n’a-t-il pas hésité à défier Khalifa Sall avec une déroutante absence de finesse. Si ce dernier veut rempiler comme maire de Dakar lors des prochaines élections locales, il faudra, a-t-il assuré, qu’il quitte le Parti socialiste pour l’Apr. Outre ce désastreux encouragement à une transhumance décriée, il fait montre d’un mépris souverain vis-à-vis de l’électeur. La seule adhésion à l’Apr suffirait-elle donc à gagner la mairie ? Qu’importe le bilan de la mandature de Khalifa Sall. Qu’importe ses compétences, ses projets pour Dakar. Rien de tout cela. Faisant de l’« Apr ou la mort » son slogan, il contribue ainsi à consolider l’idée selon laquelle, c’est l’adhésion au parti au pouvoir (comme sous l’ère des libéraux) qui façonne des destins improbables.

Rien de plus grotesque que cet éloge à des comportements qui ont été cloués au pilori. Il brouille au passage le message de la rupture que le nouveau pouvoir essaie vaille que vaille de faire passer au niveau de l’opinion. A travers notamment la fameuse traque contre les biens mal acquis. Et si cette dernière rencontre aujourd’hui un large soutien populaire, c’est bien parce qu’elle est la traduction d’une volonté d’en finir avec la gabegie, les calculs politiciens qui n’ont pour seuls horizons que des intérêts personnels, privés et claniques.

Drôle d’obsession donc que celle d’avoir les yeux rivés sur le guidon de sa réélection alors qu’il y a tant à faire d’ici là. Dans une telle posture, il va de soi qu’on ne saurait voir plus loin que le bout de son nez. Encore moins dégager un cap et tracer des sillons d’avenir.

Elus pou un septennat qu’ils ont promis de ramener à cinq ans, pour se conformer aux conclusions des Assises nationales, il reste étonnant qu’à bientôt une année de mandature, ils ne pensent qu’à ça. Ce qui n’est pas un mal en soi, pour peu que la stratégie développée soit la bonne. Au lieu de penser à accroire leurs chances de rempiler en apportant des solutions concrètes aux problèmes des Sénégalais, ils se mettent à élaborer des stratégies qui flattent les bas instincts et se nourrissent de la vénalité supposée de leurs compatriotes. Et pourtant, que ne sont-ils nombreux les défis à relever.
Véritable bombe à retardement, l’école est une urgence signalée. Il en est de même du chômage des jeunes, diplômés ou non, de l’approvisionnement en électricité, la cherté du coût de la vie, la paupérisation des campagnes, l’insécurité en Casamance, etc. Comment peut-on délaisser autant de chantiers au profit de fixations problématiques ?

Pourtant le candidat Macky Sall aimait bien rappeler avoir beaucoup voyagé à l’intérieur du pays, avoir visité les hameaux les plus reculés et avoir découvert des conditions de vie inimaginables embourbées dans une précarité insoutenable. On aurait pu penser que sa mémoire encore pleine de ces détresses, de ces vies abandonnées par la fortune, sacrifiées par cinquante deux années d‘indépendance beaucoup plus préoccupées par une gestion « bamboulasque » des deniers publiques, qu’il opérerait cette fameuse rupture générationnelle dont on nous bassine à tout bout de champ. En montrant ce côté vaillant et décomplexé d’une jeunesse militante pour le Sénégal. Pour l’Afrique. Mais que non. Les anciens travers ont la vie dure comme en témoignent ces 4X4 offertes aux députés à coups de milliards, ces grosses cylindrées qui font le bonheur des ministres, sur le dos du contribuable. Oubliant qu’ils n’ont pas été élus pour ce côté bling-bling.
Paradoxalement nos ministres semblent heureux dans un océan de problèmes. Grosses voitures, motards, chauffeurs. Le décorum du pouvoir et voilà qu’ils sont aux anges, oubliant leurs missions. S’ils en avaient encore le sens, ils en auraient perdu leurs mines radieuses. Elles jurent d’avec celle beaucoup plus marquée du président des Etats-Unis. A comparer Obama 1 et Obama 2, il est évident que le contraste est frappant. En 4 années, le jeune président a vieilli, marqué par les épreuves et les problèmes à résoudre.

Notre planète est ainsi faite qu’il y a des pauvres englués dans les maux du monde. Ne pouvant ni lire ni écrire, ni se soigner ni vivre de leur labeur, ils sont plombés dans une précarité qui les fragilise à tous les niveaux.
L’action du gouvernement de Macky Sall devrait alors plutôt s’inscrire dans la perspective de renverser l’ordre des choses, avec la ferme volonté de modifier la trajectoire du Sénégal, en le sortant de la longue nuit de la prédation dans laquelle il a été installé depuis des lustres.

Une noble mission aux antipodes des calculs clientélistes dépourvus de générosité et de sens historique.

1 COMMENTAIRE

  1. Bravo Vieux Savané ! Une analyse lucide qui rappelle à l’ordre ces fous heureux de l’APR. Je suis fier de voir qu’il y a encore des nôtres qui se soucient du bien-être de notre brave peuple. Million of thanks.

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