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Polémique Et Suspicions Autour Du Fichier Électoral Les Recommandations Des Experts Pour Dissiper Les Suspicions

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Le fichier électoral issu de la refonte partielle de 2016-2017 est unique et les recommandations de l’audit de janvier dernier sont en train d’être traitées pour résorber le gap. C’est du moins la conviction des experts électoraux contactés par la rédaction de Sud quotidien, en l’occurrence Valdiodio Ndiaye, membre du Collectif des organisations de la société civile pour les élections du Sénégal (Cosce) et Ababacar Fall, président du Groupe de recherche et d’appui conseils pour la démocratie participative et la bonne gouvernance (Gradec). Pour autant, dans le but de créer un climat de confiance entre les acteurs, ces experts recommandent, au-delà de la concertation, un audit de certification.

ABABACAR FALL, EXPERT ELECTORAL MEMBRE DU GRADEC : «Ce sont les désaccords profonds sur la loi sur le parrainage qui ont provoqué tout ce débat»

Le débat sur le fichier électoral n’est pas nouveau, il survient ainsi à la veille de chaque consultation électorale. A la veille de l’élection présidentielle de 2000, de très fortes suspicions ont pesé sur le fichier d’alors occasionnant de vives tensions avec l’affaire des cartes dites israéliennes et du fichier qui aurait migré vers la présidence de la République. Il a fallu l’intervention de la société civile regroupée autour du front d’action de la société civile (FACS) et l’oreille attentive du Président Diouf pour qu’une solution fût trouvée en accord avec l’opposition.
En 2006, après la refonte totale du fichier électoral, le même débat a ressurgi et après un audit mené par la société civile et les partis politiques au centre commercial Dakar-Plateau, les conclusions aboutirent au constat que même si le fichier pouvait encore être perfectible, il était suffisamment fiable pour qu’on aille à l’élection présidentielle de 2007 avec le fichier.
Après la victoire au premier tour de Me Wade, les suspicions reprirent de plus belle poussant l’opposition à boycotter les élections législatives de 2007 et à exiger de nouveau un audit du fichier. Devant la sourde oreille du pouvoir, l’opposition a dû se résoudre à effectuer son propre audit qui, finalement, ne donna pas grand-chose. Cependant, c’est avec ce fichier que l’opposition remportera les grandes villes lors des élections locales de 2009. Pour autant, la contestation continua jusqu’à ce que ce Président acceptât de donner suite à la revendication de l’opposition autour du fichier en faisant procéder à l’audit du fichier en 2011 par des experts indépendants commis par l’Union Européenne, les Usa et l’Allemagne. Le résultat de cet audit conclut à la quasi-fiabilité du fichier qui, cependant, pouvait être amélioré avec la mise en œuvre de 108 recommandations dont le suivi donna naissance au comité de veille qui regroupait l’ensemble des acteurs regroupés en pôle ainsi que l’administration, la Cena et les partenaires qui y avaient un statut d’observateur.
C’est ce même débat qui s’est posé après la refonte partielle du fichier électoral à la suite de l’introduction des cartes d’identité biométriques Cedeao et qui nous a valu un énième audit mené par des experts commis par l’Union Européenne encore qui conclut de nouveau «à la bonne tenue du fichier» avec une marge d’erreur de 1,2 à 1, 9 %.
Aujourd’hui, la particularité du débat réside dans l’introduction dans notre dispositif électoral de la loi sur le parrainage citoyen qui n’a pas fait l’objet de concertations sérieuses et suffisantes qui auraient permis sans doute d’examiner de façon profonde les implications de la loi dans ses modalités d’application afin de se mettre d’accord sur les conditions d’accès de tous au fichier pour vérifier la présence ou non des électeurs parrains dans le fichier général. Pour ma part, je crois que ce débat aurait pu être évité si un dialogue franc et sincère s’était instauré entre les acteurs. Ce sont les désaccords profonds sur la loi sur le parrainage qui ont provoqué tout ce débat qui, si l’on n’y prend garde, est en train de poser les germes d’un contentieux électoral préjudiciable à la paix et à la stabilité du pays.

VALDIODIO NDIAYE, EXPERT ELECTORAL MEMBRE DU COSCE :«Tout ce débat autour de trois fichiers est inapproprié»

Actuellement, si on procède à une analyse de ce qui se passe, on se rend compte que tout ce débat-là est un peu fondé sur un certain nombre de méconnaissances de ce qui est en train de se faire. Pour rappel, au mois de janvier dernier, il a été décidé de faire l’audit du fichier. A l’issue de cet audit, il y a eu 38 recommandations qui sont sorties. Pour traiter ces 38 recommandations, il a été mis en place un Comité de suivi. Donc, le travail est en train d’être fait et le gap est en train d’être résorbé. C’est pour cela que je dis que c’est par méconnaissance. Parce que, souvent je dis à nos amis qu’il est important des fois de ne pas faire la politique de la chaise vide, parce que ça ne permet pas d’avoir toutes les appréciations nécessaires sur la situation.
Par expérience, pour avoir suivi au quotidien le traitement de ces recommandations-là, je pense qu’au Sénégal, nous avons un seul fichier. C’est sur ce fichier, issu de la refonte partielle de 2016-2017, que nous travaillons. Donc, tout ce débat autour de 3 fichiers est un peu inapproprié et ce n’est même pas bon pour l’image du Sénégal. Parce que nous sommes une démocratie, je pense, à un certain niveau, quand même nous ne pouvons pas tomber sur ces travers-là. Il y a un certain nombre de dispositifs mis en œuvre dans le processus électoral qui ne permettent pas d’avoir ces genres de situations aujourd’hui. Je suis formel qu’aujourd’hui, il n’y a qu’un seul fichier électoral.
VALDIODIO NDIAYE, EXPERT ELECTORAL MEMBRE DU COSCE : «L’Etat peut créer les conditions d’un audit complémentaire ou de certification»

Ça, c’est la posture de la société civile. Nous avons pu travailler sur cette approche. La responsabilité de l’Etat, à un certain moment, est engagée. Parce qu’il appartient à l’Etat, au président de la République, de rassurer les acteurs. Rassurer les acteurs, instaurer un climat de confiance entre les acteurs, c’est extrêmement important. Parce qu’en matière électorale, la perception est importante. On peut avoir un très bon processus électoral en termes de contenu, mais si la perception n’est pas bonne, ça crée des problèmes. Aujourd’hui, il y a une rupture de confiance. Il n’y pas de dialogue entre les acteurs politiques. C’est ça qui amène ce débat. Il faut restaurer la confiance.

Pour restaurer la confiance, il est important pour l’Etat de créer d’abord les conditions d’accessibilité au fichier par l’opposition. Je pense qu’il y a un premier pas qui a été fait. C’est-à-dire le fait de mettre le fichier en ligne. Aujourd’hui, ceux qui sont dans le parrainage, une fois que leur liste est bouclée, peuvent prendre un informaticien pour vérifier en ligne si les parrains du candidat sont sur le fichier. Attention, ce n’est pas la liste de manière brute qui est disponible. Mais, c’est un fichier avec un moteur de recherche, c’est-à-dire que, quand vous insérez le numéro de l’électeur, son nom et prénom, il vous renseigne. Les candidats peuvent faire ce travail de recherche et de comparaison avant dépôt, parce qu’ils ont encore le temps. L’ouverture du dépôt commence le 11 décembre.

Le deuxième pas que l’Etat peut faire dans le cadre de la restauration de la confiance, c’est de créer les conditions d’un audit complémentaire ou de certification, l’appellation importe peu, du fichier. Dans cet audit, il importe d’impliquer l’ensemble des forces politiques. A ce niveau-là, je pense que nous, la société civile, nous allons travailler à inciter tout le monde à participer à ce travail pour en finir définitivement sur ce débat autour du fichier.

ABABACAR FALL, EXPERT ELECTORAL MEMBRE DU GRADEC : «Les modifications d’adresse électorale et les radiations pourraient faire l’objet d’un audit de certification»

L’article L.48 du code électoral dans son alinéa 3 dispose que « Le Ministère chargé des élections fait tenir le fichier général des électeurs, en vue du contrôle des inscriptions sur les listes électorales. La Cena ainsi que les partis politiques légalement constitués ont un droit de regard et de contrôle sur la tenue du fichier. Un décret détermine les conditions d’organisation et de fonctionnement de ce fichier». Cette disposition, si elle est appliquée, devrait permettre de régler la question de l’accès au fichier aux partis qui le demandent car, après le dernier audit effectué par les experts de l’UE, il y a eu des mouvements avec la révision exceptionnelle décidée en mars-avril dernier. Par conséquent, le fichier ayant subi des évolutions avec l’enregistrement de nouveaux électeurs, les modifications d’adresse électorale et les radiations pourraient faire l’objet d’un audit de certification qui se ferait dans un délai relativement très court et qui permettrait de rassurer tous les acteurs. Cela est possible si et seulement les acteurs acceptent de s’asseoir et de discuter. Cela me semble être la solution idoine susceptible de mettre fin au débat et à la suspicion.

L’évocation de l’article L.11 du code électoral qui parle de la remise de la liste des électeurs par bureau de vote quinze (15) jours au moins avant la date du scrutin aux candidats sur support électronique et en version papier et à la Cena dans les mêmes formes est très différent de la remise du fichier électoral ou de l’organisation de son accès. Cette opération permet juste aux représentants de candidats dans les bureaux de vote de disposer de la liste des électeurs inscrits dans le bureau de vote afin de faire le contrôle des opérations. Encore une fois, si nous voulons que cette élection présidentielle se déroule dans la sérénité et le calme, il appartient aux acteurs de renouer le fil du dialogue et de s’entendre sur les règles du jeu comme ils l’ont fait en 2000 et en 2010/2011. Cela me semble une des solutions peut être parmi d’autres.

sudonline.sn

2 Commentaires

  1. Lors du vote de ce projet de loi, un amendement a été fait sur le taux de 1%. Les pourcentages finalement retenus se situent entre 0,8 et 1%. Le fichier électoral au Sénégal compte actuellement 6,5 millions d’inscrits. La conditionnalité du parrainage (jusqu’ici réservée aux candidats indépendants à qui la loi demandait 10 milles signatures) devient donc intégrale et concerne toutes les élections (présidentielles, législatives, départementales et municipales).

    On sait pertinemment que le fichier avec lequel les Sénégalais iront à l’élection présidentielle ne comportera pas 6.500.000 électeurs. De toute façon, quel que puisse être ce nombre, le pouvoir a déjà un noyau dur d’au moins 3.000.000 d’électeurs potentiellement sûrs de voter pour son candidat, grâce à une méthode « diaboliquement » efficace ! Dans ces conditions, qu’on s’étonne pas de constater l’assurance affichée depuis des mois du camp présidentielle, pour une victoire éclatante dès le premier tour, et avec un score déjà connue par eux et par… moi !

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