Politique agricole de Wade: promesses enterrées

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Tout porte à croire que pour le président de la République, l’essentiel est de faire des promesses. Le respect des promesses importe peu. Certainement pour lui, il suffit de laisser le temps au temps pour que la parole donnée soit effacée de la mémoire collective. Dans les domaines de l’agriculture, de l’emploi entre autres, les fruits n’ont pas tenu la promesse des fleurs. Loin s’en faut.

Tambour battant, le président de la République use et abuse des promesses les plus mirobolantes à son interlocuteur et à sa cible du moment. « Aujourd’hui tous mes projets sont financés au-delà de mes espérances. Le problème c’est qu’il y a beaucoup d’argent et je ne sais pas si le pays pourra les contenir… » Ainsi parlait Abdoulaye Wade en 2001 en visite aux Etats-Unis après avoir reçu des investisseurs américains. Et le Président de renchérir : « tous les projets que nous avons ont trouvé un financement. Le problème actuel du Sénégal, c’est qu’on a trop d’argent. Je crois que cela n’arrive qu’au Sénégal. Les gens cherchent de l’argent. Nous on vient nous en donner ». Ce surplus d’argent annoncé par le président de la République devait permettre de financer le projet de développement économique du pays notamment les grands projets du chef de l’Etat. Pour mettre en œuvre ces projets, le gouvernement a élaboré des programmes de développement tels que le Plan REVA en 2006.

Le Plan REVA ou Retour vers l’agriculture vise à établir des populations notamment les jeunes et les femmes dans leur pays en particulier les migrants et rapatriés. Il a également pour but d’augmenter de manière significative la production agricole, notamment des cultures de diversification. Le Plan REVA tente par la même occasion de répondre aux objectifs de la Stratégie de croissance accélérée ; aux Objectifs du Millénaire pour le développement et à la lutte contre la pauvreté (Document de Stratégie pour la Réduction de la Pauvreté). La vague de jeunes déterminés à braver la mer et la mort pour atteindre les rivages de l’Europe après la mise en place du Plan est assez illustratif de l’échec de REVA.

Deux évaluations réalisées sur la sécurité alimentaire en 2008 par la FAO en milieu rural et en milieu urbain. En milieu rural, une Enquête de Sécurité Alimentaire en Situation d’Urgence (ESASU) a été conduite en juillet-août 2008 (période de soudure) sur toute l’étendue du territoire. Sur la base du score de consommation alimentaire 5,21% des ménages avaient une consommation alimentaire « pauvre » en terme de diversité et de fréquence, 21% une consommation alimentaire « limite » et 59% une consommation alimentaire « acceptable ». Clairement, c’est dans le sud du pays que la proportion de ménages ayant une consommation alimentaire « pauvre » était la plus élevée (33% des ménages en Haute Casamance et Sénégal oriental, 28% dans le Bassin Arachidier, 28% en Basse et Moyenne Casamance) (PAM, 2008).

Quelques mois avant cette enquête en avril 2008, le Président avait lancé le programme de la Grande offensive agricole pour la nourriture et l’abondance (Gaoana). Dans le rapport de présentation du décret de novembre 2010 instituant la Goana, il est indiqué que « la GOANA est un vaste plan d’urgence mais aussi une démarche stratégique qui vise la relance de l’ensemble des cultures vivrières, sans oublier les cultures industrielles et horticoles, dans une volonté politique d’indépendance alimentaire en produisant ce que nous consommons et, au-delà, en allant délibérément vers la prospérité par l’exportation de nos excédents ».

Deux ans après, le Président, à travers des déclarations publiques, persiste à croire que le Sénégal a atteint l’autosuffisance alimentaire. En juin 2010, c’est au cours du Conseil présidentiel sur l’investissement, le Chef de l’Etat devant une assistance médusée, dont une panoplie d’experts, a annoncé que le Sénégal est autosuffisant. « Nous étions le pays le plus dépendant du monde, il y a six ans, puisque nous importions tout le riz que nous consommions. (…) Nous avons lancé la Goana. Aujourd’hui, nous sommes à 523 mille tonnes, sur les 600 mille tonnes que nous consommons. Comment est-ce possible ? Par la volonté politique, et les moyens d’investissement » révélait le président de la République. Des chiffres démentis par des services de l’Etat. Le dernier bulletin mensuel des statistiques économiques publié en décembre 2010 indique que la production de riz s’établit à 391 271 tonnes

Le rapport de l’Ansd (Agence nationale de la statistique et de la démographie) sur la situation économique et sociale du Sénégal (décembre 2010) souligne aussi que « la production de céréales a légèrement décru de 1,5%. En effet, en dehors du mil qui a enregistré une hausse de la production de 19% due à l’accroissement des superficies du même taux, les autres spéculations céréalières, notamment le sorgho, le maïs et le riz ont enregistré des reflux. »

La production de manioc a baissé de (71%), imputable essentiellement à la baisse des superficies de 70%. La production de niébé a également enregistré un recul de 31% ». On remarque ici une baisse drastique de la production des programmes spéciaux maïs, manioc, chers au Président. Ces programmes spéciaux ont été mis en œuvre sans une réelle participation des acteurs économiques selon une étude (Faye, jacques et al : « Les implications structurelles de la libéralisation sur l’agriculture et le développement rural au Sénégal (1950-2006), février 2007).

La Goana c’est aussi une grande offensive sur les terres par les tenants du régime. Le chef de l’Etat s’est fait le chantre d’une telle approche en invitant les directeurs, les ministres et cadres de société à cultiver au moins 20 hectares. « Si quelqu’un demande dix hectares, on les lui donnera ; s’il deman—de mille hectares, on les lui donnera. Pour la mise en valeur et les résultats, on verra bien. Il n’y a pas de problème de terre. Il y a trop de terres, déjà, par rapport aux populations sénégalaises ». Ainsi dit ainsi fait : 232 208 hectares ont été attribués alors que 140 000 seulement sont destinées à l’agriculture. Mieux l’ensemble des terres disponibles sur la rive gauche du fleuve Sénégal aménageables est de 240 000 hectares. Il est vraisemblable que l’objectif non avoué était faire main basse sur les terres du pays.

Emplois

« Ceux qui n’ont pas de travail, levez la main » avait l’habitude de dire le président devant des masses compactes de jeunes acquis à la cause du changement lors de sa campagne électorale de 2000. Au début de son accession au pouvoir, il avait aussi l’habitude de clamer : « il faut travailler encore travailler toujours travailler ». Mais toujours est-il que le chômage reste plus que jamais chronique et endémique. Une étude ((Private sector demand for youth labour in Ghana and Senegal : Ghana and Senegal study Findings) publiée en 2009 par le Youth employment network et International Youth foundation sur la demande d’emploi dans le secteur privé au Ghana et au Sénégal montre que le secteur informel représente entre 80 et 90 % de la population active du Sénégal. Les demandeurs d’emploi sont estimés à 100 000 chaque année. L’offre est en revanche plus que limitée. L’étude révèle que près de 10 264 nouveaux emplois seront créés entre 2009 et 2013 dont 40 % seulement à plein temps et 60 % à temps partiel. Des chiffres révélateurs sur le sous-emploi, la précarité et la pauvreté des jeunes. L’écart entre la demande et l’offre renseigne éloquemment sur l’échec de la politique d’emploi si tant est qu’il y en a une.

Projet Yakalma

Le projet Yaklma est un autre éléphant blanc agité par le président de la République avant son élection en 2000. Yakalma finalement n’existe que sur le papier à travers le décret présidentiel du 2 mai 2005 relatif à l’organisation administrative pour la mise en œuvre du projet. Le décret s’énonce comme suit.

- Article premier. – Le projet « Yakalma » (projet de fourniture de repas au profit des écoles, des universités, des agents de la fonction publique et des casernes) relève de la compétence du Ministre de la Solidarité nationale. Le Ministre de la Solidarité nationale est chargé, sur la base des orientations arrêtées par le Président de la République et le Premier Ministre, de concevoir, de mettre en œuvre et d’assurer le suivi du projet Yakalma. Il peut, dans ce cadre, solliciter le concours des autres départements ministériels afin qu’ils lui fournissent l’assistance administrative nécessaire.

- Art. 2. – Toute disposition réglementaire contraire au présent décret est abrogée.
- Art. 3. – Le Premier Ministre et le Ministre de la Solidarité nationale sont chargés, chacun en ce qui le concerne, de l’exécution du présent décret qui sera publié au Journal officiel.

Aliou NIANE

lagazette.sn

 

1 COMMENTAIRE

  1. Ce vieux senile de menteur et de detourneur se prend pour un roi.Voler et menteur,c’est tout ce qu’il sait faire.Alaboni ce vieux mecreant et sa maudite famille

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