Le ministère de l’Energie et la Senelec se sont obstinés à qualifier les délestages de perturbations passagères et sous contrôle. Craignant que les choses ne s’amplifient et prennent une autre dimension, le chef de l’Etat a demandé le rapide règlement de la question des délestages.
La question de l’électricité a toujours produit une communication calamiteuse dans les sphères du pouvoir. Cela a toujours été ainsi, quel que soit le pouvoir en place. On se rappelle qu’au temps des Socialistes, la Senelec avait été jusqu’à invoquer des vautours qui étaient entrés dans les turbines et provoqué un incendie ravageur à Bel Air, en son temps. Cela n’avait pas convaincu grand monde, mais manifestement, le but n’était pas de convaincre.
Avec le pouvoir Libéral du Président Wade, tout avait été entendu, jusqu’à satiété. Le Sénégal n’a obtenu un semblant de répit qu’avec la mise en place de «Takkal», le plan si cher aux yeux de Karim Wade. Que les affidés de Macky Sall se sont dépêchés de disqualifier.
Dès son arrivée au pouvoir, le nouveau régime a pris à bras-le-corps la question de l’énergie. Le ministre de l’Energie et des Mines, M. Aly Ngouille Ndiaye, invoquant un gaspillage incomparable des ressources publiques, ainsi qu’une inefficacité manifeste dans la gestion de ce plan, s’est empressé d’en déclarer la fin, pour de concert avec le chef de l’Etat, programmer un mix énergétique qui est loin d’avoir vu le jour. Seulement, entretemps, les Américains d’Apr qui ont loué leurs centrales en appoint à la Senelec, au prix fort, se sont vus signifier le non-renouvellement de leur contrat.
Et comme avant, à l’époque de Wade, quand on met la charrue avant les bœufs, en se privant des 125 Mw de Apr sans solution de substitution vraiment solide, l’effet boomerang n’a pas tardé à se faire sentir. Dakar et quelques grands centres du pays ont commencé à revivre les affres du manque de courant. Mais personne n’a fait comprendre à M. Pape Dieng, le nouveau directeur de la Senelec, que ce qui a surtout créé la rupture entre sa compagnie et les Sénégalais, c’est une communication à contretemps. Il s’est enferré dans le silence, préférant choisir les canaux de la communication gouvernementale pour faire passer un message d’autoglorification, assurant que la situation était maîtrisée.
C’est quand ce message ne pouvait plus passer en l’état, que l’on a vu M. Ibrahima Niane, le directeur de l’Energie, monter au créneau (voir Le Quotidien n°2996 du jeudi 17 janvier 2013). Regardant littéralement l’opinion dans les yeux, M. Niane a prétendu que «les perturbations notées il y a quelques jours étaient dues au fait que les tests de mise en service de la centrale de Felou, ont nécessité l’arrêt de Manantali» géré par l’Omvs. Assurant que c’était «des problèmes conjoncturels», le représentant de Aly Ngouille Ndiaye a indiqué que toutes les dispositions étaient prises pour que la situation revienne vite à la normale. Depuis lors, les choses, loin de revenir à la normale, ont même un peu empiré, avec des perturbations plus ou moins fréquentes et non maîtrisées.
Il a alors fallu changer de langage et c’est Macky Sall en personne, qui s’en est chargé hier en plein Conseil des ministres. Reprenant enfin le langage de la vérité, le chef de l’Etat a tenu à nommer la situation par son nom. Le communiqué du Conseil des ministres, en le citant, souligne : «Il a ainsi demandé au Premier Ministre en relation avec le Ministre de l’Energie et des Mines, de prendre les dispositions nécessaires pour mettre un terme aux délestages dans la fourniture d’électricité, constatés ces derniers jours, d’accélérer le processus d’électrification en faveur de 3200 villages d’ici la fin de l’année 2013, de développer un important programme de maîtrise de la demande en énergie, en poursuivant notamment le projet de mise à disposition des ampoules à basse consommation». En des mots simples, l’essentiel est dit.
Maintenant que Macky Sall a identifié le mal et lui a donné son nom, les Sénégalais peuvent espérer que la Senelec prenne enfin au sérieux leur détresse et règle définitivement cette question. Pape Dieng ne peut oublier que ce qui a contribué à l’impopularité de Karim Wade et Samuel Sarr, c’est moins l’étalage de leur fortune insolente, mais c’est aussi et surtout, leur incapacité à leur fournir une électricité stable et à moindre coût.
lequotidien.sn
Delestages – Après les dénégations du ministre de l’Energie : Macky Sall passe aux aveux
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