Eumeu Sène est revenu à Dakar pour fêter la Tabaski en famille, après deux mois de préparation à Bergamo (Italie). Trouvé hier dans sa salle de musculation à Excaf (RDV), le chef de file de l’écurie Tay Shinger revient sur son combat contre Modou Lô prévu le 1er janvier 2014. Le technicien de Pikine, qui nous est apparu avec des muscles en moins, affiche une belle forme et rassure son monde. Parce que, dit-il, il a terrassé plus dangereux que Modou Lô. Il s’est également prononcé sur le combat- revanche contre Balla Gaye 2, de même que sur Tyson / Gris Bordeaux. Entretien :
On s’attendait à ce que vous passiez la Tabaski en Italie où vous étiez parti pour vous entraîner. Pourquoi êtes-vous revenu de sitôt ?
J’avais effectivement programmé de revenir au pays pour passer la Tabaski en famille. C’est mieux, je pense.
Dans quelle localité étiez-vous en Italie ?
J’étais à Bergamo, chez mon grand frère Pape Ngom et mon ami Saliou Diagne. J’y ai passé deux mois. Je travaillais au niveau d’une salle de Bergamo. J’étais coaché par un professionnel du nom de Thomas. J’ai fait du maintien. Je ne pouvais pas rester sans m’entraîner en vue de mon combat contre Modou Lô et j’ai décidé de me rendre en Italie pour faire un travail de maintien. Je n’ai pas fait des entraînements intenses ; juste un travail assez léger et moins intensif.
Vous avez brûlé quelques graisses dans votre corps. Est-ce un vœu personnel ou c’est votre coach qui vous l’a conseillé ?
Je ne souhaite plus avoir un certain poids. Je n’avais pas un si gros ventre ; mais j’ai travaillé mes abdominaux pour masser mon ventre. Ainsi, je suis revenu avec un beau ventre. J’ai cassé mon gros ventre.
Est-ce que vous avez préféré cet état de forme en fonction de votre adversaire, Modou Lô ?
Non. Je ne me focalise pas sur mes adversaires pour bosser. Je travaille en fonction de ce que je sens et pour avoir la forme physique qui me va le mieux.
Il y a eu trop de bruit autour de votre blessure d’avant-combat. Pour certains, vous l’avez provoquée car vous aviez été mystiquement atteint par Modou Lô dont la victoire était plus que certaine Que répondez vous ?
On ne peut pas empêcher les gens de faire leur commentaire. Tout le monde a vu ce qui s’est passé. Les entraînements sont tellement durs que je ne pouvais pas torpiller tout ce que j’avais abattu comme travail, au dernier moment. C’est à la limite insensée. J’avais bien préparé mon combat. C’est à quelques petits jours de l’assaut final que j’ai été blessé par un coup de coude de mon coéquipier Nguer qui n’avait pas tort aussi. Je ne pouvais pas faire une certaine chose quand même. Mon combat contre Gris Bordeaux a été âprement disputé, mais après je m’étais bien tiré d’affaire. Penser un seul instant que c’est parce que j’étais convaincu de mordre la poussière que j’ai contracté volontairement cette blessure à l’arcade sourcilière est ridicule. C’est des histoires qu’on raconte. Tout le monde sait qu’une arcade sourcilière est très fragile et qu’il est très facile de se blesser à ce niveau-là. Je suis un croyant et en tant que tel, je ne peux pas anticiper sur le futur parce que je ne sais pas ce qui va arriver forcément demain. C’est Dieu qui donne la victoire. Du coup, personne ne peut vous dire d’avance que c’est tel ou tel qui va vaincre.
En Casamance, on soutient que le report de votre combat contre Modou Lô a été provoqué par ceux qui prient pour vous parce que, dit-on, vous alliez mordre la poussière. Qu’en dites-vous ?
Qui vous a tenu ce langage ?
Tapha Sonko qui connaît bien Badiana, le village de votre maman et les savants du village…
(Sourire en coin) Non, je ne le cro ispas. Les habitants de Badiana prient pour moi et me rassurent par rapport à mes combats. Mais franchement personne ne m’a dit ce que vous venez de me révéler.
On a également appris que vous aviez été averti du sang qui devait couler contre Gris Bordeaux, en signe de votre victoire. Votre victoire tenait à ce sacrifice. Vous confirmez ?
(Rires) Non, vous êtes en train de faire dire à Badiana ce qu’il n’a pas dit du tout. Ce n’est pas ce qu’ils ont dit. Ce que je peux vous dire, c’est que ma mère m’avait fait savoir que mon combat contre Gris Bordeaux n’allait pas être facile du tout. C’est ainsi qu’elle m’avait conseillé de ne pas baisser les bras et de me défoncer comme un forcené. C’est ce qu’elle m’avait dit, et rien d’autre. Les savants de Badiana prient pour moi. Je ne dirai pas que c’est seul le village de Badiana qui prie pour moi car toute la Casamance prie pour moi. Mon père est un pur Sérère et ma mère est une pure Diola qui vit en Casamance. Tout le monde sait que Sérère et Diola sont les mêmes. A chaque fois que j’ai un combat, je m’y rends et ils prient tous pour que je gagne.
Comme vous le dites si bien, toute la Casamance prie pour vous et pour Balla Gaye 2. Certains ne veulent plus de votre combat-revanche contre Balla Gaye 2. Qu’en pensez-vous ?
Oui. Beaucoup de Diolas m’ont fait savoir qu’ils ne souhaitent pas que je croise Balla Gaye 2. Mais c’est lui qui veut la revanche. Je ne peux que m’entraîner et attendre. Lout jot Yomb. Franchement, au niveau de la Casamance, ils sont nombreux à me dire de ne pas affronter à nouveau Balla Gaye 2. Sinon, l’homme propose et Dieu dispose. Je vais attendre de voir ce qui va se passer.
Allez-vous suivre leurs conseils ou accorderez-vous une revanche à Balla Gaye 2 ?
C’est lui qui veut la revanche. Ce que je peux lui répondre c’est simple : lout jot yomb. Pas plus.
Beaucoup de personnes ne comprennent pas pourquoi vous avez accepté de signer contre Yékini alors que vous êtes encore sous contrat pour affronter Modou Lô.
Je ne vais pas me prononcer sur ce combat pour le moment. Prenez votre mal en patience. Si le moment de tirer toutes ces choses au clair arrive, je vais le faire. On n’en est pas encore là. Il n’est pas encore temps d’évoquer cette question-là. Le moment venu, je vais me prononcer sur le combat contre Yékini.
Pendant votre absence, Modou Lô a déclaré dans un entretien que même si le combat devait être disputé en 2020, il est convaincu de vous battre. Quel commentaire en faites-vous ?
Beuss wakh bou jotè, dinaa dèf lima meune. Je ne suis pas un athlète qui privilégie la parole. J’aime poser les actes et j’attends le jour-J pour appliquer. C’est ma réponse à Modou Lô. Je ne serai pas long avec lui : qu’il continue de parler, moi j’attends le jour du combat pour faire ce que j’ai à faire. Je n’accorde pas d’importance au bavardage. C’est tout.
Modou Lô également attend le jour du combat pour appliquer…
Qu’à cela ne tienne ! Je ne vais pas être long sur cette question. J’attends le jour-J et on verra bien.
Après le report de ce combat, avezvous vous eu une rallonge financière de la part du promoteur pour vous aider à éponger les 60 millions que vous aviez déjà dépensés dans votre préparation ?
Non…Il n’y a pas eu de rallonge financière. Le promoteur Aziz Ndiaye a investi beaucoup de millions dans ce combat. Il en a donc beaucoup perdu. A ce titre, je pense qu’il faudra qu’on soit compréhensif. Je n’ai pas de problème à ce niveau.
Beaucoup de personnes soutiennent que vous avez une peur bleue pour ce combat contre Modou Lô surtout sur le plan mystique. Qu’en est-il ?
(Catégorique) Non, peur du mystique de Modou Lô, pourquoi ? Pourquoi dois je avoir peur de Modou Lô sur le plan mystique ? J’ai terrassé des adversaires mystiquement plus costauds que Modou Lô. Vraiment, je ne crains pas le mystique de Modou Lô. Qu’on me laisse avec le peu de mystique que j’utilise lors de mes combats ! Je crois en Dieu et je Le mets au-devant de tout. C’est le lieu de remercier ceux qui prient pour moi. J’ai toujours brillé avec mes trois bouteilles mystiques. Qu’on me laisse avec ça !
Voulez-vous dire que le mystique de Modou Lô ne vous ébranle pas ?
Non, moi je ne crains rien au plan mystique. Que ce soit Modou Lô ou un autre adversaire, je ne me prends jamais la tête sur ce plan. Dieu merci, j’ai confiance en ceux qui prient pour moi. Je me contente de ce que mes marabouts me donnent et respecte mes 5 prières quotidiennes en tant que musulman. Pour moi, c’est l’essentiel. Je ne crois pas trop aux amulettes. N’empêche qu’il y a des gens très bien qui prient pour moi. Ils sont partout dans le pays. Si je croyais trop aux amulettes, j’allais me couvrir de gris-gris comme un faux-lion. Vous remarquez que tel n’est pas le cas parce que je me suffis à mes quelques gris-gris.
Ne craignez-vous pas d’être attaqué mystiquement par vos deux adversaires, Modou Lô et Yékini, en même temps ?
Mon cher, limitons-nous à mon combat contre Modou Lô. Concernant mon combat contre Yékini, je m’y prononcerai le moment venu
Tyson va disputer son premier combat sans vous. Cela ne va-t-il pas le diminuer ?
(Il baisse le ton). Je ne vais pas être long sur cette question-là. Je prie Dieu afin que Tyson terrasse Gris Bordeaux.
Etes-vous convaincu qu’il peut bien battre Gris ?
Ah oui, pourquoi pas ? Il peut bien battre Gris Bordeaux, comme il l’a réussi avec d’autres. Je prie Dieu qu’il s’en sorte. Tournons la page s’il vous plaît.
Il se susurre qu’Eumeu Sène est le seul lutteur VIP à n’avoir pas de maison à son nom. Qu’en est-il réellement ?
Ce n’est pas vrai. J’ai des maisons comme mes autres camarades. Au niveau de la cité Djily Mbaye où je loge, j’ai une maison avec un titre foncier établi à mon nom. Dieu merci. Je ne peux pas rester là à parler de mes avoirs comme le font certains, mais je rends grâce à Dieu. Je sais ce que j’ai comme biens et je n’ai vraiment pas besoin de l’étaler sur la place publique.
Vous venez de vous remarier…
(Il nous coupe). C’est ma vie privée, laissons ce sujet et parlons d’autre chose. Ce que je puis vous dire est que je n’ai pas de problème sur certaines considérations. Je suis bien avec ma femme et je ne me soucie pas de ce que les gens vont dire à propos du résultat éventuel de mon premier combat après mon second mariage.
Modou Lô a déclaré que s’il a envie d’enfouir des amulettes chez ses adversaires, c’est lui-même qui le fera. Il a donné le ton une première fois…
Je ne vais rien dire à ce propos. J’attends de poser les actes concrets.
Balla Gaye 2 a annoncé un championnat regroupant des ténors. Qu’en pensez-vous ?
Oh mon cher, je n’aime pas me prononcer sur les propos des autres. Je n’ai pas de commentaire à faire sur ça.
L’Etat veut construire l’arène nationale chez vous à Pikine mais il fait face à un mur de contestations. Certains estiment qu’il y a des agresseurs à Pikine Quelle est votre position ?
Il n’y a pas d’agresseurs à Pikine. On n’y trouve que des jeunes qui croient en eux et au travail. Les agresseurs sont partout au Sénégal. Qu’on arrête de dire que les Pikinois sont des agresseurs ! Je suis désolé mais tel n’est pas le cas.
En tant que leader à Pikine, peut-on s’attendre à ce que vous rencontriez ceux qui sont contre le projet pour les convaincre de revoir leur position ?
Ceux qui s’opposent à la construction de l’arène nationale à Pikine ne sont pas nombreux. Chaque pays respecte son sport national et je pense qu’il est bon d’avoir une arène nationale. C’est le lieu de remercier mon pays pour m’avoir permis de faire l’équipe nationale et d’approfondir mes connaissances techniques en lutte. Je remercie Abdou Badji, Ambroise Sarr et Moundor Diouf. Je lance aussi un appel aux jeunes afin de passer à l’équipe nationale. C’est une bonne chose de fréquenter l’équipe nationale. En tout cas moi, je ne regrette rien. J’ai beaucoup appris à l’équipe nationale. Je m’en réjouis.
Vous avez côtoyé Yékini en équipe nationale. C’est ce qui explique, semble-t-il, votre souhait de le croiser parce que vous le connaissez bien. Qu’en est-il exactement ?
Je vous ai dit que je n’ai pas envie de me prononcer sur ce combat contre Yékini ; mais apparemment vous voulez me faire parler. Ce que je peux vous dire est que Yékini et moi entretenons de très bons rapports. Quand on était en équipe nationale, à l’heure des prières, nous les dirigions à tour de rôle. Nous faisions office d’imam. Il n’y a aucun problème entre nous.
Avez-vous un message à lancer ?
Je profite de l’occasion pour présenter toutes les condoléances aux familles de feus Papa Kane et Khady Diouf décédés récemment. Leur disparition m’a beaucoup marqué parce qu’ils sont des nôtres. Je présente à leurs familles respectives mes condoléances les plus sincères. Je prie également Dieu de les accueillir dans son Paradis. Je remercie mes entraîneurs : Jean, Djigo, Bill, Diallo de Excaf ainsi que tous mes coéquipiers.
Justement vous étiez classé 1ère l’année dernière ; mais cette année Tay Singher est à la 25ème place du classement des écuries et écoles de lutte. Quelle lecture en faites-vous ?
(Rires). Non, on n’a pas pris 25ème. C’est plutôt vous qui avez classé notre écurie à ce rang.
Mais l’année dernière on vous avait classé 1ère et vous n’aviez rien dit…
(Sourire en coin). Comment notre écurie s’est-elle classée 25ème ? Quelles sont les écuries que nous avons devancées ?
Pour les grandes écuries, vous avez devancé celles de Balla Gaye 2 ; mais Lansar et Rock Energie vous ont devancé de loin…
Nous rendons grâce à Dieu. Nous devons redoubler d’efforts pour présenter un meilleur bilan la saison prochaine. Wa salam !
sunu lamb via seneplus.com
