L’Acte 3 de la Décentralisation: approche par les compétences ou par la territorialité ?

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Je ne reviendrai pas sur l’urgence à parachever les réformes institutionnelles ni sur la nécessité maintes fois évoquée d’anticiper sur les implications de l’Acte 3 de la Décentralisation. Je vous renvoie à ma lettre ouverte adressée au Président de la République en date du 1er février 2013 ainsi qu’aux communiqués du Bureau politique de l’Alliance Jëf Jël y afférents.

Je ne reviendrai pas non plus sur les incohérences du Conseil des Ministres à propos du processus électoral même si dans son communiqué du mercredi 15 janvier 2014, il a été annoncé, au titre des textes législatifs et réglementaires que le conseil a adopté « le projet de décret fixant la date du prochain scrutin pour les élections municipales et départementales pour le dimanche 29 juin 2014 ». Alors que le décret sus visé avait été déjà signé deux jours auparavant précisément le 13 janvier 2014.
Même si le retard enregistré dans la mise à disposition du document de référence du Ministère de l’Intérieur relatif aux implications de l’Acte 3 de la Décentralisation, aux propositions de modifications techniques et autres corrections sur le code électoral, empêche jusque-là le démarrage effectif des travaux de la Commission Technique chargée de la Revue du Code Electoral dans laquelle nous siégeons en qualité de coordonnateur du groupe des experts du pôle des partis indépendants, non alignés et non coalisés.
La prochaine plénière du pôle prévue ce mardi 28 janvier 2014 ne manquera certainement pas de revenir sur les orientations et d’indiquer la démarche à suivre. Au demeurant, nous avons saisi qui de droit pour signifier les incidences que ce retard pourrait engendrer sur le déroulement de la révision du code électoral et subséquemment sur le calendrier électoral. Notre responsabilité sur les éventuelles lenteurs dans la conduite et la finalisation du code électoral à ce stade est entièrement dégagée.
Mais cette-fois, je voudrais juste revenir sur les limites du nouveau code des collectivités locales relativement au statut particulier des départements de Dakar, Pikine et Guédiawaye qui mériterait d’être clarifié.
S’il est vrai qu’au vu de l’Acte III de la décentralisation, les villes du même nom sont effectivement considérées comme des collectivités locales, il n’en est pas aussi évident pour ce qui concerne les départements correspondants.
Or, il n’existe pas, dans le nouveau Code général des Collectivités Locales, de dispositions particulières à ces départements hormis celles énoncées à l’article 28 qui dispose : « A titre dérogatoire, les attributions dévolues au Conseil Départemental par le présent code sont exercées, le cas échéant, par la ville si son périmètre correspond au territoire du département. »
Par conséquent, ce sont les mêmes conseils municipaux de ville qui auront certainement à délibérer sur les compétences dévolues au département sans y être préparés mais aussi en l’absence de dispositions institutionnelles et organisationnelles clairement précisées par le code des collectivités locales.
Sous ce rapport, il serait difficile de fixer les conditions de « désignation » des conseillers municipaux de ville.
Dès lors, en héritant des insuffisances du nouveau Code général des Collectivités Locales, la Commission Technique chargée de la Revue du Code Electoral devant, entre autres, définir les modalités des élections ou « désignation » des conseillères et conseillers départementaux et des conseillères et conseillers municipaux devra faire face à cette situation très complexe.
Au cours de la rencontre d’échanges et de concertation du vendredi 03 janvier 2014 présidée par le Ministre de l’Intérieur, j’avais évoqué trois préalables au démarrage de la révision du code électoral. Il s’agissait de :
La fixation de la date des élections qui logiquement devrait être prise en charge par la loi portant prorogation du mandat des conseillers régionaux, municipaux et ruraux. Cela devrait être la dérogation normale à l’article L.65 du code électoral ;
La révision de la loi organique n°96-11 du 22 mars 1996 relative à la limitation du cumul des mandats électifs et de certaines fonctions ;
La révision de la loi n°72-02 du 1er février 1972 relative à l’organisation de l’administration territoriale modifiée.
A la lumière de ces constats, il serait aussi judicieux de réviser le code général des collectivités locales en vue d’instituer par des dispositions particulières, précises et explicites le statut spécifique lié aux départements de Dakar, Pikine et Guédiawaye devant compléter l’article 28.
En tout état de causes, deux options pourraient être envisagées :
Scénario 1: Au cas où le conseil de la ville est confondu avec le conseil départemental tel que semble l’indiquer le code, il conviendrait de maintenir le même mode d’élection mixte. Par conséquent, les conseillères et conseillers municipaux sont élus pour 2/5 au scrutin majoritaire sur liste complète et pour les 3/5 au scrutin proportionnel. Pour les conseillers municipaux de la Ville, ils sont élus pour moitié au scrutin proportionnel sur listes complètes. L’autre moitié est composée de conseillers des communes.
Scénario 2 : Au cas où le conseil municipal de la ville est dissocié du conseil départemental, il faudrait envisager :
la désignation de tous les conseillères et conseillers municipaux de la Ville à partir des communes ;

l’élection des conseillers départementaux pour les 2/5 au scrutin de liste départementale majoritaire à un tour et pour les 3/5 au scrutin proportionnel.
Il convient de relever que les Villes de Rufisque et Thiès, ne seront pas régies par ce statut particulier. Etant donné que les territoires des ces villes ne correspondent pas à ceux des respectifs, il y sera organisé à la fois des élections municipales au niveau de la ville et des communes la composant ainsi que des élections départementales.
Par ailleurs, nous continuons à croire que la démarche la plus appropriée consistait à valider au préalable les conclusions de la Commission Nationale de Réforme des Institutions (CNRI) qui traitent de la décentralisation et du système électoral (le mode de scrutin, les candidatures indépendantes…). Ces conclusions devraient logiquement être la source d’inspiration de la nouvelle Constitution et de la réforme du code des collectivités locales et du code électoral.

Par
M. Ndiaga SYLLA, Expert électoral
Ingénieur en Développement Urbain
(janvier 2014)

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