Par Vieux Savane

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Succès commercial garanti. Les 75.000 exemplaires du périodique français «Charlie Hebdo» se sont arrachés comme de petits pains. Epuisé, le numéro fera l’objet d’un retirage aujourd’hui, vendredi, jour de grande prière pour les musulmans. Les raisons de ce succès fulgurant : une caricature du Prophète Mouhammad publiée, au lendemain de la sortie du film sans génie et sans intérêt disent ceux qui l’ont vu d’un obscur copte égyptien vivant à Los Angeles, aux Etats-Unis d’Amérique et connu des services de police pour fraude bancaire via le net. Un arnaqueur dont on peut penser que c’est la seconde nature puisqu’une des actrices du film vient de déposer une plainte devant la Cour supérieure de Los Angeles. Elle affirme que les acteurs du film ont été manipulés car ayant participé au tournage sans en connaître l’intention véritable.

En attendant la polémique enfle. Les partisans de la liberté d’expression montent sur leurs grands chevaux pour crier leur attachement farouche à cette valeur oubliant que la liberté, au-delà de sa dimension de quête et de conquête qui rendent compte de son historicité, ne peut être réduite à une virtualité. Elle est portée par des hommes et des femmes d’une époque déterminée, désireux de faire bouger les lignes en bousculant sans cesse le statu quo, avec leurs sentiments et leurs croyances en bandoulière. Et c’est justement là où «Charlie Hebdo» a pêché dangereusement.

En enjambant allégrement le monde de la raison, il s’est risqué dans celui de la croyance. Et pourtant, il n’est pas censé ignorer, comme les éducateurs le susurrent aux oreilles des enfants, que « croire n’est pas savoir ». La personne qui croit adhère à la chose à laquelle elle croit en dehors de toute distanciation qui rend possible la pensée critique. C’est pourquoi dit-on, Dieu ne se prouve pas mais s’éprouve. Il est du domaine de la foi. C’est dire la nécessité qui s’impose à tous de respecter la religion et les croyances des uns et des autres.

Où irait-on si n’importe qui pouvait au nom de la liberté d’expression se permettre un grand n’importe quoi. On dénuderait des saints, on les montrerait dans des postures inconfortables ? Faut-il le rappeler, la liberté n’est pas antinomique avec l’idée de respect et de responsabilité. Et cela vaut justement pour toutes les croyances sans discrimination aucune. Alors de quoi «Charlie Hebdo» est-il le nom ? On peut se poser la question de l’opportunité de ce qui ressemble à une provocation ou plutôt à un coup médiatique.

Comme qui dirait : Sous la caricature…le buzz sonnant et trébuchant. Cela est d’autant plus choquant que, comme le fait remarquer une sénatrice Ump des Français de l’Etranger (Voir Le Parisien de mercredi) : « Si Charlie Hebdo bénéficie depuis mercredi d’une protection policière rapprochée et coûteuse, celle-ci ne peut-être offerte au reste des compatriotes dans l’Hexagone ou dans le monde, alors même que chacun d’entre eux devient une cible potentielle du seul fait de la provocation de quelques uns ».
Elle a posé le doigt là où ça fait mal en mettant à nu l’irresponsabilité de gens au courage douteux. Facile de se la jouer dans son salon climatisé et sous haute surveillance policière.

D’où cette responsabilité qui incombe au métier de journaliste. Non pas dans la restitution des faits mais dans les commentaires et les appréciations qui peuvent en découler.

Il est important de savoir que les mots, de même que les dessins peuvent être meurtriers. Il est donc question de voir comment gérer certaines situations avec le maximum de professionnalisme pour ne pas prêter le flanc. Même si d’aucuns comme Nicolas Domorand, comme indiqué dans l’édition de « libération » datée d’hier soutiennent que : « En démocratie, libre à chaque titre d’établir sa ligne éditoriale, libre aux personnes qui se sentent offensées de demander réparation devant les tribunaux, la seule arme légale».

Alors comment expliquer que les défenseurs de la liberté d’expression puisent justifier l’interdiction de manifester pacifiquement contre l’initiative de «Charlie Hebdo» . N’est-ce pas un droit garanti par la Constitution française ? Cette propension à faire dans le deux poids deux mesures est source de frustrations. La liberté d’expression oui mais à condition qu’elle se déploie dans le champ de la raison. Là où la discussion est possible, où des opinions peuvent se télescoper, refuser l’arbitraire et la dictature. Exercice difficile voire impossible lorsqu’il s’agit de la croyance.

Là, on bascule dans le champ de la passion et de la foi. C’est-à-dire celui de toutes les démesures possibles.
Parce que l’irresponsabilité peut tuer, détruire des familles, chambouler des vies, il importe de rappeler à la suite de Hegel que : « la liberté peut mourir de la peur de mourir ». A force de jouer avec le feu de la passion et de la foi, peut-on ajouter.

C’est le cas avec ce film de série B à l’origine des violences qui embrasent le monde arabo-musulman et de la caricature du prophète Mouhammad publiée dans «Charlie Hebdo». Parce que les croyances religieuses méritent le respect, l’irresponsabilité ne peut se cacher derrière la liberté d’expression. Encore moins la violence aveugle et meurtrière.

sudonline.sn

2 Commentaires

  1. Vieux Savane votre texte est erudit sans nul doute,et l’on comprend aisemment le contexte dans lequel se justifie votre contribution: vous vous adressez a des intellectuels que Napoleon raillait par sa fameuse boutade :  » Bon Dieu que les hommes de lettres sont betes.. Sont aussi betes tous ses hommes qui tombent dans ce piege en investissant les rues,pillant voire tuant exactement comme l’avaient prevu les initiateurs du pamphlet.Il faut etre vraiment de bas niveau pour reagir de la sorte en usant de la violence. Les prophetes Mohamed et Jesus[PSL} ont montre la voie et le comportement face aux provocateurs.Quelque soit la faute commise le comportement de certains musulmans est a codamner energiquement

  2. Je ne suis absolument pas d’accord. La croyance n’étant, par sa définition même, pas un fait, pourquoi lui apporter une quelconque importance? Il me semble que le fait que des hommes et des femmes soient prêts à exprimer toute leur violence au nom d’une croyance au 21ème siècle comme au 1er est elle matière à profond questionnement. Le fait que par la moquerie de quelques uns on puisse justifier la mort d’un seul être humain, et tout ceci pour une croyance et donc, je répète, par définition un non-fait, ceci est oui, vraiment extraordinaire.

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