Pour un ultime dialogue national fondateur! (Par Amadou Lamine Sall).

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Lauréat des Grands Prix de l’Académie française
C’est une volonté politique présidentielle à la rencontre d’autres volontés
politiques et de forces sociales qui ont souhaité, ensemble, s’unir autour d’une
plateforme responsable, porteuse d’avenir et d’histoire. Certains diront que nous
en avions déjà une qui sera difficile à égaler : les fameuses et légendaires
Assises nationales. Mais rien n’empêche que les résultats et les trouvailles de
ces dernières, bien longtemps après, puissent servir, être convoqués sur la table
du dialogue, être débattus, triés s’il le fallait, améliorés, amendés, approuvés.
C’est un raccourci considérable ajouté à ce que seront les nouvelles propositions
issues de l’expérience démocratique des dernières années des mandats du
Président Macky Sall. L’essentiel est d’aller au concret, au consensus, à ce
définitif durable qui sera enfin le lit de notre loi fondamentale. Il est temps !
Tout, tout doit être pris en compte, surtout dans la réforme profonde de nos
institutions juridiques et politiques. Puissions-nous enfin mettre en œuvre une
réforme optimale et durable de nos institutions, afin de pouvoir réserver nos
forces et nos réflexions à un développement à notre portée et une démocratie
enfin libérée de contraintes primaires et obsolètes.
La vérité est que, en l’état, notre Constitution est encore fragile,
inachevée, errante, presque corrompue par des contestations récurrentes devant
des juridictions à qui le Droit et ses libertés d’interprétations donnent
légitimement la possibilité de se déclarer incompétentes pour trancher telles ou
telles questions. On devrait pouvoir mettre fin à de telles impasses qui ouvrent
sur des accusations, des doutes fondées ou infondées. Les conclusions du
Dialogue national doivent nous conduire à une vie politique désormais
solidement gouvernée par des organes juridiques et institutionnels garantissant
sans détour les libertés individuelles et celles de la justice, sans ôter à l’État son
autorité et son pouvoir de veille publique. Il s’agit d’un équilibre des forces qui
ne conduit ni à humilier la puissance publique ni à limiter les libertés
individuelles, citoyennes, politiques. Bien sûr que nous cherchons l’idéal en
sachant qu’il n’existe pas, mais nous pouvons nous en approcher tous ensemble
si nous le voulons. Divisés, nous ne l’atteindrons pas. Seul un consensus fort et
généreux nous conduira à des réformes humaines, justes, décisives et partagées.
Les Présidents à venir dans les 50 ans, doivent trouver cette page close. Nous ne
pouvons pas recommencer un Dialogue national avec chaque Président élu !
Voilà ce à quoi le Dialogue national doit tenter de réussir.

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Macky Sall, à l’issu de ce Dialogue national, devrait nous offrir, armé
d’un bel et généreux esprit, son arbitrage, dans une vision audacieuse de l’avenir
qui aura fait avec courage le bilan politique, culturel, économique, social des
réussites et des échecs vécus par notre nation depuis l’indépendance. Il s’agit de
libérer enfin notre pays et pour de bon de ses maladies infantiles et démoniaques
qui ont gelé ce que devaient être les avancées démocratiques, politiques,
culturelles, économiques et sociales du Sénégal. Notre mémoire a du mal à
effacer l’article 35 institué par Senghor. Quand nous en avons parlé ensemble, je
me rappelle, il m’a dit ceci : « Si c’était à refaire, je ferai la même chose ». Puis,
il m’a expliqué pourquoi il aurait refait la même chose. J’ai compris que c’est sa
propre vision politique qui me parlait, alors qu’il avait choisi comme successeur
en ces temps-là, un homme qui était bien éloigné de la politique, mais qui a
ensuite appris très vite à s’en servir. Il y eut ensuite la candidature de trop du
Président Diouf au suffrage universel en 2000, après un peu plus de 19 ans au
pouvoir. Mais cela fut presque effacé par sa stature d’homme d’État et
l’acceptation de sa défaite dans le noble accueil fait à son successeur. En
oeuvrant contre sa majorité, il avait marqué favorablement l’histoire. Mais
moins noble fut l’insoutenable tentative du Président Wade de modifier la
Constitution pour une cause d’un autre temps du monde. L’on se souvient
comment le peuple y mit un terme. Il nous faut maintenant, nourris des
expériences du passé, refermer la page des blessures et laisser les chemins libres.
Ce qui ferait de la politique un humanisme intégral, c’est la rencontre
entre des femmes et des hommes qui, au delà de leurs divergences d’opinion,
restent dans le respect des uns et des autres comme acteurs complémentaires
bien qu’opposés, au service d’un même peuple. La politique est devenue fille de
l’affrontement et du rejet de l’autre. Ce rapport doit changer. L’apaisement et le
vivre ensemble doivent prévaloir. La culture, c’est à dire l’élévation de l’esprit,
peut y aider. Ce sont là mes vœux pour 2020 à la classe politique sénégalaise.
La politique est devenue un art que tant de monde pratique si mal, que
même les plus doués et les plus policés n’arrivent plus à bien le pratiquer. Il faut
mettre le pouvoir, ses mirages et sa force trompeuse, sous la douche et les laver
à grande eau.
Ce pays n’est pas une lettre privée scellée. Nous devons tous pouvoir la lire
ensemble. « Au sol », si « un carreau manque », on le voit. Nous sommes tous
ce carreau qui manque quand nous nous détournons de la gouvernance de notre
pays ou que la nature de la gouvernance nous en détourne. Ce pays a besoin de
chacun de ses enfants. Personne ne doit manquer.
Il nous faut désormais un pays sorti des majorités meurtrières, sorti des
interminables arbres à palabres, sorti des prêches de tous ces prophètes sans

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Coran, sans Bible, sans l’aval d’une seule sourate révélée. Ce pays mérite mieux
et peut mieux. Si le pétrole et le gaz ont été exploités sous l’ère du Président
Macky Sall par l’horloge de Dieu, quelque chose de plus grand peut encore nous
arriver : une réforme décisive et historique de nos institutions, afin que personne
ne puisse douter d’un patrimoine laissé à notre pays par un Chef d’État qui aura
cherché et voulu le changement moins que la gloire.
Notre peuple écorché et éprouvé par la politique continue néanmoins de
gravir la montagne en rejetant toute « mystique négative », de gravir l’esprit par
les meilleurs et les plus reposés d’entre nous, car c’est par l’esprit que nous
devancerons le mieux l’avenir de notre si cher pays, en ayant moins peur, en
criant moins, en critiquant moins tout ce qui ne vient pas de soi, en ne faisant
pas de l’argent notre Dieu, en ne faisant pas de la politique la clef de la fortune,
en chassant la vanité et l’orgueil tapis en chacun de nous, en haïssant moins nos
adversaires d’un combat et en travaillant plus.
Puisse le Dialogue national à la rencontre des solides Assises nationales
d’hier, faire le ménage à la rencontre d’une volonté politique déjà affirmée d’un
président de la République qui a fait le pari de bâtir avec ses concitoyens une
« mémoire du futur », pour que la politique, ceux qui s’en nourrissent et le
peuple seul mandataire du pouvoir, ne s’appauvrissent plus mutuellement. Ne
reculons pas ! Recréons et réinventons ensemble notre pays !
Puisse justement le « Prix Macky Sall pour le dialogue en Afrique » revenir
à son parrain en 2020 – une première ! – pour avoir initié et porté un puissant et
difficile processus jusqu’à terme et que son peuple et l’Afrique auront
unanimement validé et reconnu comme une belle page d’histoire qui s’ouvre !
Tous mes vœux aux Sénégalaises et Sénégalais !
A Paris, lors de l’anniversaire de Présence Africaine en 2019, le Président
Sall a dit placer son mandat sous le magistère de la Culture. Nous avons tous
applaudi. Mes pensées émues vont à tous nos artistes, poètes et écrivains
disparus. Puisse Monsieur le ministre en charge de la Culture bâtir dans Dakar
une stèle de la mémoire au nom de tous nos grands créateurs morts à qui nous
devons souvenir, reconnaissance et recueillement. Aux vivants, les semeurs de
rêves et flûtistes de l’âme, nous disons notre affection et notre respect pour avoir
toujours tenu hors de l’eau la tête de ce pays de proue têtue et de prière sûre.
Monsieur le président de la République, « la nuit vient de tomber » mais
rassurez-vous « elle ne s’est pas fait trop mal ». Puisse le Dialogue national
s’accomplir et que le jour qui se lève soit resplendissant !

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